Notes d’allocution pour la comparution du commissaire devant le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes

Ottawa (Ontario) -
Raymond Théberge - Commissaire aux langues officielles

Seul le texte prononcé fait foi


Monsieur le président, honorables membres du comité, bonjour.

Avant de commencer, je tiens à souligner que nous nous trouvons sur des terres qui font partie du territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabé algonquin, un peuple autochtone de la vallée de l’Outaouais.

Depuis mon entrée en fonction en 2018, je le dis et le répète, l’éducation constitue l’outil le plus puissant d’une communauté pour assurer l’épanouissement de sa langue et de sa culture. Un continuum solide en éducation est essentiel pour les communautés de langue officielle en situation minoritaire – ou CLOSM – au Canada. Leur vitalité dépend de la possibilité d’apprendre dans la langue officielle de la minorité, de la petite enfance à l’âge adulte. Les institutions d’apprentissage de la minorité créent des espaces où les locuteurs peuvent s’épanouir dans la langue minoritaire, alors que les programmes d’immersion permettent d’apprendre la langue française tout en normalisant son usage dans un endroit public, soit la salle de classe.

Par ailleurs, je tiens à souligner que le 9 octobre dernier, j’ai publié mon rapport Un avenir en commun : regard sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire. On y met en lumière plusieurs défis auxquels font face les CLOSM, dont celui du continuum de l’apprentissage. 

À la base même du continuum se trouve la question du financement. Plusieurs secteurs en apprentissage souffrent d’un manque chronique de financement durable, surtout ceux qui offrent des services aux CLOSM. Cette situation crée des embuches au droit à l’instruction dans la langue de la minorité, qui est protégé par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. De plus, le secteur postsecondaire a besoin d’un financement stable et adéquat de la part des gouvernements pour assurer son fonctionnement efficace et la mise en place d’une infrastructure qui répond aux besoins des CLOSM

Le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 est un moyen important de fournir un financement de base et un financement selon les projets à ces secteurs. Il devrait normalement servir à mieux répondre aux besoins signalés par les intervenants des CLOSM. Malgré la hausse du financement prévu, je constate que certaines de mes recommandations émises à la fin de l’exercice du précédent plan d’action (de 2018 à 2023) n’ont pas été retenues, dont celle d’assurer un déploiement rapide des initiatives dès le lancement du plan.

En plus d’un financement stable, une plus grande collaboration fédérale-provinciale constitue une piste de solution pour assurer un continuum solide. Il faut continuer d’insister sur l’importance d’inclure des clauses linguistiques dans les accords fédéraux-provinciaux-territoriaux, lesquelles devraient comprendre des mécanismes clairs de transparence et de reddition de comptes qui démontrent des effets tangibles, mesurables et durables.

D’ailleurs, j’encourage le gouvernement fédéral à préciser comment il compte assurer son engagement, notamment dans le règlement de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, afin que les minorités francophones et anglophones puissent faire des apprentissages de qualité dans leur propre langue tout au long de leur vie. 

Selon moi, les expériences éducatives devraient s’équivaloir partout au pays, tant du côté des écoles de la majorité linguistique que celles de la minorité linguistique, ce qui inclut la reconnaissance du droit de gestion scolaire de la minorité linguistique. J’insiste pour que les gouvernements reconnaissent cette nécessité. 

Pour de multiples raisons, nous constatons que des enfants cessent d’étudier dans la langue de la minorité, et ce, à diverses étapes du continuum. Il serait important de mieux cerner les moments et les causes de ces pertes d’effectifs à l’aide de données probantes. Ces données permettraient aux gouvernements et aux parties prenantes de cibler plus efficacement leurs efforts de recrutement et de rétention. 

En septembre dernier, j’ai participé à la conférence CARE qui visait, entre autres, à renforcer les liens entre la communauté éducative de tous les niveaux et les communautés d’expression anglaise du Québec. J’ai encouragé ces dernières à poursuivre leurs efforts de dialogue avec le gouvernement provincial et à revendiquer leurs droits. Je maintiens toujours cette position.

Les communautés d’expression anglaise du Québec continuent d’exprimer leur volonté de protéger et de promouvoir la langue française. D’ailleurs, les programmes publics d’immersion qu’elles ont créés ne cessent de faire leurs preuves en contribuant à l’avancement de l’égalité des deux langues officielles. Une réalité qui se manifeste par un haut taux de bilinguisme. 

En terminant, j’espère que ces éléments alimenteront vos réflexions sur le continuum de l’apprentissage, lequel est crucial pour assurer le dynamisme des CLOSM. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions dans la langue officielle de votre choix.