Notes d’allocution pour la comparution devant le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes
Ottawa (Ontario) -
Raymond Théberge - Commissaire aux langues officielles
Seul le texte prononcé fait foi
Monsieur le président, honorables membres du comité, bonjour.
Je tiens à reconnaître que les terres sur lesquelles nous sommes réunis font partie du territoire traditionnel non cédé du peuple anishinabé algonquin, un peuple autochtone de la vallée de l’Outaouais.
Comme vous le savez, en 2021-2022, après un nombre record de plaintes déposées au Commissariat, j’ai recommandé qu’une étude soit effectuée sur les obligations linguistiques relatives à la dotation des postes de la haute direction dans la fonction publique fédérale, de même que les nominations du gouverneur en conseil. L’idée derrière cette recommandation était de déterminer si la connaissance des deux langues officielles doit être un critère d’embauche pour ce type de postes.
L’étude que vous entamez vient répondre à cette recommandation, et j’aimerais vous en remercier.
Je l’ai dit à maintes reprises par le passé : la maîtrise des deux langues officielles est à mes yeux une compétence indispensable pour tout leader, particulièrement pour ceux et celles des institutions fédérales assujetties à la Loi sur les langues officielles.
Le caractère bilingue d’une organisation dépend en grande partie du bilinguisme des personnes qui occupent les postes aux plus hauts échelons. Elles doivent montrer l’exemple et pouvoir représenter l’ensemble des membres de leur personnel et de la population canadienne dans les deux langues officielles.
Je suis donc d’avis que la maîtrise des deux langues officielles doit devenir un critère d’embauche pour les postes de la haute direction de la fonction publique et pour les nominations du gouverneur en conseil.
Je vois d’un bon œil les amendements que votre comité a apportés au projet de loi C‑13 le printemps dernier, notamment en ce qui a trait à la formation linguistique requise pour garantir la capacité bilingue des sous-ministres et des sous-ministres délégués nouvellement nommés à la fonction publique fédérale, s’ils ne sont pas bilingues au moment de leur nomination.
Il sera intéressant de voir quelle sera l’incidence de ce changement sur la fonction publique au cours des prochaines années. Cela dit, le travail n’est qu’à moitié accompli : en l’absence de politiques et de directives claires, comment s’assurer que ce changement sera mis en œuvre, mesuré et ajusté au besoin? Quelles mesures seront mises en place pour accompagner les titulaires qui reviennent d’une formation linguistique, afin de leur permettre de bien exercer leurs responsabilités dans les deux langues officielles? Qu’arrivera-t-il dans les cas où de hauts fonctionnaires n’arriveront toujours pas à maîtriser leur seconde langue officielle?
Je me questionne également sur l’absence du bilinguisme de la liste des critères essentiels pour les nominations de gouverneur en conseil. Comme vous le savez, au cours des dernières années, plusieurs nominations ont fait sourciller la population canadienne puisqu’aucun critère relatif au bilinguisme n’avait été pris en compte durant le processus menant à ces nominations. Ces évènements ont d’ailleurs suscité un nombre important de plaintes au Commissariat. Nous devrions nous pencher sur l’ensemble des postes de haute direction dans les institutions qui sont assujetties à la Loi sur les langues officielles, afin de nous assurer que la maîtrise des deux langues officielles fait partie des exigences linguistiques de ces postes.
Par ailleurs, la Loi est restée muette sur la question des hauts fonctionnaires déjà en poste au moment de la sanction royale, mais l’intention du législateur derrière l’ajout d’une formation linguistique pour les sous-ministres nouvellement nommés devrait être reflétée dans toute la haute direction. À mon avis, tous les leaders de la fonction publique fédérale doivent pouvoir s’exprimer dans les deux langues officielles et comprendre quiconque s’exprime en français ou en anglais, notamment pour favoriser l’usage des deux langues et encourager la sécurité linguistique en milieu de travail. Cela permet aussi de donner une voix à l’ensemble des enjeux sur la table.
La haute direction doit donner l’exemple et envoyer un signal clair que le français et l’anglais occupent tous deux une place prépondérante et égale au sein de la fonction publique fédérale pour permettre aux fonctionnaires de s’épanouir dans les deux langues officielles. Il est grand temps d’agir.
J’ai confiance que votre étude fera la lumière sur les critères d’embauche des postes de la haute fonction publique et aidera les instances du gouvernement à les examiner de plus près.
Je vous remercie de votre attention. C’est avec plaisir que je répondrai à vos questions dans la langue officielle de votre choix.