Sommaire – Suivi de la vérification de l’Agence des services frontaliers du Canada
Qu’avons-nous examiné ?
En 2015, le commissaire aux langues officielles (le commissaire) d’alors a publié un rapport de vérification contenant huit recommandations pour appuyer l’Agence des services frontaliers du Canada (l’Agence) dans le respect de ses obligations prévues par la Loi sur les langues officielles (la Loi). Le Commissariat aux langues officielles a effectué le suivi de la mise en œuvre de ces recommandations afin d’évaluer les mesures prises par l’Agence.
Pourquoi est-ce important ?
Les suivis des vérifications sont tout aussi importants que les vérifications elles-mêmes, car ils permettent d’évaluer dans quelle mesure les institutions vérifiées ont apporté les changements recommandés dans les rapports de vérification ou de confirmer qu’elles se sont engagées à le faire.
Qu’avons-nous constaté ?
Le suivi de la vérification de la prestation des services bilingues aux voyageurs par l’Agence a permis de constater que l’institution a réalisé des progrès dans de nombreux domaines où des lacunes avaient été soulevées lors de la vérification en 2015, mais que la situation demeure tout de même préoccupante. Quatre ans plus tard, l’Agence a encore du travail à faire sur certains aspects et elle devra faire preuve de leadership et de créativité afin de s’améliorer considérant que certaines des mesures qu’elle a mises en place n’ont pas apporté les résultats escomptés, ou qu’on note des obstacles systémiques importants.
Conclusion – La capacité bilingue insuffisante continue d’entraver les efforts déployés par l’Agence pour respecter la Loi sur les langues officielles.
De façon générale, la capacité bilingue insuffisante de l’Agence demeure un obstacle systémique majeur en ce qui concerne ses obligations en matière de langues officielles et a des répercussions directes ou indirectes sur d’autres éléments observés dans le cadre du suivi de la vérification. Les nouvelles approches de recrutement et de formation sont des avenues prometteuses pour améliorer la capacité de l’institution à fournir un service de qualité égale dans les deux langues officielles, mais les retombées tardent à se faire sentir. Au-delà de la capacité bilingue de l’Agence, l’absence d’un mécanisme de surveillance formel et anonyme demeure une lacune importante qui prive l’institution d’information essentielle à l’amélioration de ses procédures de service au public en personne. Sans un tel mécanisme, l’Agence peut difficilement savoir quelles sont ses lacunes de façon fiable et déployer les efforts aux bons endroits pour les corriger.
Le commissaire tient par ailleurs à souligner la collaboration de l’Agence tout au long du suivi de vérification ainsi que sa réelle volonté d’améliorer la qualité des services au public voyageur aux différents points d’entrée au pays, qu’ils soient aériens ou terrestres. Cette volonté n’est malheureusement pas toujours accompagnée d’actions produisant des résultats concrets. Ainsi, quatre ans après la vérification effectuée par le Commissariat aux langues officielles, le fait que l’Agence soit revenue sur certains de ses engagements pris au moment de la vérification remet en question son engagement à améliorer sa situation ainsi que son leadership.
Somme toute, deux recommandations ont été mises en œuvre par l’institution tandis que quatre l’ont été de façon partielle et deux n’ont pas été mises en œuvre. Il s’agit de résultats décevants, surtout quand on considère le recul de l’institution par rapport à la première recommandation et le manque d’initiative pour mettre en place un mécanisme de surveillance formel et anonyme de ses services au public. Plus que jamais, les progrès de l’institution dépendront du niveau d’engagement qu’elle déploiera pour remédier aux lacunes identifiées, engagement qui jusqu’à maintenant fait défaut pour certaines d’entre elles. Les citoyens ne pourront s’attendre à voir des résultats probants tant que l’Agence ne prendra pas ses responsabilités en s’engageant à surmonter les obstacles qui perdurent dans l’atteinte de ses objectifs en vertu de la Loi.
Points saillants
Bilinguisme des surintendants
- L’Agence a procédé à des changements importants en matière de formation linguistique, promouvant davantage les cours en langue seconde auprès des employés de première ligne. À long terme, l’institution espère que cette mesure augmentera le bassin d’employés bilingues qualifiés pouvant se porter candidats aux postes de surintendant.
- L’Agence a aussi élaboré et mis en place une formation linguistique intensive visant à aider le personnel à atteindre un niveau BBB ou CBC en langue seconde en moins d’un an. Pour l’instant, ce programme est offert aux surintendants déjà en poste qui n’ont pas les compétences requises en langue seconde.
- L’Agence est en mesure de surveiller le nombre de surintendants bilingues requis à tous ses points d’entrée désignés bilingues ainsi que l’écart entre celui-ci et l’effectif réel. Les données récentes fournies par l’Agence démontrent que, de façon générale, cet écart s’agrandit, un signe que l’institution doit redoubler d’efforts quant à ses mesures pour recruter et former des surintendants bilingues.
Bilinguisme des agents de première ligne
- Les données sur les agents des services frontaliers engagés entre 2013 et 2017 démontrent que les mesures prises jusqu’alors par l’Agence en matière de recrutement ont eu peu ou pas d’effet sur la proportion d’agents bilingues au sein de ces nouvelles cohortes.
- La nouvelle stratégie de recrutement de l’institution inclut des recruteurs ciblés ainsi que des activités de recrutement externe. L’un des publics visés étant les personnes bilingues, l’institution a confirmé échanger avec les membres des communautés de langue officielle en situation minoritaire afin d’approcher des candidats bilingues dans les endroits où leur recrutement est plus difficile.
Procédures en matière de service au public
- L’Agence a indiqué avoir élaboré une nouvelle directive sur le service au public dans laquelle figure une définition de ce qu’est un service de qualité égale dans les deux langues officielles, laquelle est toujours en cours d’approbation. En raison de l’importance de ce document pour assurer un service de qualité égale dans les deux langues officielles, le fait que cette directive n’ait pas encore été mise en place quatre ans après la vérification est tout de même inquiétant. Il est impératif que les agents à l’échelle de l’institution aient une compréhension commune de leurs obligations, et l’absence d’une telle directive est un obstacle à l’atteinte de cet objectif.
Mécanisme de surveillance formel
- L’Agence a maintenu sa position exprimée au moment de la vérification selon laquelle un mécanisme de voyageurs mystères n’est pas viable en raison des défis particuliers, incluant ceux d’ordre légal, que pose le passage à la frontière lors d’un tel exercice.
- Le commissaire encourage l’institution à explorer d’autres options méthodologiques qui lui permettraient de surveiller l’offre active et la prestation de services de qualité égale dans la langue officielle de choix des voyageurs.
Obligations linguistiques dans les aéroports
- Le suivi a révélé des lacunes importantes dans le processus de l’Agence pour déterminer ses obligations et pour modifier ses services, s’il y a lieu. À cet effet, depuis la vérification, l’Agence est revenue sur sa position concernant sa responsabilité d’examiner annuellement les données statistiques établissant ses obligations linguistiques dans les aéroports canadiens. Comme ces obligations varient en fonction du nombre de passagers embarqués et débarqués en une année à un aéroport donné, le commissaire maintient que l’institution doit prendre les moyens nécessaires pour surveiller les données qui déterminent ses obligations dans les aéroports à l’échelle du Canada et adapter ses procédures, le cas échéant.
Collaboration avec les communautés de langue officielle en situation minoritaire
- En plus de nombreuses initiatives régionales, l’Agence a formalisé, dans son plan d’action 2016-2019, un processus consultatif des communautés de langue officielle en situation minoritaire qui vise la prise en compte de leurs besoins et l’adaptation des services de l’institution en conséquence. Des échanges annuels sont prévus, notamment sur la façon dont l’institution peut répondre à leurs besoins.
- L’Agence a procédé à l’évaluation de ses programmes afin d’établir s’ils doivent être adaptés pour répondre aux besoins des communautés de langue officielle en situation minoritaire. En outre, l’institution a indiqué que son plan d’action 2019-2022 inclura la mise en place d’un nouveau mécanisme visant à évaluer tout nouveau programme afin de déterminer s’il respecte le principe d’égalité réelle.