Table des matières
Préface
Au moment où la modernisation de la Loi sur les langues officielles est le sujet de l’heure, que la transition vers le nouveau régime linguistique occupe l’ensemble des acteurs sur l’échiquier des langues officielles, et que la situation des langues officielles évolue dans plusieurs provinces, je dépose mon rapport annuel 2022-2023. J’y fais un retour sur l’année financière 2022-2023 et j’y aborde trois grands thèmes. Dans un premier chapitre, j’y traite de la question des services en français et en anglais offerts au public voyageur. Dans le deuxième chapitre, j’y aborde la place des langues officielles dans la fonction publique. Le dernier chapitre quant à lui est consacré au Plan d’action pour les langues officielles.
Le public découvrira au fil de sa lecture que beaucoup reste à faire pour concrétiser la vision d’un Canada où il est possible pour les francophones et les anglophones, là où la Loi s’applique, de planifier leur visite d’un aéroport, de se déplacer en avion, de prendre le train ou de passer la frontière en utilisant la langue officielle de leur choix; où les fonctionnaires fédéraux qui travaillent dans une région désignée bilingue peuvent véritablement se servir de la langue officielle de leur choix quand ils prennent part à des réunions, écrivent des textes ou discutent avec un supérieur; et où les communautés de langue officielle sont en mesure de se développer pleinement. Cette année encore, je mets de l’avant des recommandations dont la mise en œuvre contribuera à corriger les lacunes que j’ai relevées et à renforcer le respect des droits linguistiques.
Je suis satisfait du fait que le projet de loi C-13 m’accorde de nouveaux pouvoirs. Grâce aux accords de conformité que les prochains commissaires et moi-même pourrons négocier, aux ordonnances que nous pourrons rendre, aux sanctions administratives pécuniaires que nous pourrons imposer, aux sommaires d’enquête que nous pourrons publier et aux nouvelles stratégies de règlement de différend que nous pourrons déployer, nous serons mieux à même d’assurer l’application de la Loi sur les langues officielles que par le passé.
Pour ce faire, bien que le Commissariat ait déjà commencé à se pencher sur la question, la mise en œuvre et l’utilisation de mes nouveaux pouvoirs exigeront des ressources supplémentaires ainsi qu’une transition progressive. Les nouveaux pouvoirs seront mis en œuvre progressivement et selon la disponibilité des ressources. Certains de mes pouvoirs, comme les sanctions administratives pécuniaires, requièrent un décret et un règlement, ce qui influencera la date de leur mise en œuvre.
Je n’ai en effet pas attendu l’approbation du projet de loi C-13 pour entreprendre les efforts de planification dont je viens de parler et pour commencer à évaluer le niveau de ressources dont le Commissariat aura besoin pour utiliser ses nouveaux pouvoirs efficacement. Ainsi mon équipe se penche sur la question pour analyser les effets du projet de loi C-13 sur le Commissariat et concevoir des stratégies pour piloter son adaptation au nouveau contexte juridique en tenant compte des pratiques exemplaires en matière de gestion de changement.
Dans un autre ordre d’idées, j’aimerais profiter de cet espace pour souligner à quel point je me réjouis que le gouvernement fédéral ait nommé cette année une Autochtone qui maîtrise le français et l’anglais à la Cour suprême. L’honorable Michelle O’Bonsawin a rejoint entre autres sur le banc du plus haut tribunal l’honorable Mahmud Jamal, un juge issu de la diversité qui maîtrise aussi les deux langues officielles du Canada.
Ces nominations récentes contribuent à renforcer à la fois la représentativité de la Cour suprême et le droit de la population canadienne à y être entendue et comprise dans les deux langues officielles. Elles démontrent que les langues officielles, l’équité, la diversité, l’inclusion et la réconciliation avec les peuples autochtones, contrairement à ce qu’on entend parfois, peuvent aller de pair. Elles illustrent aussi qu’en matière de bilinguisme officiel, l’offre, comme je le dis souvent, crée la demande. Autrement dit, en désignant clairement les postes de la haute fonction publique comme des postes où la connaissance du français et de l’anglais est nécessaire, le gouvernement visera inévitablement à ce que des candidats et des candidates bilingues se manifestent.
Nouvel argent en langues officielles
Je salue les investissements du gouvernement pour les langues officielles dans son budget 2023. J'ai hâte de voir comment ces nouveaux investissements se concrétiseront et comment ils renforceront la place des langues officielles dans la société canadienne et contribueront à la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
J’ai également été agréablement surpris de l’annonce du financement de 22,1 millions de dollars « pour un centre d’expertise visant à veiller à ce que les institutions fédérales s’acquittent de l’obligation que leur confère la Loi sur les langues officielles : de favoriser l’épanouissement des minorités de langue officielle en situation minoritaire, et à appuyer les données et la recherche sur le nombre d’enfants ayant le droit d’être instruits dans la langue de la minorité ». Toute nouvelle somme dédiée aux langues officielles est une excellente nouvelle en soi et je compte suivre de près les retombées de ces investissements.
Aux quatre coins du pays
L’année qui vient de passer montre encore une fois que l’avenir des langues officielles dans l’ensemble des provinces et des territoires du Canada n’a rien de prédéterminé. Il dépendra en effet des actions qui y seront prises par les gouvernements et par les communautés de langue officielle.
Je relève ainsi que le projet d’un comité parlementaire en Colombie-Britannique et du gouvernement de l’Alberta de remplacer la Gendarmerie royale du Canada par des corps de police provinciaux inquiète les communautés francophones, puisque ces corps ne seraient pas assujettis à la Loi sur les langues officielles.
Je note que des organismes francophones ont recommandé au gouvernement du Manitoba de faire passer à 15 %, d’ici 2036, la part des immigrants de langue française qui s’installent dans cette province. « Le fait que la cible actuelle [de 7 %] ne soit jamais atteinte rend nécessaire un rattrapage pour freiner le déclin démographique de la francophonie dans la province », affirment-ils.
L’Ontario a adopté un nouveau règlement sur l’offre active des services en français, lequel est entré en vigueur le 1er avril 2023. Ce règlement, qui vise à ce que « les francophones et les francophiles soient informés de leur droit aux services en français dès le premier contact » avec une institution provinciale, a été bien accueilli. La communauté franco-ontarienne juge en effet que ce renversement de fardeau a le potentiel de favoriser son développement.
Plus au nord, je prends acte du fait que le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest (TNO) a déposé un projet de loi pour réviser la Loi sur les langues officielles du territoire, et que la Commission scolaire francophone du Nunavut a élaboré un plan d’action dont la mise en œuvre permettrait de mieux relever les défis importants auxquels les Franco-Nunavois et leurs écoles font face.
Au Québec, la Loi 96, qui renforce la Charte de la langue française, est officiellement entrée en vigueur en juin 2022, ce qui a soulevé des préoccupations dans les communautés d’expression anglaise. La Loi 96 prévoit entre autres la nomination d’un commissaire à la langue française au Québec, et l’Assemblée nationale a en effet entériné la nomination du premier commissaire.
Au Nouveau-Brunswick, les changements proposés en mars 2023 à la Loi sur les langues officielles provinciale incluent la création d’un Secrétariat, mais aussi le retrait du mécanisme de révision de la Loi tous les dix ans, cette dernière mesure étant largement accueillie comme un recul abrupt. Plus tôt dans l’année, un nouveau cadre d’apprentissage du français langue seconde devant entrer en vigueur dès 2023 a suscité une vive controverse. Le gouvernement a finalement fait marche arrière, à la suite de nombreuses interventions, y compris celle de mon homologue provinciale, qui s’inquiétait que l’on perde de vue les succès du système d’immersion.
Enfin, je relève que la Commission de la Nouvelle-Écosse pour le redécoupage des circonscriptions fédérales a proposé une nouvelle carte électorale dont l’application pourrait avoir des effets sur les communautés francophones de cette province. « Les changements proposés diminueraient notamment le poids du vote acadien dans le choix d’un député fédéral », estime la Fédération acadienne de la Nouvelle-Écosse, tandis que l’étalement proposé de deux circonscriptions « fragilisera davantage le développement » des communautés francophones qui y vivent.
Certains de ces développements m’inquiètent. D’autres m’enthousiasment. Une chose est certaine, je demeurerai aux côtés de ceux et de celles que ces développements touchent pour m’assurer que leurs droits d’être servis en français ou en anglais, ou de s’épanouir dans la langue officielle de leur choix, sont pleinement respectés.

Raymond Théberge
Commissaire aux langues officielles
Chapitre 1 Langues officielles et public voyageur
La Loi sur les langues officielles prévoit qu’il incombe aux institutions fédérales offrant des services au public voyageur de rendre ces services accessibles en français ou en anglais lorsque la demande le justifie. Tout comme dans son Rapport annuel 2012-2013, le Commissariat a porté une forte attention à cette question étant donné la reprise des voyages du public après plus de deux ans de pandémie et le fait que trop de voyageurs et de voyageuses ont encore du mal à pouvoir utiliser la langue officielle de leur choix lorsqu’ils traitent, par exemple, avec Air Canada, l’Agence des services frontaliers du Canada, l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, les grands aéroports du pays ou les commerces qui se trouvent sur le terrain des autorités aéroportuaires.
Une préoccupation qui ne date pas d’hier
Depuis le début de mon mandat, je porte une attention spéciale au dossier des langues officielles et du public voyageur. Notamment, au cours des dix dernières années seulement, le Commissariat a examiné le programme des langues officielles de l’Aéroport international d’Halifax, la prestation de services en français et en anglais aux passagers d’Air Canada, l’offre de services bilingues par l’Agence des services frontaliers du Canada, et la qualité des mesures linguistiques prises par l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. Mes prédécesseurs et moi avons aussi publié des rapports sur le suivi donné par ces institutions à ces différentes vérifications.
Hausse du nombre de plaintes formulées dans le domaine des voyages
Chaque année, je reçois un nombre important de plaintes de voyageurs et de voyageuses qui ont été incapables de recevoir l’ensemble des services en français ou en anglais des principaux acteurs œuvrant dans le domaine des voyages.
De toutes les institutions fédérales associées à ce domaine, Air Canada est celle qui, du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, a fait l’objet du plus grand nombre de plaintes jugées recevables, soit 276 (voir le tableau 1). La presque totalité de ces plaintes (99 %) concernait des manquements aux dispositions de la partie de la Loi qui touche les communications et les services au public.
Les 276 plaintes recevables qui visent Air Canada cette année représentent un sommet sur 10 ans, si l’on fait abstraction de celles, très nombreuses, provoquées en 2021-2022 par le discours en anglais que son président-directeur général a prononcé au Québec. En fait, le nombre de plaintes ciblant le transporteur en 2022-2023 est trois fois supérieur à la moyenne annuelle enregistrée dans la dernière décennie.
Les autorités aéroportuaires du pays sont aussi, chaque année, la cible d’un nombre élevé de plaintes. Du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, j’ai ainsi reçu 77 plaintes visant ces institutions. L’Administration des aéroports du Grand Toronto et l’aéroport international de Vancouver sont ceux que le public voyageur a le plus visé cette année (12 plaintes) chacun, suivi de Moncton (8), celui de St. John’s (8), celui de Montréal (7) et celui de Calgary (7). Onze autres aéroports se sont divisé un total de 23 plaintes.
L’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien (ACTSA) et l’Agence des services frontaliers (ASFC) sont également touchées par plusieurs dizaines de plaintes chaque année.
Tableau 1 Plaintes recevables visant les institutions qui offrent des services au public voyageur, de 2012-2013 à 2022-2023
Institution fédérale | 2012–2013 | 2013–2014 | 2014–2015 | 2015–2016 | 2016–2017 | 2017–2018 | 2018–2019 | 2019–2020 | 2020–2021 | 2021–2022 | 2022–2023 | Total |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Administration canadienne de la sûreté du transport aérien | 11 | 18 | 32 | 30 | 31 | 35 | 27 | 43 | 11 | 26 | 77 | 341 |
Administrations aéroportuaires | 10 | 26 | 24 | 26 | 43 | 112 | 48 | 95 | 259 | 63 | 77 | 783 |
Agence des services frontaliers du Canada | 27 | 51 | 49 | 70 | 85 | 66 | 65 | 97 | 89 | 79 | 60 | 738 |
Air Canada | 43 | 51 | 55 | 39 | 101 | 60 | 105 | 122 | 18 | 2 833Note de tableau * | 276 | 3 703 |
VIA Rail | 6 | 0 | 6 | 8 | 11 | 6 | 0 | 15 | 7 | 4 | 7 | 70 |
Total | 97 | 146 | 166 | 173 | 271 | 279 | 245 | 372 | 384 | 3 005 | 497 | 5 635 |
Total : 5 635
Comme le montre le tableau 1, le nombre de plaintes que je reçois dans ce domaine affiche globalement une tendance à la hausse (la baisse des plaintes relevée en 2021-2022 semble essentiellement attribuable à la pandémie et à la diminution des déplacements aériens).
Cette augmentation témoigne que certains problèmes relevés dans le rapport annuel de 2012-2013 perdurent. Ainsi, il arrive encore trop souvent que les institutions fédérales ne recourent pas à l’offre active (p. ex., à des formules verbales comme « Bonjour! Hello! » ou à des écriteaux frappés de l’inscription « Français/Anglais »); ne déploient pas suffisamment de personnel en mesure de communiquer dans les deux langues avec le public, tant en vol qu’au sol; n’affichent pas systématiquement en français et en anglais. Par exemple, les manquements à la Loi relevés en 2022-2023 dans les aéroports concernent surtout la langue des services et le recours à l’offre active verbale (36 plaintes), l’affichage et l’application des règles sur l’offre active écrite (29), Communications par téléphone (6) et le bilinguisme dans les services rendus par des tiers, comme les restaurants des aéroports (4), 2 autres catégories avec 1 plainte chacune.
Cette hausse découle aussi de la place grandissante que jouent les technologies dans nos sociétés et de l’incapacité trop fréquente des institutions à s’en servir dans le plein respect des droits des francophones et des anglophones. De plus en plus de plaintes concernent ainsi la prise en compte inadéquate du français ou de l’anglais dans l’univers numérique. Par exemple, les plaintes formulées contre Air Canada visent de plus en plus les systèmes de réservation en ligne ou les applications du transporteur, tandis que 17 des 29 plaintes sur l’affichage et l’application des règles sur l’offre active écrite visant les aéroports cette année concernaient l’utilisation du français et de l’anglais sur le Web et dans les médias sociaux.
On croyait il y a 10 ans que le recours aux technologies numériques permettrait aux institutions fédérales de combler certaines lacunes en matière de langues officielles, par exemple, d’automatiser certains processus pour pallier leur manque de ressources bilingues. Force est d’admettre que cette vision ne s’est pas encore pleinement réalisée.
Réactions du Commissariat à cette hausse
Mon équipe et moi avons adopté diverses mesures, ces dernières années, pour composer avec la hausse du nombre de plaintes formulées par le public voyageur.
Ces mesures ont pris différentes formes.
D’abord, le Commissariat s’est efforcé de trouver des façons d’assurer le traitement plus rapide et efficace des plaintes déposées. Il a ainsi élaboré une nouvelle stratégie pour faire face au nombre croissant de plaintes visant les administrations aéroportuaires et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. Cette stratégie veut essentiellement que les plaintes reçues par une institution durant une période particulière soient regroupées pour faire l’objet d’une seule enquête.
Cette stratégie aéroportuaire vise d’une part à montrer aux parties plaignantes que la situation qu’elles ont vécue est partagée par d’autres et vise aussi à mettre en lumière les enjeux répétitifs et systémiques répertoriés dans les aéroports à l’échelle du pays. Le regroupement de ces plaintes facilite également leur traitement pour les administrations aéroportuaires et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien, ce qui favorise leur collaboration avec le Commissariat. Surtout, la stratégie aide à brosser un portrait d’ensemble des défis propres à ces institutions, ce qui pourra, éventuellement, favoriser le repérage et l’élimination des barrières systémiques qui, souvent, nuisent au renforcement de la conformité à la Loi en matière de services au public, dont le public voyageur.
Les effets de la mise en œuvre de la stratégie aéroportuaire ont déjà commencé à se faire sentir. Le nombre de dossiers qui visent les administrations aéroportuaires et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien et qui n’ont pas encore été traités a diminué de 45 % en moins d’un an (du 1er avril 2022 au 31 mars 2023).
Cela dit, mon intention n’est pas simplement de faire en sorte que les plaintes que je reçois dans le secteur du voyage soient réglées avec plus de rapidité. Je vise aussi une plus grande conformité à la Loi.
En avril 2022, en prévision de la reprise des voyages à la suite des changements apportés aux restrictions sanitaires prises pendant la pandémie, j’ai envoyé une série de lettres aux institutions appelées à offrir des services au public voyageur ou à encadrer l’offre de tels services. Ces lettres visaient à rappeler à la haute direction d’organisations comme les principaux aéroports canadiens, Air Canada, l’Agence des services frontaliers, l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien ou Transports Canada que le retour progressif à la normalité dans le secteur du voyage doit se faire dans le plein respect des dispositions de la Loi. De plus, j’insistais dans mes missives sur le fait que les institutions fédérales concernées peuvent compter sur le soutien de mon personnel tout au long de cette reprise.
Les bureaux régionaux du Commissariat ont fait un suivi avec les autorités aéroportuaires contactées pour les inviter à discuter des défis auxquels elles sont confrontées et des pratiques à mettre en œuvre pour relever ces défis. Ces invitations ont porté fruit. Les administrations ont ainsi parlé des difficultés que leurs concessionnaires ou elles rencontrent sur le plan du recrutement de main-d’œuvre. Certaines ont noté avoir fait des efforts majeurs pour améliorer leur offre de services bilingues, que ce soit en s’assurant de communiquer dans les deux langues dans les médias sociaux, en assurant la qualité égale de leur site Web en français ou en recourant à de meilleurs services de traduction. D’autres envisagent de pallier les lacunes actuelles en implantant de nouveaux modes de prestation de services, comme des systèmes automatisés multilingues. Certaines autorités aéroportuaires ont enfin demandé à mon personnel de rencontrer leurs concessionnaires pour les sensibiliser à l’importance de l’offre active.
Dans une veine similaire, mon équipe a invité les institutions fédérales à se servir du Modèle de maturité des langues officielles, un outil d’amélioration continue que le Commissariat a créé. Air Canada s’est entre autres servie du Modèle dans le cadre d’un exercice d’autodiagnostic mené en 2022-2023. Mon équipe a soutenu l’entreprise dans le cadre de cet exercice, lequel mènera à la préparation, en 2023-2024, d’un plan de progrès que le transporteur pourrait mettre en œuvre pour améliorer sa maturité organisationnelle en matière de langues officielles.
J’ai confiance que les effets de ces différentes actions auront des répercussions positives à long terme en matière de conformité.
Recommandation 1
Je recommande :
- à la présidente du Conseil du Trésor et au ministre des Transports d'élaborer des outils et des lignes directrices concernant les obligations linguistiques des administrations aéroportuaires et de les communiquer aux administrations aéroportuaires d'ici le 31 mars 2024;
- au ministre des Transports d'exiger des administrations aéroportuaires qu'elles soumettent un plan sur la façon dont elles s'acquitteront de leurs obligations linguistiques envers le public d'ici le 30 juin 2025.
Des responsabilités clarifiées par le tribunal
Je reconnais que les prestataires de services au public et au public voyageur font face à des défis d’envergure sur le plan des langues officielles. Je rappelle toutefois que l’ensemble de leurs obligations linguistiques a été maintenu lors de la refonte récente du Règlement sur les langues officielles — communications avec le public et prestation des services, et qu’une décision judiciaire est venue confirmer récemment les obligations envers le public et le public voyageur.
En avril 2022, la Cour fédérale a en effet rendu une décision très favorable à l’égard des droits linguistiques du public voyageur et du public en général dans l’affaire Thibodeau c Administration de l’aéroport international de St. John’s (2022 CF 563).
Dans cette décision, la Cour fédérale a conclu qu’en ne communiquant pas en français dans les médias sociaux et en ne s’assurant pas que son site Web soit entièrement accessible dans les deux langues officielles, l’Administration de l’aéroport international de St. John’s n’avait pas respecté la Loi. La Cour a en fait retenu les arguments que j’avais fait valoir comme intervenant dans cette cause. Ces arguments voulaient d’une part que l’article 22 de la Loi s’applique bel et bien aux administrations centrales des aéroports, qui sont dès lors tenues d’offrir leurs services au « public » dans les deux langues officielles. Ces arguments voulaient d’autre part que la notion de « voyageurs » prévue à l’article 23 de la Loi doive être interprétée de façon large et libérale, pour inclure parmi les personnes dotées du droit d’être servies en français ou en anglais celles qui contemplent l’idée de voyager ou qui ont l’intention de le faire.
Mon équipe a aussi participé à une audience qui a soulevé des questions sur l’interprétation des droits des voyageurs dans un autre dossier devant la Cour fédérale, Thibodeau c Autorité aéroportuaire du Grand Toronto.
Appel de la décision de la Cour fédérale
La décision de la Cour fédérale a été portée en appel par l’Administration de l’aéroport international de St. John’s. En juin 2022, j’ai reçu la permission d’intervenir devant la Cour d’appel fédérale. En novembre, j’ai déposé devant ce tribunal un mémoire d’appel qui explique précisément pourquoi le juge de première instance n’a pas erré dans son interprétation des articles 22 et 23 de la Loi. Parallèlement à cela, j’ai recommandé dans mon mémoire sur le projet de loi C-13 qu’au moment de moderniser la Loi les parlementaires tiennent compte de la décision de la Cour fédérale et clarifient « les obligations des institutions fédérales desservant les voyageurs en précisant qu’elles s’appliquent à un public voyageur défini largement et en précisant à l’article 23 qu’elles incluent aussi les obligations découlant de l’article 22 ».
Conclusion
Les institutions fédérales devraient prendre des mesures vigoureuses pour assurer l’offre de services en français et en anglais de haute qualité au public voyageur entendu au sens large et, ainsi, favoriser une hausse de la conformité, laquelle pourrait notamment se traduire par une diminution marquée des plaintes qui leur sont adressées en matière de prestation de services.
Le recours à toute nouvelle approche en matière de prestation de services, comme les approches basées sur le recours à des outils informatisés, devra se faire dans le respect du principe de l’égalité réelle. En effet, il serait inacceptable, par exemple, que les francophones aient la même offre de service que les anglophones, mais que celle-ci soit largement faite de manière automatisée pour les francophones alors qu’elle serait majoritairement faite en personne pour les anglophones.
Chapitre 2 Relancer le bilinguisme dans la fonction publique
Introduction
La partie V de la Loi sur les langues officielles qui touche la langue de travail prévoit que le « français et l’anglais sont les langues de travail des institutions fédérales ». On y souligne qu’il incombe aux institutions fédérales de veiller à ce que, dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail, les milieux de travail soient propices à l’usage effectif des deux langues officielles. Cette section fait état de mesures qu’il conviendrait de prendre pour assurer le respect des droits linguistiques des fonctionnaires.
La place des langues officielles
Le dossier des langues officielles a connu des avancées lorsqu’on l’étudie sur une longue période, mais beaucoup de travail reste encore à réaliser dans différents secteurs pour assurer les droits linguistiques au sein de la fonction publique fédérale.
En examinant le parcours des langues officielles au fil des ans, je note qu’un comité de ministres appuyé par un comité de sous-ministres servait jadis de forum pour faire progresser la question des langues officielles au sein du gouvernement du Canada. Ce forum a été remplacé depuis par un comité de sous-ministres adjoints. Sans vouloir porter atteinte de ce dernier, je souhaite mettre en lumière que ce changement de gouvernance au fil du temps a pu certes contribuer à une perte de visibilité du dossier au sein même de la fonction publique fédérale. Cela envoie à l’ensemble de la fonction publique le signal que les langues officielles n’ont plus, de nos jours, le caractère prioritaire qu’elles revêtaient auparavant.
Bon coup chez Services partagés Canada
Faisant suite aux plaintes au sujet de messageries vocales que j’ai reçues au cours des six dernières années, je suis intervenu auprès de Services partagés Canada (SPC) afin que les fonctions automatisées de boîte vocale des appareils mobiles soient modifiées. Les messages d’accueil bilingues constituent une partie essentielle des obligations linguistiques du gouvernement du Canada découlant de la Loi sur les langues officielles, ayant pour but d’informer les membres du public qu’ils peuvent se faire servir dans la langue officielle de leur choix.
En réponse à mes interventions, SPC a créé des instructions pour aider les fonctionnaires fédéraux à configurer la boîte vocale de leur appareil mobile de façon à ce que les fonctions automatisées offertes par le fournisseur de service soient bilingues.
SPC s’est également engagé à assurer que les approvisionnements futurs concernant des services d’appareils mobiles prévoient, par défaut, une exigence de fonctions automatisées bilingues de boîte vocale.
Je félicite l’équipe de SPC et l’encourage à continuer dans cette voie.
Langues officielles, diversité et inclusion
Nous sommes à une époque charnière où plusieurs des acteurs clés à l’échelle du pays se penchent sur l’identité canadienne et les façons de réimaginer la diversité, l’inclusion, la dualité linguistique et la réconciliation pour l’avenir. Ma perspective est que parler des deux langues officielles, c’est valoriser la différence et cultiver le vivre-ensemble, des valeurs qui rendent possible une plus grande ouverture à la diversité culturelle.
En 2022-2023, le Forum des bonnes pratiques conjointement organisé par le Secrétariat du Conseil du Trésor, Patrimoine canadien et le réseau des champions des langues officielles en collaboration avec l’École de la fonction publique a mis cette question en point de mire dans le cadre d’un panel. J’ai eu l’occasion de participer à cette discussion avec la sous-ministre du Patrimoine canadien et championne de la communauté des langues officielles, le sous-ministre des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord Canada, la directrice générale de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne et le dirigeant principal adjoint des ressources humaines du Secrétariat du Conseil du Trésor.
La discussion dans le cadre de ce panel intitulé « Changer le discours sur la diversité, l’inclusion et les langues officielles » a été très riche. Ce que je retiens et ce qui a été relevé par mes collègues est que, même si les questions tournaient autour des difficultés à concilier les concepts de langues officielles, de diversité et d’inclusion, les réponses et les constats de l’ensemble des participants ont abondé dans le même sens, à savoir que ces concepts ne sont pas mutuellement exclusifs, mais qu’au contraire ils sont complémentaires. Cette discussion inspirante nourrit mon optimisme quant à l’avenir de la fonction publique et de la société canadienne.
Les plaintes en matière de langue de travail
Du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, 207 des plaintes déposées auprès du Commissariat en matière de langue de travail ont été jugées recevables. Ces plaintes visaient surtout la Gendarmerie royale du Canada (43 plaintes), le ministère de la Défense nationale (28), Services publics et Approvisionnement Canada (21), l’Agence des services frontaliers du Canada (20), Services partagés Canada (11) et Affaires mondiales Canada (10), mais elles concernaient aussi, à un degré moindre, 33 autres institutions. Dans 79 % des cas, les plaintes portaient sur un incident relatif à l’utilisation du français. La plupart de ces dernières avaient trait à une lacune en matière de communications internes, de formation ou de prestation de services centraux et personnels.
Rédiger dans la langue officielle de son choix
Les changements apportés à la cueillette de données sur les langues officielles sont un des facteurs qui contribuent aussi à la baisse d’importance accordée aux droits linguistiques au sein de la fonction publique fédérale. En effet, le retrait de questions sur les langues officielles du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux (le SAFF), après 2017, ne permet plus de mesurer l’évolution dans le temps de certaines données sur la langue de travail.
Par exemple, lors du SAFF de 2017, à la question : « lorsque je rédige des documents, y compris des courriels, je me sens libre de le faire dans la langue officielle de mon choix », 68 % des personnes dont la première langue officielle est le français étaient fortement d’accord et plutôt d’accord, tandis que 92 % de personnes dont la première langue officielle est l’anglais étaient du même avis. Depuis 2017, on ne pose plus cette question aux employés.
Il m’apparaît essentiel de disposer de données pour mesurer les progrès et les reculs autour des questions de langue de travail, afin de guider la prise de décisions qui contribueront à la création de milieux de travail pleinement propices à l’usage des deux langues officielles.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor quant à lui collige les informations dans son rapport annuel auprès des institutions fédérales et non pas auprès des employés eux-mêmes. Par exemple, dans le plus récent rapport annuel du Secrétariat du Conseil du Trésor, selon l’autodéclaration des institutions fédérales évaluées, leurs données affichent une augmentation ‒ de 51 % à 59 % ‒ depuis le dernier cycle quant à la possibilité qu’a leur personnel de « presque toujours » rédiger des documents dans la langue officielle de leur choix.
Il est important d’aller mesurer auprès des employés sur une base régulière s’ils se sentent libres de rédiger dans la langue officielle de leur choix, parce que c’est l’un des principaux indices qui permettent de savoir si les mesures que prennent les institutions fédérales sont efficaces et permettent le respect des droits linguistiques des employés.
Recommandation 2
Je recommande à la présidente du Conseil du Trésor, à la ministre des Langues officielles et à la greffière du Conseil privé de travailler de concert, d’ici la fin de juin 2025, pour :
- définir, dans un plan d’action, des moyens concrets de mettre en évidence la place des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale;
- mesurer la capacité réelle des fonctionnaires fédéraux à travailler dans la langue officielle de leur choix dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail.
La greffière est à l’écoute
Ce qui précède explique qu’au début de l’année je me suis donné comme priorité d’engager le dialogue avec la greffière du Conseil privé. En effet, je souhaitais discuter avec la dirigeante de la fonction publique fédérale de l’importance, pour l’ensemble des institutions fédérales, de traiter le français et l’anglais en milieu de travail comme une priorité au même titre que d’autres.
La rencontre que j’ai tenue avec la greffière en décembre 2022 a été fructueuse.
Je me suis permis, lors des échanges que nous avons eus ensemble, de lui rappeler que les langues officielles doivent être une priorité stratégique pour l’administration, et qu’il est capital qu’elle exerce son pouvoir d’influence et incite les cadres supérieurs de la fonction publique à pleinement mettre en œuvre la Loi pour donner un nouveau souffle aux langues officielles au sein de la fonction publique fédérale.
La greffière s’est montrée très réceptive à ces messages. Je m’en réjouis. En effet, il est crucial, au moment où le gouvernement du Canada travaille à la modernisation de la Loi, de placer la promotion du français et de l’anglais dans la fonction publique fédérale au cœur des préoccupations de ses meneurs et meneuses, et de considérer tant leur maîtrise du français et de l’anglais que leur leadership comme des compétences essentielles. Il s’agit non seulement d’assurer le respect de la Loi et des droits qu’elle confère aux fonctionnaires, mais aussi d’assurer l’efficacité d’une administration publique dont la bonne marche repose, en essence, sur sa capacité à tirer le meilleur de ses effectifs francophone et anglophone.
Je compte suivre ce dossier de très près au cours des mois à venir. L’intervention énergique de la greffière quant à la langue de travail sera d’ailleurs indispensable pour que ce dossier soit mieux pris en compte par la haute direction des institutions fédérales.
Mieux évaluer la haute direction des institutions
La haute direction des institutions fédérales joue un rôle majeur puisqu’elle donne le ton pour viser la pleine mise en œuvre de la Loi. Les fonctionnaires de haut rang doivent prioriser l’ensemble des efforts qui sont légitimement attendus d’eux ou d’elles dans ce dossier.
Les évaluations de rendement de ces responsables doivent tenir compte de leur propension à adopter les comportements exemplaires qui favoriseront, là où la Loi le prévoit, la mise en place d’environnements de travail propices à l’usage des deux langues officielles par exemple, des efforts qu’ils consacrent à maintenir ou améliorer leurs aptitudes linguistiques; à recourir aux deux langues officielles lors de la tenue de réunions; à réellement permettre à chaque fonctionnaire de rédiger ses documents dans la langue officielle de son choix.
Augmenter les attentes envers les sous-ministres
Dans la foulée de ce qui précède, une question a soulevé mon intérêt cette année : celle des attentes à l’égard des sous-ministres en ce qui concerne les compétences linguistiques et les compétences de leadership en matière de langues officielles.
En ce qui concerne les compétences linguistiques, il importe de souligner que le gouverneur en conseil, qui est responsable de nommer les sous-ministres, n’est pas soumis aux mêmes attentes que pour la dotation dans la fonction publique quant à ses choix de candidats maîtrisant les deux langues officielles lors d’un processus de nomination. Les sous-ministres sont choisis dans un bassin de cadres de la fonction publique ou par voie d’un recrutement externe. L’absence d’obligations linguistiques claires peut avoir des implications quant à la capacité des candidats à créer des milieux de travail propices à l’usage effectif des deux langues officielles.
À l’instar de la décision du gouvernement de mettre en place des processus pour s’assurer d’avoir des juges bilingues, une telle approche pourrait s’appliquer aussi aux nominations des sous-ministres. Le processus actuel de nominations des juges de la Cour suprême comporte l’obligation d’un bilinguisme effectif qui s’actualise au moyen d’une évaluation de la seconde langue officielle des candidats et candidates par un comité consultatif indépendant et impartial. Une approche semblable pour la fonction publique permettrait de nommer dans les hauts échelons de la fonction publique fédérale des fonctionnaires en mesure d’utiliser les deux langues officielles. Je vois d’un bon œil l’amendement qui a été adopté au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes quant à la capacité bilingue des sous-ministres dans le cadre de l’étude du projet de loi C-13 sur la modernisation de la Loi. Je suis également conscient que de nombreux sous-ministres sont bilingues, toutefois je souhaiterais que le recours à une approche semblable à celle de la Cour suprême officialise la capacité de la fonction publique à fonctionner dans les deux langues officielles.
Les sous-ministres ont l’obligation, en vertu de leurs conditions d’emploi, d’assurer l’atteinte des objectifs de la Loi, et ils sont imputables et redevables de ce qui se passe dans leurs ministères, y compris de ce qui a trait aux langues officielles. Le Cadre de responsabilisation de gestion, outil de surveillance du rendement en matière de gestion des ministères et organismes fédéraux, ne permet pas véritablement, dans sa forme actuelle, de mesurer au fil du temps ce rendement en ce qui a trait au respect des obligations linguistiques. Entre autres, les questions que le Cadre renferme à ce sujet changent chaque année, ce qui nuit à la comparabilité des résultats et à la fiabilité des mesures de progrès. La capacité des sous-ministres et de leurs organisations à veiller au respect des droits linguistiques du personnel, à assurer la prise en compte des langues officielles dans l’élaboration de programmes et à promouvoir le français et l’anglais en milieu de travail devrait faire l’objet d’un examen annuel. Cet examen devrait être articulé autour d’une série d’indicateurs clairs, robustes et récurrents, peu importe l’outil utilisé pour mener un tel examen.
Un problème qui perdure : l’insécurité linguistique
La réalité du milieu de travail a beaucoup changé depuis que j’ai publié une étude spéciale sur l’insécurité linguistique il y a deux ans. Travailler à mieux comprendre et à résoudre le problème de l’insécurité linguistique demeure l’une de mes préoccupations. Cela m’a notamment amené, en octobre 2022, à piloter la publication d’un article qui traite notamment des difficultés particulières que doivent affronter certains francophones issus de groupes marginalisés (comme les groupes visés par l’équité) à cause de l’insécurité linguistique. En décembre 2022, j’ai aussi lancé une suite à mon étude spéciale. Celle-ci consiste à organiser des groupes de discussion pour voir comment la pandémie et les pratiques mises en place durant celle-ci, comme le télétravail, ont affecté le sentiment de sécurité ou d’insécurité linguistique des fonctionnaires.
Le travail se poursuit également au sein de la fonction publique fédérale. En effet, le groupe de travail interministériel mené par le Centre d’excellence en langues officielles du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada continue ses activités pour contrer l’insécurité linguistique.
En fin de compte, il faut garder en tête que ce sentiment dépend au premier chef de la culture, des structures et des environnements de travail que les leaders des institutions fédérales mettent en place. Et que ses impacts ont des effets marqués sur le niveau d’inclusion et de bien-être des fonctionnaires et, ultimement, sur la qualité des services que les institutions fédérales livrent en français et en anglais au grand public.
Les nouveaux enjeux en matière de langue de travail
Le monde du travail a beaucoup changé. En effet, la pandémie et la présence accrue des technologies ont entraîné la mise en place officielle de modes de travail qui reposent, une partie du temps, sur le télétravail et le travail hybride. Ces phénomènes risquent d’avoir comme conséquence l’augmentation des cas où des gestionnaires qui ne sont pas nécessairement à l’aise en français ou en anglais doivent superviser des fonctionnaires qui eux ont le droit de travailler dans la langue officielle de leur choix.
Je m’inquiète, dans l’ensemble, des effets complexes que les bouleversements actuels et à venir sur les langues officielles au travail et le respect des droits linguistiques des fonctionnaires. Je m’attends à ce que les gestionnaires de tout rang puissent compter sur le soutien et les outils nécessaires à la création de milieux de travail hybrides propices à l’usage des deux langues officielles.
Je suivrai de très près les suites qu’aura l’annonce de la greffière de décembre 2022 quant à l’harmonisation du modèle de travail hybride dans la fonction publique fédérale.
Les plaintes relatives à la désignation linguistique des postes
Je continue de recevoir un volume important de plaintes ayant trait à la désignation linguistique des postes (l’article 91 de la Loi). Du 1er avril 2022 au 31 mars 2023, nous avons reçu 714 plaintes — un nombre trois fois plus élevé que celui enregistré l’an passé (204).
Ces plaintes portent essentiellement sur le fait que les institutions n’établiraient pas les profils linguistiques de certains postes de manière objective. Il s’agit d’un manquement sérieux, puisqu’en plus de ne pas respecter ses obligations, une institution qui ne tient pas compte, au moment de définir les exigences linguistiques d’un poste, des tâches associées au poste ou du lieu dans lequel ces tâches seront effectuées prend le risque, ultimement, d’affaiblir sa capacité à mettre en place un milieu de travail bilingue et à offrir des services en français et en anglais de qualité au public.
Devant le caractère systémique de ce problème, j’ai publié, en 2020, un rapport qui visait à l’analyser en profondeur. J’y recommandais que, d’ici novembre 2022, le Conseil du Trésor révise les politiques et les outils relatifs à l’article 91 et s’assure, en collaboration avec l’École de la fonction publique du Canada, que les formations offertes à ce sujet sont adéquates et répondent aux besoins des institutions. Je demandais aussi à ces dernières d’élaborer des politiques et des procédures, un plan de sensibilisation et des mécanismes de contrôle sur la question, et d’effectuer une évaluation périodique des exigences linguistiques liées aux postes.
Le Secrétariat du Conseil du Trésor a réagi à mon rapport en mettant sur pied un groupe de travail qu’il a chargé d’examiner les problèmes soulevés dans mon rapport, de répertorier les pratiques exemplaires à imiter et d’élaborer un plan d’action triennal qui permettra de favoriser le respect de la désignation linguistique objective des postes.
Le Secrétariat a présenté à mon équipe une stratégie en décembre 2022. J’aurais nettement préféré que cette date marque la fin de la mise en œuvre du plan « article 91 » de cet organisme central plutôt que le début. Je demande au Secrétariat d’accélérer la cadence et de veiller à déployer sa stratégie avec vigueur dès les prochains mois. Comme je l’ai annoncé en janvier 2023, je réaliserai prochainement un examen du suivi aux recommandations contenues dans mon rapport de 2020.
Recommandation 3
Je recommande à la présidente du Conseil du Trésor de mettre en œuvre son plan d’action triennal visant à assurer la conformité des institutions fédérales à l’article 91 de la Loi sur les langues officielles au plus tard d’ici juin 2025.

Le Modèle de maturité des langues officielles : quelques constats
Depuis 2019, le Modèle de maturité des langues officielles (MMLO) du Commissariat a permis de constater que beaucoup d’institutions n’ont pas instauré suffisamment de processus formels pour assurer le respect systématique des langues officielles, notamment en ce qui concerne la langue de travail et la gestion des personnes. Les résultats obtenus en appliquant le Modèle montrent que le niveau de maturité des institutions est par contre plus élevé en matière de gouvernance : leur culture, le leadership démontré par de nombreux responsables et les instruments qui sont mis à leur disposition contribuent à l’opérationnalisation efficace des politiques sur les langues officielles du Secrétariat du Conseil du Trésor.
Il y a une distinction importante à faire entre la maturité et la conformité. La maturité réfère à la présence de processus documentés pour encadrer la façon dont les institutions prévoient s’acquitter de leurs obligations. En ce sens, la maturité est un facteur qui influence la conformité, parmi d’autres, comme le leadership et l’engagement des employés.
Après quatre ans d’existence, le MMLO a fait l’objet d’un examen poussé par mon équipe. En effet, le Commissariat s’est penché sur les changements que pouvait entraîner l’adoption du projet de loi sur ses activités actuelles, notamment le MMLO . Même si le Commissariat complétera le premier cycle du MMLO , il n’y aura pas d’autre cycle pour le moment. Les activités du modèle de maturité ont donc été mises en pause. Les institutions pourront utiliser l’outil qui demeurera accessible sur le site Web du Commissariat. En outre, le Commissariat va demeurer disponible pour répondre aux questions des institutions fédérales sur le MMLO .
Moderniser la langue de travail
Le projet de modernisation de la Loi, lors de son dépôt, ne proposait aucune modification de substance à la partie de la Loi touchant la langue de travail. Néanmoins, je prends acte que les parlementaires ont débattu de la question de la langue de travail lors des travaux en comité article par article.
Parmi les amendements qui ont été adoptés, je souligne que dans les régions bilingues, les employés ont le droit d’être supervisés dans la langue de leur choix, et ce, sans égard à l’identification linguistique de leur poste. D’ailleurs, il s’agit là d’une des recommandations que j’ai faite dans mon mémoire sur ce projet de loi qui reflète le positionnement du Commissariat depuis plusieurs années.
J’accueille favorablement les amendements qui ont été adoptés en comité. Dans mon mémoire, je proposais une série de recommandations additionnelles dont la mise en œuvre améliorerait l’efficacité de la partie V de la Loi sur la langue de travail et viendrait refléter une réalité insoupçonnée en 1977 au moment de modifier la Loi pour inclure les droits de langue de travail. Je recommande entre autres de préciser dans la Loi que les fonctionnaires dont le poste est basé dans une région désignée bilingue aux fins de la langue de travail conservent leurs droits linguistiques quand ils ou elles télétravaillent à partir d’une région désignée unilingue aux fins de la langue de travail. Je propose aussi que la Loi garantisse au personnel le droit d’obtenir des formations, des services individuels et des services auxiliaires centraux en français et en anglais dans toutes les régions du pays plutôt que seulement dans les régions désignées bilingues.
Le rôle du Secrétariat du Conseil du Trésor
Le Secrétariat du Conseil du Trésor continue de suivre de près les dossiers qui sont placés sous sa responsabilité. À cet égard, je note avec satisfaction que le Secrétariat, avec lequel le Commissariat discute régulièrement, donne actuellement suite à certaines recommandations qui avaient vu le jour dans le rapport Borbey-Mendelsohn, que ce soit en travaillant sur un nouveau cadre de formation linguistique ou en concevant une méthode pour que les gestionnaires affichent le profil linguistique approprié.
Conclusion
La partie de la Loi sur la langue de travail attire moins l’attention que les autres volets de cet instrument, mais elle n’est pas moins névralgique pour autant. Il conviendra qu’un ensemble de mesures s’impose pour redonner au dossier des langues officielles le caractère prioritaire et l’importance distincte qu’il mérite. Il serait important que l’ensemble des institutions fédérales et de leurs responsables en tiennent pleinement compte et prennent des mesures robustes qui permettront de faire de la fonction publique un milieu où tant le français que l’anglais ont droit de cité.
Chapitre 3 Le plan d’action sur les langues officielles : un outil puissant… mais perfectible!
Introduction
Le plan d’action pour les langues officielles constitue, avec la Loi sur les langues officielles, l’une des pierres angulaires du renforcement du respect des langues officielles aux quatre coins du Canada. Le présent chapitre porte sur les actions que j’ai prises cette année pour que le prochain plan d’action 2023-2028 vise à favoriser davantage la progression du français et de l’anglais et à mieux répondre aux attentes et besoins des communautés de langue officielle.
20 ans déjà
Il y a 20 ans cette année, le gouvernement du Canada adoptait un premier plan quinquennal visant à donner un nouvel élan à sa politique en matière de langues officielles. Doté d’un budget de 1,9 milliard de dollars, le plan d’action 2003-2008 portait principalement sur des thèmes comme l’éducation et l’épanouissement des communautés francophones et anglophones.
Le budget alloué au plan quinquennal a grimpé avec le temps, ce qui a notamment permis la réalisation d’avancées majeures dans différents secteurs. Cette hausse a entre autres servi à favoriser l’accès à des services en français et en anglais en matière de santé et de justice, le développement économique des communautés et l’immigration francophone. Elle a aussi rendu possible la réalisation de gains dans des domaines que le premier plan d’action ne ciblait pas, comme les arts et la culture.
Par contre, les fonds investis dans certains créneaux se sont avérés insuffisants. Par exemple, les sommes injectées pour consolider ou améliorer la prestation de services en français dans les provinces n’ont pas été majorées depuis 2004, bien que la demande pour ces services ait augmenté. De plus, les montants prévus pour soutenir l’éducation dans la langue de la minorité ne permettent plus de répondre aux besoins des conseils scolaires, des écoles et, évidemment, des enfants. En fait, la Fédération nationale des conseils scolaires francophones estime qu’en raison de l’augmentation du coût de la vie et de la croissance des inscriptions, les montants reçus par élève ont réellement plongé de 44 % de 2009 à 2023. Quant à lui, le Quebec Community Groups Network précise qu’une augmentation du financement découlant des ententes en éducation est également nécessaire pour les écoles de langue anglaise du Québec.
Le budget fédéral déposé à la fin de l’exercice financier 2022-2023, quant à lui, annonçait un investissement additionnel de plus d’un milliard de dollars pour le Plan d’action sur les langues officielles 2023-2028. Ce nouvel investissement compte 679,2 millions de dollars pour soutenir l’accès égal à des services d'enseignement de qualité égale en collaborant avec les provinces et les territoires, ce qui contribuera à rattraper un certain retard qui perdure depuis plusieurs années dans les secteurs concernés, dont l’éducation dans la langue de la minorité, l’apprentissage de la langue seconde et les services gouvernementaux bilingues.
Le Commissariat aux aguets
Pour viser un plan d’action pour les langues officielles qui produise véritablement les effets attendus, j’ai rapidement priorisé la vigie de ce plan, à mon arrivée en poste il y a cinq ans, afin d’en surveiller la mise en œuvre durant le quinquennat 2018-2023. Les travaux menés par mon équipe ont débouché sur la publication, en mai 2022, d’un rapport intitulé Vigie de la mise en œuvre du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 : Investir dans notre avenir : Analyse et recommandations pour le prochain plan quinquennal.
J’y relève entre autres que faire passer à 2,7 milliards de dollars le budget consacré à la réalisation du plan d’action a permis, de 2018 à 2023, de lancer des initiatives nouvelles qui ont aidé les communautés à relever certains des défis qu’elles avaient priorisés, par exemple le développement de la petite enfance et le renforcement des capacités des médias et radios communautaires.
Cela dit, mon rapport révèle aussi que certaines lacunes importantes gagneraient à être corrigées.
Mon rapport a montré que des difficultés entravent trop souvent l’attribution rapide des fonds prévus dans le plan, avec pour résultat que la signature d’ententes importantes ou le versement des sommes attendues par les partenaires des institutions fédérales accusent parfois des retards préjudiciables. Si certaines de ces difficultés sont imputables à la pandémie, toutes, assurément, ne le sont pas.
De plus, il est clair que les obligations imposées aux bénéficiaires lorsque ceux-ci demandent du financement ou rendent des comptes font peser sur eux un fardeau considérable. Pour se prévaloir des programmes prévus au plan, certains organismes doivent sacrifier des ressources qu’ils auraient pu mieux investir dans la création et la prestation de services aux francophones ou aux anglophones.
Dans ce rapport, j’y émets 14 recommandations que les acteurs fédéraux devraient appliquer afin de cibler le succès du plan d’action 2023-2028. Je propose entre autres que les institutions fédérales affectent les fonds prévus avec diligence et qu’elles fassent preuve de flexibilité et de souplesse dans leurs relations avec leurs partenaires, notamment qu’elles acceptent des remaniements de budget ou de calendrier lorsque le bénéficiaire fait face à des circonstances atténuantes. J’y recommande aussi que des processus administratifs allégés soient mis en place, des processus qui préserveraient l’intégrité d’une saine gestion des fonds publics tout en respectant les principes de transparence et d’imputabilité.
Je tiens à rappeler que la mise en œuvre du Plan d’action est grandement tributaire de l’implication des intervenants communautaires et scolaires, qui travaillent sans relâche pour assurer le déploiement réussi de diverses initiatives. Je souligne également la contribution des fonctionnaires qui gèrent les initiatives financées. Leur travail acharné et leur flexibilité méritent d’être soulignés, car ils contribuent assurément au rayonnement de nos deux langues officielles.
L’importance de consulter
Il vaut la peine de s’attarder un peu à cette dernière question. J’ai suivi les consultations relatives au plan d’action 2023-2028 au cours de l’été 2022, et j’y ai pris part pour présenter mon rapport et ses recommandations. Différents intervenants ont exprimé de l’insatisfaction quant à la manière dont les consultations ont été menées. Certains estiment qu’ils ont eu peu de temps pour préparer leur participation à ce processus important. D’autres déplorent que les consultations aient eu lieu en plein été, un moment peu propice à la mobilisation optimale des effectifs. Il aurait été important pour les organisateurs de mieux veiller à ce que toutes les personnes désireuses de participer aux consultations puissent le faire, et puissent le faire efficacement.
La pérennité du plan d’action
En conclusion, je me réjouis fortement que le projet de loi C-13 établisse l’obligation pour le gouvernement fédéral de se donner une stratégie pangouvernementale en matière de langues officielles, laquelle vient essentiellement garantir que les plans quinquennaux lancés à ce jour n’aient été que les premiers d’une longue suite.
De pair avec une Loi sur les langues officielles modernisée, les prochains plans quinquennaux pour les langues officielles contribueront à assurer un avenir rayonnant et dynamique au français et à l’anglais au pays. À condition, encore une fois, que toutes les parties prenantes se voient adéquatement consultées lors de l’élaboration de ces plans de même que des programmes et des initiatives en découlant.
Tableaux des plaintes
Figure 1 Plaintes reçues et jugées recevables par partie de la Loi, 2022-2023
Légende
- 810 Communications avec le public et prestation des services (partie IV)
- 207 Langue de travail (partie V)
- 10 Participation équitable (partie VI)
- 44 Promotion du français et de l’anglais (partie VII)
- 714 Exigences linguistiques reliées aux postes (partie XI, article 91)
- 3 Autres parties de la Loi (parties I et III)
Total : 1 788
Tableau 2 Plaintes reçues et jugées recevables, par province ou territoire, et par partie de la Loi, 2022-2023
Lieu de l’incident | Services au public (partie IV) | Langue de travail (partie V) | Participation équitable (partie VI) | Promotion du français et de l’anglais (partie VII) | Exigences linguistiques (partie XI, article 91) | Autres parties (parties I et III) | Total |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Terre-Neuve-et-Labrador | 13 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 14 |
Île-du-Prince-Édouard | 6 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 7 |
Nouvelle-Écosse | 18 | 1 | 0 | 0 | 1 | 1 | 21 |
Nouveau-Brunswick | 53 | 2 | 1 | 0 | 22 | 0 | 78 |
Québec | 230 | 39 | 1 | 9 | 26 | 1 | 306 |
Région de la capitale nationale (Québec) | 35 | 25 | 0 | 7 | 42 | 0 | 109 |
Région de la capitale nationale (Ontario) | 150 | 114 | 4 | 18 | 606 | 1 | 893 |
Ontario | 132 | 16 | 1 | 5 | 11 | 0 | 165 |
Manitoba | 15 | 2 | 0 | 2 | 0 | 0 | 19 |
Saskatchewan | 15 | 1 | 0 | 1 | 0 | 0 | 17 |
Alberta | 35 | 2 | 0 | 0 | 0 | 0 | 37 |
Colombie-Britannique | 68 | 1 | 0 | 1 | 4 | 0 | 74 |
Yukon | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 |
Territoires du Nord-Ouest | 3 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 3 |
Nunavut | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 |
À l’extérieur du Canada | 35 | 3 | 2 | 1 | 2 | 0 | 43 |
Total | 810 | 207 | 10 | 44 | 714 | 3 | 1 788 |
Tableau 3 Évolution du nombre de plaintes reçues et jugées recevables, par province ou territoire, sur une période de 10 ans (de 2013-2014 à 2022-2023)
Lieu de l’incident | 2013 2014 | 2014 2015 | 2015 2016 | 2016 2017 | 2017 2018 | 2018 2019 | 2019 2020 | 2020 2021 | 2021 2022 | 2022 2023 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Terre-Neuve-et-Labrador | 18 | 12 | 14 | 28 | 16 | 24 | 32 | 11 | 22 | 14 |
Île-du-Prince-Édouard | 4 | 4 | 2 | 5 | 2 | 7 | 4 | 4 | 7 | 7 |
Nouvelle-Écosse | 8 | 13 | 16 | 10 | 20 | 22 | 60 | 11 | 17 | 21 |
Nouveau-Brunswick | 31 | 42 | 41 | 87 | 51 | 65 | 62 | 47 | 40 | 78 |
Québec | 59 | 56 | 68 | 148 | 129 | 166 | 213 | 239 | 3 047 | 306 |
Région de la capitale nationale (Québec) | 37 | 64 | 121 | 92 | 96 | 156 | 163 | 293 | 127 | 109 |
Région de la capitale nationale (Ontario) | 182 | 193 | 351 | 429 | 307 | 336 | 500 | 883 | 1 778 | 893 |
Ontario | 75 | 78 | 58 | 106 | 124 | 153 | 192 | 148 | 175 | 165 |
Manitoba | 20 | 13 | 14 | 13 | 18 | 11 | 9 | 25 | 24 | 19 |
Saskatchewan | 8 | 16 | 4 | 6 | 25 | 14 | 6 | 23 | 10 | 17 |
Alberta | 9 | 28 | 8 | 43 | 49 | 56 | 48 | 120 | 37 | 37 |
Colombie-Britannique | 19 | 18 | 16 | 25 | 33 | 25 | 30 | 52 | 89 | 74 |
Yukon | 0 | 1 | 1 | 1 | 1 | 5 | 6 | 2 | 3 | 1 |
Territoires du Nord-Ouest | 1 | 0 | 2 | 2 | 4 | 7 | 6 | 4 | 3 | 3 |
Nunavut | 0 | 0 | 1 | 0 | 0 | 0 | 0 | 1 | 0 | 1 |
À l’extérieur du Canada | 5 | 12 | 8 | 23 | 19 | 40 | 30 | 7 | 30 | 43 |
Total | 476 | 550 | 725 | 1 018 | 894 | 1 087 | 1 361 | 1 870 | 5 409 | 1 788 |
Tableau 4 Évolution du nombre de plaintes recevables reçues, par partie de la Loi, sur une période de dix ans (de 2013-2014 à 2022-2023)
Partie ou article du Loi | 2013 2014 | 2014 2015 | 2015 2016 | 2016 2017 | 2017 2018 | 2018 2019 | 2019 2020 | 2020 2021 | 2021 2022 | 2022 2023 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Services au public (partie IV) |
282 | 320 | 344 | 565 | 457 | 550 | 731 | 693 | 3 398 | 810 |
Langue de travail (partie V) |
103 | 126 | 125 | 183 | 138 | 212 | 172 | 173 | 233 | 207 |
Participation équitable (partie VI) |
13 | 11 | 24 | 34 | 16 | 22 | 11 | 13 | 21 | 10 |
Promotion du français et de l’anglais (partie VII) |
30 | 37 | 62 | 32 | 50 | 12 | 20 | 16 | 1 546 | 44 |
Exigences linguistiques (partie XI, article 91) |
44 | 45 | 156 | 192 | 222 | 285 | 420 | 968 | 204 | 714 |
Autres parties (parties I et III) |
4 | 11 | 14 | 12 | 11 | 6 | 7 | 7 | 7 | 3 |
Total | 476 | 550 | 725 | 1 018 | 894 | 1 087 | 1 361 | 1 870 | 5 409 | 1 788 |
Recommandations
Recommandation 1
Je recommande :
- à la présidente du Conseil du Trésor et au ministre des Transports d'élaborer des outils et des lignes directrices concernant les obligations linguistiques des administrations aéroportuaires et de les communiquer aux administrations aéroportuaires d'ici le 31 mars 2024;
- au ministre des Transports d'exiger des administrations aéroportuaires qu'elles soumettent un plan sur la façon dont elles s'acquitteront de leurs obligations linguistiques envers le public d'ici le 30 juin 2025.
Recommandation 2
Je recommande à la présidente du Conseil du Trésor, à la ministre des Langues officielles et à la greffière du Conseil privé de travailler de concert, d’ici la fin de juin 2025, pour :
- définir, dans un plan d’action, des moyens concrets de mettre en évidence la place des langues officielles au sein de la fonction publique fédérale;
- mesurer la capacité réelle des fonctionnaires fédéraux à travailler dans la langue officielle de leur choix dans les régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail.
Recommandation 3
Je recommande à la présidente du Conseil du Trésor de mettre en œuvre son plan d’action triennal visant à assurer la conformité des institutions fédérales à l’article 91 de la Loi sur les langues officielles au plus tard d’ici juin 2025.
