Rapport annuel 2019-2020

Rapport annuel 2019●2020  

Table des matières

 

Préface

L’année 2019-2020 a permis de constater une grande effervescence autour des langues officielles, notamment pour célébrer les 50 ans de la Loi sur les langues officielles. Cette année a été l’occasion de se souvenir de tout le chemin parcouru par notre société depuis son entrée en vigueur. Le présent rapport annuel incite à la réflexion sur l’avenir des langues officielles dans la société. Est-ce le début d’une nouvelle ère pour les langues officielles au Canada? Je le crois à bien des égards.

Lire la suite la préface... Moins

Le premier ministre s’est engagé à déposer un projet de loi pour moderniser la Loi en 2018. La réflexion est bien entamée et le gouvernement a tous les outils en main pour passer de la parole aux actes lorsque les activités parlementaires auront repris leur cours normal. Cette modernisation doit permettre l’adaptation à une nouvelle réalité, où les services ne sont plus ancrés dans un territoire et sont livrés parfois uniquement de façon numérique. La refonte récente du Règlement sur les langues officielles — communications avec le public et prestation des services, quant à elle, tente dans une certaine mesure de répondre à ces nouveaux enjeux, mais le Règlement reste prisonnier d’une vieille conception de la Loi et manque largement la cible. J’ose espérer que le gouvernement se donnera les moyens de son ambition en vue de réformer la Loi en profondeur. Les communautés de langue officielle en situation minoritaire aspirent à voir leurs droits respectés en tout temps, tout comme ceux de la majorité, c’est-à-dire le droit à la sécurité, le droit de vote, le droit à l’éducation, le droit à la santé, et j’en passe, bref, le droit de recevoir des services de la part de leur gouvernement dans la langue officielle de leur choix. De leur côté, les institutions fédérales aimeraient qu’il soit plus facile de comprendre les règles afin de mieux les mettre en application dans leurs activités. On peut assimiler et respecter une loi de façon beaucoup plus efficace si elle est intelligible et cohérente.

L’absence évidente de services bilingues met en jeu la sécurité du public. Soyons clairs, les manquements à la Loi dans le domaine de la sécurité sont autant des enjeux de langues officielles que de sécurité.

Au-delà de ces discussions sur la modernisation de la Loi, les institutions fédérales doivent continuer de faire preuve de bonne volonté pour se conformer à leurs obligations en matière de langues officielles. Dans le domaine de la sécurité par exemple, nos enquêtes ont révélé que certaines institutions ont du mal à offrir leurs services dans les deux langues officielles.

Cela est apparu de manière criante lors de la crise sanitaire sans précédent qui a touché notre pays et le reste du monde à la fin de l’hiver 2020. J’aurai l’occasion de revenir prochainement sur la gestion de la crise sanitaire de la COVID-19 par les autorités de la santé publique dans une publication sur la sécurité publique. On observe déjà que trop souvent, les institutions fédérales se défendent en affirmant que leur mandat, qui consiste à assurer la sécurité du public, a préséance sur leur obligation de respecter la Loi. Cela me paraît une grave erreur. S’il y a un domaine où le respect des langues officielles devrait être de rigueur, c’est bien dans ce domaine. Comment assurer la sécurité du public si l’on s’adresse à ce dernier dans une seule des deux langues officielles? L’absence évidente de services bilingues peut mettre en jeu la sécurité du public.

Soyons clairs, les manquements à la Loi dans le domaine de la sécurité sont autant des enjeux de langues officielles que de sécurité. Il est déconcertant de voir que ces failles de sécurité sont notamment observées au cœur même de notre démocratie, sur la Colline parlementaire, mais aussi de façon constante dans les aéroports et aux postes frontaliers, où plus de 100 millions de voyageurs transitent chaque année. Les autorités responsables doivent se saisir immédiatement de ces enjeux.

Je suis conscient que la Loi n’est pas toujours respectée de façon systématique; c’est donc avec un brin d’optimisme que je constate que près de 80 % des plaintes pour lesquelles nous menons des enquêtes entraînent des résultats concrets pour les plaignants. Ces données démontrent qu’une majorité des institutions sont à l’écoute et qu’elles veulent mieux faire, mais elles racontent aussi une autre histoire. En effet, bien qu’un bon nombre de recommandations soient mises en œuvre, le signal d’un changement durable au sein des institutions fédérales visées est loin d’être aussi évident.

Plus que jamais, les Canadiens veulent que leurs enfants profitent des avantages du bilinguisme.

Enfin, j’envisage l’avenir de la dualité linguistique au Canada avec confiance, mais sans naïveté.

J’envisage l’avenir avec confiance lorsque je regarde nos communautés de langue officielle qui sont vibrantes. La demande pour des programmes de français langue seconde de la part des conseils scolaires a connu des décennies de croissance exceptionnelle, au point où l’on peine à trouver un nombre suffisant d’enseignants qualifiés. Plus que jamais, les Canadiens veulent que leurs enfants profitent des avantages du bilinguisme. J’encourage donc le gouvernement à maintenir ses engagements en matière d’enseignement des deux langues officielles afin de donner la chance au plus grand nombre possible de jeunes Canadiens de devenir bilingues.

Je l’envisage également sans naïveté, car nos communautés ont besoin de pouvoir compter sur des gouvernements qui font preuve de leadership constant en la matière. Le soutien à l’éducation dans la langue de la minorité doit demeurer une priorité absolue de nos politiques publiques. Tous s’entendent pour dire que l’apprentissage de la seconde langue officielle est non seulement souhaitable, mais essentiel pour assurer l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.

L’avenir passe également par une fonction publique qui est en mesure d’innover. Une nouvelle forme de service au public voit le jour, et avec celle-ci vient des défis et des occasions. Au Commissariat aux langues officielles, par exemple, j’ai lancé le Modèle de maturité des langues officielles, un nouvel outil permettant à chaque institution fédérale de faire son propre examen diagnostique. Déjà quelque 40 institutions fédérales ont fait le saut et participent à cet exercice triennal. Ces institutions recevront une marche à suivre détaillée pour intégrer davantage les langues officielles dans leurs opérations. Ainsi, je lance l’appel aux institutions fédérales qui n’ont pas encore fait le saut, mais qui veulent développer un réflexe de bilinguisme institutionnel à se joindre au groupe qui démontre déjà beaucoup d’engagement envers ses employés et ses usagers.

Signature de Raymond Théberge

Raymond Théberge
Commissaire aux langues officielles

 
 
 
 
 

Versions abrégées utilisées dans le rapport

Dans l’ensemble du présent rapport, le texte a été allégé de la façon suivante :

  • « commissaire » pour « commissaire aux langues officielles Raymond Théberge »;
  • « Commissariat » pour « Commissariat aux langues officielles »;
  • « Loi » pour « Loi sur les langues officielles »;
  • « communauté de langue officielle » pour « communauté de langue officielle en situation minoritaire »;
  • « institution fédérale » pour une institution fédérale ou un organisme fédéral assujettis à la Loi sur les langues officielles;
  • « Règlement » pour « Règlement sur les langues officielles — communications avec le public et prestation des services »;
  • « Charte » pour la « Charte canadienne des droits et libertés »;
  • « Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 » pour « Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 : Investir dans notre avenir ».
 
 
 

Chapitre 1 50 ans passés et à venir

Introduction

En 2019-2020, parallèlement à ses activités d’ombudsman, le commissaire aux langues officielles a multiplié les interventions sur plusieurs fronts, notamment en organisant de nombreux événements pour marquer le 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles, qui est entrée en vigueur le 7 septembre 1969, et en participant à ces derniers. Le commissaire a porté un regard lucide sur ces 50 premières années, mais il a surtout posé les jalons pour les années à venir en défendant fermement l’idée que l’avenir de la dualité linguistique passe par une refonte en profondeur de la Loi.

Le commissaire s’est particulièrement impliqué sur le plan de la modernisation de la Loi. Il a notamment comparu devant les comités parlementaires, il a mené une campagne nationale de consultation, pour ensuite publier un rapport contenant 18 recommandations pour une Loi actuelle, dynamique et robuste. Le commissaire a également suivi de près l’élaboration du nouveau Règlement sur les langues officielles — communications et prestation des services. Il a fourni des commentaires à plusieurs reprises au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, mais ceux-ci n’ont pas tous été retenus. Par conséquent, bien que le nouveau Règlement présente des avancées certaines, il ne répond pas à toutes les attentes du commissaire.

Dans le domaine judiciaire, le commissaire est intervenu à plusieurs reprises pour défendre des principes fondamentaux tirés de la jurisprudence. Il est notamment intervenu devant la Cour fédérale pour faire reconnaître le principe de l’égalité réelle qui sert à interpréter tous les droits linguistiques prévus par la Loi.

Plus Moins

Une effervescence autour du 50e anniversaire de la Loi

Modèle de maturité des langues officielles : lancement officiel

Le commissaire a lancé officiellement son nouveau Modèle de maturité des langues officielles le 17 juin 2019, lors d’un événement organisé en partenariat avec l’École de la fonction publique du Canada. L’événement a connu un énorme succès, car plus de 550 personnes y ont assisté sur place ou ont pu s’y joindre par webdiffusion. Cet outil moderne et convivial, utilisant la technologie, a été lancé pour souligner le 50e anniversaire de la Loi. Il traduit les principes ainsi que les droits et les obligations énoncés dans la Loi pour qu’ils soient plus facilement compris par tous les secteurs d’une organisation et réellement intégrés dans les processus décisionnels et opérationnels.

Sommet Officiellement 50 ans!

Plus de 150 personnes ayant à cœur la question des langues officielles se sont réunies dans le cadre du sommet Officiellement 50 ans! qui s’est tenu à Gatineau, Québec, du 21 au 23 novembre 2019. En effet, le Commissariat aux langues officielles s’est associé à l’Association d’études canadiennes et à Canadian Parents for French pour présenter cet événement d’envergure, au cours duquel des participants de partout au Canada ont fait le point sur les 50 ans d’existence de la Loi autour d’enjeux tels que l’enseignement de la langue seconde, la recherche en langues officielles et la perception du public à l’égard de la dualité linguistique. La journée du 22 novembre, organisée par le Commissariat avec la participation de la Fédération de la jeunesse canadienne-française et Youth4Youth, portait sur l’avenir de la dualité linguistique canadienne et était articulée sur des thèmes touchant particulièrement les jeunes Canadiens, tel que l’insécurité linguistique dans le contexte de la diversité croissante et des identités multiples. Dans cette perspective, le Commissariat a convié plus de 40 jeunes de toutes les régions du pays, venant autant d’écoles de langue française, d’écoles de langue anglaise et du programme d’immersion, à venir échanger entre eux sur l’avenir de la dualité linguistique. Au cours de cette journée, ces jeunes ont dégagé des pistes d’action qui alimenteront les réflexions du Commissariat et qui aideront à façonner l’avenir de la dualité linguistique au Canada pour les 50 prochaines années.

 
Faits saillants des thèmes abordés par les jeunes
  • Vocabulaire : Les termes que l’on utilise n’interpellent pas tous les jeunes, notamment la conception même de ce qu’est un membre des communautés de langue officielle. Ces termes devraient être plus flexibles selon eux.
  • Dualité : L’expression « dualité linguistique » ne colle pas à la réalité des jeunes, qui la perçoivent comme étant trop restrictive.
  • Insécurité : Le fait français pour les jeunes se veut flexible et inclusif des accents, des origines diverses et du droit à l’erreur. De nombreux participants ont fait part de situations où la maîtrise de leur langue première ou seconde était source de situations stressantes dans un carcan où les attentes sont plus traditionnelles.
  • Enseignement : En ce qui concerne l’enseignement des langues officielles, comme langue première ou seconde, les jeunes ont insisté sur la qualité des enseignants, mais aussi sur l’environnement d’apprentissage et les contacts avec la communauté.
  • Combattre les mythes : La population a parfois une vision dépassée des communautés de langue officielle, par exemple, lorsqu’il est question du statut économique des Anglo-Québécois, qui est bien moins élevé que le stéréotype généralement véhiculé.
  • Langues autochtones : Il est important pour les jeunes que l’on donne une plus grande place aux langues autochtones dans la politique linguistique canadienne.
 
 
 

Célébrations du 50e anniversaire

Le commissaire et le personnel du Commissariat ont participé à plusieurs autres événements et initiatives organisés par le gouvernement, les communautés de langue officielle et les organismes de recherche pour célébrer le 50e anniversaire de la Loi. Le commissaire a profité de toutes les occasions qui lui ont été offertes, tant au cours des entrevues qu’il a accordées que lorsqu’il a pris la parole à plusieurs endroits à l’échelle du Canada, pour aborder le 50e anniversaire de la Loi et la modernisation de cette dernière.

Une année riche en événements

Voici une liste non exhaustive des activités auxquelles le commissaire a pris part en 2019-2020.

Fredericton (Nouveau-Brunswick)

Discours prononcé dans le cadre d’une activité protocolaire tenue à la résidence de la lieutenante-gouverneure du Nouveau-Brunswick pour souligner le 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick.

 

Gatineau (Québec)

Discours d’ouverture prononcé dans le cadre d’une conférence organisée par le Réseau de recherche sur les communautés québécoises d’expression anglaise, l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques et l’Observatoire international des droits linguistiques, au cours du 87e Congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS).

 

Ottawa (Ontario)

Discours prononcé dans le cadre du 4e Congrès du Réseau francophone de sociolinguistique.

 

Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard)

Discours prononcé dans le cadre de la rencontre du Conseil fédéral de l’Atlantique.

 

Montréal (Québec)

Discours prononcé dans le cadre de l’assemblée générale annuelle du Quebec Community Groups Network.

 

Montréal (Québec)

Discours prononcé dans le cadre du Colloque du lieutenant-gouverneur du Québec, « 50 ans de changements juridiques visant l’inclusion citoyenne », à l’Université du Québec à Montréal.

 

Victoria (Colombie-Britannique)

Présentation du thème « Le 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles » dans le cadre de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie.

 

Winnipeg (Manitoba)

Panéliste dans le cadre de la 71e conférence annuelle de l’Institut d’administration publique du Canada intitulée « Transformation dans le secteur public : action et changement significatif ».

 

Gatineau (Québec)

Discours prononcé dans le cadre de la Journée de la dualité linguistique et du 50e anniversaire de la Loi à Services publics et Approvisionnement Canada.

 

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador)

Discours prononcé dans le cadre de l’assemblée générale annuelle de la Société nationale de l’Acadie.

 

Gatineau (Québec)

Diverses présentations dans le cadre du sommet bilingue Officiellement 50 ans! sur la dualité linguistique et l’éducation au Canada, présenté en collaboration avec l’Association d’études canadiennes et Canadian Parents for French.

 

Journée de la dualité linguistique 2019

Il convient de souligner la Journée de la dualité linguistique, qui a eu lieu le 12 septembre 2019, au cours de laquelle le commissaire a pris part, à Ottawa, en Ontario, à une causerie sur l’insécurité linguistique et la langue de travail. Au cours de cet événement, 50 prix d’excellence et de leadership en langues officielles ont été décernés, ce qui témoigne de l’expertise et de toute la richesse d’initiatives dont fait preuve la fonction publique fédérale.

Cette journée, riche en enseignements, a également permis de découvrir de nouveaux outils en langues officielles. Le Carrefour des langues officielles, qui y a officiellement été lancé, est le fruit d’une collaboration entre sept organismes fédéraux, dont le Commissariat. Le Carrefour des langues officielles vise à rassembler au même endroit toute l’information pertinente concernant les langues officielles, notamment les politiques en vigueur, la formation en langue seconde, de l’information sur les communautés de langue officielle, les meilleures pratiques et des guides. Cette initiative découle d’une recommandation du rapport du greffier du Conseil privé, intitulé Le prochain niveau : Enraciner une culture de dualité linguistique inclusive en milieu de travail au sein de la fonction publique fédérale. Le commissaire est particulièrement fier de cet outil, qui se révélera indispensable pour les employés fédéraux et pour le grand public.

Insécurité linguistique : aperçu des résultats du sondage du Commissariat

En mars 2019, le Commissariat a mené un sondage auprès des fonctionnaires des régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail. Le commissaire tient à remercier le Réseau des champions des langues officielles qui s’est chargé de diffuser le sondage aux employés de leurs institutions respectives.

L’insécurité linguistique peut être décrite comme étant un sentiment de malaise, dans une certaine mesure, à utiliser sa première ou sa seconde langue officielle en raison de divers facteurs possibles (environnement, expériences, perceptions aux plans personnel, interpersonnel, organisationnel, institutionnel, social).

Le sondage visait à mieux comprendre dans quelle mesure les employés fédéraux qui ont le droit de travailler dans la langue officielle de leur choix peuvent éprouver de l’insécurité linguistique au travail, dans leur première ou leur seconde langue officielle, et à déterminer des stratégies et des moyens pour relever les défis potentiels. Les réponses reçues dans le cadre du sondage, soit près de 11 000, ont largement surpassé les attentes, ce qui semble indiquer que les langues officielles et la sécurité linguistique sont d’importants sujets de préoccupation pour les employés fédéraux.

Alors que l’analyse des résultats se poursuit en vue de leur publication, une analyse préliminaire suggère déjà que :

  • L’insécurité linguistique est un véritable défi pour de nombreux employés fédéraux;
  • De nombreux employés fédéraux, francophones et anglophones, souhaitent avoir davantage d’occasions d’utiliser les deux langues officielles en milieu de travail.

Autres publications

Le commissaire et le personnel du Commissariat ont également contribué à plusieurs publications soulignant le 50e anniversaire de la Loi, dont des entrevues et des articles de recherche pour quelques magazines, du contenu historique pour le documentaire Bonjour, My Friend! ainsi qu’à la révision d’un récit historique sur la dualité linguistique publié par la Fondation canadienne pour le dialogue des cultures.

 

La modernisation

La modernisation est en cours

En cette année qui marque le 50e anniversaire de la Loi, le commissaire a continué son travail en vue de la moderniser en 2019. Il a d’ailleurs comparu et témoigné devant le Comité permanent des langues officielles du Sénat et le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes pour étayer sa position, mais également pour répondre aux propositions mises de l’avant par les différents intervenants.

À la suite de la tenue de ses consultations nationales, le commissaire a publié son document de positionnement en mai 2019 énumérant 18 recommandations sur la modernisation de la Loi, regroupées sous trois piliers :

 
Le commissaire a notamment formulé les recommandations suivantes dans son document de positionnement :

En outre, le commissaire poursuit sa réflexion sur la question de la création d’un tribunal administratif et des différents modèles suggérés par divers intervenants. Une attention particulière doit être accordée à la relation qui unirait ce nouveau tribunal au commissaire, surtout en matière de traitement des plaintes et des enquêtes.

Le commissaire demeure également vigilant quant à l’enjeu de l’adoption d’une version française officielle des textes constitutionnels qui se fait toujours attendre, malgré le fait qu’une version française de ces textes existe depuis 1990. Il a par ailleurs reçu un certain nombre de plaintes à ce sujet, pour lesquelles il mène actuellement une enquête.

 
 
 

Un nouveau Règlement

Le 10 juillet 2019, le Règlement modifiant le Règlement sur les langues officielles — communications avec le public et prestation des services a été adopté par le gouvernement. Le nouveau Règlement comprend plusieurs améliorations. Tout d’abord, il prévoit une protection des bureaux bilingues lorsque la part relative de la population de la minorité linguistique passe sous la barre des 5 %, mais se maintient en chiffres absolus.

Ensuite, il prévoit l’adoption d’un critère de vitalité des communautés de langue officielle, à savoir la présence d’une école de la minorité linguistique; si une école est présente dans l’aire de service, la demande sera jugée suffisamment importante pour que des services bilingues soient offerts. Le commissaire a salué l’adoption de ce critère de vitalité, mais il s’agit d’un critère insuffisant. L’histoire de la lutte pour la gestion scolaire démontre que les gouvernements locaux sont frileux quant à la création d’écoles dans la langue officielle de la minorité linguistique. Ce critère peut venir renforcer les communautés déjà établies au détriment de celles qui sont en développement. Le commissaire aurait aimé que d’autres critères socioéconomiques et culturels soient pris en compte. Or, tous les autres critères socioéconomiques et culturels que le Commissariat avait proposés lors de discussions avec le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada ont été rejetés.

Sur d’autres aspects, le Règlement ne répond pas aux attentes du commissaire. La plus grosse déception est certainement qu’il maintient l’usage du seuil de 5 % pour définir la demande importante. Le commissaire avait demandé son remplacement par un critère numérique absolu, car les droits de la population minoritaire ne devraient jamais être conditionnels à la taille de la population majoritaire. De plus, le Règlement reste très complexe même pour les initiés. Le commissaire aurait souhaité qu’il soit davantage simplifié pour le rendre plus facile à comprendre. La nouvelle mouture ne comprend pas de clause de révision décennale; par contre, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada devra produire une « analyse » et la présenter au Parlement. Les formes de cette analyse sont encore à déterminer. Cette approche n’oblige toutefois pas le Parlement à procéder à une révision du Règlement tous les 10 ans, ce qui aurait pour but d’en préserver la pertinence.

Le gouvernement s’est donné amplement le temps de mettre en œuvre la réforme, la pleine mise en œuvre du Règlement n’étant prévue qu’en 2024, à la suite du recensement de 2021. Le commissaire suivra l’application du Règlement de près afin de prendre la pleine mesure de son incidence sur les membres des communautés de langue officielle.

Appel du jugement dans l’affaire Dionne

Le commissaire était intervenant dans l’affaire Dionne c Bureau du surintendant des institutions financières.

Le 3 juillet 2019, la Cour fédérale rendait le jugement portant sur les dispositions de la Loi touchant la langue de travail au sein des institutions fédérales. Le plaignant, travaillant dans la région de Montréal, alléguait une violation de ses droits en matière de langue de travail le contraignant à travailler en anglais avec ses collègues unilingues anglophones du bureau de Toronto. La Cour a rejeté la demande de M. Dionne parce qu’elle considérait qu’il n’y avait pas de violation.

Le commissaire est déçu par ce jugement, qui comporte plusieurs enjeux de taille quant à l’interprétation des droits linguistiques. C’est pourquoi il a décidé de porter cette décision en appel.

Selon le commissaire :

  • Cette décision écarte les principes fondamentaux d’interprétation des droits linguistiques établis par la Cour suprême du Canada;
  • Elle a des conséquences négatives quant aux droits des employés fédéraux de travailler dans la langue officielle de leur choix. En effet, la Cour fédérale a estimé que l’employé bilingue devait renoncer à ses droits afin de tenir compte dans une certaine mesure des besoins des employés unilingues. Ainsi, le principe d’égalité réelle qui sous-tend le droit est enfreint. Les droits linguistiques ne sont pas des accommodements, il s’agit de droits fondamentaux. Par conséquent, une institution fédérale doit garantir les droits de tous et non pas de certains au détriment des autres;
  • Enfin, la décision va à l’encontre de l’esprit de la Loi en accordant la priorité au principe du mérite de l’article 91 sur les parties IV et V de la Loi.

Cette affaire démontre la nécessité de moderniser la Loi afin de renforcer davantage les principes d’interprétation des droits. La prochaine mouture de la Loi devrait clairement édicter les principes d’interprétation, la rendant ainsi plus robuste du point de vue de son interprétation et de son application.

15e anniversaire de la modification de la partie VII de la Loi : un bien triste anniversaire!

La partie VII de la Loi est essentielle pour favoriser l’épanouissement des communautés de langue officielle et appuyer leur développement, ainsi que pour promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne. C’était l’une des grandes innovations de la Loi de 1988, et elle a été renforcée en 2005 par l’ajout de l’obligation, pour toutes les institutions fédérales, de prendre des mesures positives pour donner suite aux engagements du gouvernement. Bien que la partie VII présente de nombreux avantages, il n’y a pourtant pas matière à célébrer le 15e anniversaire des modifications apportées en 2005.

En effet, depuis l’affaire Fédération des francophones de la Colombie-Britannique c Canada (Emploi et Développement social), la Cour fédérale a énoncé que la partie VII n’imposait aux institutions fédérales qu’une simple obligation générale d’agir et de prendre des mesures positives dans le cadre de leur mandat, changeant ainsi l’interprétation de la partie VII. Cette décision va à l’encontre même de l’esprit de la Loi et de l’objectif de la partie VII voulant que les institutions fédérales doivent prendre des mesures positives pour faire progresser l’égalité des deux langues officielles.

Cette affaire rend d’autant plus urgente la modernisation de la Loi et l’adoption d’un règlement qui clarifierait les obligations des institutions fédérales.

Air Canada : le commissaire intervient pour faire reconnaître l’égalité réelle

Le commissaire a accueilli avec enthousiasme la décision de la Cour fédérale dans l’affaire Thibodeau c Air Canada. Dans cette affaire, les plaignants alléguaient notamment un manquement important d’Air Canada en matière de sécurité puisque la signalisation en cas d’urgence n’était pas identique dans les deux langues officielles.

Dans son jugement, la Cour a confirmé que l’égalité réelle constituait la norme en matière de droits linguistiques. Elle a accepté l’argument présenté par le commissaire selon lequel l’égalité comporte quatre éléments : l’égalité de statut, l’égalité d’accès, l’égalité d’usage et l’égalité de qualité. Et toute l’importance de cette décision repose sur ces derniers puisque pour la première fois, les tribunaux reconnaissent que l’égalité comporte ces quatre éléments.

Le commissaire était satisfait des motifs de cette décision. L’égalité réelle est un principe fondamental en matière de droits linguistiques. Elle est la norme qui sert à interpréter tous les droits linguistiques prévus par la Loi. Il était également satisfait qu’à la suite de ce jugement, Air Canada devra lui soumettre un plan de travail qui envisage le remplacement systématique de la signalisation fautive, tel qu’il l’avait recommandé dans son rapport final d’enquête.

 
 
 

Chapitre 2 Les langues officielles dans la société canadienne

Introduction

La situation des langues officielles demeure un sujet d’actualité préoccupant pour les communautés de langue officielle.

En matière d’éducation, par exemple, tous s’entendent pour dire que l’apprentissage de la seconde langue officielle, particulièrement chez les jeunes, est non seulement souhaitable, mais, qui plus est, essentiel pour assurer l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne. Cependant, certains enjeux viennent entraver cet objectif louable. Que ce soit la pénurie d’enseignants de français, les difficultés liées à un processus de dénombrement des ayants droit pas toujours adéquat, le sous-financement de certaines procédures administratives d’éducation dans la langue de la minorité dans une certaine province ou le projet visant à abolir les commissions scolaires dans une autre, le commissaire demeure vigilant et à l’affût de tous les dossiers d’actualité sur la scène provinciale et territoriale afin d’en mesurer les répercussions sur les communautés de langue officielle.

Le commissaire continue également de surveiller le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 : Investir dans notre avenir afin de s’assurer qu’il répond aux besoins et aux enjeux soulevés par les communautés de langue officielle. Il attend notamment avec intérêt la signature des accords bilatéraux entre les provinces et territoires en matière d’enseignement dans la langue de la minorité et dans la langue seconde, et il continuera de surveiller de près les retombées sur les communautés d’expression française et anglaise.

Plus Moins

L'éducation

La pénurie d’enseignants en français langue seconde

En février 2019, le Commissariat a publié son étude intitulée Accéder aux possibilités : Étude sur les difficultés liées à l’offre et à la demande d’enseignants en français langue seconde au Canada. Cette étude est le fruit d’une collaboration entre le Commissariat et une équipe d’experts réunis par Canadian Parents for French. Lors du lancement de l’étude, le commissaire a diffusé des communiqués de presse à l’intention des provinces et territoires qui reflètent la réalité particulière de chacun de ces milieux.

Selon notre étude, les difficultés liées à l’offre et à la demande d’enseignants en français langue seconde persistent. Si l’on ne remédie pas à ces difficultés, il est peu probable que les taux globaux de bilinguisme français-anglais chez les non-francophones augmenteront réellement dans un avenir prévisible.

L’accès des Canadiens aux possibilités d’apprendre et de maîtriser leur seconde langue officielle est essentiel au succès continu de la Loi, à l’avancement de l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne ainsi qu’à la promotion d’une fonction publique bilingue qui peut travailler et servir les Canadiens dans ces deux langues.

Les jeunes, qui ont assisté à la conférence du 22 novembre sur l’avenir de la dualité linguistique, ont d’ailleurs unanimement réclamé ce droit à l’éducation de qualité dans leur seconde langue officielle. Ils ont également réclamé davantage d’occasions d’utiliser leur première ou seconde langue officielle pour ne pas perdre leurs compétences.

Afin d’aider à relever ces défis, il est primordial que les provinces et territoires investissent dans des programmes de qualité à l’échelle du pays pour permettre aux étudiants de progresser aussi loin qu’ils le désirent dans l’apprentissage de leur langue seconde du primaire au postsecondaire. L’étude contient les recommandations formulées par le commissaire à l’intention de la ministre responsable des langues officielles, notamment de mettre sur pied une table nationale de consultation sur le français langue seconde avec les partenaires provinciaux et territoriaux, ainsi qu’une stratégie nationale à long terme pour le recrutement et le maintien en poste des enseignants en français langue seconde. Il a également réclamé l’affectation opportune et efficace des fonds prévus dans le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023.

Le commissaire tient à souligner les efforts déployés par de nombreux administrateurs, enseignants et employés de soutien pour appuyer l’éducation en français langue seconde. Il se dit encouragé par l’enthousiasme des Canadiens quant à l’apprentissage d’une seconde langue officielle, comme en témoigne la demande croissante pour des programmes de français langue seconde, y compris des programmes d’immersion, dont la capacité a augmenté de près de 50 % entre 2006 et 2016.

 

Les enjeux pour la communauté d’expression anglaise du Québec

En 2019-2020, plusieurs enjeux ont eu une incidence sur la communauté d’expression anglaise du Québec, notamment dans le domaine de l’éducation.

Parmi les dossiers qui retiennent l’attention du commissaire, notons l’adoption du projet de loi 40, qui abolit les commissions scolaires au Québec pour les remplacer par des « centres de services ». Le projet de loi a été adopté sans que les problèmes soulevés par la communauté d’expression anglaise aient été résolus; il s’agit d’un fait important, étant donné que les commissions scolaires sont les seules entités gouvernementales gérées par la communauté.

Le commissaire demeure également préoccupé par les conséquences liées à l’absence de signature, par le Québec, du nouveau protocole d’entente relatif à l’enseignement dans la langue de la minorité et à l’enseignement de la langue seconde. Il estime que le principe de transparence est tout aussi important à l’égard de la communauté d’expression anglaise du Québec qu’à l’égard des communautés d’expression française ailleurs au pays.

Le dénombrement des ayants droit dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire

Les ayants droit sont des parents qui ont le droit, en vertu de l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, de faire instruire leurs enfants dans la langue officielle de la minorité linguistique de leur province ou territoire. La mise en œuvre de ces droits dépend de la présence d’un nombre suffisant d’enfants qui ont droit à l’instruction dans la langue officielle de la minorité linguistique dans une région donnée.

En conséquence, le dénombrement efficace et représentatif de l’ensemble des ayants droit est essentiel pour que les communautés de langue officielle puissent obtenir l’éducation dans la langue de la minorité. Or, les communautés font présentement face à une importante problématique : l’insuffisance des données relativement au dénombrement des ayants droit, qui risque d’avoir une incidence sur la qualité de l’éducation dans la langue officielle de la minorité linguistique. L’outil principal utilisé pour établir la demande en matière d’éducation dans la langue officielle de la minorité linguistique dans les régions données est le recensement de Statistique Canada.

Le dénombrement étant essentiel à l’exercice du droit à l’éducation, celui-ci entraîne son lot de frustration et de mécontentement à l’échelle du pays. Les communautés dans certaines provinces et certains territoires revendiquent un assouplissement des règles d’admission pour les immigrants ainsi qu’une simplification du processus en général. D’autres estiment que Statistique Canada ne fournit pas des données de qualité égale aux conseils scolaires francophones et anglophones, ce qui se traduit par le sous-dénombrement des ayants droit. Enfin, d’autres sont plus optimistes par rapport aux changements potentiels qui pourraient être mis en application par Statistique Canada lors du prochain recensement; elles espèrent que ces changements entraîneront une incidence importante sur leurs demandes pour la construction de nouvelles écoles.

 

Le combat pour l’éducation en français en Colombie-Britannique finalement devant la Cour suprême du Canada

En septembre 2019, le commissaire est intervenu devant la Cour suprême du Canada dans un recours judiciaire opposant le Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique et la Fédération des parents francophones de la Colombie-Britannique à la province de la Colombie-Britannique.

L’affaire porte notamment sur le sous-financement allégué de l’éducation de langue française dans la province. Le commissaire est intervenu, à cette plus haute instance, sur deux grandes questions en litige : 1) l’application du principe de l’égalité réelle qui doit sous-tendre toute analyse de droits linguistiques, dont celle prévue à l’article 23 de la Charte quant au droit à l’instruction dans la langue de la minorité, et 2) les critères devant guider la Cour dans l’analyse de l’objectif urgent et réel pour justifier une atteinte à l’article 23.

La Cour doit statuer sur plusieurs questions, dont la détermination du principe directeur qui doit guider l’analyse du droit à l’instruction dans la langue de la minorité. Elle doit aussi établir si la saine répartition de ressources gouvernementales limitées, fonction courante et élémentaire de toute forme de gouvernement, est en soi un objectif permettant à la province de justifier une atteinte au droit constitutionnel enchâssé à l’article 23 de la Charte.

Au moment de produire le présent rapport annuel, la Cour suprême du Canada n’avait toujours pas rendu sa décision, qui pourrait avoir une incidence importante sur l’interprétation des droits linguistiques, mais également sur les communautés de langue officielle.

Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023

Travail de surveillance du Commissariat

Le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 prévoit un investissement total de 2,7 milliards de dollars sur cinq ans destiné à l’appui et à la promotion des langues officielles. Le commissaire suit de près la mise en œuvre du Plan d’action afin de s’assurer que les initiatives financées mènent à des résultats tangibles pour les communautés de langue officielle. Il s’intéresse particulièrement aux nouveaux programmes mis sur pied par le gouvernement fédéral grâce à un investissement supplémentaire de près de 500 millions de dollars sur cinq ans. Parmi les nouvelles mesures proposées dans ce Plan d’action, mentionnons un fonds spécial pour les communautés d’expression anglaise du Québec, l’élargissement de la programmation en promotion de la santé en petite enfance ainsi que le rétablissement du financement de base pour les organismes œuvrant dans le domaine de l’accès à la justice.

La mise en œuvre des nouveaux programmes progresse bien. L'approche du "par et pour", par laquelle les communautés de langue officielle sont appelées à fournir certains programmes ou services, est intégrée à la conception de ces derniers, dont plusieurs sont gérés par des organismes communautaires. Le commissaire salue les efforts déployés par les institutions fédérales et les organismes communautaires quant au codéveloppement des programmes et reconnaît que ce type d’approche représente un effort de longue haleine. Il est primordial que cette collaboration soit maintenue afin d’assurer la mise en œuvre efficace des programmes. Dans son travail de surveillance, le Commissariat se penchera également sur les mesures de reddition de comptes. Le commissaire s’attend à ce que le gouvernement fasse preuve de transparence à cet égard. Les mécanismes de reddition de comptes, tout comme la consultation des communautés de langue officielle, représentent d’ailleurs des enjeux primordiaux en ce qui a trait au renouvellement des ententes en éducation qui seront signées avec les provinces et territoires.

Protocole d’entente relatif à l’enseignement dans la langue de la minorité et à l’enseignement de la langue seconde

Le 4 septembre 2019, le gouvernement fédéral a annoncé qu’il s’était entendu avec les gouvernements provinciaux et territoriaux, à l’exception du Québec, sur le texte d’un nouveau protocole d’entente relatif à l’enseignement dans la langue de la minorité et à l’enseignement de la langue seconde. Ce protocole d’entente contient certaines mesures de redevabilité de la part des provinces et des territoires, tel que le commissaire le réclamait dans son rapport annuel 2018-2019.

  • La Fédération nationale des conseils scolaires francophones a accueilli favorablement l’entente, car elle est accompagnée de la première hausse du financement en 10 ans pour l’éducation en langue française.
  • La communauté d’expression anglaise du Québec a exprimé des réserves puisque le gouvernement du Québec n’a pas adhéré au protocole, qui comprend des clauses de reddition de comptes. La communauté aimerait qu’il y ait plus de transparence quant à l’allocation de ces fonds.

Dans le budget 2019, le gouvernement du Canada avait renouvelé sa contribution financière de 235,5 millions de dollars par année aux provinces et territoires, et ce, pour la période de 2019-2020 à 2022-2023. En juin 2019, il a annoncé l’octroi d’une enveloppe supplémentaire de 60 millions de dollars sur quatre ans pour appuyer l’éducation dans la langue de la minorité. Ce nouveau financement est toutefois conditionnel à des engagements de la part des provinces et territoires en matière de reddition de comptes et à une consultation des intervenants en éducation, y compris des conseils scolaires.

Ce protocole d’entente constitue un cadre pour l’ensemble des ententes bilatérales avec les provinces et territoires dans le domaine de l’éducation. Le gouvernement du Québec n’a pas adhéré au protocole, car il entend conserver la responsabilité exclusive dans ce domaine sur son territoire. Une entente bilatérale sera conclue afin que la province obtienne la part du financement fédéral qui lui revient. Le gouvernement du Québec souscrit aux principes généraux du protocole et compte poursuivre sa collaboration avec les autres gouvernements quant à l’échange d’information et de pratiques exemplaires.

Le commissaire salue les progrès accomplis quant à la signature de cette entente. Il tient également à souligner l’importance pour les provinces et territoires de bien investir ce financement qu’elles reçoivent du gouvernement fédéral dans des programmes d’éducation pour les communautés de langue officielle.

Immigration francophone : cibles en immigration

Malgré le fait qu’on ait pu observer certaines avancées, les cibles fixées pour les nouveaux arrivants d’expression française sont toujours loin d’être atteintes et plusieurs enjeux sur le continuum de l’immigration francophone persistent. L’immigration reste le facteur prépondérant du maintien du poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire dans l’ensemble du pays et dans les différentes régions.

 
 

Immigration francophone : suivi de l’enquête sur les tests linguistiques pour les nouveaux arrivants

Dans le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023, le gouvernement s’est engagé à travailler avec les organisations d’évaluation de la compétence linguistique pour accroître la disponibilité et réduire les coûts des tests de connaissance du français exigés aux fins d’immigration économique.

Le commissaire est d’avis que la qualité, la disponibilité et le coût des tests de compétence linguistique doivent être égaux pour tous, tant au Canada qu’à l’étranger.

Le Commissariat a terminé en novembre 2019 le suivi des recommandations formulées au terme de l’enquête menée en 2017 concernant les tests de compétence linguistique requis pour présenter une demande de résidence permanente au Canada, qui n’étaient ni fournis ni offerts de manière égale dans les deux langues officielles. Le commissaire est satisfait de voir qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a mis plusieurs mesures en œuvre depuis la réception du rapport final d’enquête, notamment en ce qui concerne l’épanouissement et le développement des communautés francophones en situation minoritaire.

Cependant, bien que des progrès aient été accomplis, le commissaire est préoccupé par le fait que deux ans après la production du rapport final d’enquête, la qualité des services de test de langue française n’est toujours pas égale à celle des services de test de langue anglaise : les écarts de coûts, la disponibilité géographique et le temps d’attente global sont toujours monnaie courante. Le commissaire continuera de surveiller étroitement ce dossier et il encourage l’institution à poursuivre activement ses efforts.

Appui fédéral aux médias communautaires

Le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 prévoit 14,5 millions de dollars en appui aux médias communautaires : un montant de 10 millions de dollars destiné aux projets de collaboration visant les médias communautaires et un montant de 4,5 millions de dollars destiné à la création de stages pour la prochaine génération de professionnels des médias communautaires.

Le soutien financier aux médias communautaires est un enjeu important pour la vitalité des communautés de langue officielle. Le Commissariat a effectué un suivi des recommandations d’enquête concernant des plaintes alléguant que les institutions fédérales ont davantage recours, depuis quelques années, à Internet pour diffuser leurs publicités et avis publics au détriment des médias traditionnels (journaux et radios) des communautés de langue officielle. Les institutions fédérales visées sont Services publics et Approvisionnement Canada et Patrimoine canadien.

Lors du suivi, Services publics et Approvisionnement Canada et Patrimoine canadien ont indiqué avoir pris des mesures positives à la suite du rapport final d’enquête. Services publics et Approvisionnement Canada a notamment continué d’offrir des formations et des conseils à la communauté de la publicité du gouvernement fédéral au sujet des obligations de l’institution prévues par la Loi. Patrimoine canadien a mis en œuvre plusieurs mesures, notamment le Fonds d’appui stratégique aux médias communautaires, doté d’une enveloppe de 10 millions de dollars sur 5 ans, et un programme de stage intégré au sein du programme Jeunesse Canada au travail, mesures qui avaient été annoncées dans le cadre du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023.

Les mesures adoptées sont certainement un pas dans la bonne direction. Cependant, le suivi a révélé qu’un désaccord persiste depuis l’enquête quant au degré de responsabilité de Services publics et Approvisionnement Canada en vue d’assurer le respect des obligations liées à la Loi pour les campagnes qu’elle doit approuver. Selon le commissaire, l’institution joue un rôle dans la gestion des campagnes publicitaires. Services publics et Approvisionnement Canada est plutôt d’avis que son rôle se limite à conseiller les institutions fédérales à ce sujet et à s’assurer que les francophones et les anglophones ont une chance égale d’accéder aux produits publicitaires préparés par les institutions fédérales.

Tant les institutions visées par l’enquête que les organismes centraux auraient dû réagir à cette situation, qui était manifestement connue de tous et qui pouvait nuire aux outils d’épanouissement des communautés de langue officielle et d’appui à leur développement que sont les journaux et les radios communautaires. En d’autres mots, tout le monde est responsable, mais personne ne l’est. Le commissaire est grandement préoccupé par les répercussions que cette orientation pourrait avoir sur les médias et sur les communautés de langue officielle.

Le commissaire invite Patrimoine canadien à continuer de faire preuve d’un leadership soutenu dans le dossier et incite Services publics et Approvisionnement Canada à entamer une réflexion sur les façons dont il peut appuyer davantage les médias de langue officielle minoritaire dans le cadre de ses responsabilités. Il en va de la survie même des médias des communautés de langue officielle, éléments cruciaux pour la vitalité de ces communautés.

Appui fédéral à l’alphabétisation dans les communautés de langue officielle

Le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 prévoit 7,5 millions de dollars pour financer une initiative d’alphabétisation et d’acquisition des compétences essentielles dans les communautés de langue officielle.

Le commissaire a constaté que l’alphabétisation est un enjeu pour les communautés de langue officielle. Le Commissariat a effectué un suivi des recommandations à la suite d’une enquête qui visait Emploi et Développement social Canada et qui portait sur la décision d’éliminer le financement de base en matière d’alphabétisation et de changer l’orientation des programmes d’alphabétisation. L’enquête, qui portait sur la partie VII de la Loi, a démontré qu’Emploi et Développement social Canada n’avait pas tenu compte des besoins des communautés de langue officielle lorsqu’elle a pris ces décisions.

En réponse aux recommandations, Emploi et Développement social Canada a mandaté des chercheurs spécialisés afin de mener une analyse des besoins et a élaboré une stratégie pluriannuelle. Celle-ci prévoit la création d’une organisation nationale propre aux communautés de langue officielle, laquelle sera responsable de coordonner l’attribution des fonds et d’établir une approche globale et à long terme pour l’alphabétisation et les compétences essentielles.

Les efforts déployés par Emploi et Développement social Canada dans ce dossier ont été reconnus par le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences lors d’un témoignage au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, en février 2018. Le Réseau a souligné l’écoute active de l’institution et a confirmé que l’exercice respecte l’approche des services offerts par et pour les communautés francophones. Le commissaire est satisfait du travail entrepris par Emploi et Développement social Canada et surveillera de près la mise en œuvre de la stratégie élaborée.

En attente d’une nouvelle enquête sur la vitalité des communautés de langue officielle

Afin que la Loi soit mise en œuvre, que l’efficacité du Plan d’action du gouvernement soit mesurable et que notre dualité linguistique soit un succès, les décideurs doivent avoir une compréhension approfondie et nuancée de la vitalité des communautés de langue officielle et des multiples facteurs qui transforment et reflètent cette vitalité.

L’absence d’engagement envers une nouvelle enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle dans le Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023, ainsi que l’engagement limité concernant le financement de la recherche en général, ont été une véritable source de préoccupation pour les chercheurs et les communautés de langue officielle. L’enquête sur la vitalité des minorités de langue officielle, dont la première et la plus récente a été menée en 2006, est un moyen crucial d’obtenir des données sur la situation des minorités francophones et anglophones dans des domaines tels que la vie familiale, l’éducation, la santé, la petite enfance et la jeunesse, et l’utilisation de la langue dans la sphère publique. Elle constitue également un outil important pour aider les institutions fédérales à élaborer des politiques et à mettre en œuvre des programmes.

Lettre

Le commissaire, tout comme ses prédécesseurs, a interpellé le gouvernement fédéral à plusieurs reprises pour l’inciter à s’engager dans une nouvelle enquête postcensitaire sur la vitalité des minorités de langue officielle. En août 2019, il a d’ailleurs écrit directement à la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie et au ministre de l’Innovation, des Sciences et du Développement économique afin de les encourager fortement à prendre un engagement clair pour mener une nouvelle enquête en 2021.

Le commissaire est satisfait de voir que cette priorité se retrouve finalement dans la lettre de mandat de la ministre du Développement économique et des Langues officielles et que les décideurs, les chercheurs, les analystes des politiques, les planificateurs et évaluateurs de programmes ainsi que les membres des communautés de langue officielle pourront bientôt se prévaloir de ces données critiques.

 
 
 

Chapitre 3 Les institutions fédérales et les langues officielles

Introduction

En sa qualité d’ombudsman, le commissaire reçoit et traite, chaque année, un certain nombre de plaintes de citoyens qui estiment avoir été lésés dans leurs droits. En 2019-2020, au moins 80 % des plaintes traitées ont mené à des résultats concrets pour les plaignants.

Si ce chiffre est encourageant, il est toujours possible de constater des problèmes de conformité. Dans le rapport annuel de 2019-2020, le commissaire a choisi de soulever des enjeux de conformité qui posent de réels problèmes de sécurité. Dans des situations d’urgence, il devient d’autant plus nécessaire que l’information transmise au public le soit dans les deux langues officielles.

Au chapitre du service au public, 2019-2020 a été marquée par la 43e élection générale. Le commissaire s’était préparé en conséquence grâce à une étroite collaboration avec Élections Canada ainsi qu’aux processus internes mis en place par l’institution et le Commissariat. Parmi les processus mis en place, notons un formulaire de plainte adapté à la situation particulière des élections, qui aura permis de résoudre rapidement un grand nombre de plaintes, voire en quelques heures.

En juin 2019, le commissaire a officiellement lancé un nouvel outil créé par le Commissariat, le Modèle de maturité des langues officielles. Un peu plus de 40 institutions fédérales ont été sélectionnées par le Commissariat pour participer à l’exercice d’examens diagnostiques du Modèle de maturité des langues officielles sur un cycle de trois ans. Cet outil permet aux institutions de dresser un portrait complet de leur maturité en ce qui a trait aux langues officielles et leur fournit une marche à suivre vers la pleine maturité.

La connaissance et la compréhension des droits et des obligations linguistiques demeure un enjeu pour le public et les institutions fédérales. Le Commissariat a dévoilé un nouvel outil en publiant une série de bulletins d’interprétation venant expliquer la Loi et son règlement d’application. Étant donné l’importance prise par le gouvernement ouvert, le commissaire a choisi de publier son premier bulletin sur ce sujet. Le commissaire est d’avis qu’un gouvernement réellement ouvert doit communiquer les documents dans les deux langues officielles afin de permettre aux membres du public de participer pleinement aux consultations en ligne, ou à d’autres activités, dans la langue officielle de leur choix.

Plus Moins

Hausse des plaintes

En 2019-2020, le commissaire a enregistré une hausse de 25 % des plaintes recevables par rapport à 2018-2019, soit un total de 1 361 plaintes. Près de la moitié des plaintes reçues en juillet ont été déposées par le public voyageur, alors que la majorité des plaintes reçues en octobre concernaient la période électorale. Le nombre de plaintes déposées en vertu de la partie IV de la Loi a connu une augmentation considérable, tout comme le nombre de plaintes déposées en vertu de l’article 91 de la Loi.

 

Sécurité et langues officielles

Pandémie de la COVID-19

Récemment, le monde entier a vécu une période exceptionnelle en raison de la pandémie de la COVID-19. Comme la majorité de la population, le commissaire est profondément inquiet de la situation et il tient à souligner les efforts incroyables qui ont été mis en place pour assurer la santé et la sécurité de tous les Canadiens.

La crise sanitaire qui a pris tout le monde par surprise a su tester la résilience des langues officielles au sein de nos institutions. Malheureusement, le bilan préliminaire est loin d’être satisfaisant, car trop souvent, les informations importantes sur cette crise ont été publiées dans une seule langue officielle. Cependant, il est d’autant plus crucial dans des conditions de crise que le gouvernement fédéral s’assure que l’ensemble de la population ait accès en tout temps aux renseignements essentiels dans la langue officielle de son choix, peu importe où les personnes se trouvent au pays.

La réponse à tout type de crise repose sur deux choses, soit la communication et la confiance :

  • Nos dirigeants doivent pouvoir communiquer clairement avec l’ensemble de la population dans les deux langues officielles afin de transmettre les informations qui sont essentielles pour assurer la santé et la sécurité des membres de cette dernière et leur permettre de se faire comprendre.
  • La population doit pouvoir faire confiance à ses dirigeants, et ce lien de confiance est étroitement lié à la langue. Il faut que la population puisse recevoir ces messages dans la langue officielle dans laquelle elle se sent à l’aise et dans laquelle elle est en mesure de comprendre l’ensemble des nuances linguistiques.

Le 20 mars 2020, le commissaire a écrit à l’ensemble des champions des langues officielles fédéraux pour leur rappeler l’importance de communiquer dans les deux langues officielles.

Le commissaire a reçu des plaintes liées aux communications du gouvernement fédéral durant la pandémie et analyse actuellement les faits. Il aura donc l’occasion de revenir sur tous ces enjeux dans les prochains mois.

Enquête au sujet du Système national d’alertes au public

Il existe au Canada des provinces qui s’assurent que les alertes d’urgence sont émises dans les deux langues officielles sur leur territoire respectif. Par exemple, le Québec a pris les mesures nécessaires pour émettre ces alertes dans les deux langues officielles. Il est aussi encourageant de noter, tel qu’il a été rapporté par les médias, l’intention de la force constabulaire de Terre-Neuve de travailler avec la province pour que les alertes d’urgence soient émises dans les deux langues officielles sur son territoire. Le commissaire exhorte les autres provinces et territoires à s’inspirer de leurs homologues et à émettre leurs alertes d’urgence en français et en anglais.

Le commissaire a reçu, en 2018 et en 2019, plus de 85 plaintes contre CBC/Radio-Canada, Sécurité publique Canada, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes et Environnement et Changement climatique Canada portant sur la langue des messages d’alertes d’urgence. L’enjeu soulevé dans l’enquête était que les messages d’alertes d’urgence étaient diffusés dans une seule langue officielle, ce qui met en danger le public qui ne comprend pas cette langue. L’enquête traitait des obligations linguistiques de ces institutions fédérales quant à la réglementation et à la gestion du Système national d’alertes au public, de la diffusion d’alertes sur ce système ainsi que de la transmission d’alertes par d’autres diffuseurs.

Le Système national d’alertes au public est une initiative fédérale-provinciale-territoriale à laquelle participent diverses entités publiques et privées. Ce système a été conçu pour permettre aux organisations responsables de la gestion des urgences des provinces et des territoires d’avertir rapidement le public des risques qui mettent leur vie en danger. En théorie, les messages d’alerte d’urgence sont émis par des autorités publiques et envoyés à d’autres entités qui sont chargées de la diffusion (p. ex., CBC/Radio-Canada).

Compte tenu du champ de compétence des provinces, la Loi n’impose pas d’obligation au Conseil de la radiodiffusion ou des télécommunications canadiennes et à Sécurité publique Canada en vue de contraindre les organisations de la gestion des urgences à diffuser leurs alertes dans les deux langues officielles. Toutefois, le commissaire est d’avis que le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a l’obligation de préciser ses règlements pour exiger que ces organismes diffusent toujours les alertes dans les deux langues officielles lorsqu’elles sont diffusées dans ces deux langues, sans égard à l’endroit où les diffuseurs se trouvent au Canada. Il a recommandé au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes de modifier, dans les six mois suivant la date du rapport final d’enquête (soit d’ici mai 2020), sa politique réglementaire de radiodiffusion afin qu’elle impose aux diffuseurs l’obligation de toujours diffuser les messages d’alerte d’urgence dans les deux langues officielles partout au Canada lorsque ces messages ont été transmis par ces organisations de la gestion des urgences dans les deux langues.

 
 

Service de protection parlementaire et la Gendarmerie royale du Canada : du chemin à faire sur la Colline du Parlement

Au cours des dernières années, le commissaire a reçu plusieurs plaintes contre le Service de protection parlementaire et la Gendarmerie royale du Canada concernant l’absence de service dans les deux langues officielles sur la Colline du Parlement. Trois suivis des recommandations, effectués en 2019 à la suite des rapports d’enquête déposés en 2017, ont permis de constater que ces deux institutions n’ont pas pleinement mis en œuvre les recommandations du commissaire.

Le commissaire accorde une grande importance à cet enjeu, car il concerne l’identité canadienne et la sécurité du public. Le Parlement du Canada est un lieu hautement symbolique pour les Canadiens. Il représente le symbole de notre démocratie par la présence de la Chambre des communes et du Sénat. La Constitution canadienne précise que le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada et prévoit l’universalité d’accès dans ces deux langues en ce qui a trait au Parlement. Mis à part cet aspect symbolique, il est tout de même impensable qu’à 10 mètres de l’endroit où la Loi a été votée, les services en français ne soient pas garantis lorsqu’on s’adresse aux agents de sécurité. Lors de situations d’urgence, la sécurité et la vie des parlementaires, des employés et de tout visiteur sur la Colline ne doivent pas dépendre de leur capacité à comprendre la langue utilisée par les agents de sécurité.

Le commissaire surveillera la situation afin de veiller à ce que les droits du public au regard des langues officielles soient respectés en tout temps sur la Colline.

Service correctionnel Canada : trop de recommandations non mises en œuvre

En avril 2019, le Commissariat a présenté au Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, à sa demande, des données sur la mise en œuvre des recommandations formulées par le commissaire. Les données fournies démontraient que Service correctionnel Canada figurait au premier rang des institutions fédérales qui n’avaient pas mis en œuvre certaines des recommandations, selon les suivis effectués en 2018-2019 (avec 10 recommandations non mises en œuvre).

Une différence sur le plan de l’interprétation de la Loi, en ce qui a trait à la compétence linguistique requise de la part du personnel, explique en partie le fait que les recommandations n’aient pas été mises en œuvre. Selon le commissaire, le manque de capacité bilingue des agents correctionnels dans quelques établissements constitue un enjeu systémique et demeure un obstacle à la pleine conformité de Service correctionnel Canada. De plus, les détenus ne peuvent pas toujours se prévaloir des services essentiels touchant à leur santé, leur sécurité et leur bien-être dans la langue officielle de leur choix. Le commissaire est conscient que l’institution fait face à des défis de recrutement. Il appelle néanmoins l’institution à poursuivre ses efforts continus et à prendre des mesures concrètes pour augmenter sa capacité bilingue.

Agence des services frontaliers du Canada et Administration canadienne de la sûreté du transport aérien : toujours des enjeux

En 2019-2020, le commissaire a terminé deux suivis de vérification sur les services offerts par deux institutions offrant des services importants aux voyageurs : l’Agence des services frontaliers du Canada et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. Ces deux institutions offrent des services au public et assurent leur sécurité. La capacité bilingue actuelle des deux institutions ne leur permet pas d’avoir un nombre suffisant d’agents et de surintendants bilingues pour offrir un service de qualité égale dans les deux langues officielles aux différents points d’entrée désignés bilingues, dans le cas de l’Agence des services frontaliers du Canada, et aux points de contrôle dans les aéroports désignés bilingues, dans le cas de l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien.

Les problèmes de recrutement demeurent un enjeu majeur pour la prestation des services dans les deux langues officielles. L’Agence des services frontaliers du Canada et l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien disent avoir pris des mesures en vue d’augmenter la capacité bilingue de leur effectif. Cependant, les résultats liés aux mesures prises se font toujours attendre. Les données sur le nombre d’agents bilingues obtenues dans le cadre des suivis demeurent similaires ou démontrent très peu de progrès comparativement aux informations fournies lors des vérifications, entre mars et juillet 2014, pour l’Agence des services frontaliers du Canada, et entre décembre 2015 et mars 2016, pour l’Administration canadienne de la sûreté du transport aérien. En ce qui concerne les mécanismes visant à évaluer la prestation des services bilingues, les deux institutions fédérales n’ont pas, dans certains cas, de mécanismes d’évaluation en place, ou ceux en place ne permettent pas de surveiller de façon adéquate la prestation des services dans les deux langues officielles.

Les deux suivis ont également démontré que les deux institutions fédérales font face à des défis communs en ce qui concerne leurs liens avec les communautés de langue officielle et la prise en compte de leurs besoins dans le cadre de la prestation des services. Bien que des mécanismes de consultation soient en place, l’information dégagée sur les besoins et les réalités des communautés n’est pas systématiquement prise en compte lors de la prestation des services.

En raison de leurs rôles importants en matière de sécurité et de protection du public, les deux institutions fédérales doivent faire preuve de créativité. Elles doivent pousser leur réflexion pour résoudre les défis et enjeux liés à la prestation des services dans les deux langues officielles afin d’améliorer la disponibilité et la qualité de leur service au public voyageur. Il appelle les deux institutions à poursuivre leurs efforts pour le recrutement de candidats bilingues et à s’assurer que le personnel bilingue est affecté de façon stratégique afin d’offrir un service de qualité égale en tout temps.

Service au public

Porter plainte au Commissariat donne des résultats concrets

Porter plainte donne des résultats concrets puisque dans 80 % des cas, les plaintes ont entraîné la mise en œuvre de mesures correctives de la part des institutions fédérales.

Que faire lorsque les institutions ne prennent pas de mesures? Ces situations précises sont souvent en lien avec des enjeux de conformité persistants, de longue date ou ayant une incidence importante sur la santé, la sécurité ou les droits des membres du public.

Lorsque les mesures recommandées ne sont pas mises en œuvre par les institutions, le commissaire dispose d’un ensemble de pouvoirs et il peut prendre toutes sortes de mesures appropriées selon les enjeux. Ces interventions peuvent prendre différentes formes, notamment des rencontres formelles ou informelles avec les responsables d’institutions, des études, des vérifications ou des suivis, jusqu’au dépôt de rapports spéciaux au Parlement (par exemple, le rapport spécial sur la conformité d’Air Canada de 2016). En dernier recours, le commissaire peut intervenir devant les tribunaux pour faire respecter les droits linguistiques du public. Le commissaire intervient notamment de manière systématique dans le cadre de tous les recours touchant le droit à l’éducation dans la langue officielle de la minorité linguistique.

Les interventions du Commissariat visent à amener le gouvernement et les institutions fédérales à assumer pleinement leurs responsabilités relativement à la mise en œuvre de la Loi. Une autre grande contribution en 2019-2020 est certainement le lancement du Modèle de maturité des langues officielles, un outil diagnostique permettant aux institutions fédérales d’obtenir un portrait complet de leur situation en matière de langues officielles.

Toutes ces formes d’interventions sont complémentaires. La capacité de manier ces différents outils fait du commissaire un véritable ombudsman au service du citoyen.

Élections Canada : collaboration

En 2019-2020, le personnel du Commissariat a travaillé activement sur un certain nombre d’activités visant à encourager Élections Canada à adopter des mesures durables en matière de langues officielles à chaque étape du processus électoral ainsi qu’à sensibiliser les Canadiens et les principaux intervenants à leur droit de voter dans la langue officielle de leur choix. Il est essentiel que les Canadiens comprennent que leur droit de vote est un droit fondamental et ils doivent se sentir libres et en confiance de l’exercer, dans la langue officielle de leur choix, renforçant ainsi leur sentiment d’appartenance et le fait d’être un citoyen important ayant une voix dans la démocratie du pays.

Le commissaire a constaté l’engagement d’Élections Canada à améliorer le service dans les deux langues officielles, ce qui constituait un progrès envers le respect des obligations de l’institution. Le commissaire reconnaît également les efforts de recrutement de travailleurs bilingues déployés par l’institution, notamment dans la région d’Edmonton, en Alberta, où une Foire des carrières à Élections Canada a été organisée, en collaboration avec l’organisme Accès-Emploi. Ces mesures constituent un pas dans la bonne direction.

Il convient toutefois de souligner qu’un facteur important continue de faire de l’ombre aux progrès réalisés. En effet, il subsiste une différence d’interprétation relativement à l’application de l’article 24 de la Loi entre le Commissariat et Élections Canada. Le commissaire soutient qu’Élections Canada est soumis à des obligations partout au pays, tandis qu’Élections Canada est d’avis qu’il est assujetti à ces obligations seulement dans les endroits à demande importante. Cette différence d’interprétation est importante, car elle a une incidence sur les différentes mesures prises par Élections Canada.

Le Commissariat poursuivra son dialogue continu avec Élections Canada dans le but de l’aider à trouver des pistes de solution à long terme pour régler les enjeux critiques persistants, comme l’a révélé le suivi de la vérification détaillé présenté dans la prochaine section. Comme Élections Canada terminera son premier exercice d’examen diagnostique dans le cadre du Modèle de maturité des langues officielles du Commissariat en 2020-2021, le commissaire s’attend à ce que l’institution soit en mesure de mieux cerner ses forces et ses faiblesses et de définir clairement la voie à suivre pour améliorer l’intégration des langues officielles dans ses processus décisionnels et opérationnels.

Élections Canada : suivi de la vérification

En 2015, le commissaire aux langues officielles Graham Fraser a publié un rapport de vérification contenant neuf recommandations pour appuyer Élections Canada dans le respect de ses obligations prévues par la Loi. En mai 2019, le commissaire Raymond Théberge publiait un rapport de suivi au sujet de la mise en œuvre de ces recommandations afin d’évaluer les mesures prises par Élections Canada, qui révélait que l’institution n’a que partiellement mis en œuvre les neuf recommandations formulées.

Dans le rapport de suivi de la vérification, le commissaire souligne une amélioration significative sur le plan des outils informatiques, laquelle permettra aux directeurs du scrutin d’être mieux équipés pour préparer un plan de recrutement et comprendre la composition linguistique de leur circonscription.

Toutefois, bien que l’institution ait réalisé certains progrès, il existe toujours des lacunes quant à l’obligation de faire l’offre active, ainsi qu’à la disponibilité et à la qualité des services dans les deux langues officielles. Entre autres, Élections Canada n’aborde que de manière partielle le cœur du problème lié à l’embauche et au recrutement des directeurs du scrutin, des agents de liaison locaux et des travailleurs et fonctionnaires électoraux bilingues. Ces lacunes ont une incidence sur l’exercice du droit de vote dans la langue officielle de choix. Une offre active sans prestation effective de service n’est pas suffisante, comme semblent indiquer les plaintes reçues lors de l’élection fédérale de 2019.

Nouveau questionnaire en ligne : expérience des électeurs

Le 1er octobre 2019, le Commissariat a mis en ligne un questionnaire visant à recueillir les commentaires des Canadiens sur leur expérience de vote dans la langue officielle de leur choix durant l’élection fédérale de 2019, ainsi qu’à sensibiliser les membres du public quant à ce droit. Le questionnaire visait aussi à obtenir un aperçu de leur expérience électorale dans le but de trouver d’autres moyens d’aider Élections Canada à respecter ses obligations linguistiques. Près de 1 000 répondants ont fourni des renseignements qui ont aidé le Commissariat à mieux comprendre l’expérience des Canadiens dans l’exercice de leur droit fondamental de voter dans la langue officielle de leur choix et, ainsi, à poursuivre sa collaboration avec Élections Canada. Bien que ces résultats ne soient pas une projection de l’ensemble de la population canadienne, les commentaires reçus de la part des répondants font croire que l’expérience de vote diffère grandement entre les personnes qui parlent la langue officielle de la majorité linguistique et celles qui parlent la langue officielle de la minorité linguistique; le niveau de satisfaction est notamment moins élevé pour les répondants qui s’identifiaient comme membres de la minorité francophone à l’extérieur du Québec.

 

Élections fédérales 2019 : cent vingt-trois plaintes reçues

Le commissaire a reçu 123 plaintes recevables dans le cadre des élections fédérales de 2019. Cela représente un nombre record de plaintes (près de cinq fois le nombre de plaintes reçues durant l’élection fédérale de 2015).

Force est de constater que tout n’est pas parfait selon les électeurs, qui ne sont pas toujours en mesure d’obtenir des services dans la langue officielle de leur choix au moment de voter. Plus de 80 % des plaintes reçues de la part des électeurs portaient sur le manque de service dans la langue officielle de leur choix, y compris l’absence d’offre active de service. Les 20 % restants portaient sur des questions telles que le service téléphonique, les communications (en ligne ou affiches) et la langue de formation des employés. Les plaignants provenaient de diverses régions de neuf provinces et deux territoires, mais un nombre important (près de 70 %) provenaient de l’Ontario, avec de plus fortes proportions dans l’Est de l’Ontario et dans la région du Grand Toronto.

 

Élections fédérales 2019 : des plaintes réglées rapidement

Grâce à l’engagement d’Élections Canada ainsi qu’aux processus internes mis en œuvre par l’institution et le Commissariat, notamment la mise en place d’un formulaire de plainte modifié, un grand nombre de plaintes concernant l’élection fédérale de 2019 ont été résolues rapidement à la satisfaction du plaignant et du Commissariat. Certaines ont même été réglées en quelques heures. En fait, pour la plupart des plaintes reçues lors du vote par anticipation et pour celles reçues le jour du scrutin, le traitement a été amorcé dans les heures suivant leur réception.

 

Services partagés Canada : toujours des boîtes vocales non bilingues

Dans son rapport annuel 2017-2018, le commissaire a soulevé la question des boîtes vocales de la fonction publique fédérale non bilingues. Cette question n’est cependant pas encore résolue.

En septembre 2017, le Commissariat a rencontré Services partagés Canada afin de discuter de la recommandation formulée dans le rapport final d’enquête de juin 2017. Services partagés Canada avait alors affirmé que les travaux avaient été achevés pour que les systèmes de messagerie vocale de la technologie de la voix sur le protocole Internet de la région de la capitale nationale soient offerts dans les deux langues officielles. L’institution s’était aussi engagée à fournir un plan d’action avant la fin de décembre 2017 pour que les systèmes de messagerie vocale des autres régions désignées bilingues aux fins de la langue de travail au Canada, ainsi que ceux du service cellulaire, soient offerts dans les deux langues officielles. Ce plan d’action n’a jamais été remis, malgré une échéance repoussée à 2018 en raison d’une restructuration à Services partagés Canada qui incluait le secteur responsable du projet.

Le commissaire est déçu du manque de réponse de l’institution, malgré les demandes de mise à jour du Commissariat en 2019 dans le cadre du suivi d’enquête. Le commissaire maintient ce qu’il a dit dans son rapport annuel 2017-2018 et dans le rapport final d’enquête de 2017, c’est-à-dire que Services partagés Canada doit agir rapidement afin de se conformer à ses obligations prescrites par la Loi. Pour ce faire, l’institution doit veiller à ce que les boîtes vocales du service cellulaire et des autres systèmes, qui sont présentement administrées pour le compte de l’institution par de tierces parties, soient modifiées pour permettre l’enregistrement de messages d’accueil dans les deux langues officielles et à ce que les directives automatisées soient offertes dans les deux langues officielles dans les régions désignées bilingues.

Bulletin d'interprétation sur le gouvernement ouvert

Le gouvernement ouvert est une culture de gouvernance selon laquelle le public doit pouvoir accéder aux documents et aux délibérations du gouvernement afin de favoriser la transparence, la responsabilisation et la mobilisation de ce dernier.

Le commissaire est d’avis que peu importe le type d’information mis à la disposition du public ou la méthode de communication utilisée, les droits du public aux termes de la partie IV de la Loi continuent de s’appliquer. Les membres du public sont donc en droit de s’attendre à ce que l’information et les données rendues disponibles par les institutions fédérales le soient dans les deux langues officielles du Canada.

Seules les communications dans les deux langues officielles permettent l’atteinte des objectifs du gouvernement ouvert. Effectivement, en communiquant en français et en anglais avec le public, le gouvernement est réellement transparent et renforce le principe de la démocratie puisqu’il permet la participation des deux groupes linguistiques du Canada.

Le bulletin d'interprétation du commissaire peut être consulté sur le site Web du Commissariat.

Langue de travail

Article 91 de la Loi : rapports trimestriels et analyse en cours

Tel que le commissaire le mentionnait dans son rapport annuel 2018-2019, le nombre de plaintes reçues et qui ont fait l’objet d’enquêtes depuis 2014, en vertu de l’article 91 de la Loi, indique qu’il existe un enjeu systémique relié aux exigences linguistiques des postes dans la fonction publique fédérale. Le Commissariat effectue présentement une analyse approfondie de cet enjeu.

Parallèlement à cette question, depuis le mois d’avril 2019, le commissaire a entrepris d’envoyer un rapport trimestriel faisant état des plaintes au regard de l’article 91 au président du Conseil du Trésor afin d’offrir une mise à jour sur l’ampleur et la portée de cet enjeu systémique.

Analyse du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux

En examinant les résultats obtenus dans le cadre du Sondage auprès des fonctionnaires fédéraux 2019 selon la première langue officielle des répondants, il est possible de constater un écart considérable entre le taux de satisfaction des répondants de langue française et celui des répondants de langue anglaise en ce qui a trait aux questions sur l’utilisation des langues officielles en milieu de travail.

Les résultats obtenus dans le cadre du sondage ont également montré que pour ce qui est de la liberté que ressentent les employés à rédiger des documents dans la langue officielle de leur choix, l’écart entre les deux groupes linguistiques à l’échelle de la fonction publique s’est finalement atténué pour passer de 26 % à 22 %, alors que cet écart était resté stable de 2008 à 2017. Cette diminution de l’écart vient mettre fin à une stagnation de plus de 10 ans. Cette amélioration constitue une bonne nouvelle et il est à souhaiter que l’écart continue de s’estomper entre les deux groupes linguistiques.

Pour ce qui est de la liberté de s’exprimer dans la langue officielle de son choix lors des réunions, l’écart entre les deux groupes linguistiques demeure à 17 % depuis 2014. Des efforts considérables devront être déployés de la part de l’ensemble des gestionnaires à cet égard, soit les gestionnaires qui gèrent des équipes bilingues, ceux qui valorisent les deux langues officielles en milieu de travail et ceux qui souhaitent promouvoir le français et l’anglais au sein de la fonction publique en vue de respecter les droits linguistiques et les besoins de perfectionnement professionnel des employés.

Le sondage de 2019 présentait deux nouvelles questions sur les langues officielles. La première question permettait précisément de vérifier si les cadres supérieurs de l’institution fédérale utilisent les deux langues officielles dans leurs interactions avec les employés, ce à quoi 75 % des répondants de langue française et 71 % de ceux de langue anglaise ont répondu par l’affirmative. L’autre question permettait d’examiner la mesure dans laquelle un manque d’accès à la formation linguistique dans la seconde langue officielle avait nui à la progression de carrière du répondant au cours des 12 derniers mois. Pour 8 % des répondants de langue française et pour 13 % de ceux de langue anglaise, cela avait été le cas.

Les nouveaux outils du commissaire

Modèle de maturité des langues officielles

Le Modèle de maturité des langues officielles est un outil diagnostique permettant aux institutions fédérales qui l’utilisent de dresser un portrait complet de leur situation en ce qui a trait aux langues officielles (politiques, lignes directrices, procédures, pratiques). De plus, le Modèle de maturité va encore plus loin en donnant exactement la marche à suivre vers l’amélioration continue, les exigences étant bien décrites pour chacun des niveaux des 28 indicateurs.

Le commissaire est très fier d’avoir dévoilé ce nouvel outil diagnostique qui traduit les principes et obligations de la Loi en un langage organisationnel clair et pertinent pour tous les secteurs de l’institution. Le Modèle de maturité aide les institutions fédérales à avoir un portrait juste et complet de leurs processus organisationnels et de la façon dont les langues officielles y sont intégrées. En offrant non seulement le diagnostic, mais aussi une marche à suivre vers l’amélioration continue, le Modèle de maturité des langues officielles aide les institutions fédérales à bien définir ce sur quoi cibler leurs efforts.

 
Modèle de maturité des langues officielles : la première année

Le commissaire félicite les institutions fédérales qui ont participé à la première année de mise en œuvre du Modèle de maturité des langues officielles et reconnaît l’effort qu’elles ont consacré à cet exercice. Ces 12 institutions fédérales ont été en mesure de soumettre leur autodiagnostic pour permettre au Commissariat d’en faire la validation selon le calendrier de mise en œuvre établi. Elles auront maintenant deux ans pour mettre en œuvre leur plan d’action et, au cours des prochaines années, elles devront refaire leur autodiagnostic, permettant ainsi au Commissariat de suivre l’évolution des progrès accomplis. De façon générale, les institutions fédérales participantes ont aimé l’exercice et reconnaissent ses bienfaits, comme en font foi les témoignages que nous avons recueillis.

Le deuxième exercice d’examens diagnostiques, qui devait commencer en mai 2020, a été reporté d’une année en raison de la situation liée à la crise de la COVID-19.

Les bulletins d’interprétation

En 2019-2020, le commissaire a décidé de publier une série de bulletins qui expliquent l’interprétation générale du Commissariat concernant certains concepts et articles de la Loi. Ils visent à informer les personnes qui veulent déposer une plainte au Commissariat, les agents des institutions fédérales qui doivent appliquer la Loi et, plus généralement, tout membre du public voulant connaître l’interprétation du commissaire sur un sujet en particulier.

Ces bulletins sont rendus disponibles à titre d’information seulement et ne constituent pas des avis juridiques. Pour des situations particulières, toute personne peut communiquer directement avec le Commissariat ou porter plainte auprès du commissaire.

Des bulletins d’interprétation sur les sujets suivants ont déjà été publiés : le gouvernement ouvert, l’égalité réelle, l’offre active, les critères pour la recevabilité des plaintes, les exigences linguistiques des postes, les tiers qui agissent au nom des institutions fédérales, les communications de masse et les médias, le déroulement d’une enquête pour représailles, la protection des plaignants et les critères en matière d’emploi au sein des institutions fédérales.

 
 
 

Chapitre 4 Le Commissariat en 50 ans

Statistiques du Commissariat

Total : 66 936 56 818

Graphique 1 Total des plaintes déposées par total des plaintes recevables

Note 3 Les données regroupées concernant les plaintes pour 1973 et 1974 sont présentées sous 1974, car la source – le rapport annuel 1973-1974 du commissaire aux langues officielles - couvre à la fois l’exercice financier 1973-1974 et les neuf premiers mois de l’exercice financier 1974-1975 (c’est-à-dire du 1er avril 1973 au 31 décembre 1974).

Version texte : Graphique 1 - Total des plaintes déposées par rapport aux plaintes recevables
Année Total des plaintes déposées Total des plaintes recevables
1970 181 105
1971 745 610
1972 943 834
1973-1974 1 655 1 441
1975 906 761
1976 924 773
1977 1 160 947
1978 1 092 966
1979 1 243 1 118
1980 1 673 1 534
1981 1 696 1 554
1982 1 337 1 221
1983 1 209 1 077
1984 1 421 1 284
1985 1 080 1 025
1986 3 847 3 556
1987 2 360 2 185
1988 2 189 2 026
1989 2 743 2 554
1990 2 650 2 552
1991 1 731 1 301
1992 1 718 1 393
1993 1 619 1 242
1994 1 542 1 139
1995 1 554 1 271
1996 1 723 1 371
1997 1 762 1 367
1998 1 629 1 310
1999 1 872 1 478
2000 1 320 1 049
2001 1 222 935
2002 1 330 1 021
2003 1 031 761
2004 1 151 847
2005 939 694
2006 999 774
2007 884 634
2008 785 606
2009 1 729 1 477
2010 1 116 981
2011 643 518
2012 504 415
2013 575 476
2014 667 550
2015 900 725
2016 1 156 1 018
2017 1 006 894
2018 1 216 1 087
2019 1 559 1 361
Total 66 936 56 818
 
Plaintes reçues
Les plaintes reçues sont toutes les plaintes envoyées au Commissariat.
Plaintes recevables
Les plaintes sont jugées recevables si elles répondent aux critères énumérés à l’article 58(1) de la Loi, qui les définit comme suit :
« toute plainte reçue — sur un acte ou une omission — et faisant état, dans l’administration d’une institution fédérale, d’un cas précis de non-reconnaissance du statut d’une langue officielle, de manquement à une loi ou un règlement fédéraux sur le statut ou l’usage des deux langues officielles ou encore à l’esprit de la présente loi et à l’intention du législateur ».
Plus Moins

Total : 358

Graphique 2 Publications

Version texte : Graphique 2 - Publications
Année Nombre de publications
1970 2
1971 1
1972 2
1973 4
1974 8
1975 7
1976 5
1977 6
1978 3
1979 11
1980 9
1981 3
1982 4
1983 2
1984 6
1985 4
1986 6
1987 6
1988 7
1989 9
1990 5
1991 12
1992 8
1993 5
1994 9
1995 5
1996 7
1997 3
1998 5
1999 7
2000 9
2001 14
2002 8
2003 5
2004 13
2005 6
2006 9
2007 8
2008 9
2009 4
2010 19
2011 15
2012 11
2013 14
2014 10
2015 5
2016 4
2017 6
2018 9
2019 9
Total 358
 
Publications
Les publications comprennent le rapport annuel et diverses études dans le but d’œuvrer à la sensibilisation aux langues officielles du Canada et à leur promotion, de protéger les droits linguistiques, de faire la promotion de la dualité linguistique et d’appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire au moyen de la recherche. Les publications comprennent également des bulletins que le Commissariat a publié au fil des ans, des documents informatifs sur la dualité linguistique et des bulletins d’interprétation sur la Loi.
 

Total : 441

Graphique 3 Vérifications et rapports spéciaux

Version texte : Graphique 3 - Vérifications et rapports spéciaux
Année Nombre de vérifications et rapports spéciaux
1970 6
1971 25
1972 21
1973 8
1974 8
1975 5
1976 5
1977 5
1978 18
1979 22
1980 17
1981 23
1982 27
1983 28
1984 13
1985 12
1986 14
1987 15
1988 15
1989 17
1990 14
1991 13
1992 10
1993 14
1994 0
1995 0
1996 4
1997 1
1998 2
1999 5
2000 9
2001 3
2002 8
2003 4
2004 4
2005 5
2006 7
2007 3
2008 3
2009 5
2010 4
2011 5
2012 1
2013 3
2014 3
2015 1
2016 3
2017 1
2018 2
2019 0
Total 441
 
Vérifications
Les vérifications effectuées par le Commissariat ont pour but de procéder à l’examen complet d’un volet précis des activités d’une institution fédérale en réponse à des problèmes systémiques ou afin d’aider l’institution à prévenir un problème systémique. Chaque vérification fait l’objet d’un suivi environ 24 mois après la publication du rapport de vérification.
Rapports spéciaux
Les rapports spéciaux traitent de questions urgentes ou importantes relevant de la compétence du commissaire et sont déposés au Parlement conformément à l’article 67(1) de la Loi.
 

343

 

0

 
Recommandations du rapport annuel
Les recommandations du rapport annuel sont les recommandations officielles formulées par le commissaire dans chacun de ses rapports annuels. Toutes les recommandations faites dans les différents rapports d’enquête et de vérification ne sont pas comptabilisées ici.

Total : 112

Graphique 4 Comparutions judiciaires

Version texte : Graphique 4 - Comparutions judiciaires
Année Nombre de comparutions judiciaires
1970 0
1971 0
1972 0
1973 0
1974 0
1975 0
1976 0
1977 0
1978 0
1979 0
1980 0
1981 0
1982 0
1983 0
1984 1
1985 0
1986 0
1987 1
1988 1
1989 1
1990 2
1991 2
1992 3
1993 5
1994 2
1995 5
1996 1
1997 4
1998 9
1999 14
2000 4
2001 7
2002 1
2003 4
2004 3
2005 8
2006 1
2007 2
2008 5
2009 1
2010 3
2011 1
2012 0
2013 1
2014 6
2015 1
2016 2
2017 2
2018 4
2019 5
Total 112
 
Comparutions judiciaires
Les comparutions judiciaires regroupent tous les recours auxquels le commissaire participe à titre de partie ou d’intervenant afin de contribuer à l’avancement des droits linguistiques. Ce chiffre exclut les révisions judiciaires des décisions du commissaire.
 

Total : 265

Graphique 5 Comparutions parlementaires

Version texte : Graphique 5 - Comparutions parlementaires
Année Nombre de comparutions parlementaires
1970 0
1971 1
1972 1
1973 4
1974 0
1975 1
1976 2
1977 2
1978 3
1979 0
1980 2
1981 12
1982 9
1983 13
1984 2
1985 10
1986 9
1987 23
1988 10
1989 5
1990 10
1991 10
1992 2
1993 3
1994 4
1995 5
1996 5
1997 2
1998 1
1999 2
2000 7
2001 2
2002 9
2003 3
2004 7
2005 11
2006 5
2007 8
2008 5
2009 9
2010 6
2011 2
2012 5
2013 10
2014 4
2015 2
2016 7
2017 4
2018 3
2019 3
Total 265
 
Comparutions parlementaires
Les comparutions parlementaires regroupent tous les témoignages du commissaire aux langues officielles devant les deux comités des deux chambres parlementaires ainsi que d’autres comités qui étudient des enjeux liés aux langues officielles.
 
 
 
 
 

Mot de la fin Au-delà des célébrations

L’année 2020 marque les 50 ans du Commissariat. La première Loi, adoptée en 1969, a établi l’exigence en vue de la création du poste de commissaire aux langues officielles, et Keith Spicer a été nommé premier commissaire au Canada en 1970.

Les propos de M. Spicer sont toujours actuels aujourd’hui, même si la Loi, elle, ne l’est plus. Au cours des entrevues que le commissaire a accordées récemment, il tenait essentiellement, 50 ans plus tard, le même discours. Afin que les jeunes d’aujourd’hui (nos dirigeants de demain) développent et maintiennent leurs compétences en seconde langue officielle, les provinces et les territoires doivent investir davantage dans des programmes d’enseignement de la langue seconde, des programmes d’immersion et des programmes d’échange de qualité, et elles doivent leur fournir davantage d’occasions d’utiliser leur seconde langue officielle à l’extérieur de la salle de classe. Ce souhait a d’ailleurs été exprimé haut et fort par les groupes de jeunes de tout horizon qui ont participé à la journée sur l’avenir de la dualité linguistique dans le cadre du sommet Officiellement 50 ans!, organisé par le Commissariat en novembre 2019. Les jeunes, véritables agents de changement au fil des décennies, ont toujours joué un rôle primordial pour le maintien et la promotion de la dualité linguistique. Leurs expériences peuvent être une source d’inspiration pour tous ceux qui, de nos jours, participent à la promotion des deux langues officielles du Canada. Plus que jamais, la voix des jeunes est instrumentale pour forger l’avenir de la dualité linguistique au Canada.

Il est par ailleurs important de souligner que la Loi actuelle est fondée sur le contexte, les aspirations et les espoirs des années 1960, et que le poids des 50 dernières années se fait de plus en plus sentir sur ses épaules. Bien sûr, beaucoup de choses ont été accomplies au cours du dernier demi-siècle, même si certains problèmes se sont révélés plus tenaces. En partie grâce aux progrès qui ont été accomplis, mais aussi parce que le Canada d’aujourd’hui n’est plus celui de l’époque, il faut revoir certains concepts de base avec des yeux actuels. Pour plusieurs, les concepts mêmes de francophones et d’anglophones et de dualité linguistique ne sont pas un cadre de référence auquel ils peuvent s’identifier. À l’instar d’autres intervenants, le Commissariat doit ajuster ses façons de faire pour se positionner face à ce nouveau contexte et ultimement, aux 50 prochaines années. Le commissaire attend avec impatience le dépôt du projet de loi qui viendra concrétiser une réforme en profondeur de la Loi.

La dualité linguistique est l’une des valeurs fondamentales du Canada. Son respect et son renforcement dépendent grandement de notre capacité à favoriser la promotion des deux langues officielles et le développement de communautés fortes et engagées. En investissant dans l’avenir, dans les jeunes, dans l’éducation et dans les communautés, nous assurons la pérennité et la vitalité des langues officielles au Canada. La dualité linguistique a triomphé à différents moments de l’histoire du Canada. Comme l’a dit José Rizal, un grand linguiste du XXe siècle : « La jeunesse est l’espoir de notre avenir. »

 
 
 

Recommandations

La Loi sur les langues officielles a été adoptée par le Parlement du Canada en 1969 dans le but de protéger la dualité linguistique du Canada et de favoriser la progression vers l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais au sein de la société canadienne. En adoptant la Loi sur les langues officielles, le Parlement a enjoint au gouvernement fédéral de collaborer avec ses homologues provinciaux et territoriaux en vue d’appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, d’offrir des services en français et en anglais, de respecter les garanties constitutionnelles sur les droits à l’instruction dans la langue officielle de la minorité linguistique et de faciliter l’apprentissage du français et de l’anglais pour tous. Aujourd’hui, la Loi sur les langues officielles vise dans son essence à créer un Canada uni autour d’un projet social protégeant les droits énoncés dans la Charte canadienne des droits et libertés.

Le présent rapport annuel constate qu’en 2020, il est encore difficile d’obtenir le respect des droits fondamentaux dans la langue officielle de son choix, tels que le droit de vote, le droit à la sécurité et le droit de recevoir des services du gouvernement fédéral. Le commissaire aux langues officielles reconnaît que la mise en place des conditions d’exercice de ces droits fondamentaux est complexe et fait intervenir tous les ordres de gouvernement. Il est toutefois d’avis que ces droits fondamentaux ne sont pas respectés pour trois raisons :

  • les institutions fédérales ne respectent pas la Loi sur les langues officielles;
  • la Loi sur les langues officielles actuelle est désuète et a besoin d’être modernisée;
  • le gouvernement ne fait pas suffisamment la promotion de la dualité linguistique.

Ainsi, le commissaire aux langues officielles a défini trois niveaux d’intervention à l’intention du gouvernement fédéral afin de remédier à la situation :

 
 

Raymond Théberge