Bâtir des ponts : perceptions et réalités à propos des communautés d’expression anglaise du Québec et leur relation avec le français au Québec et le bilinguisme au Canada

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    Résumé du rapport

    Contexte et objectifs

    Le Commissariat aux langues officielles (le Commissariat) a observé qu’au cours des dernières années, les communautés d’expression anglaise du Québec (CEAQ) se sont souvent retrouvées au cœur du discours et des débats publics dans la province. Des données tirées de sondages et du recensement révèlent qu’en général, les communautés anglophones de la province sont en grande partie bilingues et qu’elles valorisent la dualité linguistique du Canada, y compris la langue française. L’on ignore, toutefois, dans quelle mesure la population générale est consciente de ces faits à propos des CEAQ et le Commissariat souhaitait vérifier l’hypothèse selon laquelle des mythes problématiques persistent.

    Dans ce contexte, et compte tenu de la modernisation de la Loi sur les langues officielles par le gouvernement fédéral en 2023, qui reconnaît la nécessité de « favoriser l’existence d’un foyer francophone majoritaire dans un Québec où l’avenir du français est assuré », ce projet de rechercheNote de bas de page 1 est l’occasion de faire la lumière sur la relation que les communautés d’expression anglaise du Québec entretiennent avec la langue française dans la province et le bilinguisme officiel au Canada dans son ensemble. Ce projet permet aussi d’explorer la possibilité que les membres de la minorité anglophone du Québec soient considérés comme des bâtisseurs de ponts, ou même comme des alliés de la promotion du français au Canada, en vue de développer un discours plus constructif qui illustre clairement leurs contributions et, au bout du compte, vient déconstruire certaines perceptions erronées.

    Le projet de recherche visait à atteindre les principaux objectifs suivants :

    • Explorer la nature et l’ampleur de certains mythes et perceptions au sein de la majorité d’expression française et de la minorité d’expression anglaise au Québec concernant les CEAQ et leur relation avec la langue française dans la province et le bilinguisme au Canada, et trouver d’éventuelles solutions.
    • Orienter et actualiser la réflexion du Commissariat au sujet des CEAQ .
    • Mieux outiller le Commissariat pour l’aider à nuancer les messages et les communications portant sur les CEAQ .
    • Dans la mesure du possible, aider à orienter et à nuancer les points de vue de certains leaders d’opinion et de certaines populations cibles.

    Population ciblée

    Le groupe visé par ce projet de recherche était la population générale du Québec, âgée de 18 ans et plus, divisé en fonction de la langue officielle de préférence, soit le français (les francophones) et l’anglais (les anglophonesNote de bas de page 2), mais aussi selon le lieu de résidence, soit les régions de Montréal et de Gatineau, où la présence anglophone est plus importante, et le reste du Québec, où les personnes d’expression anglaise sont relativement moins nombreuses. La « langue officielle de préférence » correspondait à la langue choisie pour prendre part au projet de recherche.

    Méthodologie

    Pour répondre aux objectifs de la recherche, les services d’Environics ont été retenus pour mener les volets qualitatif et quantitatif de l’étude en collaboration avec le Commissariat.

    Collecte de données qualitatives

    Environics Research a mené, en décembre 2023, une série de six séances virtuelles de discussion, en collaboration avec l’équipe de recherche du Commissariat, dans le but d’explorer les perceptions des membres de la population québécoise par rapport à la communauté anglophone du Québec, à son bilinguisme et à son utilisation du français. Les séances de discussion se sont déroulées sur la plateforme Zoom. Deux séances ont été menées auprès de francophones de la région métropolitaine de Montréal et de la région de Gatineau, où la présence anglophone est plus importante (le 4 décembre), et deux autres séances ont été menées auprès de francophones à l’extérieur de ces deux régions, là où les anglophones sont moins présents (le 5 décembre). Enfin, les deux dernières séances ont été menées en anglais auprès d’anglophones, l’une auprès de résidents et résidentes du Grand Montréal et de la région de Gatineau, et l’autre auprès de personnes résidant ailleurs au Québec (le 6 décembre).

    Les 40 personnes recrutées étaient toutes âgées de 18 ans et plus et appartenaient à différents groupes d’âge, niveaux de scolarité et communautés ethniques. Les séances de discussion, de 90 minutes environ, regroupaient entre cinq et huit personnes (sur les huit recrutées pour chacun des groupes). En guise de remerciement, les participants se sont vu offrir la somme de 100 $ pour avoir pris part à la discussion.

    Limites : L’étude qualitative jette un regard sur la diversité des opinions présentes au sein d’une population, plutôt que sur la pondération de ces opinions, ce que mesurerait une étude quantitative. Les résultats d’une recherche de ce type doivent être considérés comme des indications, mais ne peuvent être extrapolés à l’ensemble de la population.

    Collecte de données quantitatives

    Environics a réalisé, du 11 au 28 janvier 2024, un sondage téléphonique à échantillon probabiliste aléatoire auprès de 1 005 adultes résidant au Québec en utilisant les techniques usuelles de composition aléatoire, en collaboration avec l’équipe de recherche du Commissariat. Le sondage avait pour but de déterminer la persistance des mythes présumés et d’explorer les pistes pour renforcer l’harmonie interculturelle. Un échantillon de cette taille donne des résultats présentant une marge d’erreur de 3,1 points de pourcentage, 19 fois sur 20. Cette marge d’erreur s’avère plus importante en ce qui concerne les sous-groupes de la population à l’étude. La répartition des entrevues est décrite ci-dessous.

    Répartition régionale Total Montréal/Gatineau Reste du Québec Français Anglais
    Nombre de sondages terminés 1 005 565 440 885 120
    Pourcentage de sondages terminés 100 % 56 % 44 % 88 % 12 %
    Marge d’erreur; IC à 95 % ± 3,1 ± 4,1 ± 4,6 ± 3,3 ± 8,9

    Valeur du contrat

    La valeur de ce contrat s’élève à 119 186,75 $ ( TVH incluse).

    À propos du rapport

    Le présent rapport comprend un résumé des principaux résultats des volets qualitatif et quantitatif de l’étude, précédé de renseignements obtenus d’une analyse, faite par l’équipe de recherche du Commissariat, des données du recensement et de sondages antérieurs, utilisées pour établir des mythes potentiels, et suivi d’analyses détaillées des données issues des groupes de discussion et du sondage pour explorer la nature et la persistance des mythes présumés.

    Notes d’analyse

    Dans le présent rapport, les tableaux présentent les résultats quantitatifs pour la totalité des répondants, ainsi qu’une ventilation par répondants d’expression française, ou francophones (c’est-à-dire ceux qui ont choisi de répondre au sondage en français) et répondants d’expression anglaise, ou anglophones (ceux qui ont choisi de répondre au sondage en anglais). On y utilise la langue du sondage plutôt que la langue maternelle, puisque certaines questions étaient formulées différemment selon la langue officielle choisie pour répondre au sondage.

    Dans le présent rapport, les résultats quantitatifs sont exprimés en pourcentage, à moins d’avis contraire. Il est possible que la somme des résultats ne soit pas égale à 100 % en raison de l’arrondissement des nombres ou de réponses multiples. Il est également possible que les résultats nets mentionnés dans le texte ne correspondent pas exactement aux résultats individuels figurant dans les tableaux en raison de l’arrondissement.

    Principaux résultats – survol

    Les résultats de la recherche viennent confirmer l’hypothèse selon laquelle certains mythes et certaines idées erronées visant les CEAQ persistent dans la population générale au Québec. Cependant, leur nature et leur ampleur ne sont pas telles qu’elles rendent toute amélioration impossible. Fait encourageant : les francophones et les anglophones du Québec semblent s’entendre beaucoup mieux sur le plan individuel que ce que laisse entendre le discours public. La compréhension du public pourrait particulièrement être améliorée à l’aide d’exemples constructifs de l’engagement des CEAQ envers la langue française, étayés par des données concrètes, et en particulier en encourageant des interactions en personne plus positives entre les membres de la majorité francophone et de la minorité anglophone du Québec, pour le compte de la dualité linguistique plus générale du Canada.

    Principaux résultats – recherche préliminaire

    • Selon les données disponibles du recensement de 2021, la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise peuvent parler français (71 % sont bilingues), et une majorité se sert du français au travail ou comme langue d’instruction à l’école, le parlent à la maison ou l’ont comme autre langue maternelle.
    • Selon des recherches sur l’opinion publique menées en 2021 et 2022, la plupart des anglophones du Québec consomment des produits culturels ou prennent part à des activités en français et appuient autant que les francophones les énoncés favorables à la dualité linguistique du Canada. À l’instar de la population québécoise, la population canadienne hors Québec est également favorable à la Loi sur les langues officielles.

    Principaux résultats – phase qualitative

    • Tant chez les francophones que chez les anglophones, les gens ont manifesté une réelle ouverture et de l’intérêt envers l’autre groupe. Cette opinion n’était toutefois pas partagée par tout le monde, et des voix plus pessimistes ont parfois pris le dessus dans les discussions.
    • Les opinions étaient variées au sein de chaque groupe et semblaient, en premier lieu, reposer sur les perspectives individuelles, puis sur les expériences directes des participants avec l’autre groupe (qu’elles soient positives, négatives ou neutres) et enfin sur les perceptions du discours public. Très peu de gens connaissaient directement les données statistiques confirmant (ou contredisant) leurs opinions.
    • À quelques exceptions près, les francophones avaient tendance à sous-estimer la capacité des anglophones du Québec à parler français, leur usage de la langue et leur intérêt à l’égard de la culture francophone. Plusieurs s’inquiétaient de l’avenir du français à long terme, tant au Québec qu’ailleurs au pays. Certains participants de Montréal et de Gatineau étaient particulièrement frustrés d’entendre autant parler anglais au quotidien. Ils étaient aussi sceptiques quant à l’appui à la Loi sur les langues officielles chez les anglophones d’ailleurs au Canada.
    • Chez les anglophones, les mesures récentes visant à restreindre l’usage de l’anglais au Québec ont été jugées inutiles et ont engendré un profond désenchantement. Plusieurs étaient frustrés d’être critiqués pour leur usage de l’anglais, même entre eux, et qu’on les fasse sentir comme s’ils n’avaient pas leur place, malgré leurs efforts pour parler français. La plupart des anglophones se sont dits heureux d’utiliser le français, mais ne voulaient pas se sentir obligés de le faire ou qu’on leur dise que leur maîtrise de la langue était insuffisante. Certains semblaient aussi sceptiques quant au soutien des membres de la population québécoise francophone à la Loi sur les langues officielles du Canada.
    • Malgré ces frustrations, l’on a observé, chez les deux groupes linguistiques, un intérêt manifeste et même un désir d’être compris, accepté ou même « aimé » par l’« autre ». Même certains participants et participants plus sceptiques ont mentionné avoir eux-mêmes eu des interactions positives, ce qui a nuancé leur point de vue.
    • Plusieurs francophones se sont dit encouragés par les statistiques démontrant l’intérêt des Québécois d’expression anglaise pour les produits culturels en français ou leur utilisation de la langue française, et ont laissé entendre qu’il serait particulièrement utile de voir plus d’anglophones de la province parler français dans des contextes non politiques, comme dans le domaine culturel et dans les médias. Certains ont avancé qu’une entité neutre sur le plan politique devrait diffuser des données sur l’utilisation du français par les anglophones du Québec. Les francophones qui entretenaient des opinions plus défavorables au sujet des membres de la population québécoise d’expression anglaise étaient, quant à eux, plus sceptiques à l’égard de ces statistiques.
    • Certains francophones étaient d’avis que les Québécois d’expression anglaise pouvaient, et devraient, agir comme des bâtisseurs de ponts, ou même des « alliés », en informant les anglophones d’ailleurs au pays au sujet du Québec et du bilinguisme. Les anglophones d’ailleurs au pays qui ont déménagé au Québec se sont montrés ouverts à cette idée, citant leurs propres expériences en exemple et se disant même fiers d’expliquer la situation du Québec à leurs amis et à leur famille dans leur province d’origine.

    Principaux résultats – phase quantitative

    A. Les interactions avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle

    • Parmi les membres de la population québécoise qui ont des interactions avec les locuteurs de l’autre langue ( n  = 909), la vaste majorité (87 %), soit 89 % des francophones et 81 % des anglophones, a qualifié ces interactions de positives. Le pourcentage est particulièrement élevé (94 %) chez ceux et celles qui interagissent très souvent avec l’autre groupe.
    • Toutefois, une importante majorité trouve problématique que les francophones et les anglophones, en tant que groupes, entretiennent de nombreuses idées erronées les uns à propos des autres. Cette opinion est partagée par les deux communautés linguistiques, 61 % des francophones et 67 % des anglophones se disant plutôt ou tout à fait de cet avis.

    B.  Les opinions à l’endroit des anglophones du Québec

    • Alors que les anglophones sont, en général, conscients de l’usage du français par la population d’expression anglaise, les francophones tendent à le sous-estimer. Une minorité importante des répondants d’expression française est néanmoins consciente de la mesure dans laquelle plusieurs anglophones de la province peuvent parler et parlent le français dans une sphère importante de leur vie.
    • Les anglophones sont deux fois plus susceptibles (58 %) que les francophones (29 %) de savoir que la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise peuvent soutenir une conversation en français.
    • Chez les francophones, une majorité (54 %) croit qu’il est faux que la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise utilisent régulièrement le français dans leur quotidien. Les membres de ce groupe sont répartis uniformément entre ceux qui estiment vrai et ceux qui estiment faux que la plupart des élèves du Québec de langue maternelle anglaise fréquentent des écoles francophones ou sont inscrits dans des programmes d’immersion en français (44 % croient que cet énoncé est vrai et 47 % le jugent faux). En revanche, de vastes majorités d’anglophones (plus de sept sur dix) croient, à juste titre, que chacun de ces énoncés était vrai.
    • Les anglophones sont beaucoup plus susceptibles que les francophones de savoir qu’il est faux de penser que la plupart des travailleurs et des travailleuses du Québec de langue maternelle anglaise travaillent uniquement dans cette langue (62 % contre 33 %). Ils et elles sont aussi plus nombreux à savoir qu’il est faux de dire qu’au Québec, la plupart des enfants nés d’un parent de langue maternelle française et d’un autre de langue maternelle anglaise finissent par adopter l’anglais comme leur langue maternelle, plutôt que le français (54 %, contre 35 % chez les francophones).
    • La plupart des francophones (56 %, contre 46 % chez les anglophones) croient qu’il est rare que les anglophones du Québec s’intéressent à la culture de langue française, et une majorité (73 %, contre 44 % chez les anglophones) juge aussi que le bilinguisme officiel du Canada est plus valorisé par les francophones que par les anglophones au Québec. La moitié des francophones du Québec (51 %, contre 35 % chez les anglophones) est d’avis que les anglophones de la province restent entre eux et n’interagissent pas beaucoup avec la communauté d’expression française.
    • Alors que la plupart des Québécois d’expression anglaise (64 %) sont conscients qu’une forte majorité de la population canadienne hors Québec appuie la Loi sur les langues officielles, l’avis des francophones sur la question est davantage partagé (44 % estiment que cet énoncé est vrai et 50 % le croient faux).

    C.  Regard vers l’avenir

    • Une grande majorité des gens convient que l’on pourrait améliorer un peu ou beaucoup les relations entre les deux communautés linguistiques de la province en mettant en valeur le bilinguisme des anglophones du Québec, par la diffusion de statistiques et d’histoires personnelles ainsi qu’une plus grande présence de porte-parole s’intéressant à la culture de langue française.
    • Toutefois, dans tous les groupes, la mesure ayant obtenu le plus grand appui, et de loin, consiste à favoriser plus d’interactions positives entre francophones et anglophones par l’intermédiaire d’activités sociales comme les programmes d’échange jeunesse, les clubs sociaux, la musique, le sport ou d’autres champs d’intérêt spécifiques.
    • Une majorité au sein des deux communautés linguistiques de la province (77 % chez les anglophones et 71 % chez les francophones) convient que les Québécois d’expression anglaise peuvent jouer un rôle important en servant de pont entre les francophones du Québec et les anglophones du reste du Canada.

    Énoncé de neutralité politique et coordonnées

    Par la présente, je certifie, en tant que cadre supérieur d’Environics, que les produits livrables sont entièrement conformes aux exigences du gouvernement du Canada en matière de neutralité politique, comme elles sont définies dans la Politique sur les communications et l’image de marque et la Directive sur la gestion des communications. Plus particulièrement, les produits livrables ne font aucune mention des intentions de vote électoral, des préférences quant aux partis politiques, des positions des partis ou de l’évaluation de la performance d’un parti politique ou de son chef.

    Derek Leebosh
    Vice-président, Affaires publiques, Environics Research Group

    Fournisseur : Environics Research Group

    Pour en savoir plus, veuillez communiquer avec le Commissariat aux langues officielles.

    I. Introduction

    Aperçu

    Au cours des dernières années, les communautés d’expression anglaise du Québec ( CEAQ ) se sont retrouvées au cœur du discours et des débats publics. Un certain nombre d’événements ont provoqué de fortes réactions et ont ravivé, chez la majorité francophone, des perceptions négatives au sujet de la minorité anglophone de la provinceNote de bas de page 3. Même si les données issues de certains sondages d’opinion publiqueNote de bas de page 4 et du dernier recensement indiquent que, dans l’ensemble, les CEAQ sont fortement bilingues et qu’elles valorisent la dualité linguistique, plusieurs indices laissent croire que des mythes persistent à leur sujet au sein de la population franco-québécoiseNote de bas de page 5. Ces constatations surviennent à un moment où les francophones s’inquiètent de l’avenir du français à long terme dans l’ensemble du Canada, y compris au Québec.

    À la suite de la modernisation de la Loi sur les langues officielles par le gouvernement fédéral en 2023, qui reconnaît la fragilité du français au Canada dans son ensemble, y compris au Québec, mais vient aussi réitérer les obligations envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire (y compris la minorité anglophone du Québec), il est important de faire la lumière sur la relation des CEAQ avec la langue française dans la province et le bilinguisme au Canada. Plus précisément, nous voyons ici une occasion d’explorer la possibilité que la minorité anglophone du Québec soit perçue comme des bâtisseurs de ponts, ou même comme des alliés de la promotion du français dans l’ensemble du Canada, en vue de développer un discours plus constructif qui reconnaît davantage les contributions des communautés d’expression anglaise et, au bout du compte, vient déconstruire certaines idées erronéesNote de bas de page 6.

    Cet enjeu a récemment commencé à être abordé par certains chercheurs, dont le Réseau de recherche sur les communautés québécoises d’expression anglaise (QUESCREN)Note de bas de page 7. La publication de l’enquête postcensitaire de Statistique Canada sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire, prévue vers la fin de 2024, pourrait aussi faire la lumière sur le sujet. Le Commissariat aux langues officielles (le Commissariat) a saisi l’occasion d’étudier un sujet d’intérêt pour ces communautés et de contribuer au débat de société plus large déjà en cours.

    Le Commissariat souhaitait explorer la façon dont plusieurs mythes et faits précis concernant les CEAQ sont perçus par les francophones et les anglophones de la province. Même si certains de ces mythes ont déjà eu une part de vérité, surtout avant les années 1960 et 1970, ils ne reflètent plus la réalité des CEAQ et leur adoption globale du bilinguisme au XXIe siècle.

    Le Commissariat a retenu les services d’Environics Research afin de mener, en collaboration avec sa propre équipe de recherche, ce projet de recherche quantitatif et qualitatif, dans le but d’atteindre les objectifs suivants :

    • Explorer la nature et l’ampleur de certains mythes et perceptions au sein de la majorité d’expression française et de la minorité d’expression anglaise au Québec concernant les CEAQ et leur relation avec la langue française dans la province et le bilinguisme au Canada, et trouver d’éventuelles solutions.
    • Orienter et actualiser la réflexion du Commissariat au sujet des CEAQ .
    • Mieux outiller le Commissariat pour l’aider à nuancer les messages et les communications au sujet des CEAQ .
    • Dans la mesure du possible, aider à orienter et à nuancer les points de vue de certains leaders d’opinion et de certaines populations cibles.

    Recherche préliminaire

    La première phase du projet consistait en une étude menée par le Commissariat dans le but de déterminer la véracité de mythes présumés à l’endroit des CEAQ . Ces mythes portaient sur les thèmes de l’égalité socioéconomique, de l’avenir du français (y compris la compréhension et l’usage de la langue et les compétences en français) et de la cohésion sociale (y compris les interactions avec l’« autre », l’intérêt à son endroit et les valeurs communes). L’équipe de recherche du Commissariat a fait appel, le cas échéant, aux données du dernier recensement ainsi qu’aux résultats de sondages antérieurs et à de la documentation secondaire. Elle a aussi vérifié l’information auprès de chercheurs de l’extérieur de l’organisation. Les perceptions et les attitudes des participants aux groupes de discussion et des répondants au sondage seraient ensuite évaluées en fonction de cette information.

    La recherche préliminaire a permis de démontrer les éléments suivants :

    • Les CEAQ ne sont pas nécessairement privilégiées sur le plan socioéconomique. Selon les données du recensement de 2021, les membres de la communauté québécoise d’expression anglaise présentent un taux de chômage plus élevé, gagnent un revenu médian inférieur et sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté que les francophones de la province. Un sondage réalisé en 2021, cependant, démontre qu’un francophone sur deux (48 %) croit que les anglophones du Québec sont privilégiés sur le plan socioéconomiqueNote de bas de page 8.
    • La plupart des anglophones du Québec peuvent comprendre le français. La vaste majorité des anglophones du Québec ayant répondu à un sondage réalisé en 2022 (92 %) ont indiqué avoir au moins une connaissance de base du français. Seulement 2 % d’entre eux ont admis ne pas du tout comprendre le françaisNote de bas de page 9.
    • La majorité de la population québécoise de langue maternelle anglaise peut parler français. Selon le recensement de 2021, 71 % des membres de la population québécoise ayant l’anglais comme une langue maternelle peuvent parler à la fois l’anglais et le français. Même s’ils ne représentent que 2 % de la population du Canada, ils comptent pour 9 % de l’ensemble de la population canadienne bilingue, et 27 % de cette même population ayant l’anglais comme une langue maternelleNote de bas de page 10.
    • La majorité de la population québécoise de langue maternelle anglaise utilise le français. Selon des calculs reposant sur les données du recensement de 2021, la plupart des membres de la population québécoise ayant l’anglais comme une langue maternelle utilisent régulièrement le français : ils le parlent à la maison, s’en servent au travail, l’utilisent comme langue d’instruction à l’école ou l’ont comme autre langue maternelle. (Les autres utilisations de la langue, par exemple entre amis, au collège ou à l’université, dans les magasins ou ailleurs dans la communauté ne sont pas prises en compte dans le recensementNote de bas de page 11.)
    • La majorité des travailleurs et des travailleuses du Québec de langue maternelle anglaise utilisent le français au travail. Selon le recensement de 2021, la plupart des travailleurs et des travailleuses du Québec ayant l’anglais comme une langue maternelle (65 %) utilisent régulièrement le français au travailNote de bas de page 12.
    • La majorité des élèves du Québec de langue maternelle anglaise utilisent le français à l’école. Selon des calculs reposant sur les données du recensement de 2021 et des données administratives, la plupart des enfants d’âge scolaire au Québec qui ont l’anglais comme une langue maternelle ont le français comme une langue d’instruction à l’école, c’est-à-dire une langue utilisée pour enseigner divers sujets, comme les sciences, l’histoire et la géographieNote de bas de page 13.
    • La plupart des membres de la population québécoise ayant à la fois le français et l’anglais comme langues maternelles utilisent le français à la maison. Selon les données du recensement de 2021, 87 % des gens au Québec ayant le français et l’anglais comme leurs langues maternelles parlent régulièrement français à la maisonNote de bas de page 14.
    • La plupart des enfants dans les ménages mixtes français-anglais au Québec ont le français comme une langue maternelle. Selon les données du recensement de 2021, dans les ménages du Québec comptant un couple de genre différent où un adulte a le français comme leur langue maternelle et l’autre l’anglais, la plupart des enfants (69 %) ont le français comme une langue maternelleNote de bas de page 15.
    • La plupart des anglophones du Québec interagissent régulièrement avec des francophones. Au cours d’un sondage mené en 2022, la majorité des répondants anglophones du Québec (77 %) ont dit interagir quotidiennement avec plusieurs francophones, y compris des amis, des voisins, des parents ou des collèguesNote de bas de page 9.
    • La plupart des anglophones du Québec interagissent avec la culture de langue française. D’après un sondage mené en 2022, la plupart des répondants anglophones du Québec (55 %) s’intéressent à des produits culturels en français, tel que des livres, de la musique, des films ou des émissions de télévision, et la majorité (58 %) avait assisté à des événements culturels et artistiques en français, comme des spectacles, des festivals ou des expositions, au cours de l’année précédenteNote de bas de page 9.
    • Les francophones comme les anglophones du Québec valorisent la dualité linguistique du Canada. Selon un sondage mené en 2022, au moins quatre répondants sur cinq, tant chez les francophones que chez les anglophones du Québec, étaient d’accord avec chacun des énoncés suivants :
      • Les droits linguistiques sont aussi importants que tout autre droit garanti par la Constitution du Canada.
      • L’apprentissage des deux langues officielles contribue à une meilleure compréhension entre les Canadiens.
      • Le gouvernement du Canada devrait continuer à investir dans des programmes d’échange afin d’encourager la compréhension entre les francophones et les anglophones du pays.
      • Tous les diplômés de l’enseignement secondaire devraient avoir une connaissance pratique de l’anglais et du français.
      • La dualité linguistique au Canada est pour vous une source d’enrichissement culturel.
      • [Il est important] que votre enfant ou les enfants de votre communauté aient la possibilité d’apprendre [le français/l’anglais] comme langue secondeNote de bas de page 9.
    • La plupart des membres de la population canadienne hors Québec appuient aussi la Loi sur les langues officielles du Canada, et plusieurs de ceux qui peuvent parler ou qui utilisent le français hors Québec ont l’anglais comme une langue maternelle. Selon un sondage mené en 2021, environ 85 % de la population canadienne hors Québec est favorable aux objectifs de la Loi sur les langues officielles. Les données disponibles du recensement de 2021 démontrent qu’environ la moitié des membres de la population canadienne hors Québec pouvant parler français (soit 2,8 millions de personnes) et le tiers de ceux qui utilisent régulièrement la langue (soit 1,9 million de personnes) ont l’anglais, mais pas le français, comme une langue maternelleNote de bas de page 16.

    II. Résultats détaillés – phase qualitative

    A. Observations préliminaires

    Au cours des six groupes de discussion virtuels, nous avons exploré les impressions générales à l’endroit des membres de la population québécoise d’expression anglaise, ainsi que la source de ces croyances et les perceptions des relations entre les communautés anglophones et francophones. Nous avons aussi abordé la prédominance de certains mythes ou de certaines idées erronées concernant les anglophones et évalué les réactions à des faits venant les contredire. Enfin, nous avons exploré des solutions potentielles visant à construire des ponts entre les deux communautés linguistiques du Québec et à favoriser leur rapprochement. Quelques questions concernaient également le contexte pancanadien plus vaste. Il convient de souligner qu’à moins d’indication contraire, nous désignerons, dans le présent rapport, les CEAQ comme des « anglophones » ou « Québécois d’expression anglaise », et la majorité d’expression française du Québec comme des « francophones ». Tout au long des discussions, les participants ont démontré qu’ils comprenaient clairement qui étaient les « anglophones » et les « francophones », et personne n’a remis en question l’utilisation de ces termes ou les distinctions établies dans les données présentées. Cependant, dans tous les groupes, l’on a souvent fait référence aux « Québécois » et « Québécoises » comme étant implicitement « francophones ».

    Il est important de noter que dans les séances en français, nous nous sommes penchés sur la perception des participants à l’endroit des anglophones du Québec et de leur attitude à l’égard de la langue française. En revanche, les séances en anglais étaient davantage axées sur la façon dont les anglophones du Québec ont l’impression d’être perçus par la majorité francophone.

    Les opinions étaient très variées au sein de chacun des groupes, allant de positives à plus neutres ou négatives. Les membres des deux communautés linguistiques se sont souvent exprimés avec passion et émotion.

    Les opinions semblaient d’abord basées sur les expériences personnelles avec l’autre communauté, qu’elles soient dans l’ensemble positives ou neutres, ou encore qu’elles soient plus négatives, par exemple dans les cas d’intimidation ou de rejet. Elles reposaient également sur ce qui était perçu dans le discours public ou les nouvelles, sur les médias sociaux ou encore chez les politiciens. Très peu de gens connaissaient directement les données statistiques confirmant ou contredisant leurs opinions.

    Plusieurs participants, tant chez les anglophones que chez les francophones, ont manifesté une réelle ouverture et de l’intérêt à l’endroit de l’autre groupe, même si des voix plus négatives dominaient parfois la discussion. Dans ce dernier cas, ceux et celles affichant des points de vue plus positifs ou optimistes semblaient parfois hésiter à les partager ou s’en excusaient.

    B. Les attitudes générales envers les anglophones du Québec

    Au début de chaque séance, les gens devaient partager leurs impressions générales des relations entre les francophones et anglophones du Québec, et des attitudes à l’endroit des Québécois d’expression anglaise.

    Points de vue des francophones

    Les personnes ayant pris part aux quatre séances en français ont été invitées à décrire la relation entre les communautés francophones et anglophones du Québec. Les premières impressions générales étaient une combinaison de commentaires positifs et négatifs. L’on était conscient des tensions actuelles concernant les enjeux linguistiques, mais certains avaient aussi l’impression que les relations s’étaient peut-être améliorées par rapport à ce qu’elles étaient dans le passé. En effet, l’on reconnaissait les tensions politiques qui ont eu lieu dans l’histoire, mais plusieurs personnes ont aussi relevé que, sur le plan individuel, les relations étaient habituellement plutôt cordiales. Lorsqu’il était question des tensions, plusieurs francophones en ont rejeté la faute sur les extrémistes des deux côtés, ou les attribuaient à une certaine résistance des anglophones à utiliser le français. Voici quelques exemples des impressions exprimées :

    « Les relations peuvent parfois être distantes et tendues, à cause de certaines tensions historiques et sociales qui existent entre les groupes linguistiques. »

    Personne francophone

    « Les relations laissent à désirer de mon point de vue, surtout du côté des anglophones. »

    Personne francophone

    « Je dirais que les relations sont souvent teintées d’incompréhensions, de rigidité, de manque d’ouverture d’esprit de part et d’autre. »

    Personne francophone

    « Je crois que les relations sont plutôt chaleureuses, mais réservées. »

    Personne francophone

    «Je pense que les relations sont meilleures qu’elles l’étaient il y a 50 ans. »

    Personne francophone

    « Ça dépend où. Les relations sont meilleures en ville, comme Montréal, que dans les régions rurales. »

    Personne francophone de Montréal

    « Les relations sont plutôt cordiales, mais dès que les francophones revendiquent un peu plus nos droits (par exemple, se faire servir en français dans les commerces), cela créé des tensions. »

    Personne francophone

    « Les relations sont généralement bonnes, il y a un respect. Mais il y a beaucoup d’extrémistes. »

    Personne francophone

    Lorsqu’on leur a demandé de préciser leurs réponses, les participants de Montréal et de Gatineau, où les communautés anglophones sont plus présentes, ont eu tendance à exprimer des opinions plus négatives envers les anglophones, tandis que ceux du reste du Québec avaient souvent des opinions plus neutres ou positives à leur endroit. Les membres de la population québécoise ayant été élevés à la fois en français et en anglais, ou ceux ayant des proches anglophones, avaient aussi des impressions plus positives.

    Les francophones du Québec avaient l’impression que certains anglophones ne déploient pas suffisamment d’efforts pour parler français. Cette impression semblait découler d’interactions personnelles négatives, surtout au centre-ville et dans l’ouest de Montréal et à Gatineau, notamment dans les commerces (avec des employés ou d’autres clients), lors de conversations en ligne et à partir d’expériences vécues durant l’enfance ou dans le milieu de travail. Il est intéressant de noter que l’Ouest-de-l’Île et Westmount ont souvent été cités en exemple, même par des personnes qui ne résidaient pas dans ces régions.

    « C’est toujours à nous de faire l’effort de parler anglais, lorsqu’on veut se faire servir en français alors qu’on est au Québec. Quand je voyage, je fais l’effort de parler la langue du pays. »

    Personne francophone

    Plusieurs francophones ont raconté des situations où ils et elles ont dû passer à l’anglais pour accommoder une personne anglophone. Bien que certains aient affirmé que ce geste partait d’une bonne intention et que les deux communautés devaient faire plus d’efforts, d’autres ont exprimé de la frustration, affirmant que la situation inverse, c’est-à-dire qu’une personne anglophone passe au français, est beaucoup plus rare. Quelques participants ont affirmé se faire un point d’honneur de refuser de parler anglais, puisque le français risque d’être remplacé par l’anglais dans le futur, et ont critiqué les francophones qui passent trop facilement à l’anglais pour accommoder les anglophones. À leur avis, les francophones devraient défendre leurs intérêts et insister pour parler français afin de protéger la langue. D’autres participants ont souligné que le fait de passer à l’anglais lors d’une discussion avec une personne anglophone pourrait décourager ceux et celles qui tentent réellement de parler français et qui ressentent peut-être une certaine insécurité linguistique.

    « Mon copain est anglophone et son français n’est pas si bon. Mais quand il fait l’effort de parler en français, il va souvent se faire répondre en anglais, soi-disant pour l’accommoder. »

    Personne francophone

    « Souvent, les francophones, on a le mauvais réflexe de répondre en anglais aux anglophones qui veulent pratiquer leur français. Il faut de la patience et les laisser pratiquer. C’est quelque chose qui est apprécié et ça peut améliorer les relations aussi. »

    Personne francophone

    Plusieurs ont dit avoir l’impression que les relations entre les deux communautés sont plus respectueuses aujourd’hui qu’elles ne l’étaient dans les générations précédentes. L’on a relevé que le bilinguisme est plus présent que jamais au sein des générations Y et Z. Certaines personnes ont salué cette nouvelle réalité, évoquant que les générations plus jeunes d’anglophones sont maintenant plus conscientes de l’importance de la langue française au Québec et qu’une compréhension mutuelle était souhaitable. D’autres ont dit craindre qu’à long terme, l’anglais devienne de plus en plus présent, au détriment du français.

    « Je perçois que les jeunes parlent surtout et beaucoup en anglais, partout où on va à Montréal. J’entends parler anglais beaucoup plus qu’avant. Le français perd du terrain. »

    Personne francophone

    Tous les groupes de discussion en français ont soulevé la difficulté d’apprendre le français, surtout à un âge plus avancé, notamment en raison de la grammaire complexe et des noms genrés. Selon une personne dont le partenaire apprend le français, les programmes actuels de francisation au Québec sont mal organisés et peuvent décourager les anglophones.

    Points de vue des anglophones

    Lors des deux séances de discussion menées en anglais, les participants ont été invités à dire le premier mot qui leur venait à l’esprit pour décrire la façon dont, à leur avis, les francophones perçoivent les anglophones du Québec. À Montréal et à Gatineau, une majorité a employé des mots positifs, comme « fluide » et « cordiale »; l’on a toutefois relevé des exceptions importantes. À l’extérieur de Montréal et de Gatineau, les mots choisis avaient principalement des connotations négatives, comme « tendue », « terrible » et « compliquée »; encore une fois, l’on a décelé quelques exceptions notables.

    Les anglophones des régions de Montréal et de Gatineau ont surtout évoqué des expériences positives, évoquant la facilité de vivre dans ces villes, de s’exprimer et de passer d’une langue à l’autre. Ceux et celles résidant à l’extérieur de ces deux villes, en revanche, ont décrit des expériences plus négatives et ce qu’ils percevaient comme des comportements agressifs de francophones à l’endroit des personnes d’expression anglaise, parfois de la part de clients, d’autres fois par des employés de commerce refusant de les servir en anglais.

    Une personne a affirmé ne jamais avoir ressenti de tension sur le plan individuel lorsqu’elle parle en français à des francophones, mais que les médias sociaux, les nouvelles et certains politiciens font du battage médiatique autour d’incidents isolés entre francophones et anglophones, créant de la division et politisant une relation autrement cordiale.

    Certains anglophones qui maîtrisaient moins bien le français ont raconté que des francophones les avaient déjà rejetés lorsqu’ils essayaient de parler français, ou encore qu’ils ne voulaient faire aucun effort pour leur parler en anglais. De telles expériences négatives, combinées aux commentaires qui circulent dans l’espace public, font que certains hésitent à utiliser davantage ou à mieux apprendre le français, puisque le sentiment d’être pointé du doigt ne les encourage pas à essayer de parler français.

    « Les francophones du Québec ne souhaitent pas vraiment que l’on apprenne le français, et ils ne veulent pas voir les avantages de connaître plus d’une langue. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Certains avaient l’impression que les francophones du Québec craignaient de perdre leur identité si l’anglais prenait trop de place. Certaines personnes aimeraient voir les francophones célébrer le bilinguisme plutôt que de percevoir les anglophones comme une menace.

    Bien que certains participants anglophones aient dit parler et utiliser le français régulièrement, d’autres y avaient recours beaucoup moins souvent et leurs interactions avec les francophones étaient très limitées au quotidien.

    C. Les interactions personnelles

    Les participants devaient préciser dans quelle mesure ils et elles interagissent personnellement avec des membres de l’autre communauté linguistique du Québec (soit les francophones ou les anglophones), par exemple au travail, à l’école ou dans un contexte social.

    Plusieurs, tant chez les francophones que chez les anglophones, ont déclaré avoir des interactions avec des membres de l’autre communauté dans un contexte professionnel. Certaines de ces interactions se déroulent en français, mais la plupart sont en anglais.

    Quelques personnes comptent aussi des membres de l’autre communauté parmi leurs amis, comme partenaire ou dans leur famille. En effet, certaines personnes ont dit être mariées ou être en relation avec un membre de l’autre communauté. Autrement, les interactions avec les membres de l’autre communauté linguistique se déroulent souvent dans des commerces de détail ou dans un contexte de service à la clientèle.

    Quelques personnes ont aussi affirmé avoir plusieurs interactions interlinguistiques par l’entremise d’autres communautés auxquelles elles appartiennent. Par exemple, une personne francophone a mentionné faire partie de la communauté 2ELGBTQIA+, au sein de laquelle les anglophones et les francophones se mêlaient davantage les uns aux autres, surtout à Montréal. D’autres ont raconté avoir de nombreuses interactions des deux côtés de la frontière linguistique en raison d’un passe-temps ou d’une activité, comme la pratique d’un sport où l’on se mesure à des gens des deux langues, ou encore les liens tissés dans le cadre d’activités culturelles au Québec, comme la musique, les spectacles d’humour, les concerts, les émissions de télévision et les films. À quelques exceptions près, ces interactions tendaient à être plus positives et à créer un terrain d’entente.

    D. Les anglophones et l’utilisation du français au Québec

    Nous avons exploré la façon dont les participants francophones perçoivent leur relation avec les anglophones du Québec et dont ils décriraient l’attitude des anglophones à l’égard de la langue française. Au cours des séances menées auprès d’anglophones, nous nous sommes plutôt penchés sur la façon dont les participants croient être perçus par les francophones.

    Points de vue des francophones

    Les participants francophones avaient des points de vue mitigés quant à l’attitude des anglophones du Québec à l’égard de l’utilisation du français. Certains ont affirmé que les anglophones avec qui ils et elles interagissent parlent français, d’autres ont indiqué que ce n’est pas le cas.

    « La majorité des anglophones sont très accommodants, même qu’ils adorent parler ou essayer de parler français. »

    Personne francophone

    « Je regarde dans mon quartier, je suis entourée de beaucoup d’anglophones qui parlent très bien français. »

    Personne francophone

    « Ça existe des anglophones qui aiment ça parler en français, mais malheureusement ils ne sont pas majoritaires, on ne les voit pas souvent. »

    Personne francophone

    Une majorité reconnaissait que les anglophones du Québec maîtrisent beaucoup mieux le français et sont plus disposés à le parler aujourd’hui que les générations précédentes. Plusieurs ont relevé que les anglophones plus âgés et mieux fortunés avaient tendance à moins parler français que ceux des générations suivantes. En d’autres mots, l’on avait l’impression que de plus en plus d’anglophones avaient commencé à parler français au fil des ans. D’une part, certains participants estimaient que les anglophones plus jeunes sont maintenant très conscients de l’importance du français au Québec et qu’ils ont grandi avec une mentalité différente de celle de leurs parents. D’autre part, l’on s’est inquiété de voir les premiers signes d’un renversement de cette tendance, les anglophones plus jeunes commençant à tourner le dos à la langue et à la culture de langue française. L’on a aussi formulé des commentaires sur l’incidence de l’immigration et du grand nombre de nouveaux arrivants qui semblent s’intégrer à la communauté anglophone et ne comprennent pas toujours le fait français au Québec.

    En général, les participants francophones de Montréal et de Gatineau étaient un peu plus susceptibles que ceux des autres régions d’entretenir une opinion négative de l’attitude des anglophones à l’égard de la langue française. Certains étaient frustrés d’entendre autant parler anglais au quotidien et qu’on leur adresse d’abord la parole en anglais, sans essayer d’utiliser le français.

    À titre de comparaison, l’attitude des anglophones vivant ailleurs dans la province était perçue de façon positive par les francophones qui résident ou visitent ces régions.

    « Je suis allé passer deux semaines au Saguenay–Lac-Saint-Jean et je n’ai pas entendu un seul anglophone parler en anglais. »

    Personne francophone

    Certains participants de Gatineau ont relevé l’exode, après la pandémie, d’anglophones unilingues d’Ottawa venus s’installer de l’autre côté de la rivière, à la recherche d’un logement plus abordable. Ils ont ajouté que l’afflux de ces « nouveaux », comme ils les appelaient, faisait parler dans la région et causait certaines tensions, parce que l’on avait l’impression qu’ils ne parlaient pas ou n’essayaient même pas de parler français, et semblaient de surcroît s’attendre à ce qu’on les serve en anglais.

    « J’en ai vu beaucoup beaucoup de nouveaux arriver en Outaouais qui eux, clairement, ne parlent pas et ne font pas l’effort de parler français. »

    Personne francophone

    L’une des principales sources de frustration des francophones à l’endroit des anglophones est l’impression que ces derniers tiennent pour acquis qu’on les accommodera en passant à l’anglais. Cette impression que les anglophones s’attendent à ce que les francophones s’adaptent à eux (certaines personnes ont parlé du « sentiment que tout leur est dû ») joue pour beaucoup dans la façon dont les francophones perçoivent les anglophones au Québec. Comme mentionné précédemment, certains participants étaient d’avis que les francophones contribuent aussi à cette situation, parce qu’ils n’insistent pas suffisamment pour parler français avec les anglophones du Québec.

    « J’ai l’impression qu’au Québec, les anglophones prennent pour acquis que les francophones vont s’adapter à eux. »

    Personne francophone

    « Lorsqu’un francophone rencontre un anglophone, il va s’adapter et parler en anglais. Le contraire n’arrive pas. L’anglophone ne fera pas l’effort de parler français. »

    Personne francophone

    « Dans un groupe anglophone, s’il y a un francophone, c’est sûr qu’il n’y aura pas de basculement vers le français. »

    Personne francophone

    « Dans l’équipe sportive de mon garçon, tout se passe en anglais parce que deux ou trois joueurs ne parlent pas français. C’est soi-disant plus simple, tu fais plus partie du groupe ‘‘cool’’ si tu parles anglais. »

    Personne francophone

    Même si certaines personnes sont mécontentes de ces compromis, d’autres n’ont pas d’objection à passer du français à l’anglais, affirmant que de s’adapter à la langue de l’autre est une marque de respect et d’égards.

    Certains participants francophones ont indiqué que la majorité des anglophones avec qui ils et elles interagissent au quotidien, qu’il s’agisse de clients, de collègues, de membres de leur famille ou d’amis, leur parlent principalement en français.

    « Je vois tout le temps un effort qui est fait par des amis, collègues ou patients anglophones à parler français et ils se débrouillent très bien. On se comprend en français sans problème. »

    Personne francophone

    « J’ai peut-être été plus chanceux que d’autres, moi dans mon cas, c’est arrivé souvent que dans une réunion avec six ou sept francophones au travail, la seule personne anglophone se force pour parler français. »

    Personne francophone

    Une vaste majorité des francophones jugeait que les membres de la population québécoise d’expression française sont plus susceptibles d’être bilingues que ceux d’expression anglaise, puisque la connaissance de cette langue est nécessaire pour voyager ou saisir des occasions professionnelles. À leur avis, c’est particulièrement le cas pour les générations plus jeunes. Plusieurs ont fait remarquer que la société semble trouver plus important pour un francophone de parler anglais que pour un anglophone de parler français au Québec, et que le fardeau du bilinguisme revient aux francophones.

    « Les médias poussent beaucoup que si tu parles juste français tu es fermé sur le monde, paresseux, xénophobe, pris dans ton coin, alors que si tu parles anglais, il y a cette perception que c’est ‘‘cool’’ parler anglais, tu es ouvert sur le monde. »

    Personne francophone

    « Le bilinguisme est souvent perçu comme un devoir francophone. »

    Personne francophone

    «C’est davantage utile pour un francophone d’être bilingue que pour un anglophone d’être bilingue. »

    Personne francophone

    « Dans la communauté anglophone, la langue française est vue comme une sous-langue qui n’est pas utile par rapport à l’anglais, qui est la langue dominante du monde. »

    Personne francophone

    Peut-être en raison de cette opinion, les participants francophones avaient tendance à sous-estimer la capacité des anglophones à parler et à utiliser le français. Plusieurs d’entre eux avaient l’impression qu’un grand nombre d’anglophones sont probablement capables de parler au moins un peu français, mais qu’ils refusent de le faire, soit parce qu’ils ne veulent pas apprendre la langue ou qu’ils ont trop de difficulté à le faire, soit par manque d’intérêt ou par indifférence.

    « Il y a peut-être beaucoup d’anglophones qui sont effectivement bilingues, mais qui n’exercent pas leur maîtrise du français et c’est pour cela qu’on ne l’entend pas. »

    Personne francophone

    « Pour beaucoup d’anglophones, le bilinguisme est un inconvénient. Ils préfèreraient avoir les services en anglais et parler au quotidien en anglais tous les jours. »

    Personne francophone

    Les participants francophones ont constaté que les établissements ou services offerts à la communauté anglophone au Québec étaient plus nombreux, en particulier à Montréal et à Gatineau, que ceux offerts à la minorité francophone dans les autres provinces. Ils et elles étaient ainsi d’avis qu’il est plus facile, et même trop facile, pour les anglophones de mener leur vie principalement en anglais au Québec.

    « Les anglophones du Québec ont tout ce qu’il faut pour étudier et vivre en anglais du matin au soir. Les francophones dans le reste du pays n’ont pas accès aux mêmes ressources. »

    Personne francophone

    « Il y a beaucoup d’anglophones qui passent leurs journées entières sans parler français. »

    Personne francophone

    « Une vie en anglais, 365 jours par année, c’est très possible et très habituel d’après ce que je vois. »

    Personne francophone

    « Je ne suis pas contre l’anglais, je peux parler anglais. Je suis contre trop d’anglais. »

    Personne francophone

    Points de vue des anglophones

    Lorsque l’on a demandé aux participants anglophones de quelle façon, à leur avis, les francophones perçoivent leur attitude à l’égard de la langue française et de partager ce qu’ils pensent de leur relation avec les francophones, ils ont souvent dit avoir l’impression que les gens perçoivent l’anglais comme une menace pour le français. Pour plusieurs, il ne s’agissait pas d’une préoccupation sérieuse, puisqu’un plus grand bilinguisme n’a pas à se traduire par une baisse du français d’après eux. Seules quelques personnes ont reconnu la possibilité que le français était réellement menacé, et qu’il était donc nécessaire de le protéger.

    « La culture d’expression française est fortement liée à la langue, ce qui n’est pas nécessairement le cas pour nous. En tant qu’anglophones, nous ne ressentons pas l’obligation de défendre notre langue de la même façon. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Plusieurs participants anglophones ont dit souhaiter que les francophones se montrent moins critiques et qu’ils cessent de présumer que la majorité des anglophones ne parlent pas français ou ne respectent pas la langue. À leur avis, ces stéréotypes et idées préconçues viennent alimenter une insécurité linguistique qui n’est peut-être pas justifiée. Au cours des discussions, la plupart des anglophones ont affirmé parler plutôt bien français, et seules quelques personnes ont qualifié de très limitées leurs aptitudes dans cette langue. Certains se sont dits frustrés que les francophones passent à l’anglais lorsqu’ils tentent d’engager la conversation en français, ayant l’impression que leur maîtrise de la langue ne serait jamais jugée suffisante.

    « Dans les magasins, on me remercie parfois d’essayer, tandis que d’autres disent plutôt que nos efforts ne sont pas suffisants. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « On essaye de parler français, mais les gens décident de passer à l’anglais dès qu’ils perçoivent un accent. C’est très frustrant, parce qu’on fait des efforts, mais personne ne les reconnaît. Ce sont eux qui prennent la décision de parler anglais plutôt que français. » [Traduction]

    Personne anglophone

    L’on trouvait aussi irréaliste de s’attendre à ce que les nouveaux arrivants au Québec maîtrisent la langue en si peu de temps, compte tenu des efforts que cela demande et de la nécessité d’accorder la priorité au travail et à la vie de famille. Une personne a raconté être déménagée au Québec d’une autre province précisément pour donner une éducation « québécoise » à ses enfants et leur offrir un meilleur avenir, mais qu’elle doit maintenant occuper deux emplois pour joindre les deux bouts, ce qui a ralenti son apprentissage du français. Cette personne a dit avoir l’impression d’être regardée de haut lorsqu’elle tente de parler français en public, même si elle s’est installée au Québec en raison de son amour de la culture française et de son désir de la transmettre à ses enfants.

    Plusieurs étaient frustrés d’être critiqués pour leur usage de l’anglais, même entre eux, et qu’on les fasse sentir comme s’ils n’avaient pas leur place, quelles que soient leurs aptitudes à parler français ou la fréquence à laquelle ils le font. La plupart se sont dits heureux d’utiliser le français, ou de tenter de le faire, mais ils ne veulent pas qu’on les y oblige, et ils veulent se sentir acceptés lorsqu’ils se servent de l’anglais.

    « Si l’on m’oblige à faire une chose, je vais faire l’inverse. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Obliger les gens à apprendre une langue, ce n’est pas une solution. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Les récentes mesures du gouvernement visant à restreindre l’usage de l’anglais au Québec étaient une source majeure de désenchantement et de tension selon les anglophones, ces derniers étant d’avis que ces mesures isolaient les francophones. Des participants ne cachaient pas leur scepticisme quant à la nécessité, ou même la validité, de telles mesures, et l’on jugeait que celles-ci causaient préjudice aux deux communautés. Certains ont soulevé la réaction hostile des anglophones à la suite de l’adoption des mesures gouvernementales, perçues comme draconiennes, et avaient l’impression que ces mesures entraînaient une certaine résistance à l’utilisation du français dans les situations où celle-ci est perçue comme une obligation.

    « La perspective politique de préservation du français à tout prix et la mise en œuvre de telles mesures extrêmes ne fait que creuser davantage le fossé. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Malgré ce contexte politisé et certaines actualités venant alimenter les dissensions, la majorité des anglophones avaient tendance à croire que les anglophones et les francophones du Québec devraient arriver à s’entendre suffisamment bien dans la vie de tous les jours. L’on a aussi manifesté un certain optimisme quant au fait que les jeunes locuteurs des deux langues sont plus bilingues et qu’ils établissent des ponts entre les deux communautés.

    « Certains Canadiens français croient que les anglophones sont têtus parce qu’ils n’apprennent pas le français, tandis que certains anglophones jugent les Québécois d’expression française têtus parce qu’ils ne veulent pas parler anglais. Il y a donc ces deux extrêmes qui ont cette opinion de l’autre. Toutefois, lorsqu’on vit ensemble, on ne le remarque pas. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Il y a un certain fossé entre les générations. Les gens sont de plus en plus bilingues. Les jeunes maîtrisent beaucoup mieux le français. Il me plaît de croire qu’en général, les gens se montrent plus cordiaux et empathiques les uns envers les autres. » [Traduction]

    Personne anglophone

    E. Les opinions du bilinguisme pancanadien

    Les participants aux séances de discussion devaient ensuite exprimer leur opinion du bilinguisme au Canada dans son ensemble.

    Points de vue des francophones

    Plusieurs francophones ont souligné l’importance de parler anglais pour comprendre la majorité anglophone du Canada, discuter, voyager, établir des relations à l’international, s’ouvrir à d’autres cultures et créer un plus grand nombre d’occasions. Bon nombre d’entre eux se sont dits heureux que les jeunes générations soient plus bilingues, et ont parlé des parents bilingues ou unilingues anglophones qui inscrivent leurs enfants à l’école en français ou qui leur parlent dans les deux langues.

    « Je pense que parler anglais est une bonne chose parce que c’est la langue internationale. »

    Personne francophone

    «Je vois aussi des parents unilingues anglophones autour de moi qui forcent leurs enfants à parler français. Ils voient le bilinguisme comme une opportunité pour leurs enfants d’accéder à des postes bien placés, mieux rémunérés que les postes unilingues – comme au gouvernement fédéral. Cela donne à leurs enfants des opportunités qu’eux n’ont pas eues, comme parents anglophones avec une maîtrise très limitée du français. »

    Personne francophone

    « Je pense que les jeunes parents sont tentés de parler à leurs enfants dans les deux langues et je trouve ça très bien. »

    Personne francophone

    Lorsque questionnés à ce sujet, les francophones se sont dits favorables au principe du bilinguisme officiel du Canada, malgré un certain scepticisme quant au soutien des anglophones hors Québec à la Loi sur les langues officielles. Ils ont néanmoins reconnu que les anglophones du Québec sont plus conscients que ceux du reste du Canada de l’importance du français.

    « Les anglophones du Québec valorisent davantage le bilinguisme que les anglophones du reste du Canada. »

    Personne francophone

    « La vision du bilinguisme canadien n’est pas la même. Si on est francophone, on sait que le bilinguisme canadien vaut pour les francophones seulement – c’est aux francophones d’apprendre l’anglais et de s’adapter. Et encore, les francophones du Québec sont mieux traités que les francophones dans le reste du pays. »

    Personne francophone

    Une personne allophone ayant pris part à l’une des séances de discussion menées en français a raconté qu’apprendre le français l’avait aidée à trouver un emploi au Québec.

    « Comme immigrante, c’est en parlant français que j’ai trouvé ma carrière »

    Personne francophone

    Au cours des discussions, l’on a fait la distinction entre le bilinguisme individuel et institutionnel. Bien que l’aptitude de la population canadienne à communiquer dans les deux langues soit valorisée, un certain nombre de participants francophones ont exprimé des doutes quant à l’efficacité du bilinguisme institutionnel ou même à la menace posée par celui-ci, étant d’avis qu’une fois mis en œuvre, l’expérience démontre que l’anglais finit par prendre le dessus au détriment du français.

    « Le bilinguisme institutionnel ne fonctionne pas. Quand tu as l’anglais et le français, le français est graduellement tassé pour laisser la place à l’anglais. Je le vois dans la fonction publique fédérale, le français n’est à peu près pas utilisé même si une majorité sont francophones. »

    Personne francophone

    « Si, au lieu d’être une province francophone, le Québec devenait une province officiellement bilingue, par exemple, l’anglais prendrait progressivement le dessus et ce serait la fin du français en 50 ans. »

    Personne francophone

    Points de vue des anglophones

    Lorsque questionnés sur l’attitude des anglophones et des francophones du Québec à l’égard du bilinguisme au Canada, les participants d’expression anglaise étaient d’avis que, pour les francophones, le bilinguisme ne constitue pas un avantage et que l’anglais est plutôt une menace pour le français. Leur opinion quant aux attitudes à l’égard du bilinguisme pancanadien était teintée de leur expérience au Québec, où les politiques provinciales consistent à encourager uniquement l’utilisation du français.

    La plupart des participants anglophones considéraient le bilinguisme français-anglais comme une « nécessité » et se sont souvent dits fiers que le Canada soit un pays bilingue, affirmant que les gens partout dans le monde parlent plusieurs langues sans que ce soit politisé. Plusieurs étaient aussi d’avis que l’on assistait à un changement générationnel et que le bilinguisme du Canada était maintenant davantage valorisé.

    « Je trouve cela fantastique, et j’aimerais que les gens du Québec partagent cet avis. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Pour mieux réussir, il est préférable de parler plus d’une langue. Je veux que mes enfants parlent plusieurs langues. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Quelqu’un a dit comprendre l’opinion des francophones du Québec, qui perçoivent peut-être le Canada comme étranger, affirmant que le bilinguisme officiel du pays est futile dans la mesure où une majorité de personnes hors du Québec et dans les communautés francophones d’ailleurs au pays se disent peut-être favorables au bilinguisme en théorie, mais sont en fait incapables de parler français.

    Les Québécois d’expression anglaise n’étaient, pour la plupart, pas surpris du ferme appui au bilinguisme officiel au sein de la population du reste du Canada.

    F. Mythes, idées erronées et faits concernant les anglophones

    Les groupes de discussion ont fourni une occasion d’explorer divers mythes à l’endroit des anglophones concernant la langue française.

    « La minorité anglophone au Québec est plus privilégiée sur le plan socioéconomique que la majorité francophone. »

    L’un des stéréotypes envers les anglophones mentionnés par certains participants francophones était l’idée que les anglophones sont plus riches ou plus privilégiés. Certains étaient d’avis qu’au Québec, les anglophones unilingues ont accès à un plus grand nombre de perspectives d’emploi que les francophones unilingues. Les secteurs plus aisés (et plus anglophones) de l’ouest de Montréal, comme Westmount et la Ville de Mont-Royal, ont souvent été cités en exemple pour illustrer la richesse des anglophones. L’on a aussi relevé les universités de langue anglaise, qui sont très bien financées, et l’accès à des hôpitaux et à d’autres établissements anglophones, plus que ce à quoi les minorités francophones du reste du Canada ont accès. La lutte de cinq ans menée pour sauver l’Hôpital Montfort, de 1997 à 2002, a été citée en exemple.

    « Au Québec, si tu parles juste anglais, tu as beaucoup d’opportunités. Si tu parles juste français, tu as moins d’opportunités. »

    Personne francophone

    D’autres estimaient que cette situation a peut-être été vraie dans le passé, mais que ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ils jugeaient, en fait, qu’il était plus difficile pour les anglophones unilingues de trouver un emploi au Québec. Une personne de Gatineau a d’ailleurs donné en exemple la région du Pontiac en Outaouais, qui est essentiellement anglophone et plus pauvre. Certains ont avancé que les taux de richesse et de pauvreté étaient probablement semblables dans les deux communautés de nos jours.

    « Il y a autant d’anglophones que de francophones pauvres ou riches, autant à Québec qu’à Montréal. »

    Personne francophone

    Lorsqu’on leur a dit qu’en fait, les anglophones du Québec présentent des taux de chômage plus élevés, sont plus susceptibles de vivre dans la pauvreté et ont un revenu médian inférieur à celui de leurs homologues francophones, plusieurs participants francophones se sont dits surpris. Certains ont exprimé des doutes quant à la validité de ces statistiques et se sont demandé si celles-ci tenaient compte des allophones et de la présence d’immigrants au sein de la communauté anglophone plus vaste. D’autres ont, encore une fois, mentionné les secteurs de l’ouest de Montréal pour illustrer le fossé entre les riches anglophones et les francophones plus pauvres.

    « C’est difficile de voir qu’il n’y a pas de différence entre l’ouest et l’est de Montréal. Les boutiques dispendieuses du Centre Rockland, il n’y a pas ça dans l’est. La clientèle est dans l’ouest. »

    Personne francophone

    « La majorité de la population d’expression anglaise au Québec est incapable de comprendre et de parler le français. »

    Comme mentionné précédemment, les francophones avaient tendance à sous-estimer la capacité des anglophones à parler français. Lorsqu’on leur a dit qu’en réalité, plusieurs anglophones du Québec sont bilingues, les participants aux opinions plus favorables envers la communauté se sont montrés agréablement surpris. En revanche, ceux qui avaient des opinions plus négatives à l’endroit de la communauté anglophone ont remis en question la validité des statistiques, et celles-ci n’ont rien changé à leur impression initiale que les francophones sont plus bilingues. Selon eux, ce n’est pas parce qu’une personne prétend pouvoir parler français qu’elle maîtrise réellement la langue ou qu’elle l’utilise régulièrement.

    « On peut faire dire ce qu’on veut à des statistiques. Un anglophone qui dit qu’il parle français, il a peut-être juste dit ‘‘bonjour’’ dans toute sa journée. Disons que j’ai de la misère à croire. »

    Personne francophone

    « Quel est leur niveau de français? Basique, ou ils sont capables de tenir une conversation? »

    Personne francophone

    La majorité des participants d’expression anglaise étaient convaincus que les anglophones du Québec sont plus susceptibles d’être bilingues que les francophones de la province, et n’étaient donc pas surpris des preuves confirmant leur opinion. Ils avaient aussi tendance à croire que les francophones sous-estiment souvent le nombre d’anglophones capables de parler français.

    « Les francophones seraient surpris de savoir que la majorité des anglophones peuvent, en fait, parler français. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Ce serait très difficile d’être unilingue anglophone au Québec. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Plusieurs Québécois francophones ne comprennent pas bien l’anglais et supposent que les anglophones sont aussi incapables de parler français. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Au Québec, la plupart des gens ayant l’anglais comme une langue maternelle n’utilisent pas régulièrement le français dans leur vie quotidienne. »

    Lorsqu’on leur a demandé si, à leur avis, les membres de la population québécoise ayant l’anglais comme une langue maternelle utilisent le français dans leur quotidien, les francophones avaient tendance à croire que ce n’était pas le cas, à moins d’y être obligés, par exemple lors d’interactions avec une personne unilingue francophone. Certains ont relevé qu’à Montréal, une personne anglophone peut facilement mener sa vie entièrement en anglais, mais que c’était peut-être différent ailleurs dans la province, dans des régions plus francophones.

    « Ils n’ont pas vraiment d’autre choix que d’utiliser le français. »

    Personne francophone

    « Si les anglophones n’habitent pas à Montréal, effectivement, ils peuvent parler en français quotidiennement. Mais s’ils habitent à Montréal, ce sera en anglais. »

    Personne francophone

    Les participants d’expression anglaise, de leur côté, n’étaient pas surpris d’apprendre que plusieurs anglophones du Québec utilisent régulièrement le français. Certains ont aussi souligné que des gens des deux communautés refusent de parler l’autre langue, bien que cela semble changer d’une génération à l’autre, les jeunes de la province étant plus bilingues.

    « Ma mère refuse de parler français, d’abord parce qu’elle ne comprend pas la langue, mais aussi parce qu’elle a grandi à une époque où l’anglais et le français étaient réellement en opposition. Elle dit qu’elle a “le droit de parler anglais”. Cette attitude est, en quelque sorte, en train de disparaître. Je crois que c’est exécrable des deux côtés. Je l’ai vécu de la part de francophones plus âgés qui refusent de parler anglais, et d’anglophones âgés qui refusent de parler français. Cela ne donne rien de bon. J’aime croire que cela s’estompe, parce qu’on pense de plus en plus que logiquement, une personne francophone doit apprendre l’anglais, puisqu’il s’agit de la principale langue parlée dans le monde. Si vous voyagez en Italie et que vous parlez anglais, personne n’en sera insulté. Les anglophones du Québec savent qu’ils doivent apprendre le français s’ils veulent rester ici, y vivre et y travailler, et les francophones reconnaissent de plus en plus qu’ils ont besoin de l’anglais. Ce n’est pas impoli, et ce n’est pas un geste politique antinationaliste. L’anglais n’est pas l’ennemi. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Au Québec, la plupart des gens d’expression anglaise restent entre eux et n’interagissent pas beaucoup avec les francophones. »

    Lorsqu’on leur a appris que plus des trois quarts des anglophones du Québec disent interagir sur une base quotidienne avec des francophones, les participants d’expression française se sont montrés surpris, croyant que le pourcentage était moins élevé. Ceux résidant ailleurs qu’à Montréal et à Gatineau ont toutefois affirmé que cela n’avait rien d’étonnant : puisque le Québec est en majorité francophone, il est donc logique que les anglophones interagissent régulièrement avec des personnes d’expression française.

    Les participants anglophones, quant à eux, n’étaient pas du tout surpris de ce fait, puisque cela concordait avec leur vécu et leurs interactions quotidiennes avec des francophones.

    « Il y a certainement un grand nombre d’interactions. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « Mes amis proches et ma famille sont anglophones, mais ils sont presque tous parfaitement bilingues. Ils préfèrent peut-être l’anglais, mais ils travaillent en français et peuvent le parler. Ma sœur a épousé un francophone. Cela profite aux futures générations d’enfants qui grandissent dans les deux langues. » [Traduction]

    Personne anglophone

    « La plupart des Québécois d’expression anglaise ne s’intéressent pas en général à la culture de langue française. »

    L’on a demandé aux participants si, à leur avis, les anglophones s’intéressent à la culture de langue française ou s’ils assistent à des événements culturels en français.

    Les francophones étaient généralement d’avis que les anglophones prennent probablement part à plusieurs événements culturels, comme la visite de musées, les célébrations comme celles de la Fête nationale du Québec, les événements tels que la Fierté, les matchs sportifs, les spectacles ou les festivals (comme le Festival international de jazz de Montréal, le Cirque du Soleil, Osheaga et le Festival Nuits d’Afrique). Dans ces cas, l’éventuelle barrière linguistique tombe, puisque ces activités sont bilingues, qu’elles sont agréables ou encore parce que l’identité ou le sentiment d’appartenance l’emportent.

    Les francophones avaient aussi tendance à croire que les Québécois d’expression anglaise s’intéressent probablement peu à la musique, aux livres, aux émissions de télévision ou aux films en français, des produits culturels où la barrière linguistique se fait davantage sentir. Fait intéressant, quelques anglophones ont admis avoir aimé des films ou émissions de sports québécois, comme Lance et compte et Les Boys, ou les films Bon Cop, Bad Cop et C.R.A.Z.Y., ce dernier ayant été apprécié des membres de la communauté 2ELGBTQIA+ des deux langues. À ce sujet, et comme mentionné précédemment dans le présent rapport, il a été suggéré, au cours des groupes de discussion, que les anglophones au sein de la communauté 2ELGBTQIA+ étaient particulièrement favorables à la langue française et que la relation entre les deux groupes linguistiques était positive; en d’autres mots, la langue ne constituait pas un obstacle.

    Même si la majorité des francophones estimait que les anglophones s’intéressaient peu à la culture franco-québécoise, un participant originaire de la France a raconté avoir été initié à la musique québécoise surtout par un ami anglophone, donnant en exemple le groupe Les Cowboys Fringants.

    Les francophones s’inquiétaient surtout d’un éventuel déclin de l’intérêt à l’égard de la culture de langue française chez les jeunes générations de Franco-Québécois. Même s’ils encourageaient le bilinguisme chez les jeunes locuteurs des deux langues, ils ont dit avoir l’impression que cela se faisait au détriment de la culture francophone.

    « Les anglophones ne sont pas très intéressés par la culture francophone, ils n’en connaissent pas grand-chose et ne semblent pas très intéressés – surtout les jeunes. Je trouve cela fermé comme attitude. »

    Personne francophone

    « Mes deux enfants écoutent la télévision en anglais. Pour eux, les films et la culture francophone, ce n’est pas bon. Ça me fait de la peine. »

    Personne francophone

    Chez les anglophones, plusieurs participants avaient tendance à croire que leurs compatriotes d’expression anglaise n’avaient qu’un intérêt limité pour la culture de langue française et qu’ils n’assistaient probablement pas à certains types d’événements culturels en français. Certains ont affirmé avoir des amis anglophones s’intéressant plus à la culture franco-québécoise. L’on a toutefois mentionné la difficulté de comprendre un spectacle d’humour ou une pièce de théâtre en français. Quelques personnes ont admis que la musique en français ne leur plaisait pas personnellement. D’autres ont dit préférer regarder des films dans leur langue d’origine, que ce soit le français ou l’anglais. Quelques participants ont mentionné assister à des événements de cabane à sucre en français au printemps.

    Lorsque les participants ont été informés que, d’après un récent sondage, la plupart des anglophones du Québec s’intéressent aux produits culturels en français (comme des livres, de la musique, des films ou des émissions de télévision) et que la plupart avaient assisté à des événements culturels et artistiques en français au cours de la dernière année (comme des spectacles, des festivals et des expositions), les francophones ont semblé agréablement surpris, bien qu’ils se soient demandé ce qui les avait intéressés exactement. Pour leur part, les anglophones étaient aussi étonnés des données statistiques présentées.

    Ce mythe semble ainsi être le seul pour lequel les statistiques sont venues contredire les perceptions et expériences des participants, et ce, dans les deux groupes linguistiques, soit les francophones et les anglophones.

    « La majorité des membres de la population canadienne hors Québec n’appuient pas la Loi sur les langues officielles, et chez les personnes qui parlent français dans le reste du Canada, peu sont anglophones. »

    Les participants francophones avaient tendance à sous-estimer l’appui des anglophones du reste du Canada à l’égard de la Loi sur les langues officielles. Certains se sont dits agréablement surpris lorsqu’on leur a présenté les données du sondage démontrant le contraire, tandis que d’autres étaient sceptiques ou même incrédules quant à la validité de telles statistiques. Ces derniers estimaient qu’il fallait nécessairement être bilingue pour appuyer le bilinguisme officiel, et supposaient que très peu de gens parlant français dans le reste du Canada avaient l’anglais comme langue maternelle.

    À l’inverse, les anglophones n’étaient pas surpris du soutien à l’égard du bilinguisme officiel au sein de la population hors Québec. Ils étaient d’avis que le manque d’appui provenait plutôt de certains Franco-Québécois (bien que les données du sondage démontrent, en réalité, un soutien très élevé au Québec).

    Il semble que les deux groupes sous-estiment le soutien de l’autre à l’égard du bilinguisme officiel au Canada. Cette question pourrait faire l’objet d’une étude plus approfondie.

    G. Améliorer les relations entre les anglophones et les francophones du Québec

    Pour conclure les discussions, on a demandé aux participants si, à leur avis, les anglophones du Québec influencent, de quelque façon que ce soit, l’opinion des anglophones du reste du Canada en ce qui concerne le bilinguisme officiel du pays, et comment on pourrait créer des ponts entre les deux groupes linguistiques au Québec.

    Bâtir des ponts à travers le Canada

    Pour certains participants francophones, les anglophones du Québec pourraient s’avérer des alliés utiles pour sensibiliser ceux du reste du Canada au sujet du Québec, du bilinguisme et de la langue française. Ils ont relevé des attitudes variées chez les anglophones : ceux qui acceptent la culture française et aiment parler français, et ceux qui ne parlent français que par nécessité. Certains se sont basés sur leurs interactions personnelles pour avancer que les anglophones hors Québec ayant appris le français pourraient en fait être de meilleurs alliés. On a exprimé des inquiétudes à l’idée que des anglophones du Québec critiquent la province auprès des résidents des autres provinces.

    « Je côtoie des gens plus sympathiques qui viennent de la Colombie-Britannique, la Saskatchewan, du Manitoba ou de la Nouvelle-Écosse qui font l’effort de me parler en français, contrairement à des Anglo-Québécois ou des gens d’Ottawa qui sont pourtant proches des francophones. Je ne sais pas pourquoi. »

    Personne francophone

    « Je vois souvent des anglophones du Québec parler en mal de la province aux anglophones du reste du Canada. »

    Personne francophone

    Les participants anglophones de Montréal et de Gatineau ont principalement raconté leur propre expérience au Québec. Certains ont affirmé être fiers de faire partie de la communauté québécoise dans son ensemble et ont affirmé que les gens des autres provinces ne sont souvent pas conscients des tensions entre anglophones et francophones au Québec.

    Les anglophones résidant ailleurs dans la province présentaient des opinions plus mitigées. Ceux originaires d’autres provinces se sont montrés ouverts à l’idée de jouer le rôle de médiateurs, donnant leurs propres expériences en guise d’exemple et se disant même fiers d’expliquer la situation du Québec à leurs amis et à leur famille « à la maison », ailleurs au pays. Ils ont parfois admis qu’ils comprennent maintenant mieux plusieurs facettes du Québec, comme la culture unique et le mode de vie plus détendu, moins matérialiste et plus abordable.

    D’autres participants aux racines plus ancrées au Québec ont affirmé ne pas toujours se sentir liés à la culture québécoise et à la langue française en raison de ce qu’ils perçoivent comme des guerres linguistiques sans fin dans la province, et des dernières mesures du gouvernement provincial. À leur avis, certains francophones du Québec n’appuient pas le bilinguisme officiel du Canada et recherchent en fait l’unilinguisme français pour la province. Les anglophones qui entretenaient des opinions plus négatives quant à leurs expériences au Québec étaient plus sceptiques quant à la nécessité pour les Québécois d’expression anglaise de jouer le rôle de médiateurs auprès des anglophones du reste du Canada puisque, selon eux, la population hors Québec est déjà favorable au bilinguisme officiel, tandis que ce sont les francophones du Québec qui ne le sont pas.

    Bâtir des ponts au sein de la population québécoise

    On a demandé aux participants ce qu’il faudrait pour rétablir les faits relativement aux mythes et aux stéréotypes, et pour changer les attitudes des deux communautés à l’égard de l’autre afin de favoriser de meilleures relations entre les francophones et les anglophones du Québec.

    La plupart des gens des deux communautés ont réclamé une plus grande ouverture et avaient bon espoir que les relations allaient s’améliorer compte tenu du plus grand bilinguisme chez les jeunes de la province et des mariages plus fréquents entre anglophones et francophones. On a aussi relevé que de tels rapprochements profiteraient aux deux côtés.

    « Je suppose que l’on croit ce que l’on veut bien croire à propos de l’autre. À mon avis, les préjugés et les partis pris existants au sujet des francophones, des anglophones ou des allophones ne servent à rien. Les relations ne vont pas s’améliorer si l’on continue simplement d’entretenir des préjugés. » [Traduction]

    Personne anglophone

    Quelques anglophones ont exprimé leurs inquiétudes quant aux stéréotypes et idées préconçues qui les concernent lors de la prise de décisions stratégiques, et ont déploré la façon dont les médias politisent des situations qui ne sont jamais tout à fait noires ni tout à fait blanches. L’on a réitéré que la population québécoise d’expression française ne devrait pas supposer que les anglophones se tiennent tous loin des francophones et de la culture de langue française. En fait, la plupart d’entre eux souhaitent faire partie de la communauté québécoise dans son ensemble.

    Les faits et les statistiques présentés tout au long des séances de discussion n’ont pas semblé entraîner de changement de mentalité immédiat chez les gens dont les opinions étaient, au départ, plus négatives. Toutefois, lorsque combinés aux expériences positives partagées par les autres, ils se sont avérés plus efficaces pour atténuer certaines croyances et certains stéréotypes négatifs en proposant une nouvelle perspective ou un discours différent. Quelques personnes ont affirmé qu’il serait très utile qu’une entité apolitique plus neutre diffuse de telles statistiques, et plusieurs ont affirmé qu’il serait de bon ton que les membres de la population québécoise d’expression anglaise assurent une présence accrue dans le discours sur la langue française, lors d’événements culturels et dans un contexte politique.

    « Ils ont besoin de meilleurs porte-paroles. C’était plutôt le cas par le passé qu’on voyait ces gens plus présents. »

    Personne francophone.

    Les participants ont mentionné des personnalités anglophones bien en vue, comme le chanteur ontarien Talk, né d’une mère francophone et d’un père anglophone, et l’humoriste montréalais Sugar Sammy, qui présente des spectacles bilingues et se moque des deux communautés. Ils ont aussi énuméré des artistes anglo-québécois qui avaient plus de visibilité dans le passé, comme Rufus Wainwright, Judi Richards et le défunt Leonard Cohen.

    Certains se sont demandé si le nombre d’heures de cours de français pour les anglophones du Québec était suffisant. D’autres ont suggéré que le nombre d’heures consacrées à l’apprentissage de l’autre langue devrait être identique dans les systèmes scolaires francophone et anglophone.

    Enfin, on a avancé qu’il faudrait favoriser les programmes d’immersion en langue seconde, les échanges étudiants et la participation aux associations pour éliminer la barrière linguistique entre francophones et anglophones au Québec. Ces suggestions reflétaient les expériences de plusieurs participants, qui ont affirmé avoir développé des relations positives dans le cadre d’interactions directes dans des lieux « neutres », c’est-à-dire des endroits en dehors de la maison et du travail où les gens se rencontrent en personne, et d’autres activités sociales permettant aux gens de tisser des liens en tant que membres d’un groupe, d’une équipe ou d’une activité qui ne sont ni francophones ni anglophones par définition.

    III. Résultats détaillés – phase quantitative

    A. Les interactions avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle
    1. Fréquence des interactions avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle

    Les trois quarts des anglophones et la moitié des francophones du Québec ont dit interagir avec des personnes qui parlent l’autre langue officielle au moins une fois par semaine.

    Comme l’exposition à des personnes qui parlent l’autre langue officielle est susceptible d’influencer les impressions à leur sujet, l’on a demandé aux membres de la population québécoise d’indiquer à quelle fréquence ils interagissent avec des locuteurs de l’autre langue officielle. Les anglophones sont plus susceptibles (76 %) que les francophones (51 %) d’interagir avec l’autre groupe au moins une fois par semaine. De telles interactions sont rares pour deux francophones sur dix (alors que c’est le cas de 10 % des anglophones), tandis que trois sur dix (29 %) n’interagissent que très rarement, voire jamais, avec l’autre groupe (comparativement à 12 % des anglophones).

    Fréquence des interactions avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle
    Fréquence Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : plus souvent 55 51 76
    Très souvent (au moins une fois par jour) 28 24 50
    Occasionnellement (au moins une fois par semaine) 27 27 26
    Rarement (au moins une fois par mois) 19 20 10
    Net : très rarement/jamais 27 29 12
    Très rarement (quelques fois par année) 18 19 10
    Jamais 9 10 2
    Incertain(e) <1 0 1

    Question 3

    Au quotidien, à quelle fréquence interagissez-vous avec (entrevues en français : des anglophones)/(entrevues en anglais : des francophones) 
    [Note pour l’intervieweur – si demandé : des gens qui sont principalement d’expression anglaise/française]?

    Le fait d’interagir au moins une fois par semaine avec des personnes qui parlent l’autre langue est plus répandu chez les plus jeunes (63 % des francophones de 18 à 34 ans et 55 % chez les 35 à 54 ans, comparativement à 39 % chez les 55 ans et plus). La fréquence des interactions augmente également en même temps que le revenu du ménage, passant de 49 % chez ceux qui gagnent moins de 60 000 $ à 60 % chez ceux qui gagnent 100 000 $ et plus. Ces interactions sont plus élevées chez les personnes qui :

    • sont nées au Canada ailleurs qu’au Québec (70 %) ou dans un autre pays (62 %);
    • sont racisées (67 %);
    • maîtrisent l’autre langue officielle (81 %);
    • résident à Montréal ou à Gatineau (65 %, contre 42 % chez celles qui résident ailleurs au Québec).
    2. Évaluation des interactions personnelles avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle

    Une forte majorité de près de neuf personnes sur dix a qualifié de positives ses interactions avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle.

    Les répondants qui interagissent, même rarement, avec des personnes qui parlent l’autre langue officielle devaient décrire ces interactions. La grande majorité les a qualifiées d’au moins plutôt positives (89 % des francophones et 81 % des anglophones), dont trois personnes sur dix qui ont décrit ces interactions comme étant très positives.

    Évaluation des interactions personnelles avec les locuteurs et locutrices de l’autre langue officielle
    Évaluation Total
    ( n  = 909)
    %
    Français
    ( n  = 791)
    %
    Anglais
    ( n  = 118)
    %
    Net : positives 87 89 81
    Très positives 31 31 31
    Plutôt positives 57 58 50
    Neutres/autant positives que négatives 3 3 3
    Net : négatives 8 7 16
    Plutôt négatives 6 4 12
    Très négatives 2 2 4
    Incertain(e) 1 1 0

    Question 4

    Comment décririez-vous vos propres interactions avec les (entrevues en français : anglophones)/(entrevues en anglais : francophones) du Québec? 
    Diriez-vous qu’elles sont...?

    De fortes majorités dans tous les sous-groupes ont affirmé avoir des interactions positives avec les locuteurs de l’autre langue officielle. Étaient plus susceptibles de qualifier de telles interactions de très positives les personnes qui :

    • sont âgées de 18 à 34 ans (37 %);
    • maîtrisent l’autre langue (49 %);
    • ont de telles interactions très souvent (51 %).
    3. Proportion perçue des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise qui peuvent parler français

    Les anglophones du Québec sont deux fois plus susceptibles que les francophones de penser que la totalité ou la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise peuvent parler français.

    On a demandé aux répondants d’indiquer la proportion de membres de la population québécoise ayant l’anglais comme une langue maternelle et qui peuvent parler suffisamment bien français pour soutenir une conversation. On observe des différences majeures dans les réponses à cette question en fonction de la langue. En effet, les anglophones sont deux fois plus susceptibles (58 %) que les francophones (29 %) de croire que la totalité ou la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise peuvent soutenir une conversation en français. Un peu plus de quatre francophones sur dix (43 %) estiment qu’environ la moitié de la population québécoise de langue maternelle anglaise peut parler un français de base, alors que trois anglophones sur dix (31 %) sont de cet avis, et le quart (25 %) des francophones croient que seule une minorité est capable de parler français, voire personne (alors que c’est le cas d’un anglophone sur dix). Ces résultats démontrent que plusieurs francophones du Québec sous-estiment le nombre d’anglophones capables de parler français dans la province.

    Proportion perçue des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise qui peuvent parler français
    Impression Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : tous/la plupart 33 29 58
    Presque tous 7 6 12
    La plupart d’entre eux 26 22 46
    La moitié 41 43 31
    Net : une minorité/presque aucun 23 25 9
    Une grande minorité 19 21 7
    Presque aucun 4 4 2
    Incertain(e) 3 4 3

    Question 5

    Selon vous, quelle proportion de Québécoises et Québécois ayant l’anglais comme langue maternelle peuvent parler suffisamment bien le français pour soutenir une conversation? 
    Diriez-vous…?

    L’impression que la totalité ou la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise peuvent au moins soutenir une conversation en français est partagée par une minorité dans la plupart des sous-groupes (à l’exception des anglophones). Elle est toutefois un peu plus répandue chez les personnes qui :

    • sont nées à l’extérieur du Canada (42 %) ou sont allophones (44 %);
    • maîtrisent l’autre langue officielle (42 %);
    • interagissent très souvent avec les locuteurs de l’autre langue officielle (46 %);
    • résident à Montréal ou à Gatineau (37 %, contre 28 % dans le reste du Québec).
    B. Les opinions à l’endroit des anglophones du Québec
    1. Prédominance des mythes et idées erronées concernant les membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise

    Plusieurs francophones entretiennent des idées erronées au sujet des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise, en particulier lorsqu’il est question de leur utilisation du français dans leur quotidien.

    Les répondants devaient évaluer la véracité de quatre énoncés (deux vrais et deux faux) au sujet de l’utilisation et la transmission du français dans la population québécoise de langue maternelle anglaise, dans le but d’évaluer la prédominance de certains mythes et de certaines idées préconçues dans la société en général. Ces énoncés s’appuyaient directement sur les renseignements recueillis lors de la phase préliminaire de la recherche (voir la section « Recherche préliminaire » ci-dessus). Les francophones entretiennent majoritairement des idées erronées dans deux énoncés, tandis qu’ils sont répartis de façon presque égale dans les deux autres mythes potentiels.

    Les francophones sont partagés de façon presque égale quant à savoir s’il est vrai ou faux que la plupart des élèves du Québec ayant l’anglais comme langue maternelle fréquentent des écoles francophones ou sont inscrits dans des programmes d’immersion en français. Par ailleurs, une majorité de francophones pense qu’il est faux que la plupart des membres de la population québécoise ayant l’anglais comme langue maternelle utilisent régulièrement le français dans leur quotidien.En réalité, ces deux énoncés sont vrais. En revanche, une grande majorité d’anglophones (plus de sept sur dix) croit, à juste titre, que chacun de ces énoncés était vrai.

    Évaluation des énoncés véridiques sur les membres de la population québécoise ayant l’anglais comme langue maternelle
    Au Québec, la plupart des élèves ayant l’anglais comme langue maternelle fréquentent des écoles francophones ou sont inscrits dans des programmes d’immersion française (Vrai) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : vrai 49 44 79
    Totalement vrai 7 5 20
    En grande partie vrai 41 38 59
    Net : faux 42 47 13
    En grande partie faux 33 36 13
    Totalement faux 10 11 1
    Incertain(e) 9 9 7
    La plupart des membres de la population québécoise ayant l’anglais comme langue maternelle utilisent régulièrement le français dans leur quotidien (Vrai) 
    [Si demandé : Ceci peut inclure parler français à la maison, l’utiliser au bureau ou comme langue d’instruction à l’école, ou l’avoir comme autre langue maternelle en plus de l’anglais]
    Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : vrai 47 42 73
    Totalement vrai 10 9 16
    En grande partie vrai 37 33 57
    Net : faux 50 54 23
    En grande partie faux 37 40 18
    Totalement faux 13 14 5
    Incertain(e) 4 3 4

    Question 6

    Je vais vous lire une série d’énoncés au sujet des Québécoises et Québécois ayant l’anglais comme langue maternelle. Veuillez me dire si, selon vous, chacun de ces énoncés est totalement vrai, en grande partie vrai, en grande partie faux ou totalement faux.

    Une tendance semblable est observée pour les deux énoncés erronés : les anglophones sont beaucoup plus susceptibles que les francophones de croire qu’il est faux que la plupart des travailleurs québécois ayant l’anglais comme langue maternelle travaillent uniquement dans cette langue et n’utilisent pas régulièrement le français en milieu de travail, ou que quand un membre de la population québécoise dont la langue maternelle est l’anglais et son partenaire dont la langue maternelle est le français ont des enfants, la plupart de ces derniers finissent par adopter l’anglais comme leur langue maternelle, plutôt que le français. Une majorité de francophones juge que chacun de ces énoncés sont vrais, alors que les deux sont faux.

    Évaluation des énoncés erronés sur les membres de la population québécoise ayant l’anglais comme langue maternelle
    La plupart des travailleurs québécois ayant l’anglais comme langue maternelle travaillent uniquement dans cette langue et n’utilisent pas régulièrement le français en milieu de travail (Faux) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : faux 37 33 62
    Totalement faux 7 5 17
    En grande partie faux 30 28 46
    Net : vrai 59 64 33
    En grande partie vrai 48 51 32
    Totalement vrai 11 12 1
    Incertain(e) 4 4 4
    Quand un membre de la population québécoise dont la langue maternelle est l’anglais et son partenaire dont la langue maternelle est le français ont des enfants, la plupart de ces derniers finissent par adopter l’anglais comme leur langue maternelle, plutôt que le français (Faux) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : faux 37 35 54
    Totalement faux 8 8 11
    En grande partie faux 30 27 43
    Net : vrai 55 58 39
    En grande partie vrai 44 46 32
    Totalement vrai 11 12 7
    Incertain(e) 7 7 7

    Question 6

    Je vais vous lire une série d’énoncés au sujet des Québécoises et Québécois ayant l’anglais comme langue maternelle. Veuillez me dire si, selon vous, chacun de ces énoncés est totalement vrai, en grande partie vrai, en grande partie faux ou totalement faux.

    Les répondants les plus susceptibles de croire à juste titre que les deux énoncés véridiques sont au moins en grande partie vrais et que les deux énoncés erronés sont en grande partie ou totalement faux sont les personnes qui :

    • ont l’anglais ou une langue non officielle comme langue maternelle;
    • interagissent très souvent avec les locuteurs de l’autre langue officielle;
    • ne sont pas nées au Canada.

    Il convient aussi de noter que les francophones de 55 ans et plus sont beaucoup plus susceptibles que les plus jeunes, c’est-à-dire ceux âgés de 18 à 34 ans, d’entretenir des idées fausses quant à l’utilisation du français par la population québécoise de langue maternelle anglaise. Les membres de ce groupe sont aussi plus nombreux à juger que la plupart des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise n’utilisent pas le français au travail (72 % contre 53 %), et de croire à tort qu’il est faux que la majorité de cette population utilise régulièrement le français dans son quotidien (61 % contre 41 %).

    2. Prédominance des mythes et idées erronées concernant les anglophones de façon plus générale

    La plupart des francophones croient qu’il est rare que les anglophones du Québec s’intéressent à la culture d’expression française et une majorité juge aussi que le bilinguisme officiel du Canada est plus valorisé par les francophones que par les anglophones dans la province. La moitié pense que les Québécois d’expression anglaise restent principalement entre eux.

    L’on a demandé aux membres de la population québécoise d’évaluer la véracité de trois énoncés erronés concernant les anglophones de la province (pas seulement ceux qui ont l’anglais comme une langue maternelle) et d’un énoncé véridique sur les Canadiens hors Québec. Comme pour la question précédente, ces énoncés visaient à évaluer la prédominance d’idées erronées et s’appuyaient directement sur les renseignements recueillis lors de la phase préliminaire de la recherche (voir la section « Recherche préliminaire » ci-dessus).

    Quant à savoir s’il est vrai ou faux que les anglophones au Québec restent entre eux et n’interagissent pas beaucoup avec les francophones, les avis des francophones sont mitigés. En revanche, une forte majorité d’anglophones jugent cet énoncé faux. Une grande majorité de francophones croit qu’il est rare que les anglophones du Québec s’intéressent aux produits et aux événements culturels de langue française et que le bilinguisme officiel du Canada est plus valorisé par les francophones que par les anglophones dans la province. Ces deux énoncés ont, toutefois, suscité des évaluations plus partagées de la part des anglophones.

    Évaluation d’énoncés erronés portant sur les anglophones du Québec
    De façon générale, les anglophones au Québec restent entre eux et n’interagissent pas beaucoup avec les francophones (Faux) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : faux 48 45 62
    Totalement faux 13 12 20
    En grande partie faux 35 34 42
    Net : vrai 49 51 35
    En grande partie vrai 41 43 34
    Totalement vrai 8 9 2
    Incertain(e) 3 3 3
    Il est rare que les anglophones au Québec s’intéressent aux produits et aux événements culturels de langue française (Faux) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : faux 41 39 51
    Totalement faux 10 10 12
    En grande partie faux 30 29 39
    Net : vrai 54 56 46
    En grande partie vrai 41 41 37
    Totalement vrai 14 14 10
    Incertain(e) 5 5 3
    Le bilinguisme officiel du Canada est plus valorisé par les francophones que par les anglophones au Québec (Faux) Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : faux 26 22 48
    Totalement faux 10 9 19
    En grande partie faux 16 13 29
    Net : vrai 69 73 44
    En grande partie vrai 40 42 28
    Totalement vrai 30 32 16
    Incertain(e) 5 4 8

    Question 7

    Je vais vous lire une autre série d’énoncés au sujet des anglophones au sens large. Veuillez me dire si vous croyez que chaque énoncé est totalement vrai, en grande partie vrai, en grande partie faux ou totalement faux.

    Les réponses sont généralement semblables dans plusieurs des sous-groupes. On observe, toutefois, des différences significatives en fonction de l’âge en ce qui concerne la mesure dans laquelle les francophones ont des idées fausses par rapport à ces énoncés. En effet, les francophones de 55 ans et plus sont beaucoup plus susceptibles que les plus jeunes, soit ceux âgés de 18 à 34 ans, de croire qu’il est rare que les anglophones du Québec s’intéressent à la culture de langue française (60 % contre 48 %) et que ceux-ci restent principalement entre eux, sans beaucoup interagir avec les francophones (60 % contre 49 %).

    Il convient aussi de souligner que les francophones résidant dans les régions de Montréal et de Gatineau sont plus nombreux que dans le reste de la province à juger qu’il est rare que les anglophones s’intéressent à la culture de langue française (61 % contre 51 %).

    Les francophones du Québec ont des opinions mitigées quant à savoir si les membres de la population canadienne hors Québec appuient ou non la Loi sur les langues officielles, tandis que les anglophones estiment principalement que la vaste majorité de la population y est favorable.

    La moitié des francophones du Québec croit qu’il est totalement ou en grande partie faux que la vaste majorité des gens au Canada à l’extérieur du Québec appuientla Loi sur les langues officielles du Canada, tandis que plus de quatre sur dix sont d’avis que cet énoncé est totalement ou en grande partie vrai. Chez les anglophones, en revanche, près des deux tiers des membres de la population québécoise d’expression anglaise jugent cet énoncé véridique dans une certaine mesure, et seulement trois personnes sur dix croient qu’il est faux.

    Évaluation de l’appui à la Loi sur les langues officielles hors Québec
    La vaste majorité des gens au Canada à l’extérieur du Québec appuient la Loi sur les langues officielles du Canada (Vrai)
    [Note pour l’intervieweur – si demandé : qui reconnaît l’égalité de statut du français et de l’anglais, et le droit d’obtenir des services du gouvernement fédéral dans les deux langues officielles]
    Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : vrai 46 44 64
    Totalement vrai 12 12 17
    En grande partie vrai 34 32 47
    Net : faux 47 50 30
    En grande partie faux 30 31 20
    Totalement faux 17 18 10
    Incertain(e) 7 7 6

    Question 7

    Je vais vous lire une autre série d’énoncés au sujet des anglophones au sens large. Veuillez me dire si vous croyez que chaque énoncé est totalement vrai, en grande partie vrai, en grande partie faux ou totalement faux.

    Les réactions à cet énoncé sont généralement semblables dans la plupart des sous-groupes. L’impression qu’il est vrai que la vaste majorité des gens au Canada hors Québec appuient la Loi sur les langues officielles est plus répandue chez les personnes qui interagissent très souvent avec les locuteurs de l’autre langue officielle (54 %), les 18 à 34 ans (55 %) et les personnes qui détiennent un diplôme d’études secondaires ou moins (57 %).

    C. Regard vers l’avenir
    1. Les idées erronées que les francophones et les anglophones du Québec entretiennent les uns au sujet des autres constituent-elles un problème?

    Six membres de la population québécoise sur dix conviennent que les idées erronées que les francophones et les anglophones de la province entretiennent les uns au sujet des autres constituent un problème.

    Après avoir mentionné aux répondants que certains affirment que les francophones et les anglophones au Québec ont beaucoup de mauvaises perceptions les uns des autres, on leur a demandé si, à leur avis, il s’agit d’un problème. Une grande majorité est plutôt ou tout à fait d’accord pour dire qu’il s’agit d’un problème. Cette opinion est partagée par les deux communautés linguistiques, 61 % des francophones et 67 % des anglophones se disant plutôt ou tout à fait de cet avis. Il convient de souligner que les anglophones sont plus nombreux que les francophones à être fortement de cet avis (29 % contre 18 %). En revanche, plus du tiers des francophones et trois anglophones sur dix nient, dans une certaine mesure, qu’il s’agit d’un problème.

    Si les idées erronées entre francophones et anglophones du Québec constituent un problème
    Niveau d’accord Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : En accord 62 61 67
    Tout à fait d’accord 20 18 29
    Plutôt d’accord 42 43 37
    Net : En désaccord 35 36 30
    Plutôt en désaccord 26 27 17
    Tout à fait en désaccord 9 8 13
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 4 4 3

    Question 8

    Certains affirment que les francophones et les anglophones au Québec ont beaucoup de mauvaises perceptions les uns des autres. Êtes-vous tout à fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt en désaccord ou tout à fait en désaccord pour dire qu’il s’agit d’un problème?

    Dans tous les sous-groupes, une majorité est d’accord avec cet énoncé, avec peu de variation dans les réponses. Les personnes allophones sont un peu plus nombreuses à être tout à fait d’accord. Il convient de noter que l’impression selon laquelle les idées erronées qu’entretiennent les francophones et les anglophones du Québec les uns au sujet des autres représentent un problème est semblable, quelles que soient l’ampleur des interactions avec l’autre communauté linguistique ou la capacité de parler l’autre langue officielle.

    2. Comment améliorer les relations entre les anglophones et les francophones du Québec

    La plupart des gens du Québec estiment qu’un ensemble de mesures pourraient contribuer à améliorer les relations entre les anglophones et les francophones de la province, en particulier pour ce qui est de favoriser les interactions sociales positives par l’intermédiaire d’activités comme les programmes d’échange jeunesse, les clubs sociaux, la musique, le sport ou d’autres champs d’intérêt spécifiques.

    L’on a présenté aux membres de la population québécoise quatre mesures potentielles visant à améliorer les relations entre les anglophones et les francophones de la province, puis on leur a demandé dans quelle mesure chacune pourrait aider, le cas échéant. Près de neuf personnes sur dix estiment qu’il serait au moins un peu utile (dont plus de la moitié qui croient qu’il serait très utile) de favoriser les interactions sociales positives entre francophones et anglophones par l’intermédiaire d’activités comme les programmes d’échange jeunesse, les clubs sociaux, la musique, le sport ou d’autres champs d’intérêt spécifiques. Près de huit personnes sur dix jugent que de voir les anglophones du Québec manifester un plus grand intérêt pour la culture francophone et que cette communauté soit plus présente dans les médias de langue française aiderait au moins un peu à améliorer les relations entre les deux communautés, et la même proportion de répondants croit de même en ce qui concerne la publicisation d’histoires personnelles d’anglophones du Québec qui ont adopté la langue française et la parle couramment. Un peu moins de huit personnes sur dix trouvent qu’il serait au moins un peu utile de publier plus de statistiques qui démontrent que de nombreux anglophones au Québec peuvent véritablement parler français et le font (une majorité d’anglophones est d’avis que cela améliorerait considérablement les relations). Les francophones et les anglophones ont, en général, des opinions semblables quant à l’efficacité de chacune de ces mesures.

    Efficacité de mesures précises pour améliorer les relations entre les anglophones et les francophones du Québec
    Si l’on favorisait plus d’interactions positives entre francophones et anglophones à travers des activités sociales comme des programmes d’échange jeunesse, les clubs sociaux, la musique, le sport ou d’autres intérêts spécifiques Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : améliorerait 88 89 83
    Améliorerait considérablement les relations 55 55 59
    Améliorerait un peu les relations 33 35 24
    Ne ferait aucune différence 9 9 13
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 2 2 4
    Si l’on voyait les anglophones au Québec manifester un plus grand intérêt envers la culture francophone et qu’ils étaient plus présents dans les médias de langue française au Québec Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : améliorerait 81 82 75
    Améliorerait considérablement les relations 40 41 29
    Améliorerait un peu les relations 42 41 46
    Ne ferait aucune différence 16 15 21
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 3 3 4
    Si l’on publicisait plus d’histoires personnelles d’anglophones au Québec qui ont adopté la langue française et qui la parle couramment Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : améliorerait 80 81 76
    Améliorerait considérablement les relations 40 39 46
    Améliorerait un peu les relations 40 42 30
    Ne ferait aucune différence 17 16 19
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 3 3 5
    Si l’on publiait plus de statistiques qui démontrent que de nombreux anglophones au Québec peuvent véritablement parler français et le font Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : améliorerait 78 78 83
    Améliorerait considérablement les relations 38 36 52
    Améliorerait un peu les relations 40 42 30
    Ne ferait aucune différence 19 19 14
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 3 3 3

    Question 9

    Croyez-vous que les mesures suivantes permettraient d’améliorer les relations entre les anglophones et les francophones au Québec? Diriez-vous qu’elles les amélioreraient considérablement, un peu ou si cela ne ferait aucune différence?

    En général, les opinions quant à l’efficacité potentielle de ces mesures sont sensiblement les mêmes dans l’ensemble des groupes démographiques. Certaines observations valent tout même d’être soulignées en ce qui concerne les personnes les plus susceptibles de croire que certaines de ces mesures seraient très efficaces.

    • Les membres de la population québécoise plus âgés (de 55 ans et plus) et ceux dont le revenu du ménage est inférieur à 100 000 $ sont les plus susceptibles de penser qu’il serait très efficace de publiciser plus d’histoires personnelles d’anglophones du Québec qui ont adopté la langue française et la parle couramment.
    • Les francophones plus jeunes (de 18 à 34 ans), les personnes racisées et les titulaires d’un diplôme universitaire sont quant à eux plus enclins à croire qu’il serait très utile de favoriser plus d’interactions sociales positives.
    3. Les anglophones du Québec comme passerelles entre les Franco-Québécois et les anglophones du reste du Canada

    Sept répondants sur dix sont d’avis que les anglophones du Québec peuvent créer des ponts entre les francophones de la province et les anglophones du reste du Canada.

    Les anglophones et les francophones du Québec s’entendent pratiquement dans des proportions identiques pour dire que les anglophones de la province peuvent servir de lien entre les francophones du Québec et les anglophones du reste du Canada en encourageant un plus grand bilinguisme et en expliquant le contexte québécois au reste de la population. Près de sept personnes sur dix, tant chez les anglophones (77 %) que chez les francophones (71 %), sont au moins plutôt en accord avec cet énoncé. Le quart des francophones et un peu moins de deux anglophones sur dix sont, quant à eux, en désaccord, tandis que 5 % des gens se disent incertains à ce sujet.

    Les anglophones du Québec peuvent servir de ponts entre les francophones de la province et les anglophones du reste du Canada
    Niveau d’accord Total
    ( n  = 1 005)
    %
    Français
    ( n  = 885)
    %
    Anglais
    ( n  = 120)
    %
    Net : En accord 71 71 77
    Tout à fait d’accord 19 18 26
    Plutôt d’accord 52 53 50
    Net : En désaccord 24 25 18
    Plutôt en désaccord 17 19 10
    Tout à fait en désaccord 7 6 8
    Je suis incertain(e)/je préfère ne pas répondre 5 4 5

    Question 10

    Certains affirment que les anglophones du Québec peuvent être des ponts entre les francophones du Québec et les anglophones du reste du Canada. 
    [Note pour l’intervieweur – si demandé : par exemple, pour encourager un plus grand bilinguisme chez les autres Canadiens et leur expliquer le contexte québécois.] Êtes-vous tout à fait d’accord, plutôt d’accord, plutôt en désaccord ou tout à fait en désaccord avec cette affirmation?

    L’opinion selon laquelle les anglophones du Québec pourraient servir de lien entre les francophones de la province et les anglophones du reste du Canada est partagée par une majorité dans l’ensemble des sous-groupes, et peu de variations ont été observées. C’est chez les personnes qui n’interagissent que rarement avec des personnes qui parlent l’autre langue officielle et chez les allophones (78 %) qu’on est le plus d’accord, dans une certaine mesure, et moins chez les membres de la population québécoise de 55 ans et plus (66 %).

    D. Profil linguistique des répondants

    Les tableaux suivants présentent la répartition pondérée des personnes ayant pris part au sondage en fonction de leur profil linguistique.

    Variable : Langue du sondage Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Français 86 100 0
    Anglais 14 0 100
    Variable : Langue maternelle Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Français 77 89 6
    Anglais 11 3 55
    Autre(s) langue(s) 15 10 44
    Variable : Maîtrise de l’autre langue officielle Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Très bien 29 29 24
    Assez bien 31 31 28
    Plus ou moins 25 25 24
    Mal 9 8 16
    Ne parlent pas du tout l’autre langue 7 7 7

    IV. Profil des répondants et des répondantes

    Les tableaux suivants présentent la répartition pondérée des personnes ayant pris part au sondage, en fonction des principales données démographiques et d’autres variables.

    Variable : Âge Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    De 18 à 34 ans 27 27 30
    De 35 à 54 ans 34 35 27
    55 ans et + 39 38 44
    Variable : Genre Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Femme 51 48 50
    Homme 49 48 51
    Autre identité de genre <1% <1 1
    Variable : Niveau de scolarité Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Études secondaires ou moins 23 23 22
    Apprentissage enregistré, études collégiales, études universitaires en partie 37 38 33
    Diplôme d’études universitaires ou supérieures 38 38 42
    Variable : Revenu annuel total du ménage Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Moins de 20 000 $ 6 6 6
    De 20 000 $ à moins de 40 000 $ 13 14 13
    De 40 000 $ à moins de 60 000 $ 14 15 10
    De 60 000 $ à moins de 80 000 $ 10 10 12
    De 80 000 $ à moins de 100 000 $ 12 13 9
    De 100 000 $ à moins de 150 000 $ 16 16 17
    150 000 $ ou plus 17 17 16
    Je préfère ne pas répondre 11 10 17
    Variable : Lieu de naissance Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Au Québec 72 79 33
    Ailleurs au Canada 6 4 16
    À l’étranger 22 17 51
    Variable : Handicap Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Oui 6 5 11
    Non 94 95 89
    Je ne sais pas/je préfère ne pas répondre <1 <1 1
    Variable : Origine ethnique Total
    %
    Français
    %
    Anglais
    %
    Personne blanche/canadienne/québécoise 79 83 54
    Personne racisée 22 18 43