Un avenir en commun : regard sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire

 

Table des matières

 

Préface

J’ai le plaisir de vous présenter mon rapport Un avenir en commun : regard sur nos communautés de langue officielle en situation minoritaire. Comme je l’ai indiqué dans mon rapport annuel 2023-2024, publié en mai dernier, le régime linguistique canadien est dans une année de transition. La modernisation de la Loi sur les langues officielles (la Loi) a en effet introduit nombre de changements qui se mettent en place progressivement, y compris dans les activités du Commissariat aux langues officielles (le Commissariat). J’ai centré mon rapport annuel 2023-2024 sur les questions de conformité et sur l’incidence de la modernisation de la Loi, de façon à donner à ces thèmes l’attention qu’ils méritent. De même, je tenais à mettre en lumière certains enjeux clés des communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM). Ces communautés sont souvent en première ligne en ce qui a trait aux défis liés aux langues officielles à travers le Canada. Le présent état des lieux vise à diriger le projecteur sur leurs réalités, leurs besoins et leurs accomplissements.

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Les dossiers communautaires sont une vitrine à travers laquelle nous pouvons observer la relation qu’entretiennent les institutions fédérales avec les CLOSM ainsi que la façon dont ces institutions respectent leurs engagements en matière de protection des droits linguistiques de l’ensemble de la population canadienne et de promotion de l’épanouissement des CLOSM en vertu de la Loi. Il y a bien sûr des disparités et des manquements à rapporter à ce sujet, mais aussi des avancées importantes. Au sommet de cette liste figure évidemment la modernisation de la Loi en juin 2023, qui représente un accomplissement majeur et le fruit d’un effort concerté de la classe politique, de la fonction publique et de la société civile.

Raymond

Les principaux engagements du gouvernement du Canada tels qu’énoncés dans la partie VII de la Loi sous-tendent cet état des lieux. L’épanouissement des CLOSM et la promotion du français et de l’anglais demeurent omniprésents, la Loi évoquant aussi désormais les bienfaits économiques du bilinguisme ainsi que l’importance de donner à toute personne au Canada la possibilité d’apprendre une deuxième langue officielle. Je me penche en particulier sur les problèmes auxquels sont confrontées les communautés d’expression anglaise du Québec, que ce soit sur le plan de la reconnaissance de leurs droits, de leur légitimité sur le plan des perceptions en tant que CLOSM ou de leur vulnérabilité socioéconomique croissante. Comme l’ont démontré de récents événements, la position unique des communautés de langue anglaise du Québec dans le paysage linguistique canadien s’accompagne de son propre lot de défis.

L’urgence de protéger la langue française au Canada est maintenant clairement reconnue dans la Loi. Il s’agit d’un grand chantier qui anime l’ensemble des communautés à travers le Canada. Dans les six années qui se sont écoulées depuis le début de mon mandat, j’ai entendu de nombreuses préoccupations à ce sujet de la part des communautés et je les évoque dans ce rapport. Je veux toutefois souligner que les communautés d’expression anglaise du Québec ne sont pas exclues de l’enjeu de la protection du français. Elles sont, en fait, des partenaires de la réalisation de cet objectif et elles le revendiquent. Elles veulent contribuer à la vitalité de la langue française au Canada et il nous revient de leur donner cette place tout en protégeant leurs droits en tant que CLOSM . Au nombre des alliés de la langue française au Canada, il faut également prendre acte du rôle essentiel que jouent les personnes qui défendent, promeuvent, enseignent et étudient le français comme langue seconde d’un océan à l’autre.

Au-delà de la protection qu’offre la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) en matière d’instruction au niveau des écoles primaires et secondaires dans la langue de la minorité, la Loi modernisée engage désormais le gouvernement fédéral à renforcer les possibilités d’apprentissages de qualité dans la langue propre aux minorités francophones et anglophones, tout au long de la vie. J’ai accueilli favorablement cet engagement envers le continuum de l’apprentissage qui, dorénavant, s’étend explicitement de la petite enfance au postsecondaire et est envisagé au-delà du contexte formel.

Plusieurs questions clés, telles que la santé ou l’économie, ne sont que peu abordées dans ce rapport bien qu’elles revêtent une grande importance dans la réalité des CLOSM . Il ne faut pas y voir une omission, mais le résultat d’un tri nécessaire pour un rapport concis mettant l’accent sur certains secteurs qui vivent ou se préparent à vivre de grandes transformations en lien avec la Loi modernisée ainsi que divers facteurs environnementaux. D’autre part, certains thèmes ont été écartés afin de ne pas porter atteinte à l’intégrité des enquêtes en cours, ou de préjudice aux causes qui sont en processus de contestation judiciaire.

Cet état des lieux compte quatre sections, dont une première qui traite des grands maillons du continuum de l’apprentissage; une seconde qui porte sur les enjeux intergouvernementaux, en l’occurrence entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires; une troisième qui porte sur quelques aspects de la vitalité des CLOSM ; et une dernière qui aborde brièvement l’enquête tant attendue de Statistique Canada sur la population de langue officielle en situation minoritaire. J’espère que ce rapport amènera une réflexion éclairante sur la réalité actuelle des CLOSM . Plus qu’un simple constat, les pistes d’action qu’il contient s’adressent à ceux et celles qui ont le pouvoir de changer les choses, que ce soit au niveau politique, institutionnel ou social.

Carte 1 - Langues officielles au Canada

Carte 1 - Langues officielles au Canada, texte descriptif ci-dessous

Source: Statistique Canada. 2022. Profil du recensement, Recensement de la population de 2021, Produit no 98-316-X2021001 au catalogue de Statistique Canada, Ottawa.

Version texte : Langues officielles au Canada

Personnes qui peuvent parler anglais : 31.8M (87 % de la population)
Personnes qui peuvent parler français : 10.7M (29 % de la population)

Terre-Neuve-et-Labrador 
  • 477 900 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 130 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 25 945 personnes qui peuvent parler français et anglais
Île-du-Prince-Édouard 
  • 131 465 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 135 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 19 385 personnes qui peuvent parler français et anglais
Nouvelle-Écosse 
  • 856 200 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 605 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 98 940 personnes qui peuvent parler français et anglais
Nouveau-Brunswick 
  • 442 430 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 60 175 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 260 120 personnes qui peuvent parler français et anglais
Québec 
  • 445 575 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 3 980 275 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 3 898 980 personnes qui peuvent parler français et anglais
Ontario 
  • 12 196 575 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 39 310 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 1 519 365 personnes qui peuvent parler français et anglais
Manitoba
  • 1 197 535 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 1 680 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 110 435 personnes qui peuvent parler français et anglais
Saskatchewan 
  • 1 055 000 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 450 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 51 970 personnes qui peuvent parler français et anglais
Alberta 
  • 3 894 690 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 3 105 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 258 330 personnes qui peuvent parler français et anglais
Colombie-Britannique 
  • 4 461 290 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 1 785 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 326 865 personnes qui peuvent parler français et anglais
Yukon 
  • 33 950 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 85 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 5 660 personnes qui peuvent parler français et anglais
Territoires du Nord-Ouest 
  • 35 940 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 100 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 4 295 personnes qui peuvent parler français et anglais
Nunavut 
  • 33 105 personnes qui peuvent parler anglais, mais pas français
  • 65 personnes qui peuvent parler français, mais pas anglais
  • 1 390 personnes qui peuvent parler français et anglais
Population totale selon la première langue officielle parlée
  • Canada : 36 620 955 (100 %)
    • Français : 22 % (8 066 633)
    • Anglais : 76,1 % (27 881 228)
  • Québec : 8 406 905 (100 %)
    • Français : 84,1 % (7 074 328)
    • Anglais : 14,9 % (1 253 578)
  • Canada hors Québec : 28 214 050 (100 %)
    • Français : 3,5 % (992 305)
    • Anglais : 94,4 % (26 627 650)
 
 
 
 

Apprentissage

La Loi modernisée exprime l’engagement du gouvernement à « renforcer les possibilités pour les minorités francophones et anglophones de faire des apprentissages de qualité […] dans leur propre langue tout au long de leur vie, notamment depuis la petite enfance jusqu’aux études postsecondaires ». Cet engagement est crucial pour la vitalité des CLOSM dans les générations à venir. En effet, les communautés signalent depuis trop longtemps des besoins criants et grandissants dans l’entièreté du continuum de l’apprentissage. Il est maintenant temps pour toutes les institutions fédérales concernées de passer à l’action et de traduire ces mots en mesures concrètes. Cela nécessitera une réelle compréhension de la réalité des communautés en ce qui a trait à l’éducation en milieu minoritaire, et ce, à tous les niveaux d’éducation.

Plus Moins
 

La petite enfance

La dernière année nous a réservé quelques bonnes nouvelles en ce qui concerne la petite enfance, maillon clé au tout début de ce continuum. D’abord, le Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien, qui s’inspire des garderies à 10 $ par jour du Québec, a permis aux services de garde partout au Canada de respirer un peu mieux. J’étudie cette nouveauté de près afin de déterminer si les CLOSM bénéficient partout d’une prise en compte de leurs besoins particuliers par le moyen de clauses linguistiques ou par d’autres mécanismes appropriés. Il serait inadmissible que l’ensemble des CLOSM ne puissent bénéficier de cette politique positive en ce qui a trait aux services de garde.

La seconde bonne nouvelle est l’adoption de la Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada (projet de loi C-35) qui garantit désormais un engagement financier à long terme pour les garderies des CLOSM . Sans la mobilisation des communautés, la contribution de mémoires d’organismes clés à l’étape de l’étude en comité, dont celui du Commissariat, et un amendement ultime amené au Sénat, cette Loi n’aurait pas pris en compte la lentille « langues officielles » prévue par la Loi modernisée. Cet engagement financier assurera un meilleur accès à ces programmes et services et contribuera, par le fait même, à renforcer la transmission de la langue et la rétention des jeunes dans les réseaux éducatifs dans la langue de la minorité.

Des défis importants nous attendent cependant. D’abord, les communautés d’expression anglaise du Québec n’ont pas accès à plusieurs fonds issus du Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 (le Plan d’action) en vigueur dans le domaine de la petite enfance, notamment ceux de l’initiative Appui au développement de la petite enfance. Comme l’accès à des services de petite enfance dans la première langue officielle est essentiel à la vitalité de ces communautés, le gouvernement se doit de tenir compte de leurs besoins dans la conception de ses programmes de financement.

Du côté francophone, on observe une demande qui surpasse la capacité actuelle et une pénurie aiguë de main-d’œuvre qualifiée dans le domaine de la petite enfance. On observe aussi que les sommes accordées aux fournisseurs de service ne prennent pas en compte le coût accru des salaires et des infrastructures, ce qui semble décourager la participation de certains grands pourvoyeurs de services dans ce secteur. Les besoins sont particulièrement prononcés dans les régions rurales, dans des régions éloignées comme le Grand Nord où les coûts d’exploitation sont beaucoup plus élevés, et dans les régions qui connaissent une forte croissance de la population francophone, que ce soit en raison de l’immigration ou des déplacements de population des milieux ruraux vers les milieux urbains. En Ontario, par exemple, l’enthousiasme des parents francophones a fait gonfler les listes d’attente de façon spectaculaire.

La pénurie généralisée d’éducateurs et d’éducatrices a déjà fait couler beaucoup d’encre à travers le pays, mais pour les communautés de la minorité francophone s’ajoute le fait qu’elles doivent recruter ce personnel dans des bassins plus exigus. De plus, leur clientèle est éparpillée et leurs pourvoyeurs de services sont dispersés. Cette configuration crée ultimement un manque de places en garderie de langue française, ce qui pousse plusieurs parents à inscrire leurs enfants dans des garderies anglophones situées à proximité, rendant les prochaines générations vulnérables à l’assimilation.

Je tiens à souligner que des initiatives intéressantes donnent l’exemple pour tenter d’atténuer cette situation. Au Yukon, la garderie francophone du Petit Cheval Blanc s’est tournée vers le recrutement international pour pourvoir ses postes vacants. À Terre-Neuve-et-Labrador, la province offre des primes de plus de 5 100 $ par année aux personnes éducatrices certifiées du Centre de la Petite Enfance et Famille Les P’tits Cerfs-Volants, qui offrent des services de garde licenciés. Le Manitoba investit dans la formation des éducateurs et éducatrices en jeune enfance afin de leur assurer un parcours complet. La Saskatchewan collabore avec les établissements postsecondaires, dont le Collège Mathieu, afin de renforcer le développement professionnel des éducateurs et éducatrices en petite enfance. Ces mesures valorisent cette profession et contribuent ainsi à assurer la vitalité des CLOSM . Elles ne remplacent toutefois pas l’engagement plus large que doivent mettre en œuvre les institutions fédérales, par la prise de mesures positives, afin de répondre aux besoins en matière de développement de la petite enfance dans les communautés.

Enfin, en préparation au renouvellement, en 2026, des ententes avec les provinces et les territoires sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants, le gouvernement fédéral aurait avantage à consulter une plus grande variété d’intervenants, tant en formation de la main-d’œuvre que des services à la petite enfance, pour donner la chance aux communautés de reproduire les pratiques couronnées de succès ailleurs au pays. Il est primordial que les CLOSM disposent des moyens de participer pleinement à la mise en œuvre de la vision du programme national de garderies.

Éducation primaire et secondaire

L’éducation dans la langue de la minorité est fondamentale au plein épanouissement des minorités de langue officielle. L’école, sans nul doute, est l’institution la plus importante pour leur survie.

En 2023, j’ai eu l’occasion d’intervenir dans un dossier de la Cour suprême, Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest c Territoires du Nord-Ouest (Éducation, Culture et Formation). Dans sa décision, la Cour suprême a annulé des décisions ministérielles refusant l’admission à l’école en français d’enfants de parents non-ayants droit dans les Territoires du Nord-Ouest. Selon la Cour suprême, la ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation aurait dû considérer les valeurs de l’article 23 de la Charte dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire. Lorsque des décisions ministérielles ont des incidences importantes sur les valeurs consacrées par l’article 23 de la Charte, comme le maintien et l’épanouissement des CLOSM , ces valeurs doivent être prises en compte, et ce, même en l’absence d’une atteinte directe au droit garanti par l’article 23 aux ayants droit. Cette décision soutient le combat contre l’érosion linguistique subie par ces minorités au Canada, en particulier dans les communautés plus vulnérables comme celles des territoires.

Carte 2 - En 2021, c'est au Nouveau-Brunswick, au Québec et au Yukon que les pourcentages d'instruction dans la langue officielle minoritaire étaient les plus élevés, et en Alberta, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique qu'ils étaient les plus faibles

Carte 2 - En 2021, c'est au Nouveau-Brunswick, au Québec et au Yukon que les pourcentages d'instruction dans la langue officielle minoritaire étaient les plus élevés, et en Alberta, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique qu'ils étaient les plus faibles, texte descriptif ci-dessous

Source : Statistique Canada, 897 000 enfants sont admissibles à l'instruction dans la langue officielle minoritaire au Canada, Le Quotidien, no 11-001-X au catalogue, 30 novembre 2022, page 16.

Version texte : En 2021, c'est au Nouveau-Brunswick, au Québec et au Yukon que les pourcentages d'instruction dans la langue officielle minoritaire étaient les plus élevés, et en Alberta, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique qu'ils étaient les plus faibles
 

Le titre de la carte est « En 2021, c'est au Nouveau-Brunswick, au Québec et au Yukon que les pourcentages d'instruction dans la langue officielle minoritaire étaient les plus élevés, et en Alberta, à Terre-Neuve-et-Labrador et en Colombie-Britannique qu'ils étaient les plus faibles »

Il s'agit d'une carte du Canada par province et territoire montrant le nombre, dans des bulles vertes, et le pourcentage, dans des bulles bleues, d'enfants âgés de 5 à 17 ans admissibles à l'instruction dans la langue officielle minoritaire qui ont fréquenté un programme régulier ou une école de langue officielle minoritaire en 2021.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier ou une école de langue officielle minoritaire au Canada s'établissait à 468 000 et représentait 68,6 % du nombre total d'enfants admissibles au pays.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en anglais ou une école de langue anglaise au Québec s'établissait à 175 000 et représentait 76,2 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française au Canada hors Québec s'établissait à 292 000 et représentait 64,7 % du nombre total d'enfants admissibles au Canada hors Québec.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française à Terre-Neuve-et-Labrador s'établissait à 1 200 et représentait 54,2 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française à l'Île-du-Prince-Édouard s'établissait à 1 400 et représentait 64,3 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française en Nouvelle-Écosse s'établissait à 8 100 et représentait 63,3 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française au Nouveau-Brunswick s'établissait à 30 000 et représentait 80,6 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française en Ontario s'établissait à 180 000 et représentait 67,1 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française au Manitoba s'établissait à 15 000 et représentait 64,0 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française en Saskatchewan s'établissait à 7 000 et représentait 59,7 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française en Alberta s'établissait à 25 000 et représentait 49,6 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française en Colombie-Britannique s'établissait à 24 000 et représentait 55,7 % du nombre total d'enfants admissibles dans cette province.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française au Yukon s'établissait à 580 et représentait 71,0 % du nombre total d'enfants admissibles dans ce territoire.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française dans les Territoires du Nord-Ouest s'établissait à 530 et représentait 66,9 % du nombre total d'enfants admissibles dans ce territoire.

Le nombre d'enfants admissibles âgés de 5 à 17 ans qui ont fréquenté un programme régulier en français ou une école de langue française au Nunavut s'établissait à 220 et représentait 59,7 % du nombre total d'enfants admissibles dans ce territoire.

Le Recensement de 2021 a d’ailleurs apporté des données probantes très attendues sur les ayants droit. Elles confirment que plus du tiers des enfants d’ayants droit admissibles à l’éducation en français à l’extérieur du Québec n’ont jamais fréquenté les écoles de la minorité. Dans le cas de l’éducation en anglais au Québec, ce chiffre atteint le quart des enfants admissiblesNote de bas de page 1. Selon Statistique Canada, ce phénomène peut être lié à un ensemble de facteurs, dont la proximité des écoles. J’encourage Statistique Canada à continuer d’approfondir ses analyses dans ce domaine, notamment à l’aide de l’enquête post-censitaire sur les populations de langue officielle en situation minoritaire qui doit paraître d’ici la fin de l’année 2024. La Loi modernisée engage le gouvernement à rétablir le poids démographique de la minorité francophone par l’immigration, mais il faut aussi s’assurer de ne pas perdre les nouvelles générations à l’assimilation par le canal des écoles de la langue de la majorité.

En ce sens, je me réjouis que la modernisation de la Loi inclue l’engagement du gouvernement fédéral à estimer périodiquement le nombre d’enfants d’ayants droit. Il est essentiel que le gouvernement mette en œuvre cet engagement, et j’attends avec impatience le processus qui doit être élaboré par la ministre du Patrimoine canadien en vertu de l’article 2.3 de la Loi.

Les nouvelles données du recensement et d’autres sources de données de Statistique Canada sur les enfants admissiblesNote de bas de page 2 permettront aux divers intervenants et intervenantes de mieux cibler leurs efforts de recherche, de sensibilisation et de recrutement auprès des ayants droit, de revendiquer de façon stratégique les priorités quant à la construction ou l’agrandissement d’écoles. J’attends aussi avec beaucoup d’intérêt la publication des données de la nouvelle enquête post-censitaire sur les minorités de langue officielle, qui incluront des données sur leur scolarité. Le gouvernement fédéral devra mettre ces renseignements à profit pour prendre les mesures qui s’imposent pour renforcer ce continuum si essentiel à la vitalité des CLOSM . J’espère que des données plus complètes brosseront un portrait détaillé de la situation des ayants droit relativement à l’admissibilité de leurs enfants dans les établissements d’apprentissage de la minorité, notamment pour permettre aux gouvernements provinciaux et territoriaux de prendre des décisions éclairées en ce qui a trait à l’octroi des enveloppes dans ce domaine.

Français langue seconde et immersion

Les programmes d’éducation en français langue seconde, et notamment l’immersion française, sont au cœur du bilinguisme canadien. Le dernier recensement de 2021 nous apprend justement que les anglophones hors Québec qui ont participé à un programme d’immersion sont 12 fois plus susceptibles d’être bilinguesNote de bas de page 3. Quant aux communautés d’expression anglaise du Québec, qui ont vu naître le premier programme public d’immersion française en 1965, leur jeunesse bénéficie encore aujourd’hui de ces programmes, un outil essentiel au développement des compétences en français.

Nous avons aussi observé dans le dernier recensement que l’intérêt envers ces programmes est largement partagé par toutes les composantes de la population canadienne, incluant les divers groupes linguistiques et ethnoculturels. Selon un sondage parrainé en 2021 par le Commissariat, plus des trois quarts des personnes consultées étaient d’accord pour dire que les provinces et territoires doivent créer plus de places en immersion, et les personnes provenant de divers groupes linguistiques et ethnoculturels étaient parmi celles qui appuient le plus cette affirmationNote de bas de page 4.

Malheureusement, l’immersion française est encore trop souvent perçue comme une option parmi tant d’autres plutôt qu’un programme important et nécessaire. Dans certaines régions, incluant la capitale nationale du Canada, les conseils scolaires évaluent actuellement la possibilité de réduire drastiquement les programmes d’immersion au niveau primaire, alors qu’au Nouveau-Brunswick la structure de ces programmes a été remise en question à plusieurs reprises au cours des dernières années. Ailleurs, on manque de personnel pour assurer l’enseignement de ces programmes. Puisque la Loi « reconnait l’importance de donner à toute personne au Canada la possibilité d’apprendre une deuxième langue officielle », j’appelle tous les ordres de gouvernement à consacrer davantage de ressources pour améliorer l’accès aux programmes d’immersion en français. Ces programmes ont fait leurs preuves, ils suscitent année après année un grand intérêt; saisissons dès maintenant cette occasion de renforcer le bilinguisme canadien d’un bout à l’autre du pays.

La population canadienne baigne dans un écosystème linguistique commun. Des anglophones font partie d’institutions postsecondaires francophones, et vice-versa; francophones et anglophones sont voisins, amis, collègues et, l’exogamie étant une réalité grandissante, ils sont de plus en plus conjoints et co-parents. Si la vitalité d’une communauté francophone en milieu minoritaire tient à la capacité de ses membres à vivre, élever leurs enfants et avoir accès à des services en français, il est dans notre intérêt à tous de donner aux membres de la population canadienne de langue anglaise, d’un océan à l’autre, la chance de devenir bilingue.

Éducation postsecondaire

Les établissements d’enseignement postsecondaire en contexte francophone minoritaire sont confrontés à d’énormes difficultés en raison d’un sous financement structurel et opérationnel chronique, ce qui vient limiter l’accès aux programmes et à la formation en langue française au sein de ceux-ci. Certains anticipent par ailleurs une incidence négative de la décision récente du gouvernement fédéral de plafonner le nombre d’étudiants provenant de l’étranger sur leur viabilité financière et leur offre de programmes en français, et ce, dès la rentrée 2024.

La modernisation de la Loi inclut néanmoins un nouvel engagement du gouvernement fédéral envers ce secteur, puisqu’il figure désormais explicitement dans le continuum de l’apprentissage tout au long de la vie. Les étudiants et les administrations universitaires attendent de voir quelle forme concrète prendra ce nouvel engagement en ce qui a trait à l’éducation postsecondaire. Le temps est venu d’entamer des discussions avec les provinces et territoires sur la structure du financement à long terme de ces institutions, que ce soit par le Conseil des ministres de l’Éducation ou d’un autre mécanisme de concertation. Je m’attends en outre à ce qu’il y ait dans le règlement de la partie VII, en cours d’élaboration, des indications sur cet engagement.

Ces établissements assurent une formation professionnelle et technique essentielle pour répondre aux besoins de personnel pouvant s’exprimer en français dans les communautés, dans plusieurs domaines tels que l’enseignement, les soins de santé ou le système judiciaire. Ils sont aussi un véhicule essentiel pour la transmission de la langue, de la culture et du sentiment d’appartenance, autant d’éléments indispensables à la vitalité des CLOSM . En somme, ils forment les leaders de demain.

Quant aux établissements universitaires et collégiaux de langue anglaise du Québec, ils représentent un maillon crucial à la vitalité des communautés anglophones de la province dans le continuum de l’éducation. Or, eux aussi sont soumis à de sérieux défis. Les universités sont visées par la décision du gouvernement du Québec d’augmenter les frais de scolarité des étudiants non francophones provenant de l’extérieur de la province et leur assujettissement à des mesures de francisation. Les administrations des cégeps anglophones, quant à elles, sont en période de transition pour se conformer aux nouvelles obligations de la Loi 14. Par exemple, lorsque le nombre de demandes d’admission dépasse le nombre d’étudiants pouvant être admis, la Loi 14 exige la priorisation, dans l’admission au cégep, des étudiants ayant été déclarés admissibles à l’éducation primaire et secondaire en anglais au Québec. Elle impose également à tous les étudiants de suivre certains cours donnés en français, et certains devront passer l’épreuve uniforme de français pour obtenir leur diplôme. Le gouvernement du Québec a en outre imposé un plafond au nombre d’étudiants pouvant fréquenter les cégeps anglophones.

Les établissements concernés s’inquiètent grandement – et je partage ces inquiétudes – des répercussions de ces mesures sur l’évolution de leur effectif étudiant et sur leur propre viabilité financière. Deux universités ont d’ailleurs réagi en intentant des poursuites judiciaires en vertu des chartes québécoise et canadienne des droits et libertés.

Les universités, cégeps et collèges anglophones du Québec font partie de la solution, pas du problème. Ces établissements peuvent jouer un rôle de premier plan dans le projet sociétal de protéger et promouvoir la langue française. Compte tenu du fait qu’ils sont un pôle d’attraction à l’échelle nationale et mondiale, ils deviennent une ressource précieuse pour ceux et celles qui recherchent une expérience d’études postsecondaires en anglais tout en vivant en contact avec la francophonie. Cette situation complexe m’interpelle et j’ai l’intention de bien en saisir les répercussions, non seulement sur ces établissements d’enseignement, mais aussi sur la vitalité des communautés d’expression anglaise du Québec.

Recherche scientifique en français

Un autre enjeu important a refait surface ces dernières années, à savoir le déclin progressif de la recherche scientifique faite en français au Canada. La domination croissante de la recherche en anglais est une tendance globale qui se poursuit depuis des décennies et qui préoccupe beaucoup la Chambre des communes, selon un rapport de 2023 de son Comité permanent de la science et de la rechercheNote de bas de page 5. On sait par exemple que les conseils subventionnaires fédéraux accordent plus de 80 % de leur financement à des projets en anglais et qu’ils reçoivent de moins en moins de demandes de financement en françaisNote de bas de page 6.

Pourtant, la recherche en français favorise la vitalité de toutes les communautés d’expression française au pays ainsi que la vitalité du français dans la production et la diffusion du savoir et de la science. Lorsqu’elle est alignée sur des sujets d’intérêt pour ces communautés, elle aide à mieux les comprendre et, par le fait même, à adopter des politiques publiques pouvant répondre à leurs besoins. Elle permet aux programmes et établissements d’enseignement postsecondaire de langue française de rayonner et de créer une incidence économique significative dans leur région, tout en contribuant à l’épanouissement des communautés d’expression française.

Depuis l’inclusion de l’avancement de la science en français dans la nouvelle Loi, le gouvernement fédéral semble s’engager dans la bonne voie. En outre, il appuie dans son Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 des initiatives visant à améliorer l’écosystème de la recherche en français au Canada, dont la création d’un comité d’experts qui se penchera sur la création et la diffusion de savoir scientifique en français et la mise en place par l’Acfas du Service d’aide à la recherche en français. Cependant, des défis peuvent survenir au cours de la conception, la réalisation et la pérennisation de telles initiatives. Je m’attends à ce que le gouvernement remplisse ses obligations en la matière dans la nouvelle Loi et qu’il prenne les mesures nécessaires si des obstacles surviennent.

Éducation des adultes

Je terminerai cette section en mentionnant l’ultime maillon que constitue l’éducation des adultes dans le continuum de l’apprentissage. Dans le monde actuel axé sur le savoir et le développement des compétences, tout Canadien et toute Canadienne doit pouvoir continuer d’apprendre. Or, l’apprentissage dans la langue de la minorité est un droit établi. La nouvelle mouture de la Loi l’évoque en nommant l’obligation des institutions fédérales de prendre des mesures positives afin de mettre en œuvre l’engagement du gouvernement de « renforcer les possibilités pour les minorités francophones et anglophones de faire des apprentissages de qualité, en contexte formel, non formel ou informel, dans leur propre langue tout au long de leur vie ».

Ce choix de mots n’est pas accidentel. Il nous rappelle qu’on apprend non seulement dans les établissements d’enseignement formels, mais aussi en milieu de travail, en famille, dans les organismes communautaires, dans les activités sportives et culturelles et dans une multitude d’autres circonstances. Je constate que les communautés se préoccupent de développer des compétences qui permettront à leurs membres d’être agiles et résilients face aux changements sociaux, économiques, technologiques et climatiques qui déferlent sur nous. Le défi n’est pas mince, car en dehors du Québec, du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario, il y a actuellement peu de services en éducation des adultes dans la langue de la minorité. Je compte sur les institutions fédérales pour être à l’écoute de leurs besoins.

 
 
 

Ententes intergouvernementales

J’ai répété à maintes reprises que le gouvernement fédéral doit être proactif et faire preuve de leadership en matière de langues officielles dans l’élaboration d’ententes fédérales-provinciales-territoriales en s’assurant d’y inclure des clauses linguistiques. Les CLOSM sont unanimes dans leur désir de voir davantage d’engagements clairs et concrets à leur égard, consignés dans de telles ententes.

Plus Moins
 

On a vu par le passé que l’absence de dispositions linguistiques fortes et précises dans les ententes intergouvernementales s’est trop souvent traduite par un financement défavorable à ces communautés, par exemple en petite enfance. L’ajout d’une clause linguistique à la Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada devrait par ailleurs permettre d’éviter ce cas de figure dans les ententes à venir dans ce domaine.

La décision de la Cour d’appel fédérale dans Canada (Commissaire aux langues officielles) c Canada (Emploi et Développement social)Note de bas de page 7 a d’ailleurs clarifié la nécessité pour le gouvernement fédéral de faire respecter ses obligations, notamment par des clauses linguistiques appropriées protégeant les droits des minorités de langue officielle lorsqu’il s’engage dans des ententes de prestation de service avec des gouvernements provinciaux ou territoriaux. De même, cette décision signale l’importance pour les institutions fédérales de se donner les moyens de faire respecter les clauses linguistiques comprises dans ces ententes.

C’est pourquoi j’insiste sur l’importance que les clauses linguistiques comprennent des mécanismes d’évaluation et de surveillance de même que des mécanismes de transparence et de reddition de compte clairs qui démontreront les effets tangibles, mesurables et durables visés et obtenus par ces ententes. De façon plus générale, toute initiative intergouvernementale qui touche ces communautés devrait produire et rendre accessibles à ses bénéficiaires des données probantes qui permettent de cerner de façon nuancée les besoins, de comptabiliser les extrants des actions mises en œuvre, d’évaluer les résultats obtenus, de cerner les bons coups et, ainsi, de déterminer quelles sont les meilleures pratiques dans la perspective du soutien à la vitalité des CLOSM . Ces données permettraient de répondre aux questions posées par les communautés relativement à l’absence, l’insuffisance ou la lenteur du financement accordé par l’intermédiaire des provinces et territoires à leurs organismes.

Sans pour autant inclure ces clauses linguistiques, certaines ententes sont plus clairement favorables aux intérêts des communautés. C’est le cas des accords fédéral-provinciaux en santé, dont celui du Manitoba, qui contient des engagements visant l’amélioration de l’accès aux services en français. En Alberta, l’entente avec le fédéral soutient aussi plusieurs projets de la communauté francophone.

Le cas du Québec est singulier en raison du niveau de discrétion que lui accordent les ententes avec le gouvernement fédéral. En matière de santé, les communautés d’expression anglaise disposent d’un mécanisme de consultation leur permettant de communiquer leurs priorités à Santé Canada et au gouvernement du Québec. Cependant, l’absence d’engagement contraignant à même l’entente crée un sentiment d’insécurité au sein des communautés. Une grande vigilance est requise de l’ensemble des intervenants pour s’assurer que leurs intérêts soient reflétés dans ces ententes.

Des engagements formels conclus et reconnus par les signataires sont une protection stabilisante et nécessaire pour les communautés, qui doivent autrement dépendre de la bonne volonté des autorités provinciales ou territoriales du moment.

La Loi modernisée consacre désormais l’obligation des institutions fédérales de consulter les CLOSM et celle de prendre les mesures nécessaires pour favoriser l’inclusion de clauses linguistiques dans les ententes qu’elles concluent avec les provinces et territoires qui peuvent contribuer à la mise en œuvre des engagements du gouvernement énoncés aux paragraphes 41(1) à (3) de la Loi. Il est primordial que le règlement sur la partie VII vienne clarifier et encadrer cette obligation.

 
 
 

Vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire

Immigration francophone

Le gouvernement fédéral a récemment avancé de façon importante dans le dossier de l’immigration francophone avec de nouvelles obligations liées à la Loi modernisée, l’annonce de nouvelles cibles dans le Plan des niveaux d’immigration 2024-2026 ainsi que l’adoption d’une Politique d’immigration francophone. Ces développements se produisent moins de trois ans après la publication de mon Étude d’analyse statistique de la cible de 4,4 %, en novembre 2021. J’y recommandais que des analyses complètes de cette cible soient effectuées et qu’un nouvel objectif ainsi qu’une nouvelle cible plus élevée soient fixés. Je recommandais également que ceux-ci soient inclus dans une politique d’immigration en milieu minoritaire d’expression française.

Plus Moins
 

En novembre 2023, le gouvernement fédéral a annoncé son Plan des niveaux d’immigration 2024-2026. Il y retient de nouveaux objectifs évolutifs pour l’immigration francophone en milieu minoritaire, soit une proportion de 6 % de l’immigration totale au Canada en 2024 à l’extérieur du Québec, 7 % en 2025 puis 8 % en 2026. Je suis conscient des inquiétudes au sein des CLOSM francophones, qui trouvent ces cibles insuffisantes.

En janvier 2024, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) a annoncé sa Politique en immigration francophone, conformément aux exigences de la Loi modernisée. Cette politique vise à ramener le poids des francophones en situation minoritaire au niveau de 1971, soit 6,1 % de la population canadienne à l’extérieur du Québec alors qu’il se situait à 3,5 % en 2021. Elle contient plusieurs éléments et outils intéressants, comme la « lentille francophone » (qui doit encore être définie et opérationnalisée), un continuum de programmes et services en immigration, une collaboration multipartite ainsi que des données et des efforts de recherche accrus. Je garderai l’œil ouvert quant à l’articulation de cette politique.

Pour que les communautés francophones ne voient pas s’éroder leur vitalité démographique à long terme et que l’immigration francophone puisse profiter d’un certain élan, je m’attends à ce qu’ IRCC écoute activement les CLOSM francophones et tienne compte à la fois de leurs préoccupations et de la récente recommandation du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, qui fait écho aux revendications des communautés. Dans son rapport d’avril 2024, le comité demande au ministre d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada de reconnaitre que ces nouvelles cibles fixées respectivement pour les années 2024, 2025 et 2026 à 6 %, 7 % et 8 % ne sont pas suffisantes. Il encourage également le gouvernement à accroître son taux d’immigration francophone en milieu minoritaire à 12 % en 2024 et à atteindre progressivement un taux de 20 % en 2036Note de bas de page 8.

Il faut se rappeler que la rétention de l’effectif immigrant francophone dans les communautés francophones en situation minoritaire est un enjeu qui croît parallèlement à celui du recrutement. La disponibilité des services sociaux en français dans les communautés est un facteur important de la rétention, à laquelle s’ajoutent des éléments personnels comme l’employabilité, la reconnaissance des acquis ainsi que l’accès à la formation, au logement et aux garderies. De tels facteurs déterminent si un nouvel arrivant demeurera ou non dans sa communauté d’accueil. Cette dynamique affecte davantage les CLOSM de plus petite taille comme celles de la Colombie-Britannique ou de l’Île-du-Prince-Édouard, ainsi que certaines communautés éloignées comme celles des territoires.

En août 2024, 10 nouvelles communautés ont été intégrées au programme des Communautés francophones accueillantes avec une bonification du financement alloué au programme à l’échelle de 11 millions $. Je me réjouis de cette annonce qui correspond à une recommandation émise dans mon rapport sur la Vigie de la mise en œuvre du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023.

Dans le cadre de cette même annonce, le gouvernement fédéral lance son programme pilote pour les étudiants dans les communautés francophones en situation minoritaire. Cette initiative vise à améliorer l’accueil et l’intégration d’étudiants étrangers d’expression française en leur offrant la possibilité d’étudier dans des institutions postsecondaires de langue française ou bilingue en situation minoritaire, de même qu’une piste d’accès directe pour atteindre la résidence permanente après l’obtention de leur diplôme.

J’applaudis ces efforts tout en soulignant qu’il sera nécessaire de demeurer à l’écoute des organismes et des institutions des CLOSM qui jouent un rôle de premier plan dans l’atteinte des objectifs ciblés par ces programmes. D’ailleurs, je note que les groupes bénéficiaires des fonds en matière d’immigration francophone déplorent la lourdeur des modalités administratives liées aux programmes.

Chaque étape de l’immigration est une étape charnière, qu’il s’agisse du recrutement, de la sélection, de l’admission, de l’accueil ou de l’intégration. Pour que les conditions soient favorables à la rétention, un effort intersectoriel d’appui à la vitalité de ces communautés, soutenu par les multiples institutions fédérales et leurs partenaires provinciaux et territoriaux dans le cadre de stratégies intergouvernementales à l’échelle du pays, est nécessaire.

Financement des organismes communautaires

À travers le pays, des organismes du réseau des CLOSM font face à des obstacles récurrents en matière de financement. Bien qu’elles soient en hausse par rapport aux années précédentes, les sommes annoncées dans le Plan d’action pour les langues officielles 2023-2028 (le Plan d’action), notamment quant au financement de base des organismes communautaires, sont demeurées significativement inférieures au besoin chiffré par ces derniers. De plus, divers organismes communautaires ont signalé des retards inquiétants quant aux délais de versement des fonds prévus dans le cadre des différentes initiatives du Plan d’action, certaines enveloppes ayant déjà plus d’un an de retard. Ces retards peuvent entraîner des incidences majeures sur ces organismes, dont dépendent les CLOSM .

Un grand nombre de ces organismes se trouvent déjà dans une situation financière précaire et dépendent du financement gouvernemental pour assurer la rétention de leur personnel, éviter l’endettement et continuer d’offrir des services essentiels à leurs communautés. De tels délais fragilisent non seulement leurs activités quotidiennes, mais aussi leur capacité à mettre en œuvre leurs initiatives et à prévoir les évènements essentiels à leur mandat et à leur survie.

Comme je l’ai souligné en 2022, dans mon rapport sur la vigie de la mise en œuvre du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023, les institutions fédérales doivent créer les mesures nécessaires pour minimiser les retards dans la livraison des fonds du Plan d’action et assurer la mise en œuvre rapide des initiatives qui y sont annoncéesNote de bas de page 9. J’appelle le gouvernement à réévaluer son approche quant au versement des sommes rattachées au Plan d’action afin d’optimiser la distribution des fonds et ainsi d’éviter de voir plusieurs de ces organismes davantage fragilisés. Tant les CLOSM que le gouvernement fédéral gagneraient à ce que l’efficacité des programmes en langues officielles soit mesurée de façon plus transparente et plus approfondie afin de mieux répondre aux défis structurels auxquels ils font face.

J’ai pris connaissance du rapport Évaluation horizontale du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023 : Investir dans notre avenir, dans lequel Patrimoine canadien s’engage à cibler « des moyens de produire et d’assurer une reddition de comptes ainsi que la disponibilité des données financières qui permettraient de mieux évaluer l’efficacité et l’efficience du Plan d’action et de tout plan subséquent ». Certains groupes communautaires ont, à cet effet, suggéré qu’un examen indépendant de l’attribution de ces fonds pourrait accélérer, voire bonifier ce processus.

J’encourage Patrimoine canadien à continuer de bonifier son approche quant au suivi, à la mesure et au processus de versement des sommes rattachées au Plan d’action, tout en poursuivant sa collaboration étroite avec les groupes communautaires. Optimiser la distribution des fonds pour éviter une plus grande vulnérabilité des organismes subventionnés est essentiel à l’atteinte des objectifs du Plan d’action.

Augmentation du nombre de points de service bilingues

Le Règlement sur les langues officielles portant sur les communications avec le public et la prestation des services a été amendé en 2019 en vue d’élargir les critères qui déterminent quels points de service des institutions fédérales doivent servir le public dans les deux langues officielles. Le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT) a évalué que plus de 700 points de services existants seraient nouvellement désignés bilingues avec l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions, faisant passer ces derniers de 34 % de l’ensemble des points de service du gouvernement fédéral, en date de 2019, à 40 % des points de service lorsque la mise en œuvre des modifications sera terminéeNote de bas de page 10.

Les CLOSM voient évidemment d’un bon œil une expansion de l’offre de services bilingues, y compris dans des localités qui n’en ont jamais bénéficié. Je pense, comme elles, que ce changement contribuera à ce qu’elles puissent vivre plus facilement leur vie dans leur langue.

Voilà donc cinq ans que ces modifications au Règlement ont été adoptées, mais elles ne se sont pas encore traduites dans les faits. Le SCT a choisi d’attendre les données du recensement de 2021 afin d’être mieux éclairé dans l’application des nouvelles dispositions. Le calendrier de mise en œuvre coïncide ainsi avec la mise en œuvre des nouvelles dispositions de la Loi.

Le défi n’est pas banal puisque la désignation de nouveaux points de service bilingues survient en même temps que les nouvelles exigences quant à la désignation linguistique des postes de gestionnaires et de superviseurs et que la reconnaissance par le SCT du droit de tout employé œuvrant dans les régions désignées bilingues, qu’importe la désignation linguistique de son poste, à travailler et à être supervisé dans la langue officielle de son choix. Je comprends que le SCT doit jongler avec plusieurs priorités; toutefois, une mise en œuvre plus rapide du Règlement modifié aurait pu clore ce dossier avant l’entreprise de ce nouveau chantier qu’amènent les changements à la Loi. Une autre inquiétude a été exprimée selon laquelle la pénurie de main-d’œuvre bilingue pourrait compliquer la dotation des nouveaux postes désignés bilingues. Par ailleurs, certains organismes craignent qu’on vienne puiser à même leurs organismes pour trouver cette main-d’œuvre bilingue, ce qui nuirait à leurs propres efforts de recrutement et de rétention de personnel.

Je vois néanmoins positivement cet accroissement de la capacité du gouvernement fédéral à servir le public canadien dans les deux langues officielles à compter de 2025, si le calendrier de travail actuel est respecté. Le SCT devra non seulement s’assurer que l’ensemble des bureaux fédéraux soient informés de ces nouvelles exigences, mais aussi que le Règlement soit interprété de façon large et libérale, en conformité avec la décision de la Cour fédérale dans le dossier Thibodeau c Autorité aéroportuaire du Grand TorontoNote de bas de page 11, rendue en février 2024.

Communautés d’expression anglaise du Québec

Au cours des deux dernières années, les communautés d’expression anglaise du Québec ont vu leur régime linguistique changer de façon importante, avec l’expansion de la Charte de la langue française au Québec et la modernisation de la Loi sur les langues officielles au niveau fédéral. Elles ont donc été appelées à rebondir, et à s’adapter deux fois plutôt qu’une.

Je suis à l’écoute des préoccupations de ces communautés concernant certains éléments de la nouvelle Loi. Je continuerai à suivre de près la mise en œuvre de cette Loi afin d’analyser comment ses modifications affectent la vitalité de leurs communautés.

Depuis quelques années, la minorité anglophone du Québec fait face à des défis qui menacent sa vitalité. D’abord, sa légitimité à titre de CLOSM est trop souvent remise en question. Il semble en effet y avoir une confusion entre le statut majoritaire de la langue anglaise à l’échelle nationale et le statut minoritaire des communautés anglophones du Québec. Dans un contexte difficile, qui inclut l’adoption des projets de loi 21 et 40 de l’Assemblée nationale du Québec, elles se sont engagées dans plusieurs procédures judiciaires pour protéger leurs droits garantis par l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés. Des poursuites évoquant notamment l’atteinte aux droits constitutionnels de la communauté ont également été entamées à l’égard des modifications à la Charte de la langue française par le projet de loi 96. Je continuerai à effectuer une vigie très attentive de l’ensemble de ces poursuites judiciaires.

Un des principaux défis auxquels fait face la minorité anglophone du Québec est la perception qu’elle n’adhère pas à la valeur de la langue française en tant que langue commune. Bien qu’elle soit tenace, cette perception est un mythe que tous gagneraient à déconstruire. Les données du dernier recensement nous apprennent en effet que 71 % des membres de la population québécoise de langue maternelle anglaise sont bilingues, et que la plupart d’entre eux utilisent régulièrement le français au travail, à l’école ou à la maison, ou encore l’ont comme autre langue maternelleNote de bas de page 12. Cette communauté a d’ailleurs une longue tradition de promotion du bilinguisme fédéral et individuel auprès des anglophones en situation majoritaire, ainsi que de défense des droits des minorités francophones à l’extérieur du Québec. Il est dans l’intérêt de toutes et de tous que ses droits soient affirmés et respectés, et qu’elle soit reconnue comme une communauté québécoise dont l’adhésion au bilinguisme demeure déterminante afin de rendre possible cette communauté politique qu’on appelle le Canada.

Sur ce point, j’ai été très préoccupé par la directive en santé émise par le gouvernement du Québec en juillet 2024 qui a causé une certaine confusion quant au droit de la communauté d’expression anglaise de recevoir des services en santé dans sa langue. Je suis encouragé de voir qu’une nouvelle directive à cet effet a été formulée en septembre afin de réaffirmer ce droit. Comme je l’ai mentionné à maintes reprises dans mon rapport Une question de respect et de sécurité : l’incidence des situations d’urgence sur les langues officielles, il est primordial que le public puisse recevoir des communications et des services dans la langue officielle de son choix.

Que ce soit au Québec ou ailleurs au Canada, lorsqu’une personne a recours à des soins de santé, elle doit pouvoir communiquer clairement et rapidement avec le personnel. Elle peut, en outre, se trouver dans un état vulnérable où chaque seconde compte. Accorder des soins de santé à l’ensemble de la population canadienne dans la langue officielle de son choix est une question de respect et de sécurité élémentaires, à laquelle tous les gouvernements devraient aspirer.

Un autre exemple de disparité se situe du côté des industries culturelles. Les porte-parole des réseaux culturels anglophones du Québec ont récemment fait valoir que le financement public de leur production télévisuelle et cinématographique a drastiquement fondu au cours des 20 dernières années. Or, je suis d’avis que chaque CLOSM devrait recevoir un soutien financier public pour ses productions culturelles qui correspond ou dépasse le poids démographique de ces communautés par rapport à la population totale de leur province ou territoire respectifs. Il importe qu’elles puissent contribuer à la création culturelle canadienne avec les particularités qui leur sont propres.

Enfin, une perception erronée qui persiste chez environ la moitié des francophones du pays est que les communautés anglophones du Québec forment une élite privilégiée, et peu intégrée à la société québécoise contemporaineNote de bas de page 13. Or, ces communautés montrent aujourd’hui des signes de vulnérabilité socioéconomique. Selon des données de recensement reprises par la Table ronde provinciale sur l’emploi, le taux de chômage chez les anglophones du Québec est passé de 8,9 % en 2016 à 10,9 % en 2021Note de bas de page 14, alors que les francophones de cette province ont connu un taux relativement constant à 6,9 % durant la même période. Si, au recensement de 2021, chez les anglophones, les revenus moyens sont plus élevés que chez les francophones, il en est tout autrement pour d’autres indicateurs. Notamment, les revenus médians sont plus faibles chez les anglophones que chez les francophones. On constate que la proportion d’anglophones (10 %) qui avaient, au recensement de 2021, un revenu inférieur au seuil de pauvreté atteint près de deux fois la taille de celle des francophones (5,8 %)Note de bas de page 15. Ainsi, on peut observer, parmi la population anglophone de la plupart des régions administratives, des taux de chômage plus élevés, des revenus médians plus faibles et des taux de pauvreté plus élevés que parmi la majorité francophone, et ce, malgré des taux élevés de participation à la population active et une augmentation du niveau de scolarité chez les anglophones.

Le Commissariat a publié en juin 2024 une étude intitulée Bâtir des ponts : perceptions et réalités à propos des communautés d’expression anglaise du Québec et de leur rapport au français au Québec et au bilinguisme au Canada, qui constate que les perceptions erronées à l’égard de la relation qu’entretient la minorité anglophone avec la langue française persistent. Cette étude nous apprend que les francophones du Québec ont tendance à sous-estimer la capacité des anglophones de la province à parler français, la fréquence à laquelle ils le parlent et leur intérêt envers la culture québécoise francophoneNote de bas de page 16.

Toutefois, qu’ils soient anglophones ou francophones, on constate que la grande majorité des membres de la population québécoise disent bien s’entendre sur une base individuelle. L’étude présente des possibilités très intéressantes, notamment celle de favoriser plus de contacts en personnes entre les deux communautés linguistiques, par exemple à travers les programmes d’échange jeunesse – initiatives qui méritent d’être élargies non seulement pour favoriser les contacts francophone-anglophone au Québec, mais dans l’ensemble du Canada. J’espère que cette étude contribuera à déconstruire les mythes et à rétablir la légitimité de ces communautés qui sont essentielles au bilinguisme canadien, et qui contribuent à la diversité canadienne.

Infographie 1 - Faits sur les communautés d’expression anglaise du Québec

Infographie 1 - Faits sur les communautés d’expression anglaise du Québec, texte descriptif ci-dessous
Version texte : Faits sur les communautés d’expression anglaise du Québec
  • 65 % des travailleurs de langue maternelle anglaise au Québec utilisent régulièrement le français au travail
  • Plus de la moitié des enfants d’âge scolaire de langue maternelle anglaise au Québec ont le français comme langue d’instruction à l’école
  • Parmi les membres de la population québécoise qui ont l’anglais et le français comme langues maternelles, 87 % parlent régulièrement le français à la maison
  • 69 % des enfants vivant dans des ménages français-anglais au Québec ont le français comme langue maternelle
 
 
 

Enquête sur la population de langue officielle en situation minoritaire

Statistique Canada se prépare à publier l’Enquête sur la population de langue officielle en situation minoritaire, qui fait suite à l’enquête post-censitaire de 2006. Je félicite Patrimoine canadien d’avoir commandé cette enquête, qui survient après une longue attente ainsi que de nombreuses demandes issues des communautés, auxquelles j’ai donné mon appui.

L’enquête a été menée auprès de la population de langue anglaise au Québec et de la population de langue française ailleurs au Canada. Elle documente leurs compétences et leurs pratiques linguistiques dans les activités quotidiennes à la maison, au travail et dans la sphère publique. Elle met aussi à jour notre compréhension de leur situation en regard de dossiers comme l’accès aux services gouvernementaux et juridiques, l’éducation et les soins de santé, les arts et la culture dans la langue de la minorité, le sentiment d’appartenance et la participation au marché du travail, entre autres.

Les résultats de cette enquête sont très attendus par les milieux de la recherche, du développement communautaire et de l’élaboration des politiques. En raison de son vaste échantillonnage, elle vient pallier un manque évident de données fiables et nuancées sur les CLOSM . Je suis impatient de mettre la main sur ces données qui soutiendront le travail du Commissariat au cours des prochaines années.

 
 

Conclusion

Cet état des lieux aborde une fraction des récents enjeux dans certains secteurs d’activité des CLOSM et des organismes de la dualité linguistique. Il existe bien sûr d’autres enjeux importants, tels que la santé en milieu minoritaire, les arts et la culture, l’économie, ou encore la situation des jeunes, des femmes et des personnes aînées. Un état des lieux plus large et de tous les secteurs en lien avec les langues officielles pourrait peindre un portrait encore plus coloré et nuancé des défis surmontés, en voie d’être surmontés ou qui nécessitent attention et réflexion. Soyez assurés que toutes les dimensions des langues officielles et tous les enjeux des CLOSM sont sur le radar du Commissariat et feront l’objet d’études, d’enquêtes ou de rapports aux moments opportuns.

La vitalité des langues officielles nécessitera toujours notre vigilance. La nouvelle Loi est une bouffée d’air frais qui solidifie les fondations du régime linguistique canadien, mais sa poigne relève des personnes et des institutions qui rendent vivantes nos langues officielles. Or, je constate que les majorités de langue officielle en savent souvent très peu sur les communautés minoritaires près d’ellesNote de bas de page 17, alors qu’elles ont manifestement un rôle à jouer dans leur vitalité. Il est essentiel que les paliers de gouvernement travaillent main dans la main et que les institutions concernées, notamment Patrimoine canadien, prennent des initiatives concrètes pour mieux faire connaître les communautés et leurs réalités à travers le pays.

La dernière année nous a légué nombre de nouveaux instruments prometteurs. La nouvelle Loi a précisé les droits et les obligations existants et renouvelé notre boite à outils. Le Règlement de la partie VII de la Loi, en cours d’élaboration, peut entre autres fixer les modalités d’exécution que la partie VII impose aux institutions fédérales et contribuer à l’avancement de l’égalité réelle des CLOSM et des langues officielles. Il importe que toutes les parties prenantes veillent au grain afin que le règlement apporte les clarifications requises. Je suis encouragé de voir la mobilisation et la ténacité qu’ont déployées les membres des CLOSM , mais aussi bon nombre de fonctionnaires, de personnes élues ou mandatées politiquement afin de faire progresser le dossier des langues officielles depuis les six dernières années. Je me permets aussi de souligner le dévouement et le travail acharné de mon équipe.

Avec des parties prenantes engagées et des outils fraîchement repensés, j’ai espoir que nous sommes en meilleure posture pour assurer l’avenir des langues officielles au pays. Je sais aussi que les défis se renouvellent et se transforment, et que le Commissariat devra rester aux aguets : continuer à enquêter et à émettre des recommandations aux institutions, et se prévaloir de ses nouveaux outils comme la médiation, les ordonnances et, dès leur entrée en vigueur, les sanctions administratives pécuniaires. Il sera également important de sensibiliser le public sur l’importance de respecter et d’exercer les droits et obligations reconnus par la Loi sur les langues officielles, d’autant plus que de nouveaux droits et obligations devraient être clarifiés dans les prochains mois avec l’application de la Loi sur l’usage du français dans les entreprises privées de compétence fédérale. Je souhaite enfin qu’institutions fédérales, gouvernements provinciaux et territoriaux et CLOSM coopèrent davantage afin que les deux langues officielles occupent la place historique qui leur revient aux côtés des langues autochtones dans le vivre ensemble au Canada. Veiller à l’épanouissement des CLOSM , c’est investir dans un Canada diversifié, ouvert et respectueux, non seulement envers sa population, mais aussi envers son histoire et l’avenir que nous lui façonnons ensemble.