Étude d’analyse statistique de la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française au sein des communautés francophones en situation minoritaire : Près de 20 ans après son adoption, il est temps de faire mieux et d’en faire plus

Table des matières

    Remerciements

    Le commissaire aux langues officielles a recouru aux services de M. Guillaume Deschênes-Thériault, candidat au doctorat, pour mener cette étude. Celui-ci en a réalisé la revue de littérature et de documents clés, l’analyse statistique et la consultation d’intervenants clés par l’entremise de groupes de discussion. Nous le remercions de sa diligence et son professionnalisme dans la réalisation de son mandat.

    Nous souhaitons également remercier la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), qui ont contribué à la conception et à la réalisation de cette étude. Notamment, IRCC a produit, fourni et validé les données administratives du ministère qui ont servi à l’étude dans le cadre d’une entente de collaboration pour le partage des données. Nous souhaitons aussi remercier les autres intervenants clés qui ont pris part à des groupes de discussion sur les résultats préliminaires de l’étude à l’interne au Commissariat et à l’externe à l’échelle gouvernementale, communautaire et universitaire.

    Enfin, nous souhaitons souligner la contribution de Mme Véronique Boudreau, de l’équipe de recherche au Commissariat aux langues officielles, qui a veillé à la conception, à la réalisation et à la gestion de cette étude.

    Préface

    Comme nombre de pays occidentaux, le Canada connaît des baisses démographiques et compte de plus en plus sur l’immigration en particulier pour pallier ces baisses. L’immigration est inhérente à l’enrichissement du Canada, qui se caractérise par sa dualité linguistique et sa diversité culturelle, non seulement sur le plan démographique, mais aussi notamment sur les plans économique, culturel, social et humain. Le pays dans son ensemble et ses communautés de langue officielle ont tout intérêt à chercher à en bénéficier.

    En effet, le Canada est un pays forgé sur la dualité linguistique enchâssée dans sa Constitution (1982) et renforcée par une réforme de la Loi sur les langues officielles (1988). L’une et l’autre promulguent le principe de progression vers l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne. Aussi la Loi sur les langues officielles de même que la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (2001) ont-elles pour objet d’appuyer le développement des minorités francophones et anglophones.

    À l’heure actuelle, la Loi sur les langues officielles est appelée à être modernisée. En outre, le gouvernement a publié un document de réforme en février 2021, Français et anglais : vers une égalité réelle des langues officielles au Canada. Il visait à favoriser une égalité réelle des deux langues officielles en tenant compte du fait que le français est en situation minoritaire au Canada et en Amérique du Nord en raison de l’usage prédominant de l’anglais. Parmi des propositions législatives qui y étaient mises de l’avant, se trouvait celle de prévoir une obligation pour le gouvernement fédéral d’adopter une politique sur l’immigration francophone qui appuie la vitalité des communautés de langue officielle en situation minoritaire, en l’occurrence, des communautés francophones en situation minoritaire.

    Depuis des décennies, on observe des baisses constantes et marquées du poids démographique de la minorité francophone (que ce soit selon le critère de la langue maternelle, de la langue d’usage à la maison ou de la première langue officielle parlée). Divers facteurs, dont certains ont historiquement représenté des tendances lourdes, exercent une pression à la baisse sur ce poids démographique : une chute marquée de la fécondité, une transmission intergénérationnelle incomplète de la langue maternelle française des parents aux enfants, des transferts linguistiques intragénérationnels vers l’anglais comme langue d’usage au foyer parmi la population de langue maternelle française, un vieillissement accru de la population d’expression française, etc. D’autres facteurs, comme la mobilité géographique interprovinciale et l’immigration internationale, ont davantage été liés à des conjonctures notamment économiques, sociales ou politiques, sans parler des conjonctures environnementales de plus en plus présentes.

    S’appuyant sur la Loi sur les langues officielles, dont la partie VII – Promotion du français et de l’anglais, et sur les objectifs énoncés dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, notamment sur l’objectif de « favoriser le développement des collectivités de langues officielles minoritaires au Canada », l’immigration est l’un des facteurs clés sur lequel le gouvernement du Canada a une influence importante puisqu’il en détermine les niveaux et la composition.

    Comme le montrait mon prédécesseur Graham Fraser, entre autres dans sa publication Agir maintenant pour l’avenir des communautés francophones : Pallier le déséquilibre en immigration (CLO, novembre 2014), la population d’expression française en milieu minoritaire ne profite pas de l’apport de l’immigration au même titre que celle de langue anglaise. D’hier et d’aujourd’hui, bien que les contextes aient changé avec une diversité croissante, l’immigration favorise davantage la majorité d’expression anglaise que la minorité d’expression française au Canada à l’extérieur du Québec.

    Depuis les dernières décennies, l’immigration est de plus en plus constituée de personnes de langue maternelle tierce (autre que le français ou l’anglais), qui, à l’extérieur du Québec, ont une forte propension à avoir ou à acquérir une connaissance de l’anglais plutôt que du français et à utiliser la langue de la majorité plutôt que celle de la minorité au cours de leur parcours d’immigration au pays et d’intégration dans ses communautés. La force d’attraction qu’exerce l’anglais sur la population d’expression française en milieu minoritaire s’exerce aussi sur la population de langue maternelle tierce.

    Tel qu’il est inscrit dans la Constitution, l’immigration est un champ de compétence partagé entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Bien que le gouvernement du Canada collabore avec d’autres acteurs clés – dont les autres ordres de gouvernement, les organismes communautaires et les employeurs, notamment en matière de promotion du Canada à l’étranger comme pays de destination pour l’immigration ainsi qu’en matière d’accueil, d’installation et d’intégration des immigrants au sein des communautés canadiennes – c’est lui qui détermine les priorités en matière de sélection d’immigrants, de traitement de leurs demandes et d’établissement des niveaux et de la composition de l’immigration admise annuellement au Canada, à l’extérieur du Québec.

    En outre, à l’extérieur du Québec, où le gouvernement provincial a la responsabilité de sélectionner et d’intégrer les immigrants en vertu de l’Accord Canada-Québec, les programmes fédéraux constituent la grande majorité des programmes d’admissions à la résidence permanente. Bien que notre étude observe une hausse importante des admissions au programme des candidats des provinces parmi les résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire depuis 20 ans et qu’une croissance est observée parmi l’ensemble des admissions au cours des dernières années, il demeure que ce programme représentait en 2019 un cinquième des admissions de résidents permanents (IRCC, 2020a).

    Ainsi, compte tenu du fait que le gouvernement du Canada a des obligations en matière d’égalité des langues officielles et de développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, qu’il établit les niveaux et la composition de l’immigration, et qu’un déséquilibre est observé depuis des décennies entre l’immigration d’expression française et anglaise au Canada à l’extérieur du Québec, le commissaire aux langues officielles fait de cette question une priorité depuis les dernières décennies.

    Suivant les interventions marquantes de mes prédécesseurs depuis le début des années 2000, Graham Fraser (2006-2016) et Dyane Adam (1999-2006), je fais de l’immigration francophone en milieu minoritaire une priorité depuis le début de mon mandat.

    Les interventions de la commissaire Adam, de concert avec les intervenants clés, ont contribué à l’inclusion d’obligations du gouvernement du Canada envers les communautés de langue officielle en situation minoritaire dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés en 2001. S’en est suivie l’adoption de la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire.

    Cette cible a été établie en 2003 dans le Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, élaboré par le Comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada – Communautés francophones en situation minoritaire (Comité directeur CIC- CFSM). Face au constat de la baisse démographique des communautés francophones en situation minoritaire et des déficits d’immigration francophone dans ces communautés depuis des décennies, la cible avait pour objectif d’au moins maintenir ce poids démographique au niveau où il se trouvait lors du recensement de 2001. Son échéancier initial avait été fixé pour 2008, mais a été repoussé de 15 ans dans le Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (2006), aussi élaboré par le Comité directeur CIC- CFSM. Bien que l’élaboration de ce Cadre et de ce Plan se soit faite conjointement, et que leur mise en œuvre ait pu faire appel à la consultation et à la collaboration de partenaires et qu’elle puisse continuer de le faire, la cible comporte, selon les termes du ministère, un objectif ministériel (IRCC, juillet 2017) qui est en lien direct avec ses obligations législatives en ce qui a trait au développement et à l’épanouissement des communautés de langue officielle en situation minoritaire (CIC, juillet 2012).

    De plus, le ministère est responsable de prendre et de mettre en œuvre des mesures pour atteindre cette cible, d’en faire le suivi et d’en faire rapport. Au cours des 10 dernières années, le ministère a constaté que malgré des mesures prises et des initiatives entreprises ainsi que des hausses de nombres d’admissions de résidents d’expression française en milieu minoritaire, la cible n’avait pas été atteinte (CIC, juillet 2012 et juillet 2017), qu’il devait en faire plus (IRCC, juillet 2017), que des progrès devaient être réalisés (IRCC, juillet 2017) et que les progrès relatifs à son atteinte devaient être davantage communiqués systématiquement (IRCC, 2019a). Le ministère s’est donné jusqu’en 2023 pour atteindre la cible (CIC, juillet 2012; IRCC, juillet 2017).

    Sous le commissaire Fraser, la dernière publication sur l’immigration francophone, Agir maintenant pour l’avenir des communautés francophones : Pallier le déséquilibre en immigration (CLO, novembre 2014), décrivait les politiques et les programmes, puis soulevait certains défis et enjeux relativement au continuum d’immigration francophone au palier fédéral et provincial. Parmi les enjeux soulevés se trouvaient, relativement à cette cible, des défis méthodologiques quant à la définition d’un « immigrant d’expression française » et à sa mesure. La présente étude y fait suite en se consacrant davantage à cette question. Elle examine de plus près les différentes définitions d’un immigrant d’expression française et les mesures utilisées, les écarts entre les admissions de résidents permanents d’expression française et cette cible, puis son incidence sur l’objectif qui avait été fixé : au moins maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    L’étude cherche non pas à élucider tous les enjeux liés à l’immigration francophone, mais à apporter un éclairage sur l’expérience passée relativement à cette cible d’admissions d’immigrants d’expression française en milieu minoritaire et à son objectif d’accroître ou d’au moins maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire. Elle cherche aussi à explorer des pistes de réflexion pour l’avenir. Je souhaite qu’elle contribue ainsi aux discussions sur le sujet à l’horizon de l’arrivée à échéance de cette cible en 2023.

    L’étude porte uniquement sur l’immigration comme facteur clé du développement et de l’épanouissement des groupes et communautés de langue officielle, en l’occurrence des communautés francophones en situation minoritaire. En particulier, elle porte sur les admissions de résidents permanents d’expression française, qui constituent une étape première et nécessaire quoique non exclusive du continuum d’immigration depuis le pays d’origine, à la rétention linguistique et géographique, puis à l’intégration sociale, économique et culturelle des immigrants à la communauté d’accueil. L’étude ne nie pas que d’autres facteurs outre l’immigration ont une incidence sur le poids démographique des populations et de manière particulière sur celui de la population d’expression française en milieu minoritaire. Toutefois, elle s’intéresse à l’immigration dans la mesure où il s’agit d’un facteur clé sur lequel le gouvernement a une influence importante et où ce facteur, à son tour, a une incidence sur l’équilibre démolinguistique au pays. L’étude reconnaît que l’immigration est un champ de compétence partagé entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux, et qu’il s’agit d’un domaine complexe qui engage divers partenaires. Toutefois, le gouvernement du Canada y exerce un rôle de premier plan.

    L’étude comporte principalement une analyse statistique des admissions de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire relativement à cette cible et à son objectif. Cela a été rendu possible grâce à une entente de collaboration conclue entre le Commissariat aux langues officielles et IRCC pour la production, l’obtention et la validation de données administratives sur les admissions de résidents permanents d’expression française. Certaines n’ont pas été, à ce jour, publiées ou présentées dans une seule publication, par exemple les nombres d’admissions et taux d’admission de résidents permanents d’expression française hors Québec selon trois définitions employées dans les 20 dernières années.

    Par la présente étude, je souhaite, conformément à mon mandat, voir à l’engagement du gouvernement du Canada à appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, en l’occurrence les communautés francophones en situation minoritaire, et à promouvoir l’égalité de statut et d’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne en apportant un éclairage sur une question de première importance pour le Canada, ses communautés, leur dualité linguistique et leur diversité.

    Raymond Théberge

    Commissaire aux langues officielles

    1. Introduction

    1.1 Contexte entourant l’étude – Apport de l’immigration d’hier à aujourd’hui

    1.1.1 Cadre constitutionnel relatif à l’immigration

    Avant de rappeler quelques repères historiques au cours du XXe siècle, il importe de souligner que la Loi constitutionnelle de 1867 établit un partage des pouvoirs et des responsabilités du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux en matière d’immigration. L’article 95 énonce que dans chaque province, la législature pourra faire des lois relatives à l’immigration dans cette province. Il est énoncé que le parlement du Canada pourra de temps à autre faire des lois relatives à l’immigration dans toutes les provinces ou dans aucune en particulier; et toute loi de la législature d’une province relative à l’immigration n’y aura d’effet qu’aussi longtemps et que tant qu’elle ne sera incompatible avec aucune des lois du parlement du Canada (Gouvernement du Canada, Loi constitutionnelle de 1867).

    Ainsi, selon IRCC :

    « Le gouvernement fédéral a une responsabilité constitutionnelle bien établie dans le domaine de l’immigration. Même s’il s’agit d’un champ de compétences partagées où les provinces peuvent intervenir par le biais de mesures législatives, réglementaires ou de programmation, le gouvernement fédéral exerce un pouvoir prépondérant. En d’autres mots, les gouvernements provinciaux peuvent intervenir dans le domaine de l’immigration, pourvu que cette intervention demeure compatible avec celle du gouvernement fédéral. » (CIC, juillet 2012 : 12)

    1.1.2 D’hier – Apport historique de l’immigration à la dualité linguistique et à la diversité culturelle du Canada

    La diversité et la dualité du Canada que nous connaissons aujourd’hui se sont forgées au fil du temps, d’abord à partir de la présence première des peuples autochtones (Premières Nations, Inuits et Métis). L’immigration, surtout d’origine britannique et française et de langue anglaise et française, a ensuite constitué la base de la dualité linguistique, qui reconnaît officiellement le français et l’anglais comme langues officielles du Canada et les minorités de langue officielle (anglaise au Québec et française à l’extérieur du Québec). Au cours du XXe siècle et en particulier depuis les dernières décennies, l’immigration s’est de plus en plus diversifiée sur les plans linguistique et culturel. Ces composantes de la diversité et de la dualité ont participé et continuent de participer au développement et à l’enrichissement du pays au fil du temps sur divers plans, notamment démographique, économique, social, culturel et humain.

    En outre, au cours du XXe siècle, le Canada a reçu différentes vagues d’immigration suivant les conjonctures et les politiques gouvernementales de l’époque, dont celles régissant les niveaux d’immigration et la composition de l’immigration. Un bref rappel de quelques repères historiques illustre cet effet combiné des conjonctures (transformations sociales, climat politique et économique) d’une part, puis des lois et politiques d’autre part (en matière d’immigration, de diversité culturelle et de dualité linguistique).

    Les niveaux d’immigration ont fluctué au cours du XXe siècle, atteignant des sommets historiques à des moments marquants – par exemple, en 1913, le Canada a reçu plus de 400 000 immigrants (CLO, novembre 2014).

    Pour ce qui est de sa composition, l’immigration provenait principalement d’Europe et des États-Unis jusqu’aux années 1960. Malgré l’afflux important d’Européens provenant de divers pays au début du XXe siècle, les habitants du Canada étaient encore en 1931 majoritairement d’origine britannique (52 %) et française (28 %). Le Canada est ainsi resté très largement eurocentrique dans son orientation et sa composition jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, événement qui a grandement contribué à changer les idées et des attitudes à l’égard de la religion et des origines ethniques. En outre, bien que la préférence fût toujours accordée aux Britanniques, la Loi sur la citoyenneté de 1947 levait la taxe d’entrée et d’autres contraintes imposées aux Asiatiques. Autre exemple, l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies (1948) officialisait la suppression d’obstacles à l’immigration dans les démocraties modernes (Musée canadien de l’histoire).

    À partir des années 1960 et 1970, le Canada a commencé à moderniser et à démocratiser ses cadres législatifs. En matière d’immigration, de nouveaux règlements introduits en 1962 éliminaient les discriminations raciales de la politique d’immigration canadienne en posant comme critère d’admissibilité non plus l’origine ethnique ou nationale, mais la compétence. La Loi sur l’immigration (1976) imposait au gouvernement la responsabilité de planifier l’avenir de l’immigration et d’en faire l’annonce au Parlement. Aussi le gouvernement fédéral a-t-il adopté en 1971 la politique canadienne du multiculturalisme et en 1988 la Loi sur le multiculturalisme canadien (Musée canadien de l’histoire).

    À partir des années 1970 et 1980, l’immigration s’est de plus en plus diversifiée quant aux pays d’origine et aux langues des immigrants. D’abord majoritairement de langue anglaise à l’extérieur du Québec et provenant d’Europe et des États-Unis, l’immigration s’est ensuite ouverte à d’autres langues et pays d’origine.

    À partir des années 1970 et 1980, le changement dans la composition des langues immigrantes a été profond. Quelques langues non européennes (chinois, japonais, arabe) étaient déjà parlées par une partie de la population avant la Deuxième Guerre mondiale, mais les modifications apportées à la loi et aux règlements sur l’immigration au Canada durant les années 1960 ont contribué à l’accroissement rapide du nombre d’immigrants en provenance de l’Asie, du Moyen-Orient, de l’Amérique latine, des Antilles et de l’Afrique. La diversité linguistique s’est accrue en conséquence. (Statistique Canada, février 2018 : 6)

    À la même époque, la dualité linguistique a également été renforcée par l’adoption de la première Loi sur les langues officielles, qui reconnaissait l’égalité de statut du français et de l’anglais dans toutes les institutions fédérales (1969). Suivant l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés (1982) et pour assurer la pleine mise en œuvre des droits linguistiques qui y sont garantis, la nouvelle Loi sur les langues officielles de 1988 a été étendue. Elle inclut à la partie VII, l’engagement du gouvernement du Canada à favoriser l’épanouissement et à appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire ainsi qu’à faire la promotion du français et de l’anglais dans la société canadienne.

    A suivi l’adoption de dispositions sur les langues officielles et les collectivités de langue officielle dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR) en 2001. Y ont été ajoutés, comme objets de la loi, celui d’enrichir et de renforcer le tissu social et culturel du Canada dans le respect de son caractère fédéral, bilingue et multiculturel, et celui de favoriser le développement des collectivités de langues officielles minoritaires au Canada.

    1.1.3 D’aujourd’hui – L’immigration, facteur clé de croissance démographique et d’influence sur l’équilibre démolinguistique

    Depuis les dernières décennies, le Canada, comme d’autres pays occidentaux, connaît une baisse démographique étant donné le faible taux de natalité (nombre de naissances vivantes par rapport à l’effectif de la population dans un lieu donné et pendant une période déterminée) et le vieillissement de sa population (IRCC, 2020a). Dans ce contexte, l’immigration internationale apparaît comme le principal moteur d’accroissement de la population (IRCC, 2020a; Statistique Canada, Corbeil et Houle, septembre 2017).

    De 2017 à 2018, 80 % de l’accroissement de la population canadienne était dû à l’immigration nette (solde des immigrants et des émigrants), les 20 % restants étant dus à l’accroissement naturel, soit la différence entre les naissances et les décès (IRCC, 2020a). IRCC prévoit admettre de 300 000 à 430 000 résidents permanents annuellement de 2021 à 2023, après une diminution durant la première année de pandémie en 2020 (IRCC, 2020a). À plus long terme, la croissance démographique du Canada pourrait reposer exclusivement sur l’immigration d’ici 2030 (IRCC, 2020a). Cette tendance à l’accroissement migratoire (solde des immigrants et des émigrants) ne s’estomperait pas au courant des prochaines décennies (Statistique Canada, septembre 2019).

    Toutefois, au Canada à l’extérieur du Québec, la population d’expression française en milieu minoritaire connaît aussi, sinon de façon plus marquée que la population majoritaire d’expression anglaise, des baisses démographiques. Cela peut être lié à divers facteurs, dont une chute marquée des taux de fécondité depuis les années 1960 (rapport du nombre de naissances vivantes à l’effectif des femmes en âge de procréer); une transmission incomplète de la langue maternelle française des parents aux enfants; un vieillissement accru de sa population; l’utilisation d’une autre langue que la langue maternelle française, l’anglais surtout, comme langue parlée le plus souvent à la maison; des tendances à la mobilité interprovinciale suivant la conjoncture notamment économique. En plus de ces facteurs, dont certains représentent des tendances lourdes, l’immigration représente un facteur clé. Non seulement l’immigration est-elle considérée comme le principal moteur de croissance de la population canadienne, mais elle exerce une influence directe sur l’équilibre démolinguistique au pays. Il s’agit d’un facteur sur lequel le gouvernement a une influence importante, notamment pour ce qui est de son niveau et de sa composition (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    Dans plusieurs cas les tendances démographiques sont particulièrement lourdes et difficiles à renverser en raison du poids du passé et du fait que la structure initiale d’une population exerce souvent une grande force d’inertie. [Par ailleurs, l]’action et les décisions politiques peuvent également influencer l’évolution de certains facteurs démographiques; l’identification de seuils nationaux en matière d’immigration et d’accueil des réfugiés, les changements dans les politiques d’immigration ou les politiques familiales en sont de bons exemples. (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 21)

    Or, l’immigration, qui est de plus en plus diversifiée, ne tend pas à refléter le paysage ni la dynamique de la dualité linguistique au pays pour ce qui est de la contribution au maintien du poids démographique de la minorité de langue française au Canada à l’extérieur du Québec (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    Plusieurs facteurs démographiques expliquent l’évolution du français et de la francophonie au Canada. Outre un faible taux de fécondité et une transmission incomplète de la langue maternelle française des parents aux enfants, c’est l’immigration internationale qui influe le plus sur l’évolution du français au Canada. En moyenne, au cours de 20 dernières années, environ 235 000 nouveaux immigrants sont venus s’établir au Canada chaque année, dont plus de 80 % n’ont ni le français ni l’anglais comme langue maternelle.

    En général, parmi les deux langues officielles du pays, la très forte majorité de ces immigrants ne connaissent que l’anglais, l’utilisent au travail et dans leur vie de tous les jours. De même, c’est surtout l’anglais qui, au fil du temps, finit par s’imposer dans les foyers de ces immigrants hors Québec. (Statistique Canada, 2012 : 9)

    Niveaux d’immigration

    Selon les données administratives d’ IRCC, en 2019, avant le début de la pandémie, plus de 340 000 résidents permanents au total ont été admis au Canada. Le Québec était la destination de près de 40 000 d’entre eux. À l’extérieur du Québec, en 2019, parmi les 300 000 résidents permanents admis, moins de 10 000 ou moins de 3 % étaient d’expression française (IRCC, 2020a).

    Au-delà de ces admissions annuelles de résidents permanents d’expression française, l’on constate, à l’extérieur du Québec, que la part de l’ensemble de la population immigrante d’expression française (première langue officielle parlée) a peu évolué en proportion entre 1981 et 2011, passant de 1,7 % à 2,0 %, alors que la proportion de la population d’expression française née au pays reculait de 5,9 % à 4,5 % (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    L’on constate ainsi qu’au Canada hors Québec, la proportion de résidents permanents d’expression française admis annuellement, de même que la proportion de l’ensemble des immigrants d’expression française (indépendamment de la période d’immigration), est moins importante que le poids démographique de l’ensemble de la population d’expression française.

    Composition de l’immigration

    La composition de l’immigration s’est grandement diversifiée dans les dernières décennies : elle est de plus en plus originaire de pays non européens et majoritairement de langue maternelle tierce, autre que le français ou l’anglais (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    L’immigration internationale est le principal moteur de croissance de la population canadienne. Sa principale répercussion en matière linguistique est l’augmentation de la population n’ayant ni le français ni l’anglais comme langue maternelle ou comme principale langue d’usage à la maison. De plus, sa composition géographique et linguistique exerce une influence directe sur l’équilibre démolinguistique entre le français et l’anglais au Canada dans la mesure où la forte majorité de ces immigrants ont une très forte propension à adopter l’anglais comme principale langue d’usage au Canada hors Québec. (Statistique Canada, janvier 2017 : 18)

    Dans ce contexte, la langue maternelle, qui a longtemps servi de principal critère pour désigner les différents groupes linguistiques au Canada, a fait place en 1991 à la première langue officielle parlée (PLOP), adoptée par le gouvernement fédéral en vertu de la partie IV de la Loi sur les langues officielles et inscrite dans le Règlement sur les langues officielles – communications avec le public et prestation de services. La PLOP sert à établir la langue officielle dans laquelle les citoyens, y compris les nouveaux citoyens, sont susceptibles de demander des services et de communiquer avec le gouvernement fédéral. Comme elle tient compte de trois questions de recensement prises successivement, soit la connaissance des langues officielles, la langue maternelle et la langue utilisée le plus souvent à la maison, la PLOP se veut plus inclusive que la seule langue maternelle. Depuis son adoption, la PLOP est largement utilisée pour circonscrire les populations « francophone » ou « anglophone » à diverses fins, par exemple dans des analyses démographiques et démolinguistiques.

    Les tendances des dernières décennies quant au poids démographique des groupes de langue officielle française, anglaise et de langue tierce (autre que française ou anglaise), selon la langue maternelle et selon la PLOP, donnent une indication du fait que, à l’extérieur du Québec, la population de langue maternelle tierce tend à connaître, adopter et utiliser majoritairement l’anglais plutôt que le français. De la sorte, selon le critère de la PLOP, elle tend à être incluse dans la population d’expression anglaise et à contribuer au maintien de son poids démographique. L’on observe que ce n’est pas le cas pour la population d’expression française, chez qui, malgré certaines hausses de nombres, le poids démographique est en baisse continue tant selon le critère de la langue maternelle que selon celui de la PLOP en raison de divers facteurs, dont la dénatalité, la mobilité linguistique et le faible apport de l’immigration que nous avons signalé plus tôt.

    L’immigration a joué un rôle majeur dans la dynamique récente de la population de langue anglaise du Canada hors Québec. La progression de l’immigration vers la fin des années 1980 et la constance du nombre total d’immigrants admis au Canada depuis (entre 150 000 et 250 000 annuellement), dont la majorité s’établit à l’extérieur du Québec, ont fortement contribué à ces évolutions. D’une part, la taille et la composition linguistique de la population immigrante, dont le plus grand nombre n’a ni l’anglais ni le français comme langue maternelle, ont fait diminuer le poids de la population de langue anglaise définie selon les critères de la langue maternelle et de la langue d’usage au foyer. D’autre part, ces évolutions confirment le rôle clé de l’anglais en tant que principale langue d’intégration et de convergence à l’extérieur du Québec. L’apprentissage généralisé de l’anglais, les transferts linguistiques vers cette langue et la forte propension à adopter l’anglais plutôt que le français expliquent les écarts entre les tendances propres à chacune des trois caractéristiques et le fait que, malgré la forte immigration de langue tierce, le poids démographique de la population de langue anglaise définie selon la PLOP a continué de croître. (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 50-51)

    Croissance d’une immigration de langue maternelle tierce et apport inégal au poids démographique des groupes de langue officielle au Canada à l’extérieur du Québec

    La cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire a été adoptée en 2003 pour freiner la baisse du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire qui était de 4,4 % au recensement de 2001 (selon la langue maternelle et la PLOP). L’on trouve ci-dessous quelques données qui donnent une indication du contexte et de l’ampleur de cette baisse selon ces critères avant l’adoption de la cible et depuis.

    Au Canada hors Québec, comme l’illustre la figure 1, la proportion de la population d’expression française a connu une baisse constante depuis les dernières décennies, et ce, dans des proportions quasi identiques qu’il s’agisse du critère de la langue maternelle ou de celui de la PLOP.

    Cette proportion représentait 6,1 % selon le critère de la PLOP et 6,0 % selon celui de la langue maternelle en 1971, alors qu’elle représentait, selon ces deux critères, 4,4 % en 2001 et 3,8 % en 2016. Entre 1971 et 2016, la proportion de cette population selon le critère de la PLOP est donc passée de 6,1 % à 3,8 %, ce qui représente une baisse relative de l’ordre de 37,6 %.

    Durant cette période, la proportion de population d’expression anglaise a aussi connu une baisse selon le critère de langue maternelle de 78,4 % à 71,8 %. Par ailleurs, la proportion de population d’expression anglaise a connu une certaine hausse selon le critère de la PLOP, passant de 92,2 % à 94,1 %, ce qui représente une hausse relative de 2,0 %.

    En revanche, entre 1971 et 2016, la population de langue maternelle tierce a connu une hausse, passant de 15,7 % à 24,4 %, ce qui représente une hausse relative de l’ordre de 55 %. Cette hausse de proportion de population de langue maternelle tierce explique les baisses des proportions de population de langue française et anglaise selon le critère de la langue maternelle.

    Or, entre l’une et l’autre langue officielle, au Canada hors Québec, il se trouve que l’anglais est majoritairement la langue de convergence de la population de langue maternelle tierce. Si la tendance se maintient, la baisse constante du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire pourrait être appelée à se poursuivre. Statistique Canada, dans sa publication Projections linguistiques pour le Canada 2011-2036, estime que la proportion de population d’expression française à l’extérieur du Québec pourrait continuer de baisser et pourrait atteindre 3,1 % en 2036 selon le critère de la PLOP (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 83).

    Figure 1 : Pourcentage de population selon les critères de la langue maternelle et de la première langue officielle parlée, Canada hors Québec, 1971 à 2016

    Sources :

    Statistique Canada. Tableau 15-10-0003-01 Population selon la langue maternelle et la géographie, 1951 à 2016

    Version texte : Figure 1
      PLOP Langue maternelle
      Français % Anglais % Autre % Français % Anglais % Autre %
    1971 6,1 % 92,2 % 1,6 % 6,0 % 78,4 % 15,7 %
    1981 5,1 % 93,6 % 1,3 % 5,2 % 79,5 % 15,2 %
    1991 4,8 % 93,7 % 1,5 % 4,8 % 77,7 % 17,5 %
    1996 4,5 % 93,7 % 1,8 % 4,5 % 76,6 % 18,9 %
    2001 4,4 % 93,9 % 1,7 % 4,4 % 75,2 % 20,4 %
    2006 4,2 % 94,0 % 1,8 % 4,1 % 73,3 % 22,6 %
    2011 4,0 % 94,0 % 2,0 % 4,0 % 73,1 % 22,9 %
    2016 3,8 % 94,1 % 2,1 % 3,8 % 71,8 % 24,4 %

    1.2 Sujet et visée de l’étude

    L’étude porte sur la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire adoptée dans le Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (2003). Ce Cadre avait été élaboré par le Comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada – Communautés francophones en situation minoritaire (Comité directeur CIC- CFSM), qui avait été mis sur pied par le ministre de l’Immigration de l’époque.

    Devant le constat d’une baisse continue du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, l’objectif était d’au moins maintenir ce poids démographique à 4,4 %, comme il se trouvait au recensement de 2001 (tant selon le critère de la langue maternelle que celui de la PLOP). L’échéancier initial avait été fixé à 2008, puis a été repoussé à 2023 en raison notamment de défis méthodologiques quant à la définition d’un « immigrant d’expression française » et à sa mesure. Depuis l’adoption de cette cible, trois définitions et mesures ont été utilisées pour dénombrer les résidents permanents d’expression française parmi les admissions au Canada hors Québec.

    La présente étude comporte une analyse statistique des admissions de résidents permanents d’expression française relativement à cette cible depuis son adoption selon les différentes définitions utilisées, et des estimations de l’incidence souhaitée de l’atteinte de cette cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, ce qu’était son objectif. À l’aide d’éléments d’analyse qualitative, elle repère aussi des éléments de contexte entourant l’adoption et l’évolution de la cible ainsi que des pistes de réflexion à l’approche de son arrivée à échéance en 2023.

    Ce faisant, l’étude vise à porter un éclairage sur l’expérience passée depuis l’adoption de cette cible et à explorer des pistes de réflexion pour l’avenir à l’approche de son arrivée à échéance en 2023. De la sorte, l’étude vise à mettre en perspective cette cible et non à en déterminer ou à en fixer une nouvelle.

    1.3 Objectifs et méthodologie de l’étude

    1.3.1 Analyse quantitative statistique – objectif premier et principal

    L’étude a pour objectif premier et principal de réaliser et de présenter une analyse quantitative statistique 1) des écarts entre les admissions de résidents permanents d’expression française et la cible dans le temps, et 2) des estimations de l’incidence souhaitée de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire – ce qu’était l’objectif de cette cible.

    D’abord, il s’agit dans cette analyse de calculer l’ampleur des écarts depuis 2001entre les taux d’admissions de résidents permanents d’expression française atteints et les taux qui auraient été requis pour que 4,4 % des résidents permanents admis à l’extérieur du Québec soient d’expression française, suivant les différentes définitions et mesures utilisées par IRCC.

    Les manques à gagner ainsi calculés sont ensuite ajoutés à la population d’expression française à l’extérieur du Québec selon le critère de la PLOP au recensement de 2016. L’étude contient ainsi des estimations de l’incidence souhaitée de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    1.3.2 Analyse qualitative – objectif secondaire et complémentaire

    Le second objectif de l’étude, complémentaire au premier, est de mettre en contexte et en perspective l’adoption et l’évolution de la cible et de son objectif. Cela s’appuie sur une revue de littérature et de documents clés ainsi que sur la tenue de groupes de discussion virtuels avec des intervenants clés des groupes et organismes gouvernementaux, communautaires et universitaires suivants :

    • Commissariat aux langues officielles;
    • Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada ( IRCC ) et Statistique Canada;
    • Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC), Réseaux en immigration francophone (RIF);
    • Chercheurs universitaires.

    Les groupes de discussion visaient à présenter les résultats préliminaires de l’étude, à obtenir la rétroaction des intervenants clés à l’égard de l’information présentée et à recueillir leurs observations, perceptions, compréhension du contexte entourant l’adoption et l’évolution de la cible, de même qu’à explorer des pistes de réflexion à l’approche de son arrivée à échéance en 2023.

    Afin de préserver l’anonymat des participants, les informations tirées des groupes de discussion sont présentées en fonction de grands thèmes particulièrement récurrents ou saillants, selon les interventions faites. Étant donné le nombre limité de groupes de discussion et de participants, aucune référence n’est faite aux groupes de discussion précis dans lesquels ces interventions ont été partagées. C’est aussi la raison pour laquelle une liste de participants n’est pas incluse au rapport.

    Les informations pertinentes tirées de l’analyse qualitative sont présentées de manière complémentaire dans des sections distinctes (Repères historiques et méthodologiques et Pistes de réflexion et d’avenir). Certaines de ces informations figurent aussi à la fin d’autres sections comme compléments d’information, sous « Observations ».

    1.4 Portée et limites de l’étude

    1.4.1 Cible fédérale de 4,4 %

    L’étude porte seulement sur la cible fédérale de 4,4 % d’immigration d’expression française à l’extérieur du Québec adoptée en 2003 par le Comité directeur CIC- CFSM et non sur d’autres cibles d’immigration d’expression française qu’ont pu adopter des provinces telles que le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et le Manitoba. Nous n’abordons pas non plus le cas de l’immigration d’expression française ni anglaise au Québec.

    1.4.2 Admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec

    Pareillement à la façon dont la cible a été établie en 2003 et suivie par la suite, l’étude porte sur les admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec, ce qui n’inclut pas les résidents temporaires. La présente étude s’appuie sur des données d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec selon différentes définitions et mesures utilisées par IRCC depuis l’adoption de la cible. Ces données sont tirées d’une base de données administratives fournie par IRCC en janvier 2021 pour les fins de la présente étude.

    En portant sur la cible, l’étude traite d’une partie du continuum d’immigration et ne couvre donc pas ce continuum dans son ensemble. Elle concerne principalement, en amont, l’étape de la sélection et de l’admission de résidents permanents d’expression française, bien qu’elle fasse aussi mention des étapes initiales de promotion et de recrutement auprès de ceux‑ci. Elle ne porte pas non plus, en aval, sur l’intégration des résidents permanents d’expression française au sein des communautés francophones en situation minoritaire ni sur leur rétention géographique au sein de ces communautés, ni sur leur rétention linguistique – soit la continuité de leur connaissance et de leur usage du français après leur admission. Bien que cela puisse avoir, comme mentionné plus tôt, une incidence sur le poids démographique des groupes linguistiques, dont la population d’expression française en milieu minoritaire, cela dépasse le cadre des analyses statistiques faites dans la présente étude. Par ailleurs, cela fait l’objet d’autres études et analyses menées ou parrainées par des organismes universitaires ou gouvernementaux, dont certaines par IRCC 1

    Il va de soi que la sélection et l’admission de résidents permanents sont une étape nécessaire, mais non exclusive du continuum d’immigration. Toutefois, à l’heure actuelle, il n’existe pas de cible en matière de rétention ou d’intégration d’immigrants d’expression française en milieu minoritaire.

    1.4.3 Approche utilisée pour estimer l’incidence de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire

    Il importe aussi de souligner le fait que nous proposons des estimations mathématiques de l’incidence souhaitée de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française à l’extérieur du Québec suivant l’approche utilisée au moment de l’adoption de cette cible.

    Ces estimations ne comprennent pas, dans l’équation, une analyse démographique ou démolinguistique complète des divers facteurs affectant le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire. L’étude reconnaît que divers facteurs, tendances et dynamiques complexes affectent de manière particulière ce poids démographique. Toutefois, suivant l’approche adoptée pour l’établissement de la cible, elle n’incorpore pas ces facteurs dans son analyse statistique. L’étude reconnaît cette limite. Par ailleurs, elle se réfère à certaines analyses démographiques et démolinguistiques faites dans d’autres publications, dont Projections linguistiques pour le Canada 2011-2036 de Statistique Canada.

    Néanmoins, comme mentionné plut tôt, bien que l’immigration ne soit pas le seul facteur affectant le poids démographique, il s’agit d’un facteur clé de l’équilibre démolinguistique au pays et sur lequel le gouvernement exerce un rôle de premier plan, particulièrement pour ce qui est des niveaux et de la composition de l’immigration.

    1.4.4 Description, mais non l’évaluation de programmes et d’initiatives d’immigration d’expression française

    Enfin, la présente étude ne porte pas sur les politiques, initiatives ou programmes adoptés et mis en œuvre en matière d’immigration et d’immigration d’expression française pour ce qui est, par exemple, de leur évolution, de leur évaluation ou de leur incidence sur l’atteinte de la cible. Toutefois, les programmes clés pertinents à la cible et à son analyse y sont présentés et décrits.

    1.5 Présentation de l’étude

    Afin que l’analyse quantitative-statistique soit mise en contexte, l’étude présente d’abord des repères historiques et méthodologiques pertinents à l’adoption et à l’évolution de la cible. Cette section s’appuie sur l’information tirée de la revue de littérature et de documents clés ainsi que des groupes de discussion.

    La section suivante présente l’analyse statistique des écarts entre les admissions de résidents permanents d’expression française hors Québec de 2001 à 2020 et la cible, puis des estimations de l’incidence souhaitée de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire au recensement de 2016. Ensuite sont présentées certaines caractéristiques des résidents permanents d’expression française admis entre 2001 et 2020.

    Une dernière section présente des pistes de réflexion et d’avenir à considérer à la suite de ces analyses statistiques et tenant compte d’informations qualitatives à partir de la revue de littérature et de documents clés ainsi que des groupes de discussion.

    La conclusion, qui contient un sommaire de l’étude, est suivie de trois recommandations du commissaire aux langues officielles.

    2. Repères historiques et méthodologiques

    2.1 Repères historiques

    2.1.1 Quelques moments clés ayant précédé l’adoption de la cible

    La cible a été adoptée dans le Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (2003), élaboré par le Comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada – Communautés francophones en situation minoritaire (Comité directeur CIC- CFSM), qui avait été mis sur pied en 2002, par le ministre de l’époque.

    Le Cadre stratégique a fait suite à des modifications à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, à laquelle des dispositions en matière de langues officielles et de communautés de langue officielle en situation minoritaire ont été ajoutées suivant notamment la tournée de consultations nationales Dialogue menée par la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) et des interventions de la commissaire Adam devant le Parlement et dans des recherches ayant donné lieu à deux études (2002). En outre, l’étude réalisée par Quell (CLO, novembre 2002) contenait la recommandation suivante :

    Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration doit établir des objectifs à long terme en matière de sélection et de maintien, au sein de ces communautés, des immigrants parlant la langue de la minorité. Ces objectifs doivent non seulement tenir compte du pourcentage démographique que représentent ces communautés par rapport à l’ensemble de la population, mais aussi compenser le déséquilibre qui a existé entre les taux d’immigration vers les deux grandes collectivités linguistiques par le passé. ( CLO , Quell, novembre 2002 : 22)

    L’adoption de ce Cadre stratégique était en soutien au premier Plan d’action sur les langues officielles 2003-2008, qui brossait un portrait des défis notamment démographiques des communautés francophones en situation minoritaire et fixait des objectifs chiffrés de redressement dans divers axes prioritaires (Comité directeur CIC- CFSM, 2003). Aussi, il devait être suivi de l’adoption de plans d’action favorisant l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, lesquels devaient être établis par CIC en collaboration avec les autres ministères fédéraux, les provinces et les territoires ainsi que les communautés francophones (Comité directeur CIC- CFSM, 2003 : 4).

    2.1.2 Approche employée pour l’établissement de la cible et de son objectif

    Le Cadre était introduit par un message des deux coprésidents soulignant que le Comité directeur avait cerné les problématiques auxquelles s’attaquer et les grandes stratégies permettant de renverser le déficit en immigration que connaissent les communautés francophones et acadiennes depuis des décennies. Il considérait l’enjeu comme crucial pour ces communautés et comportant des répercussions majeures, que ce soit au niveau économique, culturel, social, démographique ou international (Comité directeur CIC- CFSM, 2003 : 4).

    Reconnaissant que les communautés francophones en situation minoritaire n’ont pas autant bénéficié de l’immigration que la majorité anglophone, le Cadre visait l’élaboration et la mise en œuvre de stratégies pour favoriser l’attraction, l’établissement et l’intégration d’immigrants au sein des communautés francophones et acadienne en situation minoritaire. Il contenait cinq objectifs, dont les suivants : l’accroissement du nombre d’immigrants d’expression française; l’amélioration des capacités d’accueil des communautés francophones en situation minoritaire; l’intégration économique, puis l’intégration sociale et culturelle des immigrants d’expression française; la régionalisation de l’immigration francophone à l’extérieur de Toronto et de Vancouver.

    Le premier objectif du Cadre stratégique (2003 : 10) présente un intérêt particulier pour la présente étude. Selon le libellé de son titre, il consistait à « accroître le nombre d’immigrants d’expression française de manière à accroître le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire ». Dans l’argumentaire, il était cependant plutôt question de « maintenir » ce poids démographique en attirant et en gardant, à tout le moins, un pourcentage d’immigrants d’expression française égal à celui du poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire. Ainsi, il paraît ici d’abord y avoir eu une ambiguïté quant à l’objectif d’accroître ou de maintenir ce poids démographique. De plus, il peut être noté que l’argumentaire faisait référence à la fois à l’attraction et au maintien d’immigrants d’expression française. Enfin, il importe de souligner le fait que la cible de 4,4 % était comprise comme un seuil minimal à atteindre, le résultat visé étant qu’au moins 4,4 % des immigrants à l’extérieur du Québec soient, en 2008, d’expression française (Comité directeur CIC- CFSM, 2003 : 11).

    Ce seuil était appuyé, d’une part, sur le pourcentage d’immigrants qui étaient d’expression française en milieu minoritaire selon les données administratives du Ministère (soit une proportion de 3,1 % d’immigrants d’expression française, c’est-à-dire qui ont le français comme langue maternelle ou qui possèdent une connaissance de la langue française)2 et, d’autre part, sur le pourcentage de population d’expression française à l’extérieur du Québec au recensement de 2001 (qui était de 4,4 % selon les critères de la langue maternelle et de la première langue officielle parlée [PLOP]). Le Cadre stratégique faisait référence à cette proportion de population d’expression française en fonction de la langue maternelle et du poids des communautés francophones en situation minoritaire.

    Le Cadre stratégique ne faisait mention d’aucune étude démographique ou démolinguistique détaillée pour appuyer une cible de 4,4 %, outre cette prémisse d’une équivalence ou corrélation directe entre la proportion d’immigrants d’expression française et le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    L’approche n’aurait donc pas tenu compte, dans l’équation, d’autres dimensions de l’ensemble du continuum d’immigration du pays d’origine à la communauté d’accueil et d’intégration, ni d’autres facteurs – outre l’immigration, qui affectent le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    2.1.3 Évolution de la cible et de son objectif

    En septembre 2006, le ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration lançait le Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, élaboré lui aussi par le Comité directeur CIC- CFSM. Le Plan stratégique consistait à établir les défis à relever et les priorités principales à privilégier dans le choix d’initiatives au cours des cinq prochaines années (Comité directeur CIC- CFSM, 2006 : I).

    Le Plan visait à accroître et à mieux concerter les efforts en vue d’atteindre les cinq objectifs établis dans le Cadre stratégique de 2003, dont celui d’accroître le nombre d’immigrants d’expression française de manière à accroître le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire. Selon le Comité directeur et son Plan stratégique, « il faudrait une période de 15 ans pour atteindre la cible annuelle de 8 000 à 10 000 immigrants d’expression française dans les communautés francophones en situation minoritaire », soit 120 000 à 150 000 au total au cours de cette période (Comité directeur CIC- CFSM, 2006 : 3).

    Ainsi, dans le cadre de ce Plan, l’atteinte de la cible de 4,4 %, initialement prévue pour 2008, était repoussée de 15 ans, à 2023. Cela était aussi justifié par des difficultés à mesurer avec précision le portrait démographique de l’immigration dans les communautés francophones en situation minoritaire.

    Dès l’année suivant sa publication, le Plan stratégique faisait l’objet de critiques de la part du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes (mai 2007). Les objectifs du plan n’y étaient pas remis en cause, mais les membres du comité soutenaient qu’il contenait plusieurs lacunes, dont une ambiguïté des cibles et une absence d’état de la situation.

    Par la suite, en réponse aux critiques d’un manque de clarté quant aux moyens de mesurer l’évolution des progrès en matière d’admissions, le gouvernement fédéral a établi en juin 2009 une cible intermédiaire de 1,8 % d’immigration francophone à atteindre pour 2013, tout en conservant la cible de 4,4 % pour 2023 (Comité permanent des langues officielles, novembre 2010). Cette cible de 1,8 % a effectivement été atteinte à l’échéance prévue (CIC, juillet 2012). De plus, en 2013, le gouvernement a adopté une cible de 4 % d’immigrants économiques d’expression française à l’extérieur du Québec pour 2018 tout en conservant la cible générale de 4,4 % pour 2023.

    Par ailleurs, en 2010, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, dans le cadre de sa troisième étude sur l’enjeu, soutenait qu’en raison de la mobilité des francophones et des taux des transferts linguistiques, la cible de 4,4 % déterminée à partir des données statistiques de 2001 était dépassée, qu’elle ne permettrait pas de maintenir l’équilibre linguistique à l’extérieur du Québec et qu’elle devait ainsi être revue à la hausse. L’étude comptait 20 recommandations. La deuxième visait à ce que Citoyenneté et Immigration Canada se penche, avec la collaboration des communautés francophones en situation minoritaire, sur la possibilité d’établir à 7 % la proportion d’immigrants francophones que le Canada souhaite recevoir annuellement dans ces communautés. Cette recommandation est restée sans suite. Une troisième recommandation était faite à l’endroit du gouvernement du Canada pour qu’après la consultation avec les communautés francophones en situation minoritaire et après l’élaboration d’une nouvelle stratégie d’immigration francophone, il mette en place une politique nationale sur l’immigration francophone en milieu minoritaire (Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, novembre 2010).

    En 2012, dans le cadre de l’Évaluation de l’Initiative de recrutement et d’intégration d’immigrants d’expression française au sein des communautés francophones en situation minoritaire (CIC, juillet 2012), le ministère soutenait ce qui suit :

    Le gouvernement fédéral et les CFSM ont adopté, en 2006, un plan stratégique qui vise entre autres à accroître la proportion de nouveaux arrivants d’expression française s’établissant dans ces communautés. Il s’agit là d’un objectif qui est en lien direct avec les obligations législatives du ministère en ce qui a trait au développement et à l’épanouissement des communautés de langues officielles vivant en situation minoritaire. ( CIC , juillet 2012 : 15)

    Une des questions à l’étude cherchait à savoir si les initiatives mises en place ont aidé à atteindre les objectifs fixés quant au nombre d’immigrants d’expression française s’installant dans des CFSM. À cet effet, le rapport affirmait à plus d’une reprise que la cible n’avait pas été atteinte. En outre, on peut lire ce qui suit :

    [B]ien que le nombre de nouveaux arrivants s’installant dans les CFSM ait augmenté depuis 2003, l’objectif de 4,4 % n’a pas encore été atteint. ( CIC , juillet 2012 : 16)

    Depuis l’adoption du Cadre stratégique en 2003, le gouvernement fédéral et les CFSM poursuivent un objectif (4,4 %) qui n’est toujours pas atteint. On note toutefois une augmentation du nombre de nouveaux arrivants d’expression française s’établissant dans les CFSM . ( CIC , juillet 2012 : 25)

    Si des progrès ont été réalisés au cours de la dernière décennie, il reste tout de même que les objectifs établis en 2003 (et précisés dans le Plan stratégique de 2006) ne sont pas encore atteints. Les efforts des partenaires devront donc se poursuivre. ( CIC , juillet 2012 : 39)

    Le rapport d’évaluation concluait que le Cadre stratégique de 2003 et le Plan stratégique de 2006 avaient permis à CIC et aux CFSM d’établir un objectif quant au nombre de nouveaux arrivants d’expression française qui devrait s’établir dans les CFSM, et que cette approche avait plusieurs mérites pour permettre aux intervenants de mesurer les progrès réalisés dans cette démarche particulièrement complexe. Toutefois, il soulignait le défi de ne pas avoir une seule méthode validée et adoptée par consensus pour calculer le nombre de « nouveaux arrivants d’expression française » selon la définition du Plan stratégique. Il recommandait que CIC, en collaboration avec les partenaires pertinents, détermine la formule qu’il entend utiliser afin de mesurer le nombre d’immigrants d’expression française qui s’établissent dans les CFSM (CIC, juillet 2012 : vi). Ces questions de définition « d’immigrants d’expression française » et leurs mesures correspondantes sont présentées et expliquées plus en détail dans le présent rapport, à la section suivante relative aux repères méthodologiques.

    En 2016, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes soulignait l’inexistence d’une politique pour soutenir IRCC dans la mise en œuvre des dispositions de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, qui ont pour objet de favoriser le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire par l’entremise de l’immigration. Il reconnaissait qu’ IRCC prend des mesures pour augmenter le nombre d’immigrants francophones, mais que son approche par programmes a pour effet de morceler le dossier de l’immigration francophone. Il recommandait qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et de la Loi sur les langues officielles, émette une politique officielle d’immigration visant à accroître le poids démographique des communautés linguistiques en milieu minoritaire, tout en respectant les compétences des provinces (Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, décembre 2016).

    L’Évaluation de l’Initiative d’immigration dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire (IRCC, juillet 2017) portait sur les progrès réalisés vers l’atteinte des résultats attendus depuis l’évaluation de 2012 et comprenait une certaine prise en compte des résultats depuis 2003, afin de mieux évaluer les tendances au fil du temps. Parmi les principaux domaines d’intérêt se trouvaient les activités de promotion et de recrutement ainsi que les résultats de l’immigration francophone dans les CFSM (IRCC, juillet 2017 : 8). Le rapport d’évaluation faisait notamment les constats suivants :

    Toutefois, malgré ces efforts, qui sont en cours depuis 2003, le poids relatif des immigrants d’expression française qui s’installent dans les CFSM demeure bien inférieur aux objectifs ministériels. Les données probantes indiquent que l’approche actuelle, qui repose principalement sur les activités promotionnelles et les options de résidence temporaire, pourrait ne pas suffire à atteindre les objectifs établis et, par conséquent, d’autres efforts pourraient être nécessaires pour atteindre les cibles actuelles. ( IRCC , juillet 2017 : vi)

    L’Initiative des CLOSM appuie les obligations ministérielles en ce qui a trait à la LLO et à la LIPR (telles qu’elles sont décrites ci-dessus), ainsi que ses objectifs liés à l’immigration francophone, qui s’harmonisent avec les priorités des CFSM et des gouvernements provinciaux et territoriaux. Depuis 2003, l’un des objectifs du Ministère est de s’assurer que 4,4 % des immigrants qui s’établissent à l’extérieur du Québec sont d’expression française – un objectif qui doit être atteint d’ici 2023. ( IRCC , juillet 2017 : 11)

    Par conséquent, le Cadre stratégique a fixé un objectif de 4,4 % pour l’immigration francophone dans les CFSM , et il a souligné la nécessité d’élaborer des mesures pour aider les communautés francophones et acadiennes à tirer profit davantage de l’immigration afin d’atténuer leur déclin démographique. ( IRCC , juillet 2017 : 12)

    Des années plus tard, il est encore nécessaire de favoriser la croissance démographique et économique, ainsi que la vitalité des CFSM , et l’immigration est perçue comme un moyen d’y arriver ( CLO , 2014; Chambre des communes, 2015). Les objectifs fixés pour l’immigration francophone et l’immigration économique francophone dans les CFSM sont toujours en vigueur et n’ont pas été atteints. ( IRCC , juillet 2017 : 12)

    Bien que le nombre d’immigrants d’expression française qui s’installent dans les CFSM ait augmenté pendant bon nombre d’années depuis 2003, leur poids relatif par rapport à l’ensemble de la population immigrante, ainsi que par rapport à la population d’immigrants économiques, hors du Québec, est demeuré inférieur aux cibles d’ IRCC . ( IRCC , juillet 2017 : 14)

    Les constatations de l’évaluation donnent à penser que les objectifs fixés pour l’immigration francophone, bien qu’ils soient toujours en vigueur, sont ambitieux et seront difficiles à réaliser et que le Ministère devra déployer des efforts plus importants pour réaliser des progrès vers l’atteinte de ces objectifs. ( IRCC , juillet 2017 : 16)

    En 2018, le Plan d’action fédéral-provincial-territorial visant à accroître l’immigration francophone à l’extérieur du Québec a été adopté. Reconnaissant le rôle que joue l’immigration francophone dans la préservation de la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire et le déclin démographique de ces communautés malgré les efforts et les réalisations, le Plan affirmait la nécessité de redoubler d’efforts pour relever les défis. Il visait à la mise en œuvre concertée, entre les différents gouvernements et intervenants, de mesures additionnelles pour attirer, sélectionner, intégrer et retenir les immigrants d’expression française (IRCC, mars 2018).

    En 2019, à la suite du Plan d’action pour les langues officielles 2018-2023, le gouvernement fédéral dévoilait la Stratégie en matière d’immigration francophone, qui réitérait la volonté du gouvernement d’atteindre la cible de 4,4 % d’ici 2023. Plus précisément, la Stratégie visait à soutenir la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire en établissant trois objectifs principaux en matière d’immigration francophone sur les quatre prochaines années, soit : accroître l’immigration francophone au Canada hors Québec, pour atteindre une cible de 4,4 % d’ici 2023 ; appuyer l’intégration et la rétention réussies des nouveaux arrivants d’expression française ; renforcer les capacités des communautés francophones (IRCC, 2019a).

    Plus récemment, à l’hiver 2021, dans le document de proposition de réforme de la Loi sur les langues officielles du gouvernement du Canada, Français et anglais : vers une égalité réelle des langues officielles au Canada (PCH, février 2021), le gouvernement proposait d’adopter une politique d’immigration francophone encadrée par la Loi sur les langues officielles. L’un des objectifs de cette politique était « de maintenir le poids démographique des francophones à l’extérieur du Québec afin que ceux-ci représentent 4,4 p. 100 de la population du pays », sans toutefois mentionner de cible d’immigration francophone ou d’échéancier. Toutefois, compte tenu du fait que depuis l’adoption de la cible, la proportion de population d’expression française en milieu minoritaire est passée de 4,4 % au recensement de 2001 à 3,8 % à celui de 2016 (selon le critère de la PLOP), le document de réforme ouvrirait la voie à une approche de rattrapage pour redresser puis maintenir le poids de la population d’expression française à 4,4 %.

    2.1.4 Observations quant aux repères historiques

    Approche d’établissement de la cible et de son objectif

    Selon notre lecture du Cadre stratégique de 2003 et des observations d’intervenants clés à son sujet, l’établissement d’une corrélation directe entre la proportion d’immigrants ou de résidents permanents d’expression française admis et le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, aurait comporté une approche qui peut être considérée simplificatrice en ne considérant pas l’étendue du continuum d’immigration dans son ensemble ni les divers facteurs démographiques et démolinguistiques à l’œuvre.

    Concernant le continuum d’immigration, il peut être noté que l’argumentaire évoquait la nécessité non seulement d’attirer, mais aussi de garder une proportion d’immigrants d’expression française égale au poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire. À cet effet, divers intervenants consultés dans divers groupes de discussion ont souligné que les efforts en recrutement et sélection, puis en rétention et intégration des immigrants devraient aller de pair.

    Concernant les autres facteurs qui ont une incidence sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, sans que cela soit explicité dans ce Cadre stratégique, quelques interventions aux groupes de discussion indiquent que cela aurait toutefois fait partie des discussions et réflexions plus larges à l’époque. Dans d’autres interventions, ont été soulignés l’importance de tenir compte de ces divers facteurs et le fait qu’ils se déploient de façon distincte d’une région à l’autre. Il peut être noté que des analyses de divers facteurs, à différentes échelles géographiques, sont notamment disponibles dans des publications de Statistique Canada, dont celles citées dans la présente étude ainsi que dans Les indicateurs composites de la vitalité communautaire (PCH, 2017).

    Par ailleurs, il est intéressant de signaler que cette cible était assortie de moyens dans le Cadre stratégique (Comité directeur CICCFSM, 2003 : 11) tels que l’établissement d’un pourcentage d’immigrants parlant le français choisis dans le cadre du programme des candidats des provinces et d’un pourcentage d’étudiants étrangers d’expression française admis comme résidents permanents. Il était de plus proposé de cibler, dans les activités de recrutement, des pays sources francophones ou de déployer des efforts particuliers. La proposition de cibler certains programmes et pays sources s’est aussi dégagée de la revue de littérature et d’interventions lors des groupes de discussion.

    Échéanciers pour atteindre la cible

    Concernant le report de l’échéancier initial de 2008 à 2023, nous remarquons que dans le Cadre stratégique de 2003, la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire devait être atteinte en 2008. Cet échéancier a été reporté dans le Plan stratégique de 2006 qui fixait les priorités des cinq prochaines années. Le Comité directeur CICCFSM y disait « estimer qu’il faudrait une période de 15 ans pour atteindre la cible annuelle de 8 000 à 10 000 immigrants d’expression française dans les communautés francophones en situation minoritaire ». Cela était attribué à des défis liés à la définition d’un « immigrant d’expression française » et son dénombrement. Selon certaines interventions lors de groupes de discussion, il s’agissait du temps nécessaire pour voir et mesurer, à trois reprises et sur une base quinquennale, les effets des mesures prises. Nous remarquons toutefois que le nouvel échéancier de 2023 n’apparaissait pas comme tel dans le Plan stratégique.

    Par ailleurs, dans les années qui ont suivi, le ministère constatait que, malgré des mesures prises et des initiatives entreprises ainsi que des hausses de nombres d’admissions de résidents d’expression française en milieu minoritaire, la cible n’était pas atteinte (CIC, juillet 2012; IRCC, juillet 2017), qu’il devait en faire plus (IRCC, juillet 2017) et que des progrès devaient être réalisés (IRCC, juillet 2017). Dans la Stratégie en matière d’immigration francophone, le ministère s’engageait à davantage communiquer systématiquement les progrès relatifs à l’atteinte de la cible (IRCC, 2019a). Il a indiqué se donner jusqu’en 2023 pour atteindre la cible (CIC, juillet 2012; IRCC, juillet 2017).

    Le report de l’échéancier de 2008 à 2023 pourrait avoir laissé place à interprétation, à savoir, par exemple, si l’atteinte de la cible pouvait être comprise et attendue sur une base annuelle, quinquennale ou à terme de l’échéancier. Quelle que soit cette interprétation, le ministère s’attendait notamment à voir des progrès vers l’atteinte de la cible. À cet effet, le ministère publie des données annuelles permettant de suivre l’évolution vers l’atteinte de la cible, dont Faits et chiffres. Il fait également rapport au Parlement sur les niveaux et sur la composition de l’immigration sur une base annuelle.

    Autres approches

    Dans plus d’un groupe de discussion, des interventions ont porté sur l’établissement d’une cible et d’objectifs purement quantitatifs relativement à l’apport de l’immigration au développement et à l’épanouissement des communautés francophones en situation minoritaire.

    Dans une optique davantage qualitative, plus d’une a soulevé l’importance de ne pas oublier le côté humain relativement aux perceptions et aux expériences des immigrants d’expression française et des communautés francophones en situation minoritaire dans l’ensemble du continuum d’immigration. À ce sujet, il a été question de l’attractivité des communautés francophones en milieu minoritaire aux yeux d’immigrants potentiels, notamment selon les opportunités et services qui s’y trouvent; des motivations des immigrants à vouloir s’installer dans telle ou telle autre communauté (francophone ou anglophone, en milieu minoritaire ou majoritaire, dans telle province ou tel territoire, en milieu urbain ou rural); de leur expérience à travers le processus d’immigration, d’installation et d’intégration dans ces communautés ou de leur expérience à migrer entre les communautés. Par ailleurs, d’autres ont fait remarquer que des immigrants d’expression française qui s’intègrent aux communautés francophones en situation minoritaire contribuent eux-mêmes au recrutement d’autres immigrants au sein de ces communautés en raison de facteurs linguistiques mais aussi culturels et humains.

    D’autres ont plutôt soulevé l’idée d’établir des objectifs complémentaires, par exemple quant à la rétention et à l’intégration des immigrants d’expression française au sein des communautés francophones en situation minoritaire.

    2.2 Repères méthodologiques

    2.2.1 Défis liés à la définition, à la mesure et au dénombrement des immigrants d’expression française

    L’enjeu des définitions, en tant qu’outil conceptuel pour identifier et dénombrer une population, dépasse le cadre de l’immigration puisqu’il n’existe pas une définition ou une méthode de dénombrement unique pour circonscrire la population d’expression française, et, de surcroît, la population immigrante d’expression française.

    Il s’agit d’une question qui se complexifie dans un contexte de diversité croissante quant à la composition des groupes, caractéristiques et pratiques linguistiques. Comme l’expose une étude de l’Institut canadien de recherche sur les minorités linguistiques, l’enjeu des définitions « en soulève d’autres qui ont des conséquences directes non seulement sur la recherche, mais aussi sur les politiques publiques ainsi que sur l’estimation des populations de langue officielle en situation minoritaire qui peuvent utiliser certains services. » (Guignard Noël et Forgues, mars 2020 : 1)

    Dans le domaine de l’immigration, cet enjeu est d’une importance particulière : il est au cœur de l’élaboration des cibles et des suivis des progrès réalisés. Diverses définitions et méthodes sont possibles si on utilise l’une des diverses variables linguistiques ou une combinaison de celles-ci. En outre, les nombres peuvent varier en fonction de la définition et de la méthode utilisée. Ainsi, selon les critères retenus, plusieurs définitions sont possibles, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients (CLO, novembre 2014; CIC, juillet 2012 et IRCC, juillet 2017). Au cours des deux dernières décennies, en consultation avec les communautés francophones en situation minoritaire, trois principales définitions et mesures correspondantes se sont succédé à IRCC pour dénombrer les résidents permanents d’expression française.

    Il importe de rappeler que la cible de 4,4 % a été fixée en fonction du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire au recensement de 2001 de Statistique Canada, où il se trouvait à 4,4 % tant selon le critère de la langue maternelle que celui de la PLOP. Par ailleurs, les rapports et suivis quant à l’atteinte de la cible ont été et sont toujours effectués en fonction des données administratives d’ IRCC quant aux admissions de résidents permanents. Ainsi, il convient de donner brièvement quelques référents méthodologiques pour chacune de ces sources de données.

    Le recensement, qui a lieu une fois tous les cinq ans, comprend un plus grand nombre de questions ayant trait aux langues officielles que le formulaire de demande d’admission à la résidence permanente, qui n’est rempli qu’au moment de faire une demande et qui contient moins de questions. Il y a des différences quant aux questions posées et au traitement des réponses.

    Quant aux questions posées, comme nous le décrivons plus bas, le recensement de 2016 comprenait six questions ou sous-questions permettant de récolter des données sur les langues officielles, soit la connaissance des langues officielles, la langue parlée le plus souvent à la maison, les autres langues parlées régulièrement à la maison, la langue maternelle, la langue utilisée le plus souvent au travail et les autres langues utilisées régulièrement au travail. D’autres variables peuvent être dérivées à partir des réponses à ces questions, dont la première langue officielle parlée.

    Les formulaires de demande de résidence permanente permettent de récolter des données sur la langue maternelle et les langues officielles parlées, soit la connaissance des langues officielles (CIC, juillet 2012). De plus, depuis 2017, il est possible de déterminer la langue officielle dans laquelle une personne est la plus à l’aise. (IRCC, Centre de politiques en immigration francophone, novembre 2016)

    À partir des données de recensement, il est ainsi possible d’obtenir des données plus détaillées selon les caractéristiques et pratiques linguistiques de la population ou de groupes au sein de cette population au fil du temps. En outre, il est possible de ventiler ces données selon le statut d’immigrant et la période d’immigration (immigration récente depuis un ou cinq ans, ou immigration de plus longue date), puis de les comparer à celles de la population non immigrante ou de l’ensemble de la population.

    Quant aux données administratives d’ IRCC, mises à jour sur une base mensuelle, elles permettent d’effectuer un suivi rapproché de l’évolution du portrait des résidents permanents admis au Canada. Toutefois, les variables disponibles pour brosser un portrait de ces résidents permanents d’expression française sont plus limitées.

    De plus, le moment où ces questions sont posées n’est pas le même dans le parcours d’immigration des individus. Ceux-ci répondent aux questions linguistiques posées par IRCC au moment de remplir une demande de résidence permanente, mais répondent à celles posées par Statistique Canada dans le cadre du recensement après s’être installés au Canada.

    Dans un contexte de diversité linguistique croissante, une dimension particulière est de plus en plus présente, à la fois selon les données d’ IRCC et celles du recensement de Statistique Canada : le traitement et la classification des réponses doubles ou multiples aux variables et questions linguistiques.

    2.2.2 Diverses variables linguistiques de recensement à Statistique Canada

    Avant d’aborder les trois définitions d’un immigrant d’expression française et les mesures correspondantes utilisées par IRCC depuis l’adoption de la cible en 2003, il est pertinent de s’attarder sur les variables linguistiques de recensement utilisées par Statistique Canada qui sont les plus pertinentes à la présente étude, à savoir celles utilisées pour dénombrer la population d’expression française en milieu minoritaire et déterminer leur poids démographique parmi l’ensemble de la population à l’extérieur du Québec. Nous ne discuterons donc pas, par exemple, de variables relatives à la langue utilisée au travail.

    Langue maternelle

    La langue maternelle désigne « la première langue apprise à la maison dans l’enfance et encore comprise par la personne au moment où les données sont recueillies »3.

    Elle figure au recensement depuis 1901 et a longtemps servi de variable de référence utilisée notamment par Statistique Canada pour dénombrer la population d’expression française.

    En dénombrant la population d’expression française selon le critère de la langue maternelle, toutefois, on ne tient pas compte des personnes qui ont une langue maternelle autre que le français mais qui le connaissent ou qui l’utilisent dans leur vie quotidienne, au travail ou à la maison par exemple. En effet, nombre d’immigrants qui connaissent le français et peuvent aussi en faire usage ont d’autres langues maternelles, comme l’arabe, le créole, le lingala, etc.

    Connaissance des langues officielles

    La variable de la connaissance des langues officielles désigne « la capacité d’une personne à soutenir une conversation en anglais seulement, en français seulement, dans les deux langues, ou dans ni l’une ni l’autre au moment de la collecte de données »4.

    Elle a été introduite au recensement en 1971. Dès le début des années 2000, une étude du Commissariat soulignait que cette mesure est plus inclusive que celle de la langue maternelle (CLO, Quell, novembre 2002). Toutefois, un de ses désavantages est qu’elle repose sur l’évaluation subjective que fait une personne de sa capacité à soutenir une conversation dans une langue donnée (Guignard Noël et Forgues, mars 2020).

    Langue parlée le plus souvent à la maison

    La variable de la langue parlée le plus souvent à la maison, comme son nom l’indique, réfère à « la langue que la personne parle le plus souvent à la maison au moment de la collecte des données. Une personne peut déclarer plus d’une langue comme étant “parlée le plus souvent à la maison” si les langues sont parlées aussi souvent l’une que l’autre5. »

    Cette variable a aussi été introduite au recensement en 1971. L’un de ses principaux avantages est qu’elle procure un indicateur des transferts linguistiques intragénérationnels, à savoir l’utilisation d’une langue autre que la langue maternelle comme langue utilisée le plus souvent au foyer. Le dénombrement de la population d’expression française selon cette variable exclut toutefois les personnes qui connaissent le français mais qui utilisent le plus souvent à la maison une autre langue, comme c’est le cas de certains immigrants (Guignard Noël et Forgues, mars 2020).

    Une deuxième sous-question a été ajoutée au recensement en 2001 sur « les autre(s) langue(s) parlée(s) régulièrement à la maison », ce qui désigne les langues, s’il y a lieu, que la personne parle régulièrement à la maison, autre que la langue ou les langues qu’elle parle le plus souvent à la maison6. Cette nouvelle question permet d’apporter certaines nuances à l’analyse des transferts linguistiques intragénérationnels en permettant de tenir compte de personnes qui, si elles ne parlent pas leur langue maternelle le plus souvent à la maison, l’utilisent toutefois au moins régulièrement.

    Première langue officielle parlée

    Étant donné les limites de la variable de la langue maternelle pour brosser le portrait d’une population au sein de laquelle l’immigration est de plus en plus diversifiée et compte tenu des langues maternelles tierces, la notion de première langue officielle parlée (PLOP) a été développée et adoptée en 1991 en vertu du Règlement sur les langues officielles – communications avec le public et prestation de services (Statistique Canada, juin 2014). Elle visait à mieux tenir compte des personnes ayant une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, mais qui ont une connaissance de l’une ou l’autre de ces langues ou en font l’usage le plus souvent à la maison.

    Bien que le critère de la PLOP ait été adopté en vertu de la partie IV de la Loi sur les langues officielles en 1991, depuis lors, elle a aussi été utilisée plus largement pour définir et dénombrer les minorités de langue officielle, notamment relativement à la partie VII de la Loi sur les langues officielles, qui porte sur l’engagement du gouvernement à favoriser leur épanouissement. Ainsi, la PLOP est la variable utilisée notamment dans les portraits statistiques de la population immigrante de langue française à l’extérieur du Québec établis par Statistique Canada (juin 2014 et avril 2010) de même que dans beaucoup de travaux récents sur les minorités de langue officielle. Il s’agit aussi de la principale variable de référence dans cette étude pour ce qui est de l’estimation de l’incidence à atteindre la cible de 4,4% d’immigration d’expression française sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    La PLOP ne fait pas l’objet d’une question de recensement, mais elle est dérivée de trois questions linguistiques de recensement prises successivement, à savoir celle sur la connaissance des langues officielles, celle sur la langue maternelle et celle sur la langue parlée le plus souvent à la maison. Ci-dessous se trouve une explication plus détaillée de cette méthode de dérivation. Un diagramme la représente à la figure 2.

    Suivant cette méthode, « les personnes qui peuvent soutenir une conversation en français seulement ont le français comme première langue officielle parlée. Les personnes qui peuvent soutenir une conversation en anglais seulement ont l’anglais comme première langue officielle parlée. Les réponses aux questions sur la langue maternelle et sur la langue parlée le plus souvent à la maison sont ensuite utilisées pour établir la première langue officielle parlée des personnes qui peuvent parler le français et l’anglais ou qui ne parlent ni l’une ni l’autre des langues officielles. On inclut dans la catégorie Français les personnes qui ont le français seulement ou le français et au moins une langue non officielle comme langue maternelle. Les personnes qui ont l’anglais seulement ou l’anglais et au moins une langue non officielle comme langue maternelle sont incluses dans la catégorie Anglais. Pour les cas non encore classés, on inclut dans la catégorie Français les personnes ayant le français seulement ou le français et au moins une langue non officielle comme langue parlée le plus souvent à la maison. On procède de la même manière pour la catégorie Anglais. La population se trouve ainsi classée dans deux catégories principales : Français ou Anglais. Il faut ajouter deux catégories résiduelles pour les personnes qui n’ont pu être classées à l’aide des renseignements fournis : le français et l’anglais et ni le français ni l’anglais. » (Statistique Canada, Dictionnaire du recensement).

    Figure 2 : Méthode de dérivation de la première langue officielle parlée

    Source : Statistique Canada, Définitions, sources de données et méthodes, Dérivation de la première langue officielle parlée.

    Description de Figure 2 Méthode de dérivation de la première langue officielle parlée

    La figure 2 est une représentation graphique de la façon dont la première langue officielle parlée est déterminée. Chaque étape du processus de dérivation en trois étapes est représentée par une colonne, et la quatrième colonne représente la première langue officielle parlée. Les trois étapes du processus de dérivation portent chacune sur une variable linguistique précise. Chacune de ces colonnes est constituée de deux boîtes. La boîte du haut indique l'étape du processus de dérivation qui est décrite dans la boîte du bas, plus grande.

    Chacune des boîtes du bas contient des cases plus petites qui représentent les réponses à la question posée pour la variable linguistique en question. Chacune de ces cases est liée à une case de la colonne adjacente de droite.

    La première colonne représente l'étape 1 du processus de dérivation, soit la connaissance des langues officielles. La deuxième colonne représente l'étape 2 du processus de dérivation, la langue maternelle. La troisième colonne représente l'étape 3 du processus de dérivation, c.-à-d. la langue parlée le plus souvent à la maison. Le terme « autre » indique la présence d'une ou de plusieurs langues autres que les deux langues officielles, soit l'anglais et le français.

    Si une personne répond « Anglais seulement » à l'étape 1, soit la question sur la connaissance des langues officielles, la valeur « Anglais » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que les étapes 2 et 3 du processus de dérivation seront sautées). Dans le même ordre d'idées, si une personne répond « Français seulement » à la question sur la connaissance des langues officielles, la valeur « Français » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que les étapes 2 et 3 du processus de dérivation seront sautées).

    Si une personne répond « Anglais et français » à la question sur la connaissance des langues officielles, elle passera à la deuxième étape du processus de dérivation, soit la question sur la langue maternelle. Si une personne répond « Anglais » ou « Anglais et autre » à la question sur la langue maternelle, la valeur « Anglais » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que l'étape 3 du processus de dérivation sera sautée). Si une personne répond « Français » ou « Français et autre » à la question sur la langue maternelle, la valeur « Français » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que l'étape 3 du processus de dérivation sera sautée). Si une personne répond « Anglais et français », « Anglais, français et autre » ou « Autre », elle passera à l'étape 3 du processus de dérivation, c. à d. la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison.

    Si une personne répond « Ni anglais ni français » à la question sur la connaissance des langues officielles, elle passera à la deuxième étape du processus de dérivation, soit la question sur la langue maternelle. Si une personne répond « Anglais » ou « Anglais et autre » à la question sur la langue maternelle, la valeur « Anglais » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que l'étape 3 du processus de dérivation sera sautée). Si une personne répond « Français » ou « Français et autre » à la question sur la langue maternelle, la valeur « Français » lui sera directement attribuée comme première langue officielle parlée ( c.-à-d. que l'étape 3 du processus de dérivation sera sautée). Si une personne répond « Anglais et français », « Anglais, français et autre » ou « Autre », elle passera à l'étape 3 du processus de dérivation, c. à d. la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison.

    Pour tous les cheminements qui mènent à l'étape 3 du processus de dérivation, si une personne répond « Anglais » ou « Anglais et autre » à la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison, la valeur « Anglais » lui sera attribuée comme première langue officielle parlée. Si une personne répond « Français » ou « Français et autre » à la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison, la valeur « Français » lui sera attribuée comme première langue officielle parlée.

    Une personne qui a répondu « Anglais et français » à la question sur la connaissance des langues officielles et « Anglais et français », « Anglais, français et autre » ou « Autre » à la question sur la langue maternelle, et qui répond « Anglais et français », « Anglais, français et autre » ou « Autre » à la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison se verra attribuer la valeur « Anglais et français » comme première langue officielle parlée.

    Une personne qui a répondu « Ni anglais ni français » à la question sur la connaissance des langues officielles et « Anglais et français » ou « Anglais, français et autre » à la question sur la langue maternelle, et qui répond « Anglais et français », « Anglais, français et autre « ou « Autre » à la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison se verra attribuer la valeur « Anglais et français » comme première langue officielle parlée.

    Une personne qui a répondu « Ni anglais ni français » à la question sur la connaissance des langues officielles et « Autre » à la question sur la langue maternelle et qui répond « Autre » à la question sur la langue parlée le plus souvent à la maison se verra attribuer la valeur « Ni anglais ni français » comme première langue officielle parlée.

    2.2.3 Trois définitions d’un immigrant d’expression française et mesures d’ IRCC

    Trois définitions d’un immigrant d’expression française et trois mesures ont été adoptées et employées depuis 2003 par IRCC. Elles sont synthétisées dans la figure 3 ci-dessous et décrites par la suite.

    Figure 3 : Tableau synthèse des définitions, des mesures et des questions d’identification des immigrants d’expression française, IRCC (2003, 2006, 2016)
    Définition de 2003 Définition de 2006 Définition de 2016
    Un immigrant d’expression française est un immigrant qui a le français comme langue maternelle ou qui possède une connaissance de la langue française. Un immigrant d’expression française est un immigrant dont le français est la langue maternelle ou, s’il a une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, dont le français est la première langue officielle canadienne d’usage. Un immigrant d’expression française est un immigrant dont le français est la première langue officielle canadienne d’usage.
    Mesure de 2003 Mesure de 2006 Mesure de 2016

    1. Les résidents permanents qui déclarent avoir le français comme langue maternelle.

    2. Les résidents permanents qui ont une langue maternelle autre que le français, y compris l’anglais, et qui déclarent avoir une connaissance du français (y compris les réponses multiples « français et anglais »).

    1. Les résidents permanents qui déclarent avoir le français comme langue maternelle.

    2. Les résidents permanents qui ont une langue maternelle autre que le français ou l’anglais et qui déclarent une connaissance du « français seulement » (excluant les réponses multiples en anglais et en français).

    1. Les résidents permanents qui déclarent une connaissance du « français seulement ».

    2. Les résidents permanents qui déclarent la connaissance du « français et de l’anglais », ainsi que le français comme la langue officielle dans laquelle ils sont le plus à l’aise.

    Questions pertinentes au formulaire de demande de résidence permanente Questions pertinentes au formulaire de demande de résidence permanente Questions pertinentes au formulaire de demande de résidence permanente
    Langue maternelle : Dans la liste, sélectionnez votre langue maternelle. Cette langue est celle que vous avez apprise à la maison durant votre enfance et que vous comprenez toujours. Si votre langue maternelle ne figure pas dans cette liste, sélectionnez « Autre ».
    • Français
    • Anglais
    • Autre
    Connaissance du français : « Indiquer avec les options dans la liste si vous êtes en mesure de communiquer en français et/ou en anglais. »
    • Français
    • Anglais
    • Dans les deux langues
    • Aucune
    Langue maternelle : Dans la liste, sélectionnez votre langue maternelle. Cette langue est celle que vous avez apprise à la maison durant votre enfance et que vous comprenez toujours. Si votre langue maternelle ne figure pas dans cette liste, sélectionnez « Autre ».
    • Français
    • Anglais
    • Autre
    Connaissance du français : « Indiquer avec les options dans la liste si vous êtes en mesure de communiquer en français et/ou en anglais. »
    • Français
    • Anglais
    • Dans les deux langues
    • Aucune
    Connaissance du français : « Indiquer avec les options dans la liste si vous êtes en mesure de communiquer en français et/ou en anglais. »
    • Français
    • Anglais
    • Dans les deux langues
    • Aucune

    Langue dans laquelle la personne est le plus à l’aise :

    « Si vous avez sélectionné “Dans les deux langues”, veuillez indiquer si vous êtes plus à l’aise de communiquer en français ou en anglais. »

    Sources :

    Comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada – Communautés francophones en situation minoritaire.

    Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, novembre 2003

    Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, septembre 2006

    Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Centre de politiques en immigration francophone. Mesure et définition d’un immigrant d’expression française [communication orale], novembre 2016

    Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Formulaire de demande générique pour le Canada.

    Définition et mesure de 2003

    En 2003, la définition d’un immigrant d’expression française et la mesure correspondante référaient aux résidents permanents ayant le français comme langue maternelle ou possédant une connaissance de la langue française. Cette deuxième composante de la définition de 2003 et de sa mesure comptait l’ensemble des résidents permanents qui ont une langue maternelle autre que le français (dont l’anglais) et qui mentionnaient être en mesure de communiquer en français seulement ou en français et en anglais.

    Un inconvénient de cette définition et de sa mesure est qu’elles tendaient à surestimer le nombre d’immigrants d’expression française en raison du fait qu’elles comptaient l’ensemble des résidents permanents ayant déclaré être capables de parler le français et l’anglais, sans considération de la langue officielle utilisée le plus régulièrement (IRCC, juillet 2017). En outre, selon les données administratives obtenues d’ IRCC (2021), seulement 16,8 % des résidents permanents inclus dans cette proportion de 3,1 % en 2001 avaient le français comme langue maternelle. La fiabilité de cette mesure a été rapidement remise en question à l’époque, notamment dans le Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (Comité directeur CICCFSM, 2006).

    Définition et mesure de 2006

    Une deuxième définition et une mesure correspondante ont été adoptées dans le Plan stratégique de 2006 et se sont imposées comme références durant plus d’une décennie. Elles réfèrent à l’immigrant dont le français est la langue maternelle ou, s’il a une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, dont le français est la première langue officielle canadienne d’usage. Toutefois, les formulaires de demande de résidence permanente, qui ne contenaient à l’époque que deux questions linguistiques, ne permettent pas de mesurer directement la première langue officielle canadienne d’usage, soit la deuxième partie de la définition. Le nombre d’immigrants correspondant à ce critère est estimé en fonction des questions relatives à la langue maternelle et aux langues officielles parlées (CIC, juillet 2012).

    La définition de 2006 se mesurait ainsi en combinant les résidents permanents dont la langue maternelle est le français et les résidents permanents de langue maternelle autre que le français ou l’anglais et dont la langue officielle parlée est le français seulement. À la différence de la définition de 2003, cette deuxième définition exclut les résidents permanents qui ont l’anglais comme langue maternelle de même que ceux qui ont une langue maternelle autre que le français et qui déclarent être en mesure de communiquer à la fois en français et en anglais. Cela a pour effet de sous-estimer le nombre d’immigrants d’expression française, en ne tenant pas compte des personnes bilingues (français-anglais) dont le français n’est pas la langue maternelle, même s’il s’agit de leur principale langue officielle d’usage (CIC, juillet 2012).

    À titre d’illustration, selon les données administratives obtenues d’ IRCC (2021), l’utilisation de la définition de 2006 a pour effet d’exclure du nombre de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec, pour la période de 2001 à 2020, 5 313 libanais, 4 399 marocains, 1 975 algériens et 1 851 tunisiens qui ont l’arabe pour langue maternelle et qui déclarent être en mesure de s’exprimer en français et en anglais, et ce, même s’ils sont originaires de pays où le français est une langue d’usage commune dans l’espace public (langue d’instruction, langue parlée par une proportion importante de la population, etc.).

    Définition et mesure de 2016

    Dans l’optique de brosser un portrait plus juste des admissions de résidents permanents d’expression française, IRCC a élaboré et adopté en 2016 une nouvelle définition d’un immigrant d’expression française, assortie d’une nouvelle mesure. Elle est basée sur la connaissance du français plutôt que sur la langue maternelle et réfère à un immigrant dont le français est la première langue officielle canadienne d’usage. Elle se mesure en combinant a) les résidents permanents qui déclarent une connaissance du « français seulement », ou b) les résidents permanents qui déclarent la connaissance du « français et de l’anglais » comme langues officielles, ainsi que le français comme la langue dans laquelle ils sont le plus à l’aise. Une nouvelle question ajoutée en 2017 au formulaire de demande de résidence permanente permet de cerner cette deuxième composante de manière plus précise.

    Cette définition est considérée comme plus inclusive que celle de 2006, puisqu’elle permet d’inclure des immigrants bilingues dont le français n’est pas la langue maternelle, mais plus restrictive que celle de 2003, puisqu’elle exclut les personnes qui ont une connaissance de la langue française, mais qui sont plus à l’aise en anglais.

    Pour l’année 2019, la définition et la mesure de 2016 permettent de dénombrer 1 782 résidents permanents d’expression française de plus que celles de 2006. Plus des trois quarts de ces résidents permanents d’expression française additionnels sont originaires du Maroc, de l’Algérie et de la Tunisie, et ont l’arabe comme langue maternelle. Ils sont capables de s’exprimer dans les deux langues officielles du Canada, mais indiquent être plus à l’aise en français. Si on ajoute les résidents permanents du Burundi qui ont le Kirundi comme langue maternelle, les arabophones libanais et les créolophones de l’Île Maurice, on explique alors plus de 95 % de la différence entre les mesures de 2006 et de 2016 pour l’année 2019. (IRCC, 2021)

    Ces données tendent à appuyer les affirmations d’ IRCC (Centre de politiques en immigration francophone, novembre 2016) comme quoi la nouvelle mesure adoptée en 2016 permet de brosser un portrait plus fidèle de la réalité de l’immigration d’expression française puisque cette nouvelle mesure permet de mieux prendre en compte les six principaux pays d’origine des résidents permanents, qui sont tous des endroits où le français est une langue d’usage commune.

    2.2.4 Observations quant aux repères méthodologiques

    Définition et mesure de 2003

    Concernant la définition et la mesure de 2003, selon des interventions lors de groupes de discussion, elle aurait été appelée à l’époque, à être revue, ce qui a été fait en 2006. Notamment, il serait rapidement devenu manifeste qu’elle comportait des enjeux de surestimations des admissions de résidents permanents d’expression française hors Québec en indiquant l’atteinte et même le dépassement de la cible dès le début.

    Définition et mesure de 2006

    Nous reconnaissons, comme d’autres, que la définition et la mesure de 2006 comportent des limites : elles sous-estiment les nombres d’admissions de résidents permanents d’expression française. En outre, elles excluent les immigrants bilingues dont le français n’est pas la langue maternelle. Néanmoins, cette définition était opérationnelle jusqu’en avril 2016 et, avec sa mesure correspondante, sert à la publication de Faits et chiffres (IRCC, novembre 2016).

    Ainsi, les analyses statistiques qui suivent sont principalement basées sur la définition et la mesure de 2006. Nous ferons tout de même allusion aux définitions de 2003 et 2016 à différentes occasions lorsque cela s’y prête.

    Définition et mesure de 2016

    Pour ce qui est de la définition d’ IRCC adoptée en 2016, les premières données sont disponibles à partir de l’année 2019 seulement, ce qui ne permet pas d’effectuer une analyse longitudinale, contrairement aux définitions de 2003 et 2006. Cela s’explique par le fait que la mesure utilisée pour la définition de 2016 est en partie dérivée d’une question qui a été ajoutée au formulaire de demande de résidence permanente en 2017.

    Des enjeux de comparabilité entre les données administratives d’ IRCC et les données de recensement de Statistique Canada ont été signalés lors de groupes de discussion. D’autres interventions ont porté sur la question de la comparabilité entre la nouvelle mesure et celles antérieurement utilisées par IRCC pour le suivi des taux d’admission de résidents permanents d’expression française à long terme.

    Par ailleurs, les données présentées dans ce rapport illustrent que la mesure développée en 2016, qui inclut la notion de première langue officielle d’usage, permet de brosser un portrait plus exact de la population immigrante d’expression française que les mesures précédentes.

    En outre, elle permet de mieux dénombrer les résidents permanents ayant une langue maternelle autre que le français, mais ayant une connaissance du français ou, entre les deux langues officielles, qui sont plus à l’aise en français qu’en anglais. Nombre d’entre eux sont originaires de pays où le français est une langue commune d’usage dans l’espace public et qui représentent des bassins potentiels d’attraction, de recrutement et de sélection d’immigrants d’expression française, comme le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, le Burundi, le Liban et l’Île Maurice.

    3. Niveaux d'immigration d'expression française en milieu minoritaire - Analyse statistique de la cible et de son objectif

    3.1 Méthodologie

    3.1.1 Calculs des taux d’admission de résidents permanents d’expression française, Canada hors Québec, 2001-2020

    En premier lieu, les taux réels d’admission de résidents permanents d’expression française sont présentés à l’aide d’une approche descriptive. Ils sont présentés selon cinq différentes variables pour la période de 2001-2020 à partir de la base de données administratives fournie par IRCC, soit les trois définitions d’un immigrant d’expression française (2003, 2006, 2016), ainsi que selon la connaissance du français et la langue maternelle française. Une approche descriptive sert également à la présentation de caractéristiques des résidents permanents d’expression française admis hors Québec durant la même période.

    3.1.2 Calculs des écarts entre les admissions de résidents permanents d’expression française admis et les admissions requises pour atteindre la cible, Canada hors Québec, 2001-2020

    En deuxième lieu, sont présentés, pour la période de 2001 à 2020, les calculs des écarts ou des manques à gagner entre le total des admissions de résidents permanents d’expression française réellement admis selon la définition de 2006 et le nombre total requis annuellement pour atteindre 4,4 %. Pour déterminer le nombre total requis, nous avons calculé 4,4 % du nombre total de résidents permanents admis à l’extérieur du Québec pour chaque année de référence. Nous avons par la suite fait la somme de ces écarts pour illustrer l’ampleur des manques à gagner accumulés en matière d’admissions de résidents permanents d’expression française au cours des deux dernières décennies. Ces analyses sont principalement basées sur la définition de 2006 d’ IRCC, qui permet d’examiner les admissions de résidents permanents d’expression française sur une période de 20 ans. Malgré ses limites avec des tendances à produire des sous-estimations, il s’agit de l’unité de mesure la plus adéquate pour s’intéresser à cette population sur une longue période. Il s’agit aussi de la mesure de référence employée par IRCC pour la majeure partie de la période à l’étude, soit de 2006 à 2016. De plus, rappelons que la définition de 2006 et sa mesure correspondante ont été celles employées depuis le moment du report de l’échéancier de 2008 à jusqu’à 15 ans plus tard. Nous ferons tout de même allusion aux définitions de 2003 et de 2016 à différentes occasions lorsque cela s’y prête.

    3.1.3 Estimation de l’incidence de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française, Canada hors Québec, 2001-2016 et 2008-2016

    En troisième lieu, suivant l’objectif premier de la cible de 2003 et sa prémisse, nous avons cherché à estimer l’incidence du fait de combler ces écarts et d’atteindre la cible sur le poids démographique de la population d’expression française à l’extérieur du Québec.

    Pour ce faire, nous avons ajouté les manques à gagner pour ce qui est du nombre de résidents permanents d’expression française selon la définition de 2006 pour la période de 2001 à 2016 à la population d’expression française au Canada à l’extérieur du Québec selon le critère de la première langue officielle parlée (PLOP) dénombré au recensement de 2016 de Statistique Canada.

    À défaut de correspondances directes entre les variables, entre la formulation et la séquence des questions ainsi qu’entre le traitement des réponses multiples, le choix de la définition de 2006 de résident permanent d’expression française selon IRCC et de la population d’expression française en fonction de la PLOP au recensement de 2016 de Statistique Canada nous apparaissent les meilleures7, le critère de la langue maternelle française étant trop restrictif.

    Nous avons effectué nos estimations selon deux scénarios de référence :

    • De 2001 au premier tiers de 20168 (le recensement de 2001 étant la période de référence initiale pour l’établissement de la cible);
    • De 2008 au premier tiers de 2016 (2008 étant l’échéance initiale pour l’atteinte de la cible).

    3.2 Calculs des taux d’admission de résidents permanents d’expression française selon différentes définitions et mesures d’ IRCC, 2001-2020

    3.2.1 Taux d’admission de résidents permanents d’expression française selon la définition et la mesure de 2006, Canada hors Québec

    Définition et mesure de 2006 – Proportions

    Comme l’illustre la figure 4 plus loin, selon cette définition et la mesure correspondante à IRCC, la proportion de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec est passée de 1,2 % en 2001 à 2,6 % en 2020. Même si cette proportion a plus que doublé, elle reste bien en deçà de 4,4%, et ce, malgré les diverses initiatives mises en place par IRCC pour tenter d’augmenter cette proportion (IRCC, 2019a). Il importe toutefois de rappeler que cette définition et cette mesure tendent à sous-estimer le nombre de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec.

    La proportion de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec dépasse pour la première fois le seuil de 2 % en 2019. De 2001 à 2018, cette proportion a fluctué entre 1,1 % et 1,8 %. Elle a oscillé entre 1,1 % et 1,3 % de 2001 à 2006; elle a augmenté pour atteindre 1,6 % de 2007 à 2010 et 1,8 % de 2011 à 2013; elle a baissé pour atteindre 1,4 % et 1,3 % en 2014 et en 2015, et a augmenté de nouveau pour atteindre 1,8 % en 2017 et en 2018; elle a ensuite franchi les 2,0 % en 2019 et en 2020. L’on constate qu’après un creux en 2015 (1,3 %), cette proportion a légèrement augmenté dans les années suivantes pour atteindre 2,1 % en 2019 et 2,6 % en 2020, ce qui représente une hausse de 1,3 point de pourcentage sur cinq ans. Néanmoins, les taux d’admissions de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire n’ont pas franchi les 2 % pour la plupart de la période à l’étude.

    Il est à noter que pour l’année 2020, suivant les figures 5 et 6 plus bas, l’immigration dans son ensemble à l’extérieur du Québec a connu une diminution plus importante (-53 %) que l’immigration d’expression française (-43 %) dans le contexte de la pandémie de COVID-19. Reste à voir quels seront les effets d’un retour à des niveaux d’immigration comparables à ceux de l’avant-pandémie dans les années à venir.

    Définition et mesure de 2006 – Nombres

    La figure 5 présente les chiffres absolus d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec selon la définition de 2006. La somme de ces admissions de 2001 à 2020 représente un total de 67 430 résidents permanents d’expression française admis selon cette définition (données non présentées dans la figure).

    À titre de comparaison, la figure 6 indique que ce chiffre est de 4 251 948 pour l’ensemble des résidents permanents admis durant la même période. Les résidents permanents d’expression française représentent ainsi seulement 1,6 % de l’ensemble des résidents permanents admis à l’extérieur du Québec dans les deux dernières décennies.

    À noter toutefois une augmentation notable du nombre de résidents permanents d’expression française admis dans les dernières années. Le nombre annuel moyen de ces admissions entre 2001 et 2005 était de 2 350 alors qu’il est plutôt de 4 813 pour la période de 2016 à 20199, soit plus du double. Il s’agit d’une différence de près de 2 500 personnes supplémentaires en moyenne annuellement entre ces deux périodes.

    3.2.2 Taux d’admission de résidents permanents d’expression française selon la définition et la mesure de 2003, Canada hors Québec

    Définition et mesure de 2003 – Proportions

    La proportion de 3,1 % d’immigration d’expression française en 2001, à laquelle faisait référence le Cadre stratégique de 2003, était basée sur la définition de la même année, soit celle de 2003. La figure 4 indique que 3,2% des admissions de résidents permanents en 2001 étaient d’expression française selon cette définition et sa mesure. Il peut être noté que cela correspond à une donnée arrondie de 3,16%.

    Comme le montre la figure 4, la proportion annuelle de résidents permanents d’expression française, selon la définition de 2003, a dépassé le seuil de 4,4 % chaque année de 2004 à 2011 ainsi qu’en 2019 et en 2020.

    Toutefois, il est nécessaire d’interpréter ces chiffres avec prudence, car comme nous l’avons indiqué précédemment, cette mesure entraîne une surestimation du nombre de résidents permanents d’expression française admis (IRCC, juillet 2017). Pour plusieurs années, elle inclut davantage de résidents permanents qui ont l’anglais pour langue maternelle que le français. À titre d’illustration, en 2009, 33,7 % des résidents permanents d’expression française admis avaient l’anglais comme langue maternelle, comparativement à 22,9 % pour le français selon la mesure de 2003 (données non présentées dans la figure).

    Les diminutions annuelles constatées de 2007 à 2015 pour la mesure de 2003 s’expliquent notamment par une baisse marquée durant cette période du nombre de résidents permanents qui ont une langue maternelle autre que le français et qui déclarent pouvoir communiquer dans les deux langues officielles.

    3.2.3 Taux d’admission de résidents permanents d’expression française selon la définition et la mesure de 2016, Canada hors Québec

    Les données présentées à la figure 4 et à la figure 5 en fonction de la définition de 2016 ne concernent que deux ans. Pour l’année 2019, la proportion de résidents permanents d’expression française est légèrement sous-estimée dans les présents calculs. Cela s’explique par le fait que le nombre total d’admissions à l’extérieur du Québec ne tient compte que de l’année au cours de laquelle les demandeurs sont devenus résidents permanents et non de l’année au cours de laquelle ils ont présenté une demande de résidence permanente. Par conséquent, il n’est pas possible, à partir de la mesure de 2016, d’identifier les demandeurs d’expression française qui sont devenus résidents permanents en 2019, mais qui ont présenté une demande de résidence permanente avant le 1er janvier 2017, moment de l’introduction des nouvelles questions au formulaire d’immigration10. Tout comme pour la mesure de 2006, il est possible de constater une augmentation en proportion entre 2019 et 2020, mais une baisse en chiffres absolus dans le contexte de la COVID-19.

    Figure 4 : Proportion de résidents permanents d’expression française admis annuellement selon les définitions et mesures de 2003, 2006 et 2016, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 4
      Définition 2003 Définition 2006 Définition 2016 Cible
    2001 3,2 % 1,2 %   4,4 %
    2002 3,0 % 1,1 %   4,4 %
    2003 3,4 % 1,1 %   4,4 %
    2004 4,9 % 1,3 %   4,4 %
    2005 4,7 % 1,3 %   4,4 %
    2006 4,6 % 1,3 %   4,4 %
    2007 5,1 % 1,6 %   4,4 %
    2008 5,1 % 1,6 %   4,4 %
    2009 5,0 % 1,6 %   4,4 %
    2010 4,8 % 1,6 %   4,4 %
    2011 4,8 % 1,8 %   4,4 %
    2012 4,2 % 1,8 %   4,4 %
    2013 3,9 % 1,8 %   4,4 %
    2014 3,5 % 1,4 %   4,4 %
    2015 3,2 % 1,3 %   4,4 %
    2016 3,3 % 1,6 %   4,4 %
    2017 3,5 % 1,8 %   4,4 %
    2018 3,8 % 1,8 %   4,4 %
    2019 4,6 % 2,1 % 2,7 % 4,4 %
    2020 5,6 % 2,6 % 3,6 % 4,4 %
    Figure 5 : Nombre de résidents permanents d’expression française admis annuellement selon les définitions et mesures de 2003, 2006 et 2016, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 5
    Année Définition 2003 Définition 2006 Définition 2016
    2001 6 735 2 582  
    2002 5 830 2 047  
    2003 6 101 1 936  
    2004 9 438 2 421  
    2005 10 278 2 766  
    2006 9 589 2 784  
    2007 9 856 3 041  
    2008 10 284 3 242  
    2009 10 226 3 247  
    2010 10 906 3 552  
    2011 9 363 3 640  
    2012 8 521 3 706  
    2013 8 156 3 683  
    2014 7 363 3 010  
    2015 7 130 2 967  
    2016 8 044 3 909  
    2017 8 086 4 137  
    2018 10 167 4 922  
    2019 13 705 6 285 8 067
    2020 7 712 3 553 5 004
    Figure 6 : Nombre total de résidents permanents admis annuellement, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 6
    Année Nombre total
    2001 213 040
    2002 191 473
    2003 181 792
    2004 191 577
    2005 218 929
    2006 206 961
    2007 191 549
    2008 202 047
    2009 202 682
    2010 226 708
    2011 196 994
    2012 202 754
    2013 207 063
    2014 210 068
    2015 222 864
    2016 243 131
    2017 234 106
    2018 269 931
    2019 300 612
    2020 137 667

    3.2.4 Taux d’admission de résidents permanents selon la connaissance du français et la langue maternelle, Canada hors Québec

    Connaissance du français – Proportions

    La figure 7 ci-dessous indique que parmi l’ensemble des résidents permanents admis à l’extérieur du Québec entre 2001 et 2020, selon les données d’ IRCC (IRCC, 2021), la proportion déclarant connaître à la fois le français et l’anglais a fluctué entre 2,1 % en 2001 et 4,1 % en 2020. Après un sommet de 3,8 % en 2004, cette proportion a légèrement diminué dans les années suivantes et est passée sous la barre des 3 % de 2012 à 2018, avant de remonter à 3,3 % en 2019. Par ailleurs, il peut être noté qu’au moment du recensement de 2016, 9,8 % de la population canadienne vivant à l’extérieur du Québec disait connaître à la fois le français et l’anglais (Statistique Canada, mars 2019).

    Pour ce qui est de la proportion de l’ensemble des résidents permanents admis à l’extérieur du Québec déclarant connaître uniquement le français, selon les données d’ IRCC (IRCC, 2021), elle est plus faible que celle des résidents permanents qui indiquent connaître les deux langues officielles. De 2001 à 2020, cette proportion a fluctué entre 0,8 % et 1,4 %. À titre illustratif, il s’agit de proportions plus élevées que la proportion de 0,4 % de l’ensemble de la population canadienne à l’extérieur du Québec ayant déclaré connaître uniquement le français au moment du recensement de 2016 (Statistique Canada, mars 2019).

    Langue maternelle française – Proportions

    Enfin, comme l’illustre la figure 7 ci-dessous, la proportion de l’ensemble des résidents permanents ayant le français pour langue maternelle a fluctué entre 0,4 % et 1,5 % entre 2001 et 2020.

    Il est à noter que la langue maternelle française et la connaissance du français seulement ou du français et de l’anglais ne sont pas mutuellement exclusives et peuvent se recouper. Une proportion des résidents permanents admis peut avoir le français comme langue maternelle et connaître le français seulement ou le français et l’anglais. Toutefois, les données indiquent qu’une plus grande part des résidents permanents admis a une connaissance du français et de l’anglais comparativement à la proportion ayant le français comme langue maternelle. Aussi, comme nous l’avons indiqué précédemment, la variable de la langue maternelle ne permet pas de tenir compte d’une population et d’une immigration de plus en plus diversifiée, notamment sur le plan linguistique, dont font partie un nombre croissant d’individus qui ont des langues maternelles autres que le français ou l’anglais.

    Figure 7 : Proportion de l’ensemble des résidents permanents admis annuellement selon la connaissance du français et selon la langue maternelle, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 7
      Connaissance du français seulement Connaissance du français et de l'anglais Français comme langue maternelle
    2001 0,9 % 2,1 % 0,5 %
    2002 0,8 % 2,1 % 0,5 %
    2003 0,8 % 2,4 % 0,4 %
    2004 0,9 % 3,8 % 0,6 %
    2005 1,0 % 3,6 % 0,7 %
    2006 1,0 % 3,5 % 0,8 %
    2007 1,2 % 3,8 % 1,0 %
    2008 1,1 % 3,7 % 1,0 %
    2009 1,1 % 3,7 % 1,2 %
    2010 1,2 % 3,4 % 1,0 %
    2011 1,3 % 3,2 % 1,1 %
    2012 1,3 % 2,7 % 1,2 %
    2013 1,2 % 2,6 % 1,1 %
    2014 0,8 % 2,6 % 0,9 %
    2015 0,8 % 2,3 % 0,8 %
    2016 0,9 % 2,3 % 1,0 %
    2017 1,0 % 2,4 % 1,2 %
    2018 1,0 % 2,7 % 1,2 %
    2019 1,1 % 3,3 % 1,3 %
    2020 1,4 % 4,1 % 1,5 %

    3.2.5 Calculs de la répartition des admissions de résidents permanents d’expression française selon la définition de 2006 et de la population d’expression française, Provinces et territoires

    La figure 8 ci-dessous illustre la répartition, entre les provinces et territoires, de l’ensemble des résidents permanents d’expression française admis durant la période de 2001 à 2020, selon la définition et la mesure de 2006. À titre d’information, la figure présente aussi la répartition par provinces et territoires de l’ensemble de la population d’expression française à l’extérieur du Québec selon le critère de la première langue officielle parlée au recensement de 2016.

    L’on y observe que l’Ontario a accueilli près des deux tiers (62,8 %) des résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec, suivi de l’Alberta (11,6 %) et de la Colombie-Britannique (10,1 %). À l’inverse, l’Île-du-Prince-Édouard et les territoires n’ont admis que 0,3 % de l’ensemble des résidents permanents d’expression française qui se sont établis à l’extérieur du Québec durant cette période.

    Trois provinces maritimes ont admis une proportion de résidents permanents d’expression française plus faible que la proportion de leur population à l’échelle de la francophonie canadienne selon le critère de la PLOP. Parmi ces provinces, le Nouveau-Brunswick arrive en queue de peloton. Alors que 22,9 % des francophones à l’extérieur du Québec habitaient dans cette province au moment du recensement de 2016, le Nouveau-Brunswick n’a accueilli que 5,8 % des résidents permanents d’expression française sur 20 ans.

    Figure 8 : Répartition des résidents permanents d’expression française admis selon la définition et la mesure de 2006 et de la population d’expression française selon la première langue officielle parlée, Provinces et territoires

    Source : IRCC, 2021 et Statistique Canada, 2016

    Version texte : Figure 8
      Répartition des résidents permanents d'expression française admis selon la définition et mesure de 2006 ( IRCC , données administratives, 2001 à 2020) Répartition de la population d'expression française selon la première langue officielle parlée (Statistique Canada, recensement de 2016)
    TNL 0,4 % 0,2 %
    IPÉ 0,3 % 0,5 %
    1,2 % 2,9 %
    NB 5,8 % 22,9 %
    ON 62,8 % 53,8 %
    MB 5,8 % 4,0 %
    SK 1,7 % 1,4 %
    AB 11,6 % 7,8 %
    CB 10,1 % 6,3 %
    Territoires 0,3 % 0,3 %

    3.3 Calcul des écarts à atteindre la cible de 4,4 % d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec

    3.3.1 Calcul des écarts à atteindre la cible selon la définition et la mesure de 2006, Canada hors Québec

    Les données présentées dans la section précédente permettent de constater que le nombre de résidents permanents d’expression française admis chaque année est bien inférieur au nombre qui aurait été requis pour atteindre 4,4 % d’immigration d’expression française à l’extérieur du Québec.

    Selon la figure 9 ci-dessous, en moyenne, l’admission d’approximativement 6 000 résidents permanents d’expression française supplémentaires aurait été nécessaire annuellement pour atteindre 4,4 % de l’ensemble des admissions à l’extérieur du Québec chaque année de 2001 à 2020. Pour l’ensemble de cette période, le total de ces écarts annuels représente un manque à gagner d’approximativement 119 656 résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec, selon la définition de 2006. Cela représente près du double des 67 430 résidents permanents d’expression française réellement admis à l’extérieur du Québec durant cette période. En somme, pour atteindre 4,4 % d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec après 20 ans, il aurait fallu admettre 119 656 résidents permanents d’expression française de plus que les 67 430 admis, pour un total de 187 086.

    Par ailleurs, si l’on considère les manques à gagner accumulés non pas depuis 2001, mais depuis 2008, année d’échéance initialement prévue au moment de fixer la cible en 2003, cela représente environ 75 839 résidents permanents d’expression française de plus qu’il aurait fallu admettre à l’extérieur du Québec au-delà des admissions réelles de 49 853. Donc, au total, pour atteindre 4,4 % d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec après 12 ans, il aurait fallu admettre 125 692 résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec.

    Figure 9 : Écarts entre le nombre de résidents permanents d’expression française admis annuellement selon la définition de 2006 et le nombre requis pour atteindre 4,4 %, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 9
    Année Total admis Différence Total requis
    2001 2 582 6 792 9 374
    2002 2 047 6 378 8 425
    2003 1 936 6 063 7 999
    2004 2 421 6 008 8 429
    2005 2 766 6 867 9 633
    2006 2 784 6 322 9 106
    2007 3 041 5 387 8 428
    2008 3 242 5 648 8 890
    2009 3 247 5 671 8 918
    2010 3 552 6 423 9 975
    2011 3 640 5 028 8 668
    2012 3 706 5 215 8 921
    2013 3 683 5 428 9 111
    2014 3 010 6 233 9 243
    2015 2 967 6 839 9 806
    2016 3 909 6 789 10 698
    2017 4 137 6 164 10 301
    2018 4 922 6 955 11 877
    2019 6 285 6 942 13 227
    2020 3 553 2 504 6 057

    3.3.2 Calcul des écarts à atteindre la cible selon la définition et la mesure de 2006, Provinces et territoires, 2001 à 2020

    Ces manques à gagner accumulés en matière d’immigration d’expression française entre 2001 et 2020 ne sont pas répartis également entre les provinces et les territoires, ceux-ci ayant des niveaux d’immigration d’expression française qui varient considérablement, comme l’illustre plus haut la figure 8.

    Afin d’estimer la répartition de ces 119 656 résidents permanents d’expression française additionnels, selon un scénario dans lequel la cible aurait été atteinte chaque année dès 2001, nous nous sommes basés sur les répartitions annuelles réelles des résidents permanents entre les provinces pour chaque année à l’étude11.

    Dans un tel scénario, la figure 10 ci-dessous permet de constater que c’est la province de l’Ontario qui aurait eu la plus grande part des résidents permanents additionnels, tandis qu’en chiffres absolus, ces nombres auraient été modestes à Terre-Neuve-et-Labrador, à l’Île-du-Prince-Édouard et dans les territoires.

    Figure 10 : Répartition provinciale et territoriale des admissions de résidents permanents d’expression française selon la définition de 2006 et du total requis pour atteindre 4,4 %, Provinces et territoires, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 10
      Total admis Total estimé (scénario de l'atteinte de la cible fédérale de 4,4 %)
    TNL 284 762
    IPÉ 194 517
    809 2 236
    NB 3 908 10 160
    ON 42 313 119 070
    MB 3 904 10 501
    SK 1 154 3 106
    AB 7 829 21 552
    CB 6 796 18 531
    Territoires 230 626

    3.4 Estimation de l’incidence de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française au Canada à l’extérieur du Québec

    3.4.1 Estimations selon la définition de 2006, Canada hors Québec

    Considérant l’objectif premier de la cible et de sa prémisse sous-jacente quant au maintien du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire au niveau où il se trouvait au recensement de 2001 à 4,4 % (selon les critères de la PLOP et de la langue maternelle), les estimations suivantes visent à explorer et à examiner quelle incidence aurait pu avoir l’atteinte de cette cible sur ce poids démographique. La méthodologie employée pour ce faire est décrite à la section 3.1.3 plus haut.

    Elles comportent deux scénarios : l’un selon l’hypothèse que la cible de 4,4 % d’admissions de résidents permanents d’expression française hors Québec aurait été atteinte dès 2001 (considérant qu’au début des années 2000, des déficits d’immigration d’expression française en milieu minoritaire étaient constatés par le Comité directeur CIC- CFSM et que 2001 était l’année de référence dans l’établissement de la cible) et l’autre selon l’hypothèse qu’elle aurait été atteinte en 2008 (considérant l’échéance initialement fixée pour l’atteindre). L’estimation de l’incidence de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire est faite en fonction du critère de la première langue officielle parlée12. Ces estimations sont présentées à la figure 11, plus bas.

    Selon les données de recensement et le critère de la PLOP, le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire est passé de 4,4 % en 2001 à 3,8 % en 2016. Cela représente une différence de 0,6 point de pourcentage, ce qui correspond à une baisse relative de l’ordre de 13 %.

    Dans un scénario où la cible de 4,4 % avait été atteinte dès l’échéancier initial de 2008, ce poids démographique aurait pu être de l’ordre de 4,0 % en 2016. Cela aurait représenté une différence de 0,4 point de pourcentage, correspondant à une baisse relative de l’ordre de 8 %.

    Dans un scénario où la cible aurait été atteinte dès 2001, ce poids démographique aurait pu être d’environ 4,2 % en 2016. Cela aurait représenté une baisse de 0,2 point de pourcentage, ce qui correspond à une baisse relative de l’ordre de 5 %.

    Suivant ces hypothèses, la baisse démographique de la population d’expression française hors Québec selon le critère de la première langue officielle parlée aurait pu être de près de deux à un tiers de ce qu’elle a été en réalité en considérant les points de pourcentage (0,2 ou 0,4 vs 0,6 point de pourcentage) et en considérant les baisses relatives (5 % ou 8 % vs 13 %).

    Ces estimations indiquent que l’atteinte de la cible plus tôt, en 2001 plutôt qu’en 2008, aurait pu avoir une incidence sur la réduction de l’ampleur de la baisse de ce poids démographique.

    Figure 11 : Poids démographique de la population d’expression française aux recensements de 2001 et de 2016 selon la première langue officielle parlée et estimations de l’incidence sur ce poids démographique de l’atteinte de la cible à partir de 2001 et à partir de 2008, Canada hors Québec

    Source : IRCC, 2021 / Statistique Canada, Recensements de 2001 et de 2016

    Version texte : Figure 11
      Poids réel en 2001 Poids réel en 2016 Poids estimé (4,4 % d'immigration francophone à partir de 2001) Poids estimé (4,4 % d'immigration francophone à partir de 2008)
    Canada hors Québec 4,4 % 3,8 % 4,2 % 4,0 %

    3.4.2 Estimation du nombre de résidents permanents d’expression française nécessaire pour maintenir le poids démographique de la population d’expression française à l’extérieur du Québec à 4,4 %, 2001 à 2016

    Comme nous l’avons illustré, un taux d’admission de résidents permanents d’expression française de 4,4 % dès 2001, selon la définition de 2006, aurait représenté 119 656 résidents permanents d’expression française de plus à l’extérieur du Québec. Selon nos estimations, cela n’aurait pas permis de maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire au même niveau entre les recensements de 2001 et de 2016 (selon la PLOP).

    Ayant fait cette observation, la question est maintenant de savoir ce que le maintien de ce poids démographique aurait exigé. Selon nos calculs, il aurait fallu, selon le critère de la PLOP, approximativement 150 000 francophones de plus à l’extérieur du Québec au moment du recensement de 2016, soit 1 174 831 plutôt que 1 024 200 personnes d’expression française selon le critère de la PLOP sur un total de 26 700 695 personnes au Canada hors Québec. (Statistique Canada, août 2017)

    Si l’admission de résidents permanents d’expression française était le seul facteur considéré dans l’équation, ces 150 000 francophones additionnels correspondraient à un taux d’admission annuel de 6 % à 7 %, soit un taux annuel moyen d’approximativement 6,2 % de 2001 au premier tiers de 2016.

    Dans ce cas, en suivant l’objectif initial et sa prémisse, entre 2001 et 2016, un taux annuel d’admission de résidents permanents d’expression française se situant entre 6 % et 7 % aurait été nécessaire pour au moins pouvoir contribuer à maintenir à 4,4 % le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    Toutefois, comme nous l’avons mentionné précédemment, cela ne tient pas compte de la rétention linguistique et géographique de ces résidents permanents d’expression française admis ni de leur intégration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, sans parler d’autres facteurs outre l’immigration qui affectent ce poids démographique, lequel a continué sa baisse jusqu’à 3,8 %, toujours selon le critère de la PLOP au recensement de 2016.

    3.4.3 Observations quant à l’analyse statistique

    Approche d’établissement de la cible et de son objectif

    Ces analyses statistiques et estimations donnent d’abord à interroger la prémisse selon laquelle il y aurait une corrélation directe entre les taux d’admission de résidents permanents d’expression française et le poids démographique de la population d’expression française hors Québec ou vice versa.

    Selon nos estimations, même si les taux d’admission de résidents permanents d’expression française avaient été équivalents au poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire depuis le début des années 2000, cela n’aurait pas permis de maintenir ce poids à 4,4 % et encore moins de l’accroître. Toutefois, cela aurait pu contribuer à en réduire la baisse.

    Un objectif de maintien du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire qui reposerait entièrement sur l’immigration, voire sur les admissions de résidents permanents d’expression française, aurait exigé une cible considérablement plus ambitieuse. Selon nos estimations, cela représenterait des taux d’admission annuels de l’ordre de 6 % à 7 %.

    Comme cela a été soulevé dans des interventions lors des groupes de discussion, cela appellerait à la prise en compte, dans l’équation, d’un continuum plus large de l’immigration, dont la rétention linguistique du français chez les résidents permanents d’expression française admis, puis leur rétention géographique et leur intégration au sein des communautés francophones en situation minoritaire.

    Dans les groupes de discussion et à partir de la revue de littérature a aussi été soulevée la question d’autres facteurs, outre l’immigration, affectant le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, notamment une chute de la fécondité particulièrement marquée, un vieillissement accru de la population, des tendances aux transferts linguistiques intragénérationnels et intergénérationnels ainsi que des mouvements migratoires interprovinciaux qui, d’ailleurs, affectent de différentes façons le poids démographique des populations d’expression française dans différentes régions du pays (Statistique Canada, 2017; Patrimoine canadien, 2017). Pour sa part, en invoquant la mobilité des francophones et les taux des transferts linguistiques, le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes estimait à 7 % la cible qui serait requise pour maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire (Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes, novembre 2010).

    Selon des interventions lors de groupes de discussion, une nouvelle cible devrait s’appuyer sur des analyses démographiques et démolinguistiques complètes et s’inscrire dans une optique plus large.

    Croissance marginale du nombre d’admissions de résidents permanents d’expression française

    Par ailleurs, malgré une hausse en chiffres absolus du nombre de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec sur 20 ans, leur proportion augmente peu en raison notamment d’une augmentation considérablement plus importante d’admissions de résidents permanents qui ne sont pas d’expression française. Des interventions lors des groupes de discussion ont porté sur cet enjeu. A aussi été soulevée l’importance d’adapter les politiques, stratégies et mesures aux niveaux d’immigration afin d’avoir en place, sur le terrain, les outils et les ressources nécessaires à l’accueil et à l’intégration d’immigrants.

    Effets potentiels de cumuler des écarts avec la cible

    L’analyse permet d’illustrer que les manques à gagner en matière d’admissions de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire, accumulés au fil du temps, peuvent avoir contribué, du moins en partie, à la baisse du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    Dans l’analyse, le fait de changer l’année de référence quant au moment de l’atteinte d’un niveau d’immigration de 4,4 % de 2001 à 2008 se traduit par une différence de 0,2 point de pourcentage entre les deux scénarios. Cela suggérerait que quelques années de différence dans l’atteinte de la cible pourraient avoir contribué, du moins en partie, à changer l’incidence sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire. Chaque année pour laquelle la cible n’a pas été atteinte peut avoir accentué ces manques à gagner accumulés dans les deux dernières décennies.

    4. Composition de l’immigration d’expression française en milieu minoritaire – quelques caractéristiques des résidents permanents d’expression française admis de 2001 à 2020

    Dans le cadre de notre analyse des données fournies par IRCC, nous nous sommes intéressés à quelques caractéristiques des résidents permanents d’expression française admis entre 2001 et 2020 à l’extérieur du Québec et à l’évolution de certaines de ces caractéristiques durant ces deux décennies selon la définition et la mesure de 2006 d’ IRCC. Elles ont trait aux catégories d’immigration et à certains programmes que nous avons sélectionnés, aux régions et pays d’origine ainsi qu’à certaines caractéristiques linguistiques.

    4.1 Catégories d’immigration et certains programmes

    Bien que cette étude n’ait pas en soi les programmes comme objet d’analyse, il est pertinent d’en décrire des éléments clés de manière succincte afin de donner une indication du contexte institutionnel dans lequel s’inscrit la cible en immigration d’expression française en milieu minoritaire de manière complémentaire aux données présentées dans la présente section.

    4.1.1 Catégories d’immigration

    Le Programme des résidents permanents d’ IRCC comprend trois principales catégories d’immigration : la catégorie de l’immigration économique, celle du regroupement familial et celle des personnes protégées et réfugiées.

    Les figures 12A et 12B ci-dessous donnent un aperçu de chacune de ces catégories parmi les résidents permanents d’expression française (figure 12A), puis parmi l’ensemble des résidents permanents (figure 12B) admis entre 2001 et 2020. Cela est suivi d’informations plus détaillées sur chacune de ces catégories et de données plus précises sur les programmes qui figurent dans la catégorie de l’immigration économique.

    Figure 12A : Proportion de résidents permanents d’expression française admis annuellement selon la définition de 2006 et selon les catégories d’immigration, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 12A
      2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Total
    Résidents permanents d'expression française - Catégorie économique 53,8 % 55,1 % 44,1 % 44,7 % 42,2 % 39,9 % 43,2 % 49,7 % 51,5 % 43,6 % 37,0 % 38,8 % 39,8 % 43,4 % 36,7 % 38,7 % 48,9 % 53,7 % 61,0 % 72,5 % 47,6 %
    Résidents permanents d'expression française - Catégorie de regroupement familial 23,7 % 24,4 % 30,5 % 23,6 % 22,0 % 25,2 % 25,1 % 23,8 % 20,5 % 24,4 % 24,4 % 25,0 % 30,2 % 30,1 % 33,6 % 28,8 % 27,4 % 23,2 % 19,3 % 14,8 % 24,6 %
    Résidents permanents d'expression française - Catégorie des personnes protégées et réfugiées 22,5 % 20,5 % 24,8 % 29,5 % 32,0 % 32,0 % 29,2 % 23,6 % 25,6 % 28,4 % 35,3 % 33,7 % 26,9 % 23,1 % 26,0 % 28,6 % 21,6 % 21,2 % 18,7 % 11,1 % 25,3 %
    Résidents permanents d'expression française - Toute autre immigration 0,0 % 0,0 % 0,5 % 2,3 % 3,8 % 2,9 % 2,5 % 2,9 % 2,4 % 3,6 % 3,3 % 2,5 % 3,1 % 3,5 % 3,7 % 3,9 % 2,1 % 2,0 % 1,0 % 1,6 % 2,4 %
    Figure 12B : Proportion de l’ensemble des résidents permanents admis annuellement selon les catégories d’immigration, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 12B
      2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Total
    Ensemble des résidents permanents - Catégorie économique 62,8 % 60,2 % 54,5 % 56,4 % 59,5 % 54,3 % 53,9 % 59,3 % 58,7 % 65,7 % 60,9 % 59,7 % 54,8 % 62,7 % 63,1 % 51,2 % 55,1 % 58,2 % 57,7 % 61,0 % 58,4 %
    Ensemble des résidents permanents - Catégorie de regroupement familial 27,4 % 30,1 % 34,2 % 28,8 % 25,6 % 31,4 % 32,7 % 30,5 % 30,5 % 24,2 % 26,1 % 29,4 % 34,3 % 26,8 % 24,7 % 27,5 % 30,0 % 27,0 % 27,2 % 25,1 % 28,6 %
    Ensemble des résidents permanents - Catégorie des personnes protégées et réfugiées 9,8 % 9,7 % 10,9 % 13,2 % 13,1 % 12,3 % 11,5 % 8,6 % 9,3 % 8,8 % 11,6 % 9,1 % 9,6 % 8,9 % 10,8 % 20,2 % 13,7 % 13,6 % 13,7 % 12,2 % 11,7 %
    Ensemble des résidents permanents - Toute autre immigration 0,1 % 0,0 % 0,5 % 1,6 % 1,8 % 1,9 % 1,9 % 1,7 % 1,5 % 1,3 % 1,4 % 1,7 % 1,3 % 1,6 % 1,5 % 1,1 % 1,2 % 1,2 % 1,4 % 1,7 % 1,3 %

    4.1.2 Catégorie économique

    D’abord, la catégorie de l’immigration économique est la plus importante en termes d’admissions annuelles. Les résidents permanents qui tombent sous cette catégorie sont sélectionnés en fonction de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada.

    Comme l’illustrent les figures 12A et 12B ci-dessus, au total durant une période de 20 ans, à l’extérieur du Québec, 47,6 % des résidents permanents d’expression française ont été admis dans la catégorie économique comparativement à 58,4 % pour l’ensemble des résidents permanents admis. Cette différence s’est résorbée en ce qui concerne les admissions récentes (2016-2020). Les proportions de ces admissions parmi les résidents permanents d’expression française et parmi l’ensemble des résidents permanents admis se sont rapprochées, avec en moyenne pour cette période 55,4 % et 56,4 % respectivement (données non illustrées dans les figures).

    L’augmentation récente du nombre de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec est principalement liée à l’immigration économique. La hausse de la proportion de résidents permanents d’expression française dans la catégorie économique correspond à des nombres absolus qui sont passés de 1 513 en 2016 à 3 835 en 2019, avant de redescendre à 2 576 en 2020 (données non illustrées dans les figures).

    Certains programmes dans la catégorie économique

    La catégorie économique comprend les programmes suivants à l’extérieur du Québec : le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral) qui comprend les admissions dans le Programme des travailleurs qualifiés (fédéral), le Programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral) et la catégorie de l’expérience canadienne; le Programme des candidats des provinces; le Programme des gens d’affaires (fédéral) qui comprend les admissions dans le Programme d’immigration des travailleurs autonomes, le Programme de visa pour démarrage d’entreprise et le Programme de capital de risque pour les immigrants investisseurs; le Programme d’aides familiaux (fédéral) qui comprend les admissions dans toutes les catégories d’immigration de soignants et le Programme pilote d’immigration au Canada atlantique (IRCC, 2020a). Ci-dessous, des données d’admissions de résidents permanents d’expression française selon la définition de 2006 et sa mesure pour les trois premiers programmes.

    L’on observe d’abord que les récentes augmentations d’admissions de résidents permanents d’expression française dans la catégorie économique sont davantage attribuables à la fois aux augmentations des admissions dans le programme des travailleurs qualifiés et le programme des candidats des provinces que dans le programme des gens d’affaires, comme l’indique la figure 13 plus bas.

    Programmes des travailleurs qualifiés

    Comme l’illustre la figure 13, les proportions d’admissions de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec dans le programme des travailleurs qualifiés, ont augmenté de manière continue de 2016 à 2019, passant de 24,7 % à 40,3 %, soit de 964 à 2 531 résidents permanents admis (chiffres non illustrés dans les figures).

    Tel qu’il est indiqué plus haut, les admissions de résidence permanente liées au programme des travailleurs qualifiés incluent celles liées au programme des travailleurs qualifiés (fédéral), au programme des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral) et à la catégorie de l’expérience canadienne. Ils sont gérés à travers le système Entrée express depuis 2016.

    Les candidats à la résidence permanente qui soumettent une déclaration d’intérêt et qui sont jugés admissibles sont classés dans le bassin d’Entrée express en fonction d’un système de points tenant compte des compétences linguistiques, du niveau d’étude, de l’expérience professionnelle et d’autres facteurs. Une invitation à présenter une demande de résidence permanente est envoyée par IRCC aux candidats qui, dans le bassin, obtiennent les notes les plus élevées.

    De plus, en 2017, le gouvernement fédéral a décidé d’accorder des points supplémentaires, dans le cadre du processus Entrée express, pour la bonne connaissance du français et de mettre en place des mesures facilitant l’obtention de la résidence permanente pour les travailleurs étrangers temporaires francophones et les étudiants internationaux. L’augmentation de l’octroi de points supplémentaires pour les candidats francophones et les candidats bilingues avait été annoncée en octobre 2020. (IRCC, octobre 2020c)

    Programme des candidats des provinces

    L’immigration est un domaine de compétence partagée entre les gouvernements fédéral et provinciaux et territoriaux. Depuis les années 1990, les provinces et territoires sont de plus en plus engagés dans ce domaine. Ils adoptent des stratégies officielles d’immigration de même que des politiques de sélection et d’intégration conformes à leurs besoins (Paquet, 2016).

    L’un des principaux outils des provinces et des territoires pour recruter des immigrants, dans la catégorie économique, est le programme des candidats des provinces, dont l’un des objectifs est de stimuler la croissance des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Dans le cadre de ce programme mis en place par IRCC, chaque province obtient un nombre déterminé de certificats de désignation annuellement et peut les accorder selon des critères spécifiques, ce qui permet de cibler certains groupes particuliers ou de répondre à des besoins plus locaux.

    Les données concernant le programme des candidats des provinces sont particulièrement intéressantes, du fait qu’au début des années 2000, presque l’entièreté des résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec était sélectionnée par le gouvernement fédéral.

    Comme l’illustre la figure 13 plus bas, parmi les résidents permanents d’expression française, la proportion de ceux admis dans le cadre de ce programme était en 2001 de 0,4 %. En 2019, elle était de 20,6 %, et en 2020, de 25,6 %. Cela témoigne d’un rôle de plus en plus grand rempli par les provinces et les territoires dans la sélection de résidents permanents d’expression française, avec un quart des sélections effectuées dans la dernière année.

    Selon des interventions faites lors des groupes de discussion, ces évolutions illustrent l’importance d’une collaboration accrue avec les provinces. Il n’en demeure pas moins que les programmes fédéraux d’immigration continuent de représenter la majorité des programmes d’immigration, comptabilisant 79,4 % des admissions de résidents permanents d’expression française hors Québec en 2019 et 74,4 % en 2020 (données non illustrées dans les figures).

    Par ailleurs, le nombre de certificats de sélection accordés à des résidents permanents d’expression française varie considérablement d’une province à une autre. À titre indicatif, en 2019, 14 % de l’ensemble des résidents permanents admis au Nouveau-Brunswick étaient d’expression française, contre 3,7 % en Ontario, 2,4 % dans les territoires, 2 % au Manitoba et 1,8 % à Terre-Neuve-et-Labrador. Pour le reste des provinces, cette proportion est sous la barre du 1 % (données non illustrées dans les figures ci-dessous).

    Figure 13 : Proportion de résidents permanents d’expression française admis annuellement selon la définition de 2006, pour des programmes de la catégorie économique, Canada hors Québec, période de 2001 à 2020

    Source : IRCC, 2021

    Version texte : Figure 13
      2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Total
    Programme des candidats des provinces 0,4 % 0,3 % 1,1 % 0,8 % 4,1 % 3,2 % 4,2 % 5,2 % 6,6 % 6,5 % 10,4 % 12,0 % 11,6 % 14,4 % 13,9 % 13,9 % 17,3 % 16,9 % 20,6 % 25,6 % 11,0 %
    Programme des gens d’affaires 3,4 % 2,2 % 2,3 % 1,3 % 0,8 % 1,4 % 0,7 % 1,0 % 0,6 % 1,0 % 0,7 % 0,4 % 0,9 % 1,0 % 0,2 % 0,2 % 0,1 % 0,2 % 0,1 % 0,0 % 0,8 %
    Programme des travailleurs 50,0 % 52,6 % 40,8 % 42,5 % 37,3 % 35,3 % 38,3 % 43,5 % 44,4 % 36,1 % 26,0 % 26,5 % 27,2 % 28,0 % 22,6 % 24,7 % 31,5 % 36,5 % 40,3 % 46,9 % 35,9 %

    4.1.3 Catégorie du regroupement familial

    Les candidats à la résidence permanente dans cette catégorie sont parrainés par un citoyen canadien ou un résident permanent.

    Comme l’illustrent les figures 12A et 12B ci-dessus, les résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec sont moins nombreux en proportion dans la catégorie du regroupement familial, pour l’ensemble de la période de 2001 à 2020 (24,6 %) que pour l’immigration récente, soit de 2016 à 2020 (22,5 %). En comparaison, ces proportions sont respectivement de 28,6 % et 27,5 % pour l’ensemble des résidents permanents (données non illustrées dans les figures).

    4.1.4 Catégorie des personnes protégées et réfugiées

    Pour ce qui est de la catégorie des personnes protégées et réfugiées, comme cela est illustré aux figures 12A et 12B ci-dessus, les résidents permanents d’expression française y sont surreprésentés en comparaison de l’ensemble de la population des résidents permanents admis hors Québec avec une proportion de 25,3 % pour l’ensemble de la période de 2001 à 2020 comparativement à une proportion d’ensemble de 11,7 %. Cette différence s’est quelque peu atténuée en ce qui concerne les admissions plus récentes de 2016 à 2020 : les proportions sont de 20,3 % pour les résidents permanents d’expression française, comparativement à 14,8 % pour tous les résidents permanents admis à l’extérieur du Québec (données non illustrées dans les figures).

    En chiffres absolus, le nombre de réfugiés parmi les admissions de résidents permanents d’expression française est demeuré relativement stable de 2016 à 2019, puis a diminué en 2020. La diminution constatée en proportion est due à une augmentation plus importante des admissions dans la catégorie économique.

    4.2 Régions ou pays d’origine principaux des résidents permanents d’expression française admis au Canada hors Québec, 2001-2020

    4.2.1 Présentation de la figure 14 : Tableau sommaire des régions ou pays d’origine principaux

    La figure 14 ci-dessous présente trois colonnes sous lesquelles figurent les dix premiers pays d’origine en fonction de la citoyenneté, selon la proportion de résidents permanents d’expression française admis. Dans la première colonne figurent ceux selon la définition et la mesure de 2006 d’un immigrant d’expression française pour la période de 2001-2020. Dans la deuxième se trouvent ceux selon ces mêmes définition et mesure, mais pour la période de 2016 à 2020. Dans la troisième sont présentés ceux selon la définition et la mesure de 2016, pour la seule année de 2019. On obtient d’une part une indication de l’évolution dans le temps en utilisant les mêmes définition et mesure, soit celles de 2006, et d’autre part des variations en utilisant les définitions et mesures de 2006 et de 2016. Il est à noter que ce tableau ne contient pas l’ensemble des pays d’origine.

    4.2.2 La France, principal pays d’origine

    Ce tableau indique que la France est le principal pays d’origine des résidents permanents d’expression française admis chaque année de la période à l’étude, et ce, peu importe la définition utilisée. Il s’agit d’une tendance qui va en s’accentuant. De 2001 à 2020, il s’agit du pays d’origine de 22,9 % des résidents permanents d’expression française, alors que cette proportion est de 32,9 % pour l’immigration récente (2016-2020) selon la définition de 2006. En chiffres absolus, cela représente en moyenne approximativement 1 500 personnes originaires de la France admises annuellement durant les cinq dernières années (non illustré dans le tableau).

    Selon des interventions faites lors des groupes de discussion, cela n’apparaissait pas surprenant, puisque des activités de promotion ciblées, dont Destination Canada, sont organisées en France depuis le début des années 2000, alors que dans d’autres régions, par exemple dans des pays africains, ces initiatives sont plus récentes ou à développer.

    4.2.3 L’Afrique subsaharienne, première région d’origine

    Selon la définition de 2006, l’Afrique subsaharienne est, en proportion, la principale région d’origine des résidents permanents d’expression française admis au Canada hors Québec entre 2001 et 2020. Il s’agit de la région d’origine de 41 % d’entre eux. Les principaux pays d’origine des résidents permanents originaires d’Afrique subsaharienne sont la République démocratique du Congo (12,5 %), le Cameroun (5,6 %), le Burundi (4,3 %) et la Côte d’Ivoire (2,7 %). Au moins 1 % des résidents permanents d’expression française admis au cours des 20 dernières années ont quant à l’île Maurice, du Rwanda, du Djibouti, du Sénégal et de la Guinée comme pays d’origine.

    Ces tendances concernant l’Afrique subsaharienne reflètent celles soulignées par Marcoux et Richard (2018), selon lesquelles le nombre de locuteurs francophones sur le continent africain est en forte progression et que par conséquent, les pays d’Afrique francophones sont des bassins prometteurs pour le recrutement de candidats d’expression française à l’immigration au Canada à l’extérieur du Québec.

    4.2.4 L’Afrique du Nord, deuxième région d’origine, et le Liban, deuxième pays d’origine

    Les pays de l’Afrique du Nord et le Liban sont les lieux d’origine de 15,3 % des résidents permanents d’expression française admis entre 2001 et 2020. Les principaux pays d’origine sont le Maroc (5,2 %), l’Algérie (3,8 %) et le Liban (2,3 %).

    Il est toutefois possible que cette proportion soit sous-estimée, du fait que la mesure associée à la définition de 2006 exclut de nombreux locuteurs bilingues ayant une langue maternelle autre que le français (principalement l’arabe) mais ayant une connaissance de la langue française, tels ceux provenant du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie et du Liban, comme l’illustrent les chiffres présentés à la section sur la mise en contexte méthodologique.

    Si on utilise la définition de 2016 pour calculer les proportions pour l’année 2019, ces quatre pays sont les lieux d’origine de 32,8 % des résidents permanents d’expression française admis hors Québec, comme l’indique la troisième colonne de la figure 14.

    Ainsi, le continent africain dans son ensemble est le lieu d’origine de plus de la moitié des résidents permanents d’expression française admis depuis 2001.

    4.2.5 Autres régions d’origine – l’Amérique, l’Asie et l’Océanie

    La figure 14 indique aussi qu’en Amérique, le principal pays d’origine des résidents permanents d’expression française hors Québec est Haïti. Enfin, seulement 2,3 % des résidents permanents d’expression française au cours des 20 dernières années sont originaires d’un pays d’Asie ou de l’Océanie, alors que le continent asiatique est la région d’origine de plus de la moitié de l’ensemble des résidents permanents admis à l’extérieur du Québec (données non illustrées dans la figure).

    Figure 14 : Tableau sommaire des régions et principaux pays d’origine des résidents permanents d’expression française admis selon la définition de 2006 (données pour la période de 2001 à 2020 et de 2016 à 2020) et selon la définition de 2016 (données pour 2019), Canada hors Québec
    Top 10 pays d’origine des résidents permanents d’expression française admis hors Québec selon la définition de 2006 (Période de 2001 à 2020) Top 10 pays d’origine des résidents permanents d’expression française admis hors Québec selon la définition de 2006 (Période de 2016 à 2020) Top 10 pays d’origine des résidents permanents d’expression française admis hors Québec selon la définition de 2016 (Période de 2019)
    1. France (22,9 %) 1. France (32,9 %) 1. France (22,1 %)
    2. Congo ( RDC ) (12,5 %) 2. Congo ( RDC ) (10,5 %) 2. Maroc (13,2 %)
    3. Haïti (8,6 %) 3. Cameroun (6,2 %) 3. Algérie (11,4 %)
    4. Cameroun (5,6 %) 4. Maroc (5,7 %) 4. Burundi (6,6 %)
    5. Maroc (5,2 %) 5. Algérie (5,4 %) 5. Cameroun (6,4 %)
    6. Burundi (4,3 %) 6. Burundi (4,7 %) 6. Congo ( RDC ) (5,8 %)
    7. Algérie (3,8 %) 7. Haïti (4,6 %) 7. Tunisie (5,8 %)
    8. Côte d’Ivoire (2,7 %) 8. Côte d’Ivoire (2,9 %) 8. Haïti (3 %)
    9. Liban (2,3 %) 9. Belgique (2,7 %) 9. Liban (2,4 %)
    10. Île Maurice (2,1 %) 10. Djibouti (2,1 %) 10. Île Maurice (2,3 %)
    Source : IRCC , 2021

    4.3 Caractéristiques linguistiques des résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec selon différentes définitions et mesures

    Comme cela est décrit ci-dessous, les résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec de 2001 à 2020 ont des caractéristiques linguistiques variées selon les différentes définitions et mesures utilisées.

    4.3.1 Définition et mesure de 2006

    4.3.1.1 Français et autres langues maternelles

    Le français est la langue maternelle de 59,7 % des résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec entre 2001 et 2020 selon la définition de 2006. Pour ce qui est des langues maternelles autres que le français, l’on en dénombre plus de 165 différentes. Neuf sont la langue maternelle d’au moins 1 % des résidents permanents admis depuis 2001. Les cinq plus communes sont l’arabe (10,9 %), le créole (6,6 %), le kirundi (2,6 %), le lingala (2 %) et le souahéli (1,7 %).

    4.3.1.2 Capacité de communiquer en français ou en anglais

    En ce qui concerne la capacité de communiquer dans les deux langues officielles du Canada, 62,9 % des résidents permanents d’expression française admis hors Québec entre 2001 et 2020 selon la définition de 2006 affirment être en mesure de communiquer en français uniquement. Cette définition inclut ceux ayant le français comme langue maternelle ou ceux ayant une langue maternelle autre que le français ou l’anglais, mais qui ont une connaissance du français (français seulement).

    Par ailleurs, 28,7 % ont déclaré être en mesure de communiquer à la fois en français et en anglais. Ces résidents permanents bilingues incluent uniquement ceux qui ont le français pour langue maternelle. Enfin, 7,8 % déclarent être uniquement capable de communiquer en anglais ou dans aucune des deux langues officielles du Canada, malgré le fait que le français soit leur langue maternelle.

    Ces données montrent que la population de résidents permanents d’expression française dénombrée en fonction de la définition de 2006 peut à la fois inclure des personnes qui, dans les faits, ne connaissent pas le français, et exclure des personnes bilingues dont le français est la principale langue canadienne d’usage.

    4.3.2 Définition et mesure de 2016

    La mesure associée à la définition de 2016 permet aussi de dresser des constats intéressants sur les caractéristiques linguistiques des résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec, puisque cette définition se veut plus inclusive pour ce qui est des personnes bilingues ayant une connaissance du français mais ayant une langue maternelle autre que le français ou l’anglais.

    Cette définition et cette mesure, comme mentionné précédemment, ne tiennent plus compte de la langue maternelle mais de la connaissance des langues officielles et de la langue officielle dans laquelle la personne est le plus à l’aise. Elle permet ainsi d’exclure d’emblée toute personne qui ne parle pas français et de mieux dénombrer les francophones bilingues.

    Selon cette définition et cette mesure, pour l’année 2019, 38,6 % des résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec avaient une connaissance du français seulement et 61,4 % du français et de l’anglais selon cette mesure.

    Bien que cette définition et cette mesure ne tiennent plus compte de la langue maternelle, il est intéressant de voir que selon cette mesure, le français était la langue maternelle de 39,5 % des résidents permanents d’expression française admis. Les cinq langues maternelles les plus communes des autres locuteurs étaient l’arabe (30,1 %), le kirundi (5,5 %), le créole (4,1 %), le bamiléké (1,6 %) et le souahéli (1,9 %). Encore une fois, ces données illustrent la possibilité de mieux dénombrer, à l’aide de la définition de 2016 et de sa mesure, la population arabophone, dont le français est la principale langue canadienne d’usage.

    5. Pistes de réflexion et d'avenir

    5.1 Projections linguistiques pour le Canada 2011-2036

    Les Projections linguistiques pour le Canada 2011-2036, publiées par Statistique Canada (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017), sont particulièrement pertinentes pour illustrer l’ampleur des défis à partir des tendances passées sur le plan démographique et démolinguistique et y envisager des scénarios d’avenir pour les communautés francophones en situation minoritaire, en particulier pour ce qui est de l’enjeu de l’immigration. Ces projections sont basées sur l’évolution des facteurs touchant la composition des groupes linguistiques dans les dernières décennies : la fécondité, le vieillissement, les transferts linguistiques inter- et intragénérationnels, en plus de la migration internationale et interprovinciale. Les estimations produites projettent, sans prédire, divers scénarios d’avenir selon que ces facteurs et leurs tendances passées se poursuivent ou se transforment dans les années et décennies à venir.

    5.1.1 Tendances démographiques et démolinguistiques du passé et du présent

    Comme nous l’avons indiqué plus tôt, l’immigration n’a pas été et n’est toujours pas favorable au maintien du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    En effet, l’on peut lire que :

    Grâce à sa forte fécondité, la population de langue maternelle française [en particulier au Canada hors Québec] a pu se maintenir jusque dans les années 1950, malgré un contexte où l’immigration ne lui était pas favorable. Toutefois, depuis le Recensement de 1951, le pourcentage que représente cette population au sein du Canada est en baisse constante. (Statistique Canada, février 2018 : 3)

    En plus de cela, à l’extérieur du Québec, la population minoritaire de langue maternelle française se distingue de la population majoritaire de langue maternelle anglaise du point de vue de la mobilité linguistique intergénérationnelle à savoir la transmission incomplète de la langue maternelle des parents aux enfants. La transmission incomplète du français contribue généralement au vieillissement accru de sa population en réduisant « le bassin potentiel de nouveaux parents de langue française susceptibles de transmettre à leur tour le français à leurs enfants » (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 125). Ce n’est pas le cas de la population majoritaire de langue maternelle anglaise, qui tend fortement à transmettre l’anglais comme langue maternelle des parents aux enfants.

    De plus, la langue transmise aux enfants en tant que langue maternelle est souvent celle parlée le plus souvent à la maison par les parents13 (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 25, 125). Au chapitre de la mobilité linguistique intragénérationnelle et des transferts linguistiques se dégage la tendance chez la population de langue maternelle française en milieu minoritaire à utiliser le plus souvent une autre langue à la maison, cette langue étant généralement l’anglais plutôt que la langue maternelle française. C’est moins le cas dans les provinces et territoires à l’extérieur du Nouveau-Brunswick et certaines régions ontariennes à proximité du Québec (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 124). Par ailleurs, encore une fois, à l’extérieur du Québec, la population de langue maternelle anglaise tend à utiliser l’anglais le plus souvent à la maison. De plus, en ce qui a trait à la population de langue maternelle tierce qui effectue des transferts linguistiques, la majorité le fait vers l’anglais (Statistique Canada, janvier 2017 : 98).

    Enfin, l’on observe que la population d’expression française en milieu minoritaire est davantage composée de personnes issues de la migration interprovinciale que de la migration internationale. À l’inverse, la population d’expression anglaise est davantage composée de personnes issues de la migration internationale que de la migration interprovinciale (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 42-43). À titre d’information, d’autres publications traitent en particulier de la migration interprovinciale de la population immigrante de langue française (CIC, juillet 2012; IRCC juillet 2017; Statistique Canada, juin 2014).

    5.1.2 Projections démographiques et démolinguistiques d’avenir

    L’étude de Statistique Canada projette la possibilité d’une baisse continue du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à 3,1 % d’ici 2036 selon la plupart de ses scénarios (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 82).

    Les auteurs soulignent que certains facteurs représentent des tendances lourdes, qui sont relativement stables qui évoluent lentement dans le temps, telle la transmission intergénérationnelle de la langue, soit la transmission de la langue maternelle des parents aux enfants (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 21). Au Canada hors Québec, se trouvent des tendances à une transmission intergénérationnelle incomplète du français comme langue maternelle des parents aux enfants. Toutefois, même dans un scénario hypothétique où cette transmission serait quasi complète, les projections estiment que le poids de la population ayant le français comme PLOP atteindrait 3,6 % en 2036, comparativement à 3,1 % selon la plupart des autres scénarios (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 82).

    Par ailleurs, l’étude souligne que :

    L’immigration est l’un de ces phénomènes démographiques aux répercussions majeures sur l’évolution démographique des divers groupes linguistiques au pays […] et sur lequel l’État exerce une influence, tant en ce qui a trait au volume d’immigrants accueillis chaque année qu’à la composition de cette immigration, entre autres selon le pays de naissance ou la connaissance des langues officielles. (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 29-30)

    Selon cette étude, pour maintenir le poids démographique de la population de langue française en milieu minoritaire à 3,8 %, ce qu’il était au recensement de 2016, le nombre d’immigrants de langue française requis hors Québec entre 2017 et 2036 est estimé à 275 000, soit environ 13 750 par année. Au total, il serait nécessaire, pour maintenir ce poids à 3,8 %, que 5,1 % des immigrants qui s’établissent à l’extérieur du Québec entre 2017 et 2036 aient le français comme première langue officielle parlée. Toutefois, cette proportion varierait considérablement selon les provinces et territoires. Elle serait de plus de 35 % au Nouveau-Brunswick et de moins de 3 % dans les provinces de l’Ouest. Ce calcul ne concernerait ni Terre-Neuve-et-Labrador ni les territoires puisque le pourcentage de la population ayant le français pour PLOP ne devrait pas diminuer entre 2017 et 2036 (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 83-84).

    Il importe d’insister sur le fait que selon les projections de Statistique Canada, ce niveau de 5,1 % d’immigration d’expression française hors Québec serait nécessaire pour seulement conserver le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à 3,8 %, ce qu’il était au recensement de 2016, alors que la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française hors Québec avait été fixée en fonction du poids démographique de la population d’expression française de 4,4 % établi lors du recensement de 2001.

    Dans le contexte actuel et étant donné ces perspectives d’avenir, si une nouvelle cible d’immigration d’expression française était adoptée en vue de maintenir ou de contribuer à maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à au moins 3,8 % ou en vue de le rehausser ou de contribuer à le rehausser, par exemple à 4,4 %, il est plus que probable qu’une cible encore plus ambitieuse que 4,4 % d’admissions de résidents permanents d’expression française soit nécessaire. De plus, des cibles, sinon du moins des objectifs et suivis quant à la rétention du français parmi les immigrants d’expression française puis à leur intégration aux communautés francophones en situation minoritaire pourraient aussi être d’intérêt. En ce sens, il apparaît que les modifications au recensement de 2021, avec l’inclusion de questions sur la langue d’instruction, pourraient apporter de nouvelles possibilités en ce qui a trait notamment à des indicateurs d’intégration des familles immigrantes de langue française au sein des communautés francophones en situation minoritaire.

    5.2 Approches de recrutement

    Même si une cible d’admission de résidents permanents d’expression française hors Québec plus ambitieuse pouvait s’avérer nécessaire pour atteindre ou approcher un objectif de maintien ou d’accroissement du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, l’atteinte de la cible actuelle de 4,4 % dans les trois prochaines années demeure incertaine.

    La plus récente évaluation de l’Initiative d’immigration dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire (IRCC, juillet 2017) mettait en évidence les limites de l’approche actuelle en matière de recrutement d’immigrants d’expression française, compte tenu des résultats bien en dessous des objectifs depuis 2003. Cette évaluation estimait que la cible de 4,4 % serait difficilement atteignable si les initiatives actuelles n’étaient pas bonifiées de manière importante.

    Les données probantes indiquent que l’approche actuelle, qui repose principalement sur les activités promotionnelles et les options de résidence temporaire, pourrait ne pas suffire à atteindre les objectifs établis et, par conséquent, d’autres efforts pourraient être nécessaires pour atteindre les cibles actuelles. ( IRCC , juillet 2017 : vi)

    Les écarts relatifs à l’objectif de 4,4 % depuis le début des années 2000 invitent à réfléchir sur les façons de bonifier, d’améliorer ou de repenser l’approche actuelle. L’objectif du présent rapport était avant tout la réalisation de l’analyse statistique. Toutefois, il est pertinent de réfléchir à de telles possibilités quant à l’approche actuelle, notamment en fonction de la recension des écrits, des tendances observées dans l’analyse statistique et des extrants des groupes de discussion. Ces pistes de réflexion ne sont pas une liste exhaustive, mais des voies à explorer ou à bonifier.

    5.2.1 Cibler des bassins prometteurs de recrutement

    L’étude de Marcoux et Richard (automne 2018), réalisée pour le compte d’ IRCC, est particulièrement intéressante pour cibler les bassins prometteurs pour le recrutement d’immigrants d’expression française. Les tendances dressées dans cette étude concordent avec celles sur les principales régions d’origine présentées dans ce rapport.

    Marcoux et Richard (automne 2018) estiment que la cible de 4,4 % pourrait être atteinte avec des activités de recrutement bien ciblées en fonction des évolutions démographiques prévues au sein de l’espace francophone international. Selon eux, « afin de maintenir ou consolider le fait français au nord de la frontière américaine, il apparaît important d’identifier les pays ou régions du monde qui, à court ou moyen termes, devraient connaître des croissances considérables de leurs populations francophones, représentant ainsi des bassins potentiels de recrutement d’immigrants d’expression française. » (automne 2018 : 76)

    Les données de l’Organisation internationale de la francophonie permettent de brosser un portrait actuel et de dessiner des tendances à venir en ce qui a trait aux bassins de population d’expression française. Le rapport de 2018 de l’Observatoire de la langue française estime à 300 millions le nombre de locuteurs francophones dans le monde, dont 235 millions de locuteurs quotidiens. Le nombre de locuteurs francophones est en forte progression, soit 22,7 millions de plus qu’en 2010. Parmi eux, 68 % se trouvent en Afrique subsaharienne.

    Ces tendances portent Marcoux et Richard à soutenir que « le centre de gravité de la Francophonie se déplace de l’Europe vers le continent africain » (automne 2018 : 82), principalement en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Selon les chercheurs, ces deux régions ont un grand potentiel pour le recrutement d’immigrants francophones. Sans que le Canada ait effectué d’efforts d’envergure sur le continent africain selon ces auteurs, selon eux, une part de plus en plus importante d’immigrants d’expression française proviennent d’un pays d’Afrique comme nous l’avons aussi vu dans notre étude. Cela porte Marcoux et Richard à estimer que l’atteinte de la cible pourrait notamment passer par des initiatives ciblées et bien coordonnées dans certains pays d’Afrique pour recruter quelques milliers d’immigrants francophones supplémentaires annuellement. Cela ne signifie pas que les pays européens ne représentent plus un bassin de recrutement intéressant, mais ceux-ci auront une importance moindre en comparaison avec le potentiel de recrutement dans des pays africains.

    En plus de mettre sur pied de tels mécanismes, il faut aussi veiller à arrimer les activités de promotion à l’international au processus de sélection et d’établissement à long terme des nouveaux arrivants d’expression française (CIC, juillet 2012). Il ne suffit pas de faire la promotion des communautés : il faut s’assurer que les informations se rendent aux personnes qui ont réellement le potentiel d’immigrer au Canada et de vouloir s’installer dans l’une de ses communautés francophones en situation minoritaire.

    La promotion, notamment par l’organisation d’activités comme Destination Canada, est une étape essentielle pour l’atteinte de la cible, mais cela doit s’inscrire dans une stratégie plus globale de recrutement. Pour les auteurs des deux évaluations du ministère (CIC, juillet 2012 et IRCC, juillet 2017), il serait pertinent de réfléchir aux stratégies de promotion en considérant que « [s]i davantage de nouveaux arrivants francophones peuvent être convaincus de venir s’établir dans les [communautés francophones en situation minoritaire], encore faut-il qu’ils soient en mesure d’immigrer de façon permanente au Canada » (CIC, juillet 2012 : v).

    5.2.2 Travailler de pair avec les provinces

    Les données sur les catégories d’admission illustrent un rôle de plus en plus grand rempli par les provinces et les territoires dans la sélection de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec, avec plus d’un cinquième des sélections dans les deux dernières années. Alors que l’ensemble des accords entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires en matière d’immigration contiennent des clauses qui visent à promouvoir l’immigration au sein des communautés francophones en milieu minoritaire, le nombre de résidents permanents d’expression française sélectionnés par les provinces et territoires varie considérablement d’une juridiction à l’autre. Dans ce contexte, il serait intéressant d’envisager d’établir des objectifs plus précis sur le nombre de places à accorder à des candidats francophones dans le cadre des programmes provinciaux et de poursuivre les efforts entrepris au courant des dernières années pour engager davantage les provinces et territoires dans ce dossier.

    5.2.3 Miser sur des mécanismes facilitant l’obtention de la résidence permanente pour les candidats d’expression française

    Les évaluations menées par IRCC en 2012 et en 2017 mettent en lumière la nécessité de développer davantage de mécanismes facilitant la résidence permanente au sein des communautés francophones en situation minoritaire. La nouvelle annonce effectuée à l’automne 2020 concernant l’augmentation des points supplémentaires pour les candidats d’expression française et bilingues dans le cadre d’Entrée express est un exemple d’initiative en ce sens.

    5.2.4 Favoriser les transitions de la résidence temporaire vers la résidence permanente

    Des intervenants consultés ont rappelé que les étudiants étrangers, formés au Canada et bien souvent déjà insérés socialement au sein des communautés, représentent un groupe particulièrement prometteur en termes de recrutement et d’intégration. Une étude menée par l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (juin 2020) invite à mieux cerner le rôle des établissements d’enseignement postsecondaire en matière d’immigration. Par ailleurs, les travailleurs temporaires francophones, notamment ceux arrivés dans le cadre du programme Mobilité francophone, sont aussi un groupe auquel une attention particulière pourrait être accordée.

    5.2.5 Créer une catégorie d’immigrants économiques francophones

    En 2013, une étude commandée par la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne dans le contexte des réformes en immigration mettait de l’avant l’idée de créer une nouvelle catégorie d’immigrants économiques francophones dans le cadre d’un programme pilote. Le ministre dispose de l’autorité nécessaire pour créer un tel programme par instructions ministérielles. Les places disponibles dans le cadre de ce programme pilote seraient exclusivement réservées à des candidats d’expression française. Il serait pertinent d’analyser la possibilité de développer un tel projet pilote et de mesurer ses effets potentiels.

    5.3 Pistes de recherche

    Cette recherche s’est concentrée sur l’analyse statistique des admissions de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire. Lors des groupes de discussion, plusieurs autres pistes pour des recherches d’intérêt ont été mentionnées. Certaines d’entre elles et d’autres sont notamment abordées dans des rapports de recherche d’ IRCC.

    • Reprendre l’étude de Marcoux et Richard (2018) quant aux bassins prometteurs de recrutement et voir comment appliquer les constats dressés pour bonifier l’approche actuelle en matière de promotion et de recrutement.
    • Analyser la possibilité de développer un projet pilote pour la création d’une catégorie d’immigrants économiques francophones et de mesurer ses effets potentiels.
    • Faire l’inventaire, suivre l’évolution et évaluer l’incidence des politiques, des programmes et des initiatives en immigration, dont l’immigration d’expression française et le recrutement de résidents permanents d’expression française à long terme.
    • Effectuer une analyse comparative des dispositions en place dans les provinces en matière d’immigration francophone pour déterminer les bonnes pratiques, mais aussi les lacunes.
    • Réaliser des analyses de l’immigration et de l’immigration d’expression française à différentes échelles géographiques entre provinces et territoires et en leur sein, notamment entre milieux urbains et ruraux.
    • Documenter l’expérience des résidents temporaires d’expression française qui cherchent à passer à la résidence permanente, les défis qu’ils rencontrent et les pistes à envisager pour faciliter cette transition.
    • Réaliser une recension exhaustive des écrits sur le thème de l’intégration socioéconomique des immigrants au sein des communautés francophones en situation minoritaire et déterminer les principaux enjeux relevés et les lacunes en termes de recherche par rapport à ces enjeux.
    • Brosser un portrait et établir un état des lieux des transferts linguistiques chez la population immigrante d’expression française et des enjeux qui s’y rattachent.
    • Brosser un portrait des immigrants au sein des communautés francophones en situation minoritaire et déterminer les facteurs de la rétention, notamment en ce qui concerne les motifs et les enjeux rattachés aux migrations secondaires entre provinces ou territoires ou en leur sein.

    6. Sommaire et conclusion

    6.1 Sujet et objectifs de l’étude

    La présente étude porte sur la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire adoptée en 2003 dans le Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire. Celui-ci avait été élaboré par le Comité directeur Citoyenneté et Immigration Canada – Communautés francophones en situation minoritaire (Comité directeur CIC- CFSM). L’échéancier initial pour atteindre la cible avait été fixé à 2008. En raison de défis méthodologiques quant à la définition d’un « immigrant d’expression française » et du temps jugé nécessaire à observer et à mesurer les effets d’initiatives prises, cet échéancier a été repoussé de 15 ans, soit de 2008 à 2023, dans le Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire, aussi élaboré par le Comité directeur CIC- CFSM en 2006.

    L’étude a pour objectif premier et principal une analyse statistique des écarts avec cette cible depuis son adoption, puis des estimations de son incidence souhaitée sur le maintien du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, ce qu’était son objectif. De manière complémentaire, à l’aide d’une revue de littérature et de documents clés ainsi que de groupes de discussion en présence d’intervenants clés gouvernementaux, communautaires et universitaires, l’étude apporte des éléments de mise en contexte sur l’adoption et l’évolution de la cible et de son objectif ainsi que des pistes de réflexion et d’avenir à l’approche de son arrivée à échéance en 2023. L’étude ne vise pas à chiffrer une nouvelle cible, mais à contribuer aux réflexions à ce sujet.

    6.2 Contexte entourant l’étude

    Avant d’aborder directement la cible, nous l’avons mise en contexte de façon plus globale sur les plans historique et démographique. Nous avons évoqué des moments clés de l’histoire du Canada que nous connaissons aujourd’hui, caractérisé par sa dualité linguistique et sa diversité culturelle, dont l’immigration est une composante constituante. Nous voyons d’abord que l’immigration, inscrite dans la Loi constitutionnelle de 1867, est un champ de compétence partagé entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires, mais que le gouvernement fédéral y exerce un pouvoir prépondérant. Depuis l’adoption de la Loi sur l’immigration (1976) et suivant la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (2001), le gouvernement fédéral a l’obligation de faire rapport au Parlement quant aux niveaux et à la composition de l’immigration qu’il a admise au cours de l’année écoulée et qu’il vise pour l’année à venir. Il détermine ainsi les priorités en matière de sélection et d’admission de nouveaux arrivants annuellement . À l’extérieur du Québec, la grande majorité des programmes de sélection et d’admission des immigrants relève du gouvernement fédéral. Bien que notre étude observe une hausse importante des admissions au programme des candidats des provinces parmi les résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire depuis 20 ans et qu’une croissance est observée parmi l’ensemble des admissions au cours des dernières années, il demeure que ce programme représentait en 2019 un cinquième des admissions de résidents permanents (IRCC, 2020a). Malgré que l’immigration soit sujette à des éléments de conjoncture, dont des migrations internationales, et qu’elle soit un champ de compétence partagée par lequel le gouvernement fédéral collabore avec d’autres ordres de gouvernement, des organismes communautaires et des employeurs, au Canada à l’extérieur du Québec, le gouvernement fédéral y occupe un rôle de premier plan. À son tour, cette immigration exerce une influence importante sur l’équilibre démolinguistique au pays.

    Historiquement, l’immigration au Canada était majoritairement de langue anglaise à l’extérieur du Québec, provenant majoritairement d’Europe et des États-Unis. À la suite de modifications législatives et réglementaires faites à partir des années 1960 et 1970, l’immigration s’est, à partir des années 1970 et 1980, de plus en plus diversifiée sur le plan linguistique et quant aux pays d’origine. À la même époque, la dualité linguistique se voyait renforcée par l’adoption de la première Loi sur les langues officielles (1969), la Charte canadienne des droits et libertés (1982) et la nouvelle Loi sur les langues officielles (1988). L’engagement du gouvernement du Canada à favoriser l’épanouissement et à appuyer le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire ainsi qu’à faire la promotion du français et de l’anglais dans la société canadienne s’est traduit par l’ajout de la partie VII à la nouvelle Loi sur les langues officielles. S’en sont suivies des modifications à la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (2001) pour y inclure comme objet celui de favoriser le développement des collectivités de langues officielles minoritaires au Canada.

    Sur le plan démographique, depuis les dernières décennies, le Canada, comme d’autres pays occidentaux, connaît une baisse démographique étant donné de faibles taux de natalité (nombre de naissances vivantes par rapport à l’effectif de la population dans un lieu donné et pendant une période déterminée) et un vieillissement de la population (IRCC, 2020a). La population d’expression française en milieu minoritaire connaît des baisses démographiques particulièrement marquées depuis plusieurs décennies en raison de divers facteurs, dont une immigration qui, d’hier à aujourd’hui, ne lui est pas favorable.

    Au sujet de ces divers facteurs, certains ont historiquement représenté des tendances lourdes, notamment une chute marquée de la fécondité, une transmission intergénérationnelle incomplète de la langue maternelle française des parents aux enfants, des transferts linguistiques intragénérationnels vers l’anglais comme langue d’usage au foyer, un vieillissement accru de la population. À cela s’ajoutent d’autres facteurs, comme la mobilité géographique interprovinciale et l’immigration internationale, davantage liés à des éléments de conjoncture économique ou à des politiques.

    Concernant les niveaux et la composition de l’immigration au Canada dans les dernières décennies, ces niveaux se situent entre 150 000 et 250 000 annuellement depuis les années 1980. Pour ce qui est de la composition de cette immigration, la majorité de la population immigrante s’établit à l’extérieur du Québec et le plus grand nombre de cette population immigrante n’a ni le français ni l’anglais comme langue maternelle. Cela contribue à faire diminuer, à l’extérieur du Québec, le poids relatif de la population de langue maternelle française et de celle de langue maternelle anglaise. Par ailleurs, selon le critère de la première langue officielle parlée (PLOP), qui tient aussi compte de la connaissance des langues officielles et de leur utilisation au foyer, la population de langue anglaise, contrairement à celle de langue française, maintient son poids démographique. Cela s’explique notamment par le fait que l’anglais est, à l’extérieur du Québec, la principale langue d’intégration et de convergence de la population immigrante avec l’apprentissage généralisé de l’anglais, les transferts linguistiques vers cette langue et la forte propension à adopter l’anglais plutôt que le français (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017 : 50-51).

    L’étude reconnaît ainsi, dès le départ, que la baisse du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire est liée à divers facteurs. Néanmoins, elle considère que l’immigration est un facteur clé étant donné son incidence sur l’équilibre démolinguistique au pays et l’influence qu’exerce sur elle le gouvernement en déterminant les niveaux et la composition. De fait, selon Statistique Canada, bien que « [p]lusieurs facteurs démographiques expliquent l’évolution du français et de la francophonie au Canada, [dont] un faible taux de fécondité et une transmission incomplète de la langue maternelle française des parents aux enfants, c’est l’immigration internationale qui influe le plus sur [cette] évolution » (Statistique Canada, 2012 : 9).

    6.3 Contexte d’adoption et d’évolution de la cible

    Pour ce qui est du contexte de l’adoption et de l’évolution de la cible, l’étude relève les éléments saillants suivants.

    La cible de 4,4 % d’immigration francophone a été adoptée dans le Cadre stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire de 2003, lequel a été élaboré par le Comité directeur CICCFSM. À l’époque, le Comité directeur faisait le constat d’une baisse démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire et d’un déficit d’immigration d’expression française au sein de ces communautés. Ainsi, il fixait la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire, avec l’objectif de rehausser sinon d’au moins maintenir ce poids démographique au niveau où il se trouvait au recensement le plus récent, soit celui de 2001, où la population d’expression française à l’extérieur du Québec représentait 4,4 % de l’ensemble de la population (tant selon le critère de la langue maternelle que celui de la PLOP). Il visait comme résultat qu’au moins 4,4 % des immigrants à l’extérieur du Québec soient d’expression française en 2008.

    L’étude fait remarquer que la formulation de l’objectif comportait une ambiguïté quant à savoir s’il s’agissait de rehausser ou de maintenir ce poids démographique. Elle souligne aussi que cette cible et son objectif étaient établis avec la prémisse d’une correspondance, voire d’une corrélation directe entre l’une et l’autre, sans mention d’études démographiques ou démolinguistiques détaillées pour l’appuyer. L’approche n’aurait donc pas tenu compte, dans l’équation, d’autres dimensions de l’ensemble du continuum d’immigration, dont la rétention linguistique du français chez les immigrants et leur rétention géographique au sein des communautés francophones en situation minoritaire, et, outre l’immigration, d’autres facteurs affectant le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire. Il s’agit d’une limite importante qui a été soulevée par des interventions lors de groupes de discussion. La présente étude et son analyse statistique reprennent l’approche qui était celle utilisée en établissant la cible en 2003. Cette étude ne comporte pas d’analyse démographique ou démolinguistique complète. Cette limite y est soulignée. L’étude note toutefois des publications dans lesquelles de telles analyses sont réalisées (Statistique Canada, janvier 2017; PCH, 2017).

    Par ailleurs, l’étude signale que cette cible était comprise comme un seuil minimum à atteindre. Aussi note-t-elle que l’argumentaire faisait référence non seulement à l’attraction, mais aussi au maintien d’immigrants d’expression française. Enfin, elle remarque que l’atteinte de cette cible était assortie de moyens tels que l’établissement de pourcentages d’immigrants d’expression française pour certains programmes (programme des candidats des provinces, transition d’étudiants étrangers vers la résidence permanente) et qu’il était proposé de cibler des pays sources francophones. De telles propositions de cibler certains programmes et pays sources se sont aussi dégagées de la revue de littérature et d’interventions lors des groupes de discussion.

    Le Plan stratégique pour favoriser l’immigration au sein des communautés francophones en situation minoritaire (2006), aussi élaboré par le Comité directeur CICCFSM, visait à accroître et à mieux concerter les efforts en vue d’atteindre les cinq objectifs établis dans le Cadre stratégique de 2003, dont celui d’augmenter le nombre d’immigrants d’expression française de manière à accroître le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire. Dans le cadre de ce plan, l’atteinte de la cible de 4,4 %, initialement prévue pour 2008, était repoussée de 15 ans, à 2023. Cela était notamment justifié par des difficultés à mesurer avec précision le portrait démographique de l’immigration dans les communautés francophones en situation minoritaire.

    De plus, l’étude remarque que dans le Plan stratégique de 2006, sans que l’année 2023 n’y apparaisse, le Comité directeur CICCFSM disait estimer qu’une période de 15 ans serait nécessaire pour atteindre la cible annuelle de 8 000 à 10 000 immigrants d’expression française (CICCFSM, septembre 2006). Par ailleurs, selon certaines interventions aux groupes de discussion, l’échéancier avait été reporté, considérant le temps nécessaire, pour voir et mesurer sur trois cycles de cinq ans les effets des mesures et des initiatives prises. Au cours des années qui ont suivi, le ministère constatait que malgré des mesures prises et des initiatives entreprises ainsi que des hausses de nombres d’admissions de résidents d’expression française en milieu minoritaire, la cible n’était toujours pas atteinte et il signalait qu’il aurait à déployer davantage d’efforts pour réaliser des progrès vers l’atteinte de la cible (CIC, juillet 2012; IRCC, juillet 2017). Il a indiqué compter y arriver d’ici 2023 (CIC, juillet 2012; IRCC, 2019a). La publication des données permettant de suivre les résultats liés à l’atteinte de la cible et les rapports au Parlement ont été faits et continuent de se faire sur une base annuelle.

    Diverses études du Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes se sont penchées sur la cible. Une étude de 2010 soutenait qu’en raison de la mobilité des francophones et des taux des transferts linguistiques, la cible de 4,4 % établie à partir des données du recensement de 2001 était dépassée, qu’elle ne permettrait pas de maintenir l’équilibre linguistique à l’extérieur du Québec et qu’elle devait ainsi être revue à la hausse, soit à 7 %.

    Par ailleurs, l’étude de 2010 du Comité de même qu’une étude de 2016 recommandaient la mise en place d’une politique nationale sur l’immigration francophone en milieu minoritaire en vue d’accroître le poids démographique des communautés linguistiques en milieu minoritaire. Cette proposition a aussi été faite plus récemment dans le document de réforme de la Loi sur les langues officielles du gouvernement, Français et anglais : vers une égalité réelle des langues officielles au Canada, publié en février 2021.

    6.4 Analyse statistique de la cible et de son objectif

    Par la suite, l’étude présente des repères méthodologiques nécessaires pour comprendre l’analyse statistique de la cible. Elle rappelle que la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française avait trait aux admissions de résidents permanents par IRCC et était établie en fonction du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire au recensement de 2001 de Statistique Canada, où il se trouvait à 4,4 % tant selon le critère de la langue maternelle que celui de la PLOP. L’étude note à cet effet que comme la cible ne tient compte que des admissions de résidents permanents d’expression française, elle comporte une partie importante, mais non exclusive, de l’ensemble du continuum d’immigration, sans compter que d’autres facteurs outre l’immigration ne sont pas pris en compte. Cette limite, présentée d’emblée en introduction à l’étude et rappelée à quelques reprises, a aussi fait l’objet d’interventions lors de groupes de discussion.

    Des limites sont également signalées quant aux trois définitions d’ IRCC d’un « immigrant d’expression française » et aux mesures correspondantes : la première, de 2003, tendait à des surestimations et a vite été abandonnée; la deuxième, de 2006, tendait à des sous-estimations mais a servi de référence sur une plus longue période, soit de 2006 à 2016, et sert ainsi à l’analyse statistique effectuée dans l’étude; la dernière, de 2016, est considérée comme plus inclusive et exacte, mais les données correspondantes ne sont disponibles qu’à partir de 2019. De plus, des mises en garde sont notées pour ce qui est de la comparabilité de données produites à l’aide de chacune de ces définitions, de même qu’entre les données linguistiques du recensement et les données administratives d’ IRCC.

    L’étude relève que même peu après l’adoption de la cible, des questionnements, voire des doutes avaient été soulevés et persistent, quant à savoir si l’atteinte de la cible serait suffisante pour arriver à l’objectif d’au moins maintenir à 4,4 % le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    L’analyse statistique effectuée dans ce rapport tend à l’indiquer. Suivant l’approche utilisée pour l’établissement de la cible et le suivi pour son atteinte, l’analyse statistique consiste d’abord à calculer les écarts entre les taux et les nombres d’admissions obtenus, puis ceux qui auraient été requis pour atteindre un taux d’admissions de résidents permanents d’expression française de 4,4 % de 2001 à 2020, selon la définition d’un immigrant d’expression française et la mesure correspondante de 2006 dans les données administratives qu’ IRCC a fournies au Commissariat.

    À cet effet, l’étude permet de constater que, selon la définition de 2006 et sa mesure correspondante, les taux d’admission de résidents permanents d’expression française n’ont pas franchi les 2,0 % de l’adoption de la cible à 2019. Pour cette dernière année, ce taux s’est légèrement accru à 2,1 %. Une hausse, à 2,6 %, est observée en 2020. Pour ce qui est de la définition de 2016 et de sa mesure correspondante, l’on observe que les taux d’admission de résidents permanents d’expression française sont de 2,7 % en 2019 et de 3,6 % en 2020. Toutefois, l’on note que 2020 correspond à la première année de pandémie de COVID-19, durant laquelle les taux d’admission de résidents permanents ont été diminués mais de façon moins marquée parmi les admissions de résidents permanents d’expression française.

    Ensuite, l’analyse examine ce qu’il en aurait été si la cible avait été adoptée et atteinte dès 2001 et jusqu’en 2020, considérant qu’au début des années 2000 des déficits d’immigration d’expression française étaient déjà signalés et que la cible a été adoptée en fonction du recensement de 2001. Dans ce cas, il aurait fallu en moyenne annuellement environ 6000 admissions de résidents permanents d’expression française supplémentaires. Au total, après près de 20 ans, il aurait fallu admettre environ 119 656 résidents permanents d’expression française de plus à l’extérieur du Québec que les 67 430 admis, pour un total de 187 086.

    En considérant les manques à gagner accumulés non pas depuis 2001, mais depuis 2008, année d’échéance initialement prévue, cela représente de 2008 à 2020 environ 75 839 résidents permanents d’expression française de plus que les 49 853 admissions, ce qui aurait représenté un total de 125 692 résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec sur 12 ans.

    Suivent des estimations de l’incidence souhaitée de l’atteinte de la cible sur le poids démographique de la population d’expression française à l’extérieur du Québec. Elles sont effectuées selon deux scénarios ou hypothèses où la cible aurait été atteinte, soit à partir de 2001 (année de référence pour l’établissement de la cible) et de 2008 (échéancier initial de la cible). Pour ce faire, les nombres additionnels d’admissions de résidents d’expression française à l’extérieur du Québec qui auraient été requis pour atteindre la cible sont ajoutés à la population d’expression française à l’extérieur du Québec selon le critère de la PLOP au recensement de 2016.

    Suivant cette analyse, même si les taux d’admission de résidents permanents d’expression française à l’extérieur du Québec avaient été de 4,4 %, cela n’aurait pas permis de maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à 4,4 %. Cela aurait toutefois pu contribuer à diminuer l’ampleur de la baisse entre les recensements de 2001 et de 2016.

    Entre ces deux recensements, la proportion de population d’expression française en milieu minoritaire est passée de 4,4 % à 3,8 % selon le critère de la PLOP, ce qui représente une baisse de 0,6 point de pourcentage. Selon nos scénarios et estimations, si la cible avait été atteinte en 2001 et qu’elle avait une incidence directe sur ce poids démographique, ce dernier aurait pu être d’environ 4,2 % en 2016, ce qui représente une baisse de 0,2 point de pourcentage. Si elle avait été atteinte en 2008, ce poids démographique aurait pu être de l’ordre de 4,0 % en 2016, ce qui représente une baisse de 0,4 point de pourcentage. Bien qu’il s’agisse de scénarios hypothétiques, l’analyse permet de constater que le fait de changer l’année de référence pour l’atteinte de la cible de 2001 à 2008 se traduit par une différence de 0,2 point de pourcentage. Cela suggérerait qu’une différence de quelques années dans l’atteinte de la cible aurait une incidence sur le cumul des manques à gagner d’admissions, ce qui pourrait aussi du moins en partie avoir une incidence sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire.

    Ayant observé que l’atteinte de la cible n’aurait pas permis de maintenir le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à 4,4 % entre les recensements de 2001 et de 2016 selon le critère de la PLOP, l’étude a cherché à voir ce qu’aurait requis le maintien de ce poids démographique. Selon nos calculs, il aurait fallu, selon le critère de la PLOP, approximativement 150 000 francophones de plus à l’extérieur du Québec au moment du recensement de 2016, soit 1 174 831 plutôt que 1 024 200 personnes d’expression française selon le critère de la PLOP sur un total de 26 700 695 personnes au Canada hors Québec (Statistique Canada, août 2017). Selon nos estimations, si l’admission de résidents permanents d’expression française était le seul facteur considéré dans l’équation, ces 150 000 francophones additionnels correspondraient à un taux d’admission annuel entre 6 % et 7 %.

    6.5 Pistes de réflexion et d’avenir

    Enfin, l’étude présente quelques caractéristiques des résidents permanents d’expression française admis de 2001 à 2020 ainsi que des pistes de réflexion et d’avenir.

    Elle y reprend les Projections linguistiques pour le Canada 2011-2036 de Statistique Canada, selon lesquelles le poids démographique de la population de langue française à l’extérieur du Québec devrait continuer de diminuer au cours des 15 prochaines années dans les différents scénarios projetés. Bien que le nombre de francophones selon le critère de la PLOP pourrait connaître une augmentation en chiffres absolus, Statistique Canada projette une baisse de la proportion de la population d’expression française en milieu minoritaire, ce qui varierait toutefois entre les provinces. Cela s’explique notamment par le fait qu’il est prévu que la proportion d’immigrants de langue maternelle tierce qui connaissent, adoptent et utilisent l’anglais augmentera davantage dans les deux prochaines décennies que la proportion d’immigrants de langue maternelle tierce qui adoptent le français (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    Semblablement, la présente étude note que malgré que le nombre de résidents permanents d’expression française admis à l’extérieur du Québec ait plus que doublé en 20 ans, cette augmentation n’a pas été suffisante pour atteindre la cible de 4,4 %. Cela s’explique notamment par une augmentation encore plus importante d’admissions de résidents permanents qui ne sont pas d’expression française.

    Pour maintenir le poids démographique de la population d’expression française à l’extérieur du Québec au même niveau que lors du recensement de 2016, soit 3,8 %, Statistique Canada projette qu’il faudrait une proportion annuelle moyenne de 5,1 % d’immigration d’expression française à l’extérieur du Québec de 2017 à 2036 selon la PLOP (Statistique Canada, Corbeil et Houle, janvier 2017).

    Depuis les premiers appels à adopter une approche de rattrapage déjà au début des années 2000, notamment par le Commissariat (CLO, Quell, novembre 2002) et d’autres instances, dont le Comité permanent des langues officielles de la Chambre des communes (novembre 2010) et le Comité permanent des langues officielles du Sénat (décembre 2014), les taux d’admissions de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire ont apporté des manques à gagner supplémentaires d’environ 120 000 admissions depuis 2001.

    Plus récemment, la FCFA (2018a : 11) a aussi appelé à envisager sérieusement une approche de rattrapage. Le document de réforme des langues officielles du gouvernement, Français et anglais : vers une égalité réelle des langues officielles au Canada, laisse présager une ouverture à une telle possibilité en proposant de rehausser le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire à 4,4 % (PCH, février 2021).

    En plus de donner à réfléchir sur les taux d’immigration et d’admission de résidents permanents d’expression française en milieu minoritaire, notre étude offre des pistes pour ce qui est de sa composition, notamment du côté des bassins prometteurs selon les régions et pays d’origine, des catégories d’immigration de même que certaines approches ou certains mécanismes qui pourraient présenter un intérêt. En outre, il est question de cibler des bassins prometteurs au sein de l’espace francophone international, de travailler de pair avec les provinces, de favoriser les transitions de la résidence temporaire à la résidence permanente et de créer une catégorie d’immigration économique francophone.

    En somme, dans la mise en lumière des manques à gagner relativement aux admissions de résidents permanents d’expression française depuis l’adoption de la cible et les estimations de l’incidence que l’atteinte de la cible aurait pu avoir sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire, l’étude souligne que les niveaux et la composition des admissions de résidents permanents établis par le gouvernement fédéral constituent une composante non exclusive mais importante du continuum d’immigration. Ce continuum, à son tour, influe sur l’équilibre démolinguistique au pays. À l’extérieur du Québec, où l’immigration est de plus en plus diversifiée et où les immigrants admis tendent à connaître sinon à apprendre puis à adopter et à utiliser l’anglais comme langue d’intégration plutôt que le français, l’immigration tend à contribuer davantage à l’essor de la population d’expression anglaise qu’à celui de la population d’expression française sur le plan démographique et bien d’autres. Cibler des bassins prometteurs de recrutement selon les pays et régions d’origine ainsi que les langues qui y sont parlées peut fournir des pistes de réflexion afin que les deux groupes de langue officielle, y compris la population d’expression française en milieu minoritaire, puissent pleinement bénéficier de la diversité croissante de l’immigration et qu’ainsi cette diversité contribue à la dualité linguistique du pays.

    Par ailleurs, l’incidence d’autres facteurs, outre l’immigration, sur le poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire donne à penser que pour rehausser ou maintenir ce poids, une approche plus globale et une cible plus ambitieuse seraient requises.

    Enfin, tout en reconnaissant les défis entourant cette cible et son objectif depuis près de 20 ans, il faut aussi reconnaître que le gouvernement doit être tenu à ses engagements, y compris lorsqu’il fixe de tels cibles et objectifs, puis appelé à corriger le tir lorsque cela n’est pas atteint. C’est en ce sens que je formule les trois recommandations qui suivent.

    7. Recommandations du commissaire aux langues officielles

    7.1 Le commissaire aux langues officielles recommande qu’à l’arrivée à échéance de la cible en 2023, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada effectue des analyses complètes en collaboration avec les partenaires clés et en fasse rapport publiquement :

    • 7.1.1 pour ce qui est de l’adoption en 2003 de la cible de 4,4 % d’immigration d’expression française en milieu minoritaire, de ses échéanciers et des manques à gagner depuis son adoption;

    • 7.1.2 pour ce qui est de la contribution de cette cible à l’atteinte de l’objectif d’au moins maintenir le poids démographique des communautés francophones en situation minoritaire au niveau du recensement de 2001, puis de l’incidence de cette contribution sur le développement de ces communautés.

    7.2 Le commissaire aux langues officielles recommande qu’avec l’arrivée à échéance de la cible en 2023, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, avec l’aide de ses partenaires communautaires et gouvernementaux :

    • 7.2.1 revoie, raffine et clarifie l’objectif relatif à la contribution d’une nouvelle cible au rétablissement et au maintien du poids démographique de la population d’expression française en milieu minoritaire;

    • 7.2.2 revoie la cible et adopte une nouvelle cible plus élevée;

    • 7.2.3 définisse et développe des stratégies, des approches et des outils adaptés pour l’atteinte de cette nouvelle cible et de son objectif;

    • 7.2.4 détermine un échéancier ultime ainsi que des jalons à atteindre à plus court et moyen terme pour l’atteinte de la nouvelle cible ainsi que de son objectif;

    • 7.2.5 explicite les exigences et les mesures de reddition de comptes pour l’atteinte de la nouvelle cible, de même que de son objectif.

    7.3 Le commissaire aux langues officielles recommande au gouvernement du Canada d’adopter une politique d’immigration d’expression française en milieu minoritaire, y compris un nouvel objectif et une nouvelle cible.

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